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sujet; draco ϟ rise & fall |
PRISONERS • bloodstains on the carpet Draco Malfoy | Draco A. Malfoy feat tom felton • hope
| ◄ | • nom complet ; malfoy, un nom qui évoque entre autres des gallions sonnants et trébuchants, une prétention époustouflante et, depuis des siècles, une capacité remarquable à changer de camp pour se ranger du côté du plus fort. draco, prénom peu commun qui tend à tirer des rictus amusés. il n'a pourtant pas été choisi au hasard, bien au contraire : ces cinq lettres latines (« Dragon ») représentent à elles seules tout ce que Lucius attendait de voir son fils devenir. un serpent, en premier lieu, tant dans l’attribution de sa maison, à Poudlard, que dans l'attitude. un homme puissant, également, à l’image de l'athénien du même nom que les ignorants qualifieraient de tyran. une véritable effigie, enfin, à l'exemple de l'étoile égyptienne qui indiquait le nord, puisque ce prénom est aussi tiré d'une constellation. de fait, draco s'est toujours plu à croire que son destin était de montrer la voie à ses congénères sorciers, de briller parmi eux. mais leur respect était loin d'être acquis, et il n'avait clairement pas anticipé ce que lui vaudrait de devenir l'un des hommes du Magister. une bête humaine en devenir, cruelle de par ses actes et pourtant si instable, vulnérable sous la surface. abraxas, son deuxième prénom, lui vient de son grand-père. • surnom(s) ; la fouine, diraient quelques impudents gryffondors... • naissance ; 05 juin 1980, wiltshire • ascendance ; pur, la question se pose-t-elle encore lorsqu'on prononce le nom malfoy ? • camp ; gouvernement (voldemort) • métier ; langue-de-plomb. • réputation ; underco. • état civil ; père célibataire, les rumeurs vont bon train au sujet de la génitrice du bâtard. ses fiançailles avec astoria ont été rompues dans des conditions plutôt douteuses... l'aurait-il trompée ? ou serait-elle bel et bien la mère ? • rang social ; mangemort. il a pris la marque avant l'âge habituel, mais à l'origine il s'agissait plus d'un moyen de le mener à sa perte que d'un privilège. le lord n'avait sans doute jamais envisagé qu'il survive si longtemps. • particularités ; occlumens. • patronus ; on dit des mangemorts qu'ils sont, pour la plupart, incapables d'employer avec succès un tel sort... cette théorie se vérifie en draco, puisqu'il est tout simplement incapable de produire quoi que ce soit de plus qu'un mince filet d'argent. Son âme est simplement trop sombre désormais pour qu'un quelconque symbole d'espoir la représente. • épouvantard ; le corps mutilé de sa mère. et scorpius aux mains du lord, l'enfant étant l'un des principaux moyens de pression que détient voldemort sur le jeune malfoy. • risèd ; allez savoir. ce qu'il avait désespérément voulu s'avère être un cauchemar, il ne se permet plus vraiment d'idéaliser l'avenir et se contente désormais de faire avec ce qui vient. • animaux ; un hibou grand-duc, indispensable puisque pratique. et accessoirement, une boule de poils colorée appartenant à Scorpius, un boursouflet. • baguette ; il reste tiraillé lorsqu'il pense à la compagne de ses onze ans, longue de 30 cm, taillée dans l'aubépine pour un résultat étrange, contradictoire et plein de paradoxes. on dit que ce bois dénonce un sorcier complexe et fascinant, à la nature conflictuelle ou traversant des périodes tourmentées. la supposition s'avère amplement justifiée dans le cas de draco. rigide, efficace pour les maléfices et enchantements, une affinité dont le jeune homme a d'ailleurs plus qu'abusé durant sa scolarité. en son coeur, un crin de licorne garantissant une puissance magique relativement constante et presque sans fluctuations. combien l'a-t-il maudit, ce crin arraché à un animal trop pur, conférant à sa baguette une certaine réticence à servir des Forces du Mal ? sa fidélité l'a cependant gagné, elle l'a accompagné lorsqu'il était au plus bas, et il ressent cruellement son manque depuis qu'elle se trouve aux mains de potter. Celle qu'utilise draco depuis est taillée dans 30,5cm d' Erable, bois coûteux et très recherché pour son apparence lumineuse. terne lorsque enfermée, c'est une baguette adepte d'aventures — elle est donc comblée par les exigences du lord, à cause desquelles le jeune homme se retrouve régulièrement à l'extérieur, en mission. ce qui la rend vive, ce sont l’ambition, le défi, les changements de décor réguliers. elle brille littéralement au fur et à mesure que les aptitudes et la position sociale de draco évoluent. posséder une baguette d’érable a longtemps été une marque de prestige social, en raison de la réputation qu’elle a acquise d’appartenir aux sorciers qui ont le mieux réussi, et draco ne se prive pas de l'afficher, bien qu'il ne soit toujours pas parfaitement à l'aise avec elle. le coeur de la baguette était à l'origine un crin de licorne, encore. malmené par les sortilèges de magie noire de plus en plus poussée qu'employait draco, ce crin est cependant mort et a été remplacé par un ventricule de dragon.
Pureblood • Prédéfini |
The stars have faded away ► Avis sur la situation actuelle : Son avis compte-t-il ? Si on le questionne, Draco répondra avec emphase que l'actuelle situation de la Communauté Sorcière est tout simplement justifiée. Que la plèbe mérite d'être piétinée et utilisée pour le bon plaisir de l'Elite, des Sang-Pur. Si on creuse la surface, cependant, il reste loin d'être aussi indifférent qu'il le souhaiterait. Toujours réticent à ôter la vie, toujours paradoxal et tourmenté, toujours en proie à d'éternels questionnements ; bien que le temps et les déceptions l'aient endurci. Draco se contente de repousser l'introspection, de peur de trouver un lui une conscience en désaccord avec ses actes. Trop de vies dépendent de ses gestes. Celle de sa mère, en sursit, victime d'une lente torture orchestrée par le Lord. Celle de Scorpius, trop jeune pour être aussi constamment menacé. Alors Draco exécute, automate docile à l'extérieur, gamin effrayé cloîtré à l'intérieur. ► Info en vrac : il a eu des facilités à maîtriser l'occlumancie. d'une part, le refus de livrer ses pensées les plus profondes à sa tante a été une excellente motivation ; d'autre part, il a toujours eu pour habitude de compartimenter sa vie et ses émotions. faire taire sa pitié pour maltraiter autrui sans scrupules, faire taire sa compassion pour devenir mangemort, supprimer virtuellement le bon qu'il y avait en lui : tous ces exercices, qui ont régi sa vie au quotidien, se sont avérés payants au cours de son apprentissage. • il a un fils âgé de 3 ans (05/06/1998). leur relation est complexe, mais il est ce que draco a de plus cher. • draco a une tendance kleptomane, une manie (ou même un besoin) de s'approprier ce qui appartient aux autres. peu importe la valeur monétaire, puisqu'il a déjà dérobé une simple feuille de papier arrachée à un livre ; c'est plutôt le sentiment de pouvoir qu'il ressent en dérobant quelque chose à autrui. et la valeur sentimentale rend les dits objets plus précieux à ses propres yeux. • Il a un goût prononcé pour les paris, mais qui s'est atténué après que son comparse et plus proche ami l'ait trahi. • calculateur, manipulateur, arriviste, ambitieux, arrogant, sombre, borné, indécis, loyal, secret, menteur, rancunier, sanguin, sadique, détaché, perfide, cynique, rusé, charismatique, cultivé, élitiste, possessif, protecteur, séducteur. • il a été marqué courant de sa sixième année. • etc. Nothing compares to you • pseudo & âge ; HERESY., 22 ans. • comment as-tu trouvé le forum ? haha. • ton avis, tes suggestions ; • connexion ; aussi souvent que possible, décalage de 6h à prendre en compte cela dit. • quelque chose à ajouter ? p'tain j'ai enfin fini c'te fiche (presque), je peux mourir heureuse
Dernière édition par Draco Malfoy le Jeu 4 Sep 2014 - 18:37, édité 18 fois |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Draco Malfoy | Here comes the hurricane Seven Deadly Sins ――――――-―• PRIDE (born this way) •――――-――― Le petit prince naît. Aussitôt, on lui cale entre les lèvres une cuillère coulée dans l’or; on pose entre ses paumes fragiles d’innombrables serments chimériques. « Le monde t’appartient » : tel est le refrain. L’innocence de cet être ploie d’ores et déjà sous de sombres augures… ses traits angéliques l’assimilent au monstre d’orgueil et d’ambition qui lui fait face. Blond comme cet homme immense qui le jauge avec attention, il ouvre les yeux sur ce qui l’entoure et, en guise de première vision, plonge ses prunelles curieuses dans le métal froid qu’est le regard paternel. Effet miroir, ce second trait commun les lie un peu plus l’un à l’autre. Malfoy : c’est ce qui le définit dès aujourd’hui, ce qui forge son identité et qui le suivra jusqu’à la fin. Pensif, le patriarche agite une main au-dessus de l’enfant; docile, le plus jeune lui répond en suivant le mouvement, attentif déjà, subjugué par la prestance de celui qui sera son modèle. Une once de satisfaction pointe sous les traits de glace. Ce sera Draco. Derrière ces cinq lettres s’impose toute une symbolique : serpent imposant de l’imaginaire latin, tyran athénien d’une époque révolue. Référence stellaire, enfin — « Draco », c'est la constellation qui recueille « Thuban », l’ancienne étoile égyptienne indiquant le nord. Un prénom de meneur, un patronyme bourré d’arrogance. À sa suite, Abraxas, directement hérité de son grand-père. Les liens sont noués, les fils tendus à l’extrême; la marionnette mise sur pieds, prête à esquisser ses premiers gestes. ――-―• SLOTH&GLUTTONY (11 yo) •――--― Un « plop » sonore retentit dans la pièce, tirant à peine un battement de paupières à l’héritier Malfoy. Les draps de son lit étaient soyeux, la température et la luminosité de la pièce irréprochables, et aucun ronflement ou autre bruitage intempestif et désagréable ne venait rompre la tranquillité des lieux : le summum du confort. Il aurait pu rester ainsi des heures durant, à simplement profiter de ses retrouvailles avec sa chambre après quelques mois passés au loin, entre les hauts murs de Poudlard. ... Poudlard. À choisir, Draco n’y aurait sans doute jamais mis les pieds. Il en avait longtemps entendu parler, de ce lieu réputé comptant au nombre des meilleures écoles d'apprentissage de la Magie, qui constituait le rêve de tout enfant de sorciers qui se respectaient. Mais alors que tous ou presque en chantaient les louanges, c’était une tout autre facette qui lui avait été dépeinte — car Lucius entrait dans cette fameuse catégorie, ce « presque ». Une école placée sous l’égide d’un vieux fou : telle était sa vision des choses. Dumbledore, ce crétin hypertrophié adepte de tolérance et d’ouverture d’esprit, prenait soin d’établir une équité sans faille entre tous et toutes... Hérésie ! Les Malfoy prônaient l’élitisme, l’excellence, ce que le château ne pouvait, objectivement, pas garantir alors qu’il accueillait en son sein la méprisable engeance des moldus. Ainsi farci de préjugés, Draco s’était psychologiquement préparé durant des années à faire son entrée ailleurs. Durmstrang semblait rassembler tout ce qui pouvait plaire au père et, par conséquent, au fils. Combien d’après-midi passés à envisager les méthodes d’enseignement, la teneur des matières, les habitudes propres à la culture rude de ceux qu’accueillait ce remarquable endroit? Tout avait pourtant été remis en question… à cause de l’amour envahissant de sa mère, de sa volonté farouche de le garder à ses côtés. Voyons, son Draco était « trop jeune » pour « s’éloigner autant de la demeure familiale » et se retrouver projeté dans cadre à l'opposé de celui auquel il était habitué. Lucius avait contre-attaqué en affirmant d'un ton sans réplique que le garçon avait besoin de s'endurcir, et Narcissa avait opté pour une autre tactique : les larmoiements avaient pris le pas sur les arguments percutants. Draco avait eu beau tempêter, elle avait obtenu gain de cause. Droit comme « i », tel l’homme qu’il était encore loin d’être, le fils avait vrillé sa mère d’un regard furieux et décrété qu’elle venait de ruiner son avenir. Mais en quelques gestes seulement, elle l’avait fait faiblir : un éclat d’amusement dans son regard azur, l’envol bref et fascinant de ses mèches blondes remises en place d’une main gracieuse, puis sa paume posée sur la joue ronde de celui qu’elle chérissait avec une ardeur coupable. Tableau déstabilisant. Enfin, elle avait formulé la promesse de se faire pardonner. Ses offrandes? Une inépuisable palette de sucreries hiboutées, sans faute, tous les jours que durerait la scolarité de son fils. Perdu dans la vision charmante qu’elle lui offrait, Draco avait hésité un instant et jeté un coup d’œil de biais pour s’assurer que son père avait quitté la pièce, avant de s’incliner. Soit, c’était une proposition valable. Cela devait suffire à faire amande honorable. Avec un sourire satisfait, le jeune adolescent se remémora les mines jalouses qui l’avaient souvent entouré lorsque, à l’heure du courrier, les paquets avaient été posés devant leurs propriétaires. Paperasse pour les uns, beuglantes pour les autres… pour lui, gourmandises de tous pays et de toutes sortes. Il se retourna paresseusement sur le dos à l’entente d’un raclement de gorge et ouvrit un œil pour voir la créature hideuse qui se tenait au pied de son lit. Le teint gris-vert presque nauséabond et les yeux globuleux injectés de veines carmines qui le fixaient lui tirèrent une grimace – à Poudlard, au moins, les elfes avaient le bon goût de servir sans jamais se montrer. « Tu me déranges, persifla-t-il avec agacement, sachant pertinemment l’effet des critiques sur ces malheureuses créatures. L’Elfe trembla de tous ses membres, s’éloigna dans un couinement pour agripper ses mains sales au montant du lit et, d’un geste brusque, abattit son propre front contre l’arrête de la planche de bois en marmonnant des insultes contre lui-même. Je suis très mécontent », ronronna le jeune maître ― à sa grande satisfaction, l’elfe redoubla d’ardeur tandis que le petit blond se pelotonnait sur son oreiller en fixant son manège d’un œil curieux. Quelle stupide créature... Son plaisir sadique prit cependant fin dans un claquement de porte qui le fit sursauter. À l’entrée de sa chambre se dressait la silhouette de son père. À cette vue, le garçon s’assit et serra les lèvres, conscient de la colère retenue qu’irradiait l’adulte devant lui. « Je t’ai fait appeler, Draco. Combien de temps comptes-tu me faire attendre? » « Je ne savais pas ! ― fut la réponse qu’il lui parvint aussitôt. Puis, d’un timbre geignard : C’est de sa faute, il ne m’a rien dit. » Il pointait d’un doigt accusateur l’Elfe qui avait enfin cessé de se molester et qui se tordait à présent durement les doigts. Ses iris partant en tous sens sous le poids de la panique auraient presque pu détourner l’attention de Draco si ceux, sévères, de son père, ne le tétanisaient pas déjà sur place. « Tu sembles vouloir passer tes vacances à gaspiller pleinement ton temps entre repos et amusement… » Cela avait été prononcé comme un simple constat. Étrangement, alors même qu’il connaissait son père, Draco s’y laissa prendre. Il se redressa légèrement et hocha vivement la tête. « J’avais hâte de rentrer. Poudlard n’est pas si impressionnant que les autres le disent, notre manoir est bien plus confortable. Et dire que Potter passe toutes ses vacances là-bas ! Il eut un ricanement moqueur. Moi qui pensais que ― » « Assez. Je ne suis pas ici pour parler de Potter mais pour te prévenir que quels que soient tes projets, tu peux les oublier. Sur ces mots, il s’approcha d’une démarche raide et posa sur le lit des feuilles de parchemin que Draco récupéra lentement. Je m’attendais à mieux de ta part. Visiblement, tu ne t’es pas démarqué de tes camarades, contrairement à une petite sang-de-bourbe dont les professeurs ne cessent de chanter les louanges… L’adolescent déglutit difficilement. Il avait complètement oublié la place de Lucius au sein de l’administration, en tant que généreux donateur, qui lui conférait un certain pouvoir mais surtout, un accès à tout ce qui s’y passait à l'école. Te laisser distancer par elle revient à entacher notre nom, tu en es conscient? Il y eut un instant de silence, durant lequel il fixait son fils tandis que celui-ci fixait le parchemin, n’osant lever la tête. Je compte sur toi pour te rattraper et remettre rapidement à sa place cette… Les lèvres du patriarche frémirent de dégoût ― abomination. Cet été, tu combleras tes lacunes et tu entameras des révisions pour la prochaine année scolaire. Il en sera ainsi jusqu’à ce que tu ais atteint ton but. » Il se détourna dans un claquement de cape, sans attendre de réponse et, une fois sûr qu'il était trop loin pour l'entendre, Draco jeta au loin le programme manuscrit en criant de rage. L'Elfe avait eu le bon goût de rester sur place, et il se figea sur place lorsque les prunelles furieuses du petit garçon se posèrent sur lui. Il ne fit pas un geste pour se défendre lorsque le blond saisit le premier objet dur qui lui tomba sous la main et l'envoya droit sur lui, visant sa tête informe. Il ne tenta pas non plus de s'enfuir en le voyant fondre sur lui d'une démarche rapide, ni quand il se retrouva au sol, rué de coups de pieds. Ce n'était qu'un caprice de plus, l'une des habituelles crises de rage de l'enfant gâté qu'était le rejeton Malfoy. ―――-―• WRATH&ENVY (13 yo) •―――-― Draco froissa avec aigreur le parchemin et le lâcha à sa droite d’un mouvement empli de frustration ― droit dans le bol de Vince, qui se figea sous l’outrage. « Qu’est-ce qu’il dit? », demanda stupidement Gregory, comme si la moue contrariée du blond n’était pas suffisamment significative. « Rien qui ne te concerne. » La réponse avait claqué sèchement; pas suffisamment, cependant, pour venir à bout de son insistance. « Mais Draco ― » « Écoute, l’interrompit le concerné d’une voix acide. Je ne crois pas qu’en discuter maintenant soit judicieux. Loin de moi l’idée de te faire faire plusieurs choses à la fois, ton pauvre esprit ne supporterait pas le choc. » Généralement, se balader avec Crabbe et Goyle était assez rentable. C’était sécurisant : malgré leur jeune âge ils avaient déjà quelque chose d’impressionnant, que cela soit dû à leur carrure ou à leur air patibulaire, et rares étaient ceux qui osaient chercher plus loin. Leurs parents étaient cependant à l’origine de la relation qui les unissait à Draco, et c’était sans doute sous leur ordre qu’ils s’étaient adjoint au jeune Malfoy ― sans compter leur propre besoin de s’en remettre à un chef pour déterminer comment gérer leur potentiel. Mais marcher avec des personnages si peu vifs avait aussi ses inconvénients : inutile de compter sur eux pour élaborer quoi que ce soit de semblable, de près ou de loin, à un plan, tout d’abord. Ensuite et surtout, ce qui était le point dérangeant à l’instant même, ils étaient tout bonnement incapables de faire preuve d’un minimum de finesse et mettaient sans arrêt les pieds dans le plat, provoquant immanquablement l’agacement de Malfoy. Celui-ci coula un regard dédaigneux au-delà de leur table et croisa par hasard le regard brun de Granger. Il s’empressa d’étirer sa main jusqu’au panier de fruits pour en tirer le moins beau et la fixa droit dans les yeux lorsqu’il lança du bout de sa baguette un sort qui sculpta le fruit de façon à le transformer en figurine humaine. C'était quelque chose que les parents sorciers montraient très tôt à leurs enfants, pour les amuser, mais cette idiote avait été élevée chez des arriérées et ne put retenir un air émerveillé. Parfait : s'assurant d'avoir toute son attention, Draco attarda le bout de sa baguette au niveau de la chevelure ébouriffée de la figurine, pour lui faire comprendre qu'il s'agissait d'elle. Et alors qu'elle fronçait les sourcils, soudain méfiante, il exécuta un sortilège de découpe qui sectionna la tête ; elle tomba mollement sur la table. Il envoya en l'air le reste du corps, puis le fit disparaître d'un dernier coup de baguette. Granger avait la bouche ouverte et le regard furieux, ce qui la rendait encore plus moche que d'habitude. Amusé, Malfoy se pencha vers son voisin de table, qui ne fit même pas de remarque concernant le changement d'humeur du leader lunatique ; et il fit un commentaire sur la longueur des dents de la sang-de-bourbe, en prenant soin de bien prononcer chaque mot pour qu'elle n'en perdre rien. L'instant d'après, elle ramassait ses affaires et quittait la table d'un pas précipité, les bras chargés de livres. À côté d’elle, Potty et Weasel ne s’étaient rendus compte de rien et continuaient de discuter joyeusement, le premier parfaitement inconscient du regard assassin posé sur lui maintenant que la première cible (Granger) avait déguerpi. Tout était de la faute de Potter. Potter et son nouveau balai, Potter et son succès au sein de l’équipe de Quidditch de sa Maison, Potter et sa popularité imméritée. Potter par-ci, Potter par-là. L’adolescent serra les dents si fort qu’il crut les entendre grincer alors qu’il repensait à la réponse sans appel qui avait suivi sa requête, présentée à son père, de lui faire parvenir un éclair de feu. Un simple non aurait déjà été pénible, mais il avait fallu que l’homme lui signale que son Nimbus 2001 n’avait pas suffi à lui faire prendre de l’avance sur son rival, et qu’il lui faudrait à présent faire ses preuves s’il espérait se voir offrir un Éclair de Feu. Potter ne faisait pas ses preuves, lui. Il se contentait d’enfreindre le règlement à tout va et on le félicitait pour ça. Draco quitta la table sans un regard pour l’air dépité de ses deux comparses, obligés par on ne savait quelle règle tacite de le suivre à chacun de ses déplacements; il serra les lèvres avec agacement en voyant la meute rouge et or se lever dans un ensemble bruyant, simultanément. Ruminant son mécontentement, il ne put s’empêcher de tendre l’oreille, à l’affut d’une information quelconque à utiliser contre eux. Comme s’il l’avait aperçu derrière eux, l’un des Gryffondors ― l’irlandais doué comme un pied en sortilèges, sachant que les sorts se lançaient plutôt à la baguette, celle-ci se maniant à la main ― haussa la voix. « Marrant, on dirait que Malfoy fait profil bas ces temps-ci… il doit prévoir le mauvais coup qui rendra plus risible encore la défaite de son équipe lors du prochain match de Quidditch, quand Harry lui aura raflé le vif d’or juste sous le nez. » Son comparse de toujours s’empressa de renchérir : « Sous le nez, tu plaisantes! Avec son super balai Harry aura vite fait de le semer, il ― » Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que le blond l’avait coupé en accélérant pour le dépasser, lui heurtant au passage l’épaule suffisamment brutalement pour faire chuter les livres qu’il tenait en mains. « Eh bien, quand on parle du loup…! » Le concerné ne saisit pas la référence moldue et se contenta de hausser dédaigneusement un sourcil. « Masochiste, Malfoy? Tu accoures quand on parle des raclées qui t’attendent? » « Je me sentais d’humeur à faire des prémonitions, moi aussi. Je gage que Potty ne jouera pas le prochain match… » « Et en quel honneur ? » « Simple impression, répondit le blond d’un ton dégagé, mais je doute qu’il en ressorte vivant cette année. Entre Black et les Détraqueurs, il y en a beaucoup qui veulent ta peau, Potter… » Un amalgame de voix mi-outrées mi-furieuses s’éleva et, voyant Weasley batailler pour sortir sa baguette de sa robe, le Serpentard tira une pièce de sa poche, qu’il expédia sur le roux d’un mouvement de pouce. « Mais qu’est-ce que tu fais? » Il mima un air étonné. « La charité, quelle question. J’avais cru que tu essayais d’attiser ma pitié en mettant en avant tes vêtements rapiécés, me serais-je trompé? Il le toisa alors avec malveillance et ajouta : Ce ne sont que dix mornilles, mais je te les laisse. Tu devrais les garder jusqu’aux prochaines vacances, ta mère s’évanouira sûrement en te voyant ramener plus que le salaire de misère de ton père. » Alors que les Gryffondors s’apprêtaient à se jeter sur lui comme une meute d'enragés (et honnêtement, il eut le temps d'avoir de terribles sueurs froides en quelques secondes), le professeur Rogue eut le bon goût d’apparaître et de demander d’un ton polaire les raisons de cet attroupement; après quoi il dispersa rapidement la smala Potterienne. Le regard gris de Malfoy tomba alors sur un objet au sol, oublié plus tôt par l’ami de l’irlandais agaçant. Une manchette copieuse ― ces petites choses faisaient fureur parmi les étudiants, bien que leur emploi soit prohibé en salles d’examens. Malfoy jeta un rapide coup d’œil autour de lui et, une fois certain que personne ne le regardait, il la récupéra avec un sourire satisfait et la fourra dans sa poche. C’était un geste discret, que les uns qualifieraient d’anodin et les autres de malveillant... mais étrangement, Draco n’avait même pas songé à la réaction du propriétaire lorsqu’il prendrait conscience de sa perte ― ou accessoirement seulement. Il s’agissait plutôt d’un geste mécanique, d’une manie dont lui-même n’avait qu’à peine conscience. Comme cette fois où il avait arraché une page de livre, chez Fleury&Bott, ou cette autre où il s’était approprié des friandises oubliées sur une table basse dans la salle commune de sa maison. Un besoin intrinsèque de s’approprier les biens des autres, d’affirmer sa supériorité sur tous les plans et même les moindres… l’envie : tel était l’un des maux qui le rongeaient. ――――――――-―• GREED (14 yo) •――――――-――― « Tu n’es qu’un pauvre gosse à l’esprit étriqué, Malfoy! Qu’est-ce que tu reproches exactement aux nés-moldus? Je parie que même toi tu ne le sais pas. Tu te contentes de régurgiter la haine dans laquelle tu as baigné toute ton enfance sans même prendre le temps de te demander ce que toi tu penses! » Les mains du dit Malfoy se crispèrent sur les pages du livre qu’il étudiait alors que les paroles de cet imbécile de sang-de-bourbe lui revenaient en mémoire. Autour de lui gisait un amoncellement d’ouvrages, témoins des recherches qu’il avait menées au cours des dernières heures. Son index pâle glissa le long de la tranche de l’un d’eux, courut sur la surface de la couverture d’un autre, et revint souligner les lignes manuscrites qui défilaient sous son regard attentif. C’était là. Compilé sous forme de thèses, de récits historiques, de témoignages dont certains avaient été prononcés par ses propres ancêtres. Les raisons de la rancœur des sang-pur prenait racine dans le passé torturé qu’ils partageaient avec les moldus, mais également dans l’observation de ces deux « races »… Incompatibles. Les moldus se disaient être le fruit d’une évolution, tandis que les sorciers se savaient nés de la magie elle-même. Le mystère du corps humain pouvait-il être le fruit de mutations hasardeuses? Certes, non; aux yeux de Draco, les sangs-pouvoirs étaient simplement un raté du phénomène d’Apparition qui lui avait été enseigné dès l’enfance. C’étaient des créatures échouées, des moitiés d’Hommes, amputées de quelque chose de primordial : la magie. Il eut une grimace et porta ses yeux sur ses paumes relevées, se demandant comment il était possible de vivre sans. Un sorcier pouvait choisir de ne plus se servir de ses pouvoirs, mais il n’avait aucune chance de survivre si on l’en drainait entièrement. Autrefois, ceci avait constitué une sentence applicable contre les criminels ― une lente et douloureuse agonie, considérée comme ignoble et abolie avec le temps. Le fait que certains puissent naître sans et s’avérer viables dépassait l’entendement de l’adolescent, mais il choisit de laisser de côté ce fait pour se concentrer sur ses réflexions précédentes. Ignorant l’existence de ce qu’il leur manquait, donc, les moldus élaboraient des théories tordues destinées à expliquer leur provenance, telle que cette histoire… d’évolution. Quelques mages marginaux avaient supputé que leur idée puisse être juste, et que les sorciers soient le fruit de mutations parallèles à celles des humains. Mais alors, fallait-il considérer que ceux dotés de pouvoirs étaient plus aboutis que ceux qui n’en avaient pas? Toutes ces notions restaient aux yeux de Draco un imbroglio d’idées confuses, cependant, les ouvrages étaient clairs : qui disait « évolution » disait disparition de la race inférieure. Exterminer les moldus et leur engeance serait donc un sympathique coup de pouce accordé à Mère Nature. Pour pallier l’absence de pouvoirs, les moldus avaient mis au point ce qu’ils appelaient « technologie », mais les quelques tentatives effectuées avaient démontré que les inventions qui en découlaient étaient incompatibles avec l’air saturé de magie du monde sorcier. Il n’avait pas bien compris pourquoi certains chercheurs parlaient avec mépris et indignation de ces créations; ils avaient établi des séries de preuves difficilement incompréhensibles pour prouver leur caractère nocif ― Draco pouvait bien se contenter de les croire sur parole. Pour lui, c’étaient en tout cas autant de preuves de la nécessité de dissocier les deux mondes : les moldus étaient des dangers publics. À ceci s’ajoutaient bien sûr les tristement célèbres chasses aux sorcières. Certes, certains avaient démontré une certaine fascination ― justifiée ― à l’égard de la magie, mais qu’adviendrait-il si les sorciers se révélaient au grand jour en prônant l’égalité et en réclamant de vivre en communion avec leurs soi-disant semblables? Sans nul doute, il n’y aurait que trop de Sans-Pouvoirs pour se défier d'eux et chercher à leur nuire. Or... que craint-on? Ce qui nous est supérieur. Les moldus avaient démontré combien ils pouvaient se montrer cruels et inhumains, et on réclamait à présent que ceux qu’ils avaient tenté de décimer ― réduisant à néant quantité d’illustres familles et d’ouvrages recelant des montagnes de connaissance ― leur reconnaissent une valeur qu’ils n’avaient pas et agissent selon des principes de tolérance non réciproques. La requête était insensée. Avec un reniflement hautain, Draco empila les livres d’un geste de baguette et les renvoya se ranger sagement à leur place, dans les hautes étagères. Il était peu prêteur, avare de son monde et de ses richesses, et bien décidé à écarter de sa route quiconque souhaiterait le convaincre d’en dédier une parcelle à une sous-race. ―――――-―• EGO&LUST (15 yo) •――-――― « C’est quoi cette horreur ? » Draco leva paresseusement un sourcil en suivant le regard de Blaise et n’eut besoin que d’une seconde pour comprendre de quoi il parlait. Juste là, à la table des professeurs, installé à la place réservée aux professeurs de DCFM. C’était trapu, surmonté d’une grosse tête perchée allez savoir comme sur un cou presque inexistant. La face blafarde étalée était dotée d’une large bouche dont les bords retombaient mollement en une moue déplaisante. Ses gros yeux ronds, quelque peu globuleux, glissaient lentement sur les occupants de la pièce avec une lueur malveillante, et ses cheveux châtain clair, courts et bouclés, étaient retenus par un nœud noir aussi puérile que son cardigan rose pelucheux, très mal assorti à ses petites dents pointues. Le blond cligna des yeux comme si le geste suffirait à chasser la vision incongrue, mais elle persista – sa lèvre supérieure se plisse en une mimique dédaigneuse. « Je ne saurais le dire, mais j'ai comme l'impression que c’est précisément le genre de créatures infernales qui font de Daeva une forêt réputée infréquentable. La chose a sûrement réussi à semer les Gardiens... trois gallions qu’ils interviennent dans l’heure pour la ramener d’où elle vient. » Si des ricanements appréciateurs saluèrent la remarque sur le coup, la suite lui donna tort : c’était bien leur nouveau professeur de Défense, en fait. Draco leva les yeux au ciel. « Par les caleçons de ce vieux timbré de Dumbledore. D’abord le loup-garou, puis le demi-géant et maintenant un immonde crapaud ? Si on ajoute au compte le rat et la belette personnels du balafré on a là une sacrée basse-cour », persifla-t-il… avant de voir apparaître la main de Blaise sous son nez. « On est fixés, pas d’intervention de Gardiens pour ce soir. Tu me dois trois gallions. » Malgré le petit sourire mauvais qui lui étirait le coin des lèvres, son camarade avait l’air tout à fait sérieux, et Draco ouvrit de grands yeux outrés. « Comment ça trois gallions ? Ce n’était pas un vrai pari, juste une moquerie ! » L’autre se contenta de lever les épaules, tout sauf concerné par cette subtile différence – « Eh bien surveille tes mots la prochaine fois. » Mi-agacé mi-amusé, Draco lui fit malgré tout passer les pièces, sans se douter qu'il lécherait plus tard les pompes de ladite créature... C’était habituel chez les Serpentard, que l’argent change de main à une vitesse alarmante. Ils avaient un penchant pour les paris, les défis, les parties clandestines de poker-sorcier – nouvelle tendance à laquelle un camarade les avait initiés, et le jeu avait fait fureur parmi les élèves des trois dernières années – ; quidditch, enseignants, étudiants, n’importe quel sujet était enclin à faire affluer les enjeux sur la table. Et au cœur de ce business tenu d’une main de maître, se tenait nul autre que Zabini. Il avait hérité de toutes les questions d’organisation un an plus tôt, lorsque le septième année qui s’en chargeait avant lui avait dû commencer à préparer sa retraite (comprenez par là passer ses A.S.P.I.C). Ces paris, auxquels les garçons s’étaient mêlés dès leur entrée au château (excellent moyen de se faire une place au sein de la Maison), avaient contribué à les rapprocher. Oh Blaise et Draco se connaissaient depuis longtemps – depuis toujours même. Ils n’avaient cependant jamais eu l'opportunité de se lier d'amitié avant Poudlard. Zabini, avait un mauvaise « renommée » : bien que théoriquement fréquentable, il ne convenait pas tout à fait aux normes de Lucius, fils d'une sulfureuse veuve noire à la réputation déplorable au sein des familles pures dont elle avait souvent brisées les unions. Le patriarche Malfoy manifestait un certain intérêt pour les disparitions des maris en question, et surtout pour le fait que la femme n’ait jamais été sérieusement remise en cause, en dépit de sa réputation de « veuve noire ». Mais il avait longtemps rechigné à être ouvertement associé à une femme suivie par de telles rumeurs. Non qu’il puisse ou veuille se targuer d’être un sain – simplement, les apparences, encore une fois, étaient d’une importance clef. Blaise avait donc fait partie de la liste noire de la famille pendant toute l’enfance de Draco, et c’était précisément ce qui avait attisé la curiosité du blond. Ils formaient un étrange duo, à dire vrai, qui se muait en trio à la tombée de la nuit, lorsque Nott abandonnait ses manies d'asocial solitaire pour se joindre à leurs divertissements souvent malsons. Bien que souvent fourrés ensemble, ils ne semblaient pas spécialement proches au premier abord, leurs échanges ne semblaient parfois même pas cordiaux. Aux yeux des autres, leur relation était assimilable à une alliance plutôt qu’à une véritable amitié – mais n’était-ce pas ainsi que fonctionnaient les Serpentards, après tout ? Êtres froids, dénués de sentiments à l’instar de leur emblème, et qui ne pensaient qu’à leurs intérêts. C’était pourtant très loin de la réalité. Ils n’étaient pas comme les Gryffondors, soucieux d’afficher leur proximité si ouvertement qu’un aveugle n’aurait aucune chance de la manquer. Non, leur complicité s’exprimait à travers des regards, des micro-sourires, des non-dits qu’eux seuls comprenaient. Leur lien s’affirmait dans les éclats de rires étouffés derrière les rideaux de leurs baldaquins, dans les secrets avoués sans que la crainte d’être trahi ne leur traverse l’esprit, dans la colère ressentie à chaque blessure de l’autre, dans les injures qu’ils se balançait avec pour seul but de s’obliger à se relever, et dans les plans qu’ils organisaient comme un seul pour atteindre leurs buts. C’était parce que Blaise comptait autant, que Malfoy ne souffrait aucune critique le concernant. Aucune. Et vice-versa. Parfois, Draco ne pouvait s’empêcher d’avoir peur de l’intensité de ses ressentis – lui qui aimait se dire anesthésié de sentiments, lui qui détestait surtout être « lu », compris. Lui qui se targuait d’être une énigme, et qui se sentait pourtant nu sous le regard amusé de Blaise. Mais ce n’était pas un fardeau. Non, plutôt un secret grisant, parce qu’avoir confiance en quelqu’un, aussi difficile que cela puisse être, lui donnait l’impression d’être plus fort. Invincible. ___________________________________________________« Attends… att― oh… Draco esquissa un sourire moqueur contre la peau qu’il grignotait du bout des lèvres, tandis que le corps entre ses bras s’arquait délicatement vers l’avant, à la rencontre de la main curieuse qu’il avait glissée sous sa jupe d’uniforme. L’adolescente mit quelques secondes avant de parvenir à reprendre la parole. Pas ici… n’importe qui pourrait… » les surprendre? Le blond arqua un sourcil mais ne répondit rien. C’était exactement ce qu’il attendait. Elle lui avait semblé parfaite, mais à présent qu’elle se trouvait là, les jambes légèrement écartées avec abandon, le visage rejeté en arrière et la gorge nue, offerte, le chemisier largement ouvert, elle n’exerçait plus sur lui le même attrait qu’aux débuts de leur jeu de séduction. Il éloigna légèrement son visage, sans la lâcher, pour détailler la vue qu’elle lui offrait. Il y avait pourtant une indéniablement sensualité dans la façon dont elle le fixait entre ses longs cils, ou même dans la courbe de ses lèvres entrouvertes. La main qu’il avait sagement gardée posée contre le mur, à proximité des mèches châtain, se détacha pour redessiner la lippe de la tentatrice. Celle-ci sortit une langue mutine et taquina son pouce avec langueur en lui lançant un regard plein de charme. « Pas ici », avait-elle pourtant soufflé à l’instant… Il n’y avait rien que Malfoy méprisait plus que l’impudeur. Ou plutôt si : le sang souillé. Mais à bien connaître le Serpentard, cette pauvre fille se serait rendue compte que quelque chose clochait dans la façon dont il agissait avec elle. Les coups d’œil lancés par-dessus son épaule n’avaient rien de la soi-disant prudence supposément due au concierge rodant dans les couloirs adjacents. L’empressement qui l’empêchait de la conduire jusqu’à son dortoir n’était pas la hâte de découvrir les courbes de son corps. Il attendait. Pour passer le temps, il décrocha la chaîne qu’elle portait et la glissa dans sa poche, justifiant aussitôt son geste en posant sa bouche à l’endroit exact ou avait reposé le pendentif ― de travers, puisqu’il l’avait repoussé à de nombreuses reprises. Elle soupira sans discrétion alors qu’il mordait, léchait, aspirait successivement la chair tendre, laissant sur son passage une marque rougeâtre. L’agacement le hérissa lorsqu’elle se laissa aller à passer ses paumes dans ses cheveux blonds; il s’éloigna juste assez pour lui lancer un regard significatif, peu enclin à se laisser décoiffer. Une moue boudeuse lui répondit et, à l’instant même où il menaçait de laisser percer son exaspération, des claquements de mains retentirent à leurs côtés. Ils n’étaient qu’à peine audible, mais avaient suffisamment troublé le silence ambiant pour que l’amante sursaute sous le coup de la surprise. Malfoy, lui, releva les yeux d’un mouvement lent. Blaise Zabini venait de sortir de l’ombre et les approchait de sa démarche tranquille, suivi de près par Théo. « Délicieux spectacle, vraiment. J’hésitais à vous interrompre, mais… Il s’interrompit, faussement embêté, puis se résigna à continuer : Je devais quelque chose à Malfoy, et je n’avais pas vraiment envie d’attendre que vous ayez conclu pour le lui donner. » Sur un sourire amusé, il leva une main à demi fermée. Entre son index et son majeur relevés trônait un gallion. Draco se redressa pour offrir un bref baiser à l’adolescente entre ses bras. « Merci », lâcha-t-il de son timbre habituellement détaché, désagréablement trainant, avant de lui tourner le dos pour récupérer la pièce. Le regard de l’éconduite passa de l’un à l’autre. « Qu’est-ce que ça veut dire? » Une pointe d’incrédulité et de mécontentement mêlés étaient audibles dans sa question, et Draco trouva presque touchant qu’elle lui accorde tout de même le bénéfice du doute. S’il répondait que Blaise lui avait emprunté de l’argent et n’avait pas trouvé de meilleur moment pour le lui rendre, puis suggérait qu’ils aillent reprendre ailleurs leurs petites affaires ― le croirait-elle? « La fête est finie, se contenta-t-il de répondre en se fendant d’un rictus désabusé. Retourne à ton dortoir, avant que je ne sois obligé de signaler à Rusard ta présence dans les couloirs après le couvre-feu. » « Tu te fiches de moi ? » Incrédule, elle lui offrait un regard de hibou éberlué qui ne lui seyait guère. Draco renifla, moqueur. « Oserais-je? Je me contente de faire mon travail… Il tapota de l’index l’insigne de préfet qu’il l’avait, un peu plus tôt, empêchée de décrocher de sa chemise d’uniforme. L’attitude bon enfant se mua cependant en menace évidente lorsqu’elle esquissa un mouvement pour lui assener la claque qu’il méritait. Je ne ferais pas ça, si j’étais toi », cracha-t-il hargneusement. Elle se figea, hésita un instant; des larmes brodaient à présent son regard noisette, mais elle les ravala pour relever le menton, refusant sans doute de se laisser blesser par lui. Elle tourna les talons sans ajouter un mot et Draco grogna d’agacement en arrangeant sa tenue. « Tu es conscient que tu retireras ton uniforme dans quelques minutes à peine et que le remettre en ordre ne sert pas à grand-chose? Ta ronde est finie depuis longtemps. » Le jeune homme haussa les épaules en réponse, tout en renouant sa cravate. Les apparences, toujours elles. Il ne retournerait pas à son dortoir mal attifé alors que rien ne lui assurait qu’il ne croiserait pas un professeur en chemin. « Je peux savoir pourquoi tu as mis tant de temps à intervenir? », demanda-t-il finalement, polaire. « Je croyais que tu t’amusais. » Et à voir Blaise, on aurait juré qu’il disait vrai. Mais Draco savait bien que c’était seulement pour le mettre en rogne. « En m’exhibant dans un couloir? Certainement pas. », claqua-t-il néanmoins alors que son camarade étouffait un rire. « J’oubliais. Tu es plutôt du genre pudibond, à préférer l’intimité et le confort d’une chambre… Mon Draco est un grand romantique sous ses airs d’insensible. » « Urgh. Conservateur me convient mieux, si tu permets. » ___________________________________________________
Dernière édition par Draco Malfoy le Mer 26 Aoû 2015 - 12:05, édité 12 fois |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Draco Malfoy | All the wrong choices ――――――-―• FEAR (16 yo) •――――-――― La ruelle étroite était lugubre et glauque. Les ombres s’y découpaient étrangement, à la faible lueur jaunâtre des lucioles virevoltant dans leur prison de verre, et des couches de crasses dessinaient des arabesques loufoques sur les murs de pierres qui semblaient s’allonger à l’infini. Au bout de ce tunnel infernal creusé par des baguettes d’hommes, la vie reprenait son cours palpitant et en déroulait le fil en continu. Les sorciers foulaient les dalles du Chemin de Traverse sans jamais un regard de côté, suspicieux et pressés, s’enfonçant volontairement dans une agréable routine que les rumeurs de guerre mettaient pourtant à mal. Cela faisait des années, à présent, que les Seigneur des Ténèbres avait amorcé son retour… et pourtant, certains s’efforçaient encore de le nier. La peur était bien là, mais abstraite, fugace, aussitôt chassée par des rires nerveux aux relents d’incrédulité ― c’était improbable. Impossible. Il était mort, n’est-ce pas? Les sourires réapparaissaient alors, forts de cette certitude mensongère; ils tremblaient à peine sur les lèvres de leurs porteurs, mais sonnaient désespérément faux. Et même désespérés tout court. Au cœur de l’abri sinueux presque aveugle cependant, le temps était comme suspendu. Des doigts pâles s’agrippèrent aux aspérités du mur; au bout de cette main, tout un corps brisé, ployant sous les spasmes d’une douleur fulgurante. Drago ferma les paupières avec force, en une tentative vaine d’occulter ce qui le rongeait, et parvint enfin à engloutir avidement une goulée d’oxygène. Le soulagement fut bref. Ses phalanges lâchèrent son appui, que son épaule heurta durement, et elles s’enroulèrent autour de son poignet gauche alors qu’il vomissait des suppliques dénuées de sens. Pitié, pitié, que cela cesse. Ses prunelles d’argent se révulsèrent dans leurs orbites écarquillées et il réprima un haut-le-cœur, haletant, les pensées fixées sur une litanie intérieure. C’était ce qu’il avait toujours voulu. Ce qu’il avait attendu des années durant. Il ne pouvait pas reculer maintenant, pas alors que… Mais son corps fiévreux hurlait pour une tout autre cause, personnelle, bien éloignée des réflexions idéologiques et pragmatiques auxquels il se raccrochait désespérément. Ça faisait mal. Le sort avait distillé sous sa peau une encre sombre qui avait entamé l’épiderme, l’avait rongé jusqu’à atteindre son sang. Il s’y était intimement mêlé, comme un poison, l’avait coagulé jusqu’à former des cloques noires à la surface de la chair, dessinant lentement un motif dont les traits sombres tranchaient nettement sur le poignet pâle qui les accueillait désormais. Mais c’était plus qu’une simple marque : c’était la marque, la preuve physique d’une intrusion plus profonde. « Ne lutte pas, lui avait conseillé son père. Concentre-toi sur l’importance de cet instant, sois-en fier. Laisse-toi simplement ― » Ses mots s’étaient interrompus là, lorsque le Lord l’avait surpris et avait demandé d’un timbre moqueur s’il prodiguait quelque conseil à leur jeune recrue. Lucius avait nié avant d’incliner la tête; des conseils? Certes, non. Cela revenait à dire que Drago était incapable de supporter la souffrance, or ne devait-il pas être prêt à donner sa vie même pour celui qu’il appelait Maître? Et le Maître n’avait que faire des faibles et des geignards… Ceci dit, on lui avait laissé quartier libre pour la soirée. Avant qu’il ne quitte la pièce, blafard, il avait senti la main gracile de sa tante glisser dans sa main droite un objet discret. Son visage avait pivoté étrangement sur son cou mince lorsqu’elle avait posé sur lui son regard fou. « Pour repousser la douleur, tu ne trouveras pas mieux », avait-elle certifié, son visage émacié se parant d’un sourire malsain. Son chuchotement n’en était pas un ― elle n’avait pas réellement tenté d’être discrète ―, mais il avait été accueilli par quelques éclats de rires mauvais plutôt que par une réprimande, et Drago n’avait pas voulu savoir ce que les autres Mangemorts avaient su lire derrière ses mots faussement réconfortants. Maintenant, pourtant… la peine devenait si insupportable qu’une part de lui ressentait le désir de s’en remettre à ce remède. L’adolescent fouilla la poche de sa robe et lutta un instant pour saisir ce qui lui avait été confié. Il fronça les sourcils et le palpa un instant, incapable de déterminer ce dont il s’agissait et comment l’employer, et soudain… La sensation coutumière d’une tension au niveau du nombril, le décor qui se floute, les couleurs qui se mêlent en un tourbillon inconsistant : un portoloin. L’instant d’après, il heurtait à genou d’autres dalles semblables à celles qu’il venait de quitter, et tout aussi sales. Incertain, il regarda autour de lui et eut l’impression d’être simplement tombé dans une dimension parallèle, présentant le même déco ― à l’envers. Il se redressa, fébrile, et tenta de ravaler la panique qu’il sentait enfler lui. Où Bellatrix l’avait-elle envoyé? Lui faire « confiance » avait bien été la pire idée qu’il ait eu ce soir… du moins, après celle qui l’avait poussé à approcher le Lord de son plein gré, tel un agneau s’offrant fièrement pour être sacrifié sur l’autel de la cruauté. Non. Non, s’assena-t-il intérieurement en secouant la tête pour remettre en ordre son esprit égaré. C’était une bonne chose. Et il tentait réellement de s’en convaincre. À pas lents, il parvint à rejoindre le bout de la rue au bout d’un temps qui lui parut infiniment long, seulement pour se retrouver au seuil d’un tout autre monde. Il cligna des yeux à plusieurs reprises pour chasser l’illusion qui imprégnait sa rétine, mais au bout du compte c’était encore là. Ces hommes et ces femmes en tenue… étrange. Ces boîtes aux formes arrondies dont certaines bordaient la rue tandis que d’autres… roulaient, et transportaient des passagers. Oh, des magicobus miniatures. Bien sûr. Drago se mordit la lèvre inférieure et tourna la tête de droite à gauche, anxieux de ne rien reconnaître. « Encore un!, cracha une voix à ses côtés qui le fit presque bondir de surprise. Un homme au visage plissé comme un vieux parchemin mouillé le dévisageait avec ce qui ressemblait à du dégoût, et le plus jeune sentit quelque chose se tordre à l’intérieur de lui. Il se détourna pour regarder derrière lui, voulant croire que l’inconnu parlait de quelqu’un d’autre que lui, mais il n’y avait personne. Par-delà les brumes qui encombraient ses pensées, Malefoy su que c’était le moment pour lui de sortir une réplique cinglante, virulente, mais le seul fait d’y penser le fit vaciller, et il se rattrapa de justesse à une grande tige de métal qui sortait sur sol et distillait une lumière aveuglante ― et très blanche, bien différente de celle des lucioles. Encore un jeune voyou qui se bousille la santé en ingurgitant toutes sortes de merdes. Le vieillard continuait de baragouiner à voix basse, sa mâchoire sans cesse en action ― comme s’il mastiquait ses propres dents. Soudain, il vrilla Drago d’un regard colérique et s’adressa directement à lui : Tu t’es battu, hein ? Pour ta came j’parie ? D’un geste du menton, il désigna son poignet que le blond n’avait pas eu conscience de tenir encore à la vue de tous, enserré durement entre ses doigts blêmes. Il ne payait effectivement pas de mine, avec ses cernes violacés creusés par la fatigue, ses yeux rougis, les mèches filasse d’un blond terne qui s’échappaient de sa capuche, sa posture prostrée due aux tortures qui avaient précédé l’application de la Marque et le sang mêlé d’encre qui suintait de sa plaie à vif en un liquide noir épais. Il rabattit rapidement sa manche sur la Marque et frissonna lorsque le tissu frotta contre sa chair. Ce type ne L’avait pas reconnue. C’était… c’était un moldu. Face à l’absence de réponse, voyant le garçon trembler sur ses jambes affaiblies, son compagnon d’infortune le gratifia de nouveaux marmonnements furieux desquels il ne saisit que « gothique », « porter des robes », « tatoué », « seringue » et une série d’autres mots incompréhensibles mais sans doute peu élogieux. Et puis, au bout d’un instant de silence contemplatif : Répugnant », vint la conclusion, tandis que l’homme détournait résolument la tête, plissant le nez en soufflant comme s’il tentait de chasser quelque chose de particulièrement déplaisant. Piqué au vif, Drago déplia sa carcasse et toisa de toute sa hauteur son détracteur, bien que celui-ci ne puisse le voir. Répugnant ? Comment ce satané moldu, cette créature inhumaine et inférieure, comme osait-il ? « Je me faisais exactement la même réflexion, répliqua-t-il enfin d’une voix basse et rauque, le souffle difficile. Mais ce n’est que votre odeur, vous devrez bien vous y faire. » La rage qui brûlait en lui n’était pas tout à fait la sienne, il en était convaincu. Il y avait la vexation, intense, qu’il connaissait bien; il y avait la fatigue et la douleur, présentes encore mais étrangement passées en second plan. Et il y avait ce désir naissant de faire digérer à ce pauvre type le dentier qu’il avait finalement cessé de mastiquer avec application, occupé qu’il l’était désormais à fixer Drago de son ses petits yeux outrés. Et ce désir-là était comme une tempête dévastatrice, qui menaçait d’anéantir tout semblant de conscience, de le pousser à attraper sa baguette et à faire taire l’insolent à jamais. Il y avait une haine qui s’infiltrait dans ses veines comme l’encre un peu plus tôt ― et c’était à cause d’eux, de ces êtres dont la seule existence était une insulte à la magie, de ces moins que rien insignifiants, de ces ignominies qui souillaient la terre et qu’il devait éradiquer au plus tôt, c’était à cause d’eux qu’il souffrait aujourd’hui. Sans même s’en rendre compte, il avait effectivement brandit sa baguette, ses traits mortifères violemment tendus en une mimique haineuse, et le vieillard cracha au sol une chique grisâtre, inconscient du danger. « Complètement taré. » Sur ces mots, il s’approcha du bout du trottoir, regarda à droite et gauche, puis traversa en ne cessant de jeter des coups d’œil méfiants derrière lui. La brûlure qui lui déchirait l’avant-bras se fit plus vive et, dans un état second, il se mit à suivre celui qui lui apparaissait désormais comme la cause même de ses tourments ; lentement d’abord, puis d’un pas plus vif lorsque le vieil homme s’en aperçut et accéléra le bas. Il bifurqua sans crier gare dans une ruelle perpendiculaire, Drago n’hésita pas un instant à le suivre – et ce ne fut que de justesse, par pur réflexe plutôt que de façon calculée, qu’il dévia sa trajectoire lorsqu’un gros bout de bois vint s’abattre sur lui. Le coup fut partiellement évité mais résonna malgré tout dans sa boîte crânienne en s’abattant sur le côté de sa tête, et il émit un cri de rage en levant sa baguette : un éclair lumineux en jaillit, atteignit l’homme en plein ventre et l’envoya au sol, quelques mètres plus loin. Tremblant de tous ses membres, l’adolescent laissa ses jambes le porter et protégea mécaniquement le lieu afin de ne pas risquer d’être surpris, tandis qu’il approchait sa victime. « Scindendae Corpus », lâcha-t-il d’une voix roque, et l’homme se crispa en regardant avec effroi une fumée noire serpenter jusqu’à lui. Elle l’encadra, l’étreignant presque délicatement avant de disparaître, comme aspirée par la chaleur de son corps. Et soudain le vieux se mit à suffoquer. Il étouffait, suffoquait en silence, les lèvres grandes entrouvertes sans que l’oxygène ne parvienne à s’y engouffrer, incapables de puiser assez de souffle pour hurler. Le cœur au bord des lèvres mais le palpitant affolé par une excitation malsaine, le Mangemort pencha sa baguette comme pour appuyer fermement sur une plaie béante – comme de fait, l’homme convulsa et crachota un flot carmin : sous l’effet du sort, une main invisible l’étreignait de l’intérieur, enserrait sa cage thoracique et ses entrailles, les comprimait jusqu’à les broyer. Un gargouillement jaillit de sa bouche ensanglanté et parvint à atteindre les pensées brumeuses de Drago. Des supplications. Elle le renvoyèrent à la scène qui lui avait paru s’étirer à l’infini plus tôt dans la soirée : les heures qu’il avait passées à subir les assauts cruels de la baguette du… du Lord. Des larmes vinrent humidifier les coins de ses yeux, il les chassa d’un geste rageur alors que les douloureuses réminiscences s’imposaient à sa mémoire. Son propre corps brisé, ployant sous le Doloris au point qu’il avait cru un instant qu’il en perdrait l’esprit. Le tout ponctué de remarques de son bourreaux, d’explications auxquelles on l’avait forcé à acquiescer : tout cela était mérité, c’était une punition visant non seulement lui mais toute sa famille – son incapable de père, sa faiblarde de mère, un spectacle visant à leur faire regretter d’avoir déçu leur Maître... il gardait un souvenir vague de l’Imperium qui avait suivi, des exclamations extatiques de sa tante alors qu’il s’était mutilé les membres pour se faire payer la faiblesse des Malefoy, la honte qui ternissait ce nom dont il avait longtemps été fier à l’extrême. Le reste était… flou, mais ses propres gémissements se répercutaient à ses oreilles, se superposaient à ceux du moldu. Il se rappelait avec un haut le cœur la façon dont ils s’étaient mêlés à des déclamations insensées débordant de fanatisme, d’adulation à l’égard du Lord, des mots dictés qu’il avait récités dans l’espoir de faire cesser la douleur. Et il savait, il savait qu’il avait rampé à Ses pieds, et quémandé sa pitié, qu’il avait baisé le bas de ses robes sous les rires des Mangemorts. Encouragé par cette folle de Bella dont les prunelles profondément noires brillaient à la fois de dérision, de reconnaissance et de satisfaction, puisqu’à ces yeux le Maître valait plus que largement que ses fidèles s’écrasent pour reconnaître sa suprématie. Ses lèvres frémirent sous l’assaut d’une nouvelle nausée, violente. Drago expira brutalement en reprenant conscience, espérant extirper de lui les mémoires autant que l’étincelle de folie. Il posa sa paume contre son estomac et serra, essayant d’endiguer l’affolement de son cœur – il fallait qu’il sorte d’ici. Sous le choc, il mit fin au maléfice, trébucha d’un pas en arrière, d’un deuxième, puis s’enfuit à toutes jambes sans savoir où aller. Il percuta des corps – des passants, des badauds inconscients de la menace qui s’abattrait bientôt sur eux, des imbéciles qui s’outraient d’être ainsi bousculés et qui le repoussaient en le traitant de malade. Malade oui, il était malade, Merlin, qu’était-il devenu ? Ses pas le menèrent finalement à une zone d’ombre où il se tapit tel un animal traqué, la respiration lourde. Il tritura de nouveau le portoloin, parvenant à grand peine à le réactiver tant ses mains fébriles peinaient à être efficaces. En voyant disparaître ces lieux hostiles, il comprit finalement les paroles de sa tantes : il n’y avait pas de meilleur remède à la souffrance que la haine ― infliger aux autres une peine égale ou mortellement supérieure à celle ressentit. C’était un mode de pensée que Drago avait lui-même appliqué à de nombreuses reprises, des années durant, faisant payer à son entourage le moindre de ses mal êtres. Pourquoi l’idée de le refaire aujourd’hui le laissait-elle pantelant? Au fond de lui, il connaissait la réponse à cette question. L’espace d’un instant, il ne s’était pas reconnu. Il aurait pu ôter une vie par vengeance, pour faire payer un outrage, mais… il n’était pas prêt pour ça. Peut-être même ne le serait-il jamais… seulement, il était un peu tard pour cette prise de conscience. Aussi se barricada-t-il derrière un mur de déni, muselant sa conscience pour repêcher en lui-même les vestiges de ses certitudes. Il pouvait le faire. Il devrait le faire. Le Maître, il le savait, avait une mission pour lui; il l'accepterait et la mènerait à bout. ――――――-―• NIGHTMARES (17 yo) •――――-――― Le Manoir n’était plus ce qu’il avait été. Cette demeure incartable entourée de mystère, masquée à la vue de sorciers comme de moldus, ce lieu débordant de riches, entouré de terres qu’occupaient toutes sortes de créatures rares tels les paons albinos, cette bâtisse immense qui avait vu grandir des générations d’enfants blonds comme les blés, dignes représentants de la prestigieuse lignée Malefoy. Un lieu qui avait une histoire, certes sombre et terrible, mais qui avait été témoin des premiers pas de Drago, qui avait abrité ses jeux et ses espoirs, ses rêves de grandeur... tout cela n’était désormais que souvenir. De familière, elle était devenue foncièrement inquiétante. Plus de lumière au Manoir : tout était englouti par des ténèbres opaques; ou n’était-ce que la vision de l’héritier déchu ? Lui qui tremblait désormais en longeant les tapisseries qu’il connaissait pas cœur. Lui qui baissait la tête en passant devant les rares portraits encore présents de ses ancêtres, déglutissant difficilement sous leurs regards réprobateurs, leurs lèvres muselées par la menace d’une mise au rebus. Oh ils y croyaient, à la suprématie du sang-pur, à l’importance capitale d’en faire une notion sur laquelle baser l’ensemble de la société. Mais ils voyaient d’un mauvais œil l’évolution des Malefoy… La fierté de la famille faisait office de quartier général : y défilaient une multitude de sorciers, et pas des plus respectables, dont les rires gras se répercutaient contre les parois luxueuses qu’ils souillaient de leur présence. La majorité des tableaux avaient été décrochés de leurs riches supports et entreposés dans une salle abandonnée, là où leurs plaintes furieuses, outrées, ne pouvaient être entendues. Il en avait plus ou moins été de même pour le patriarche, son épouse, son fils ― ils étaient là sans l’être, fantômes sur leurs propres terres, et tout droit à la parole leur avait été ôté. Ils avançaient en pions, en figurants, selon le bon vouloir d’un Maître qui n’avait que faire de leur sort. Ils étaient en semi-disgrâce, et cela se ressentait. Lucius se savait au bord du gouffre qu’était le discrédit mais faisait tout pour y pallier, allant même jusqu’à offrir en pâture son fils unique pour rattraper les fautes qu’il avait lui-même commises. Drago souffla, agacé contre lui-même. C’était faux, son père ne le vendait pas. Il s’efforçait de… de lui assurer une place plus ou moins stable pour lui épargner les conséquences désastreuses du mécontentement du Seigneur des Ténèbres. Mais c’était plus fort que lui : il se sentait suffoquer ici, asphyxié par les invasions incessantes. L’entente des suppliques des prisonniers ramenés à la suite des raids étaient émétiques. Les sous-sols, autrefois insonorisés par de multiples sorts, prenaient aujourd’hui l’aspect de véritables cellules, et les sortilèges avaient été levés : les mangemors semblaient considérer les gémissements comme une douce mélopée, certains se pressant pour être ceux qui les tireraient aux malheureux qui croupissant en bas. Drago, lui, n’en dormait plus la nuit. Ou plutôt si : mas quand il dormait, il cauchemardait sans cesse. Un poids creusa son matelas. Dérangé, il gigota un instant pour le chasser. La plante de son pied heurta à cet instant quelque chose de dur et de glacial. Le reste de son corps s’immobilisa tandis que son membre inférieur bougeait lentement, presque contre son gré, tâtant ce qui s’avéra être une écaille lisse. Et au-dessus de celle-ci, une autre. Il n’essayait plus de reconnaitre quoi que ce soit à présent, tout comme son pied ne se déplaçait plus contre la chose. C’était elle qui se mouvait à présent en le frôlant, caresse malsaine qui menaçait de lui faire perdre la raison. Son esprit paniqué établissait des liens qu’il aurait voulu ignorer, mais il ne pouvait pas se faire plus bête qu’il ne l’était : il n’y avait qu’une seule créature écailleuse dans cette demeure. Nagini. Un frisson lui fit frémir l’échine. Il était à peu près persuadé d’avoir correctement fermé sa porte avant de s’endormir, pourtant, et ce justement pour éviter ce genre d’effroyables surprises. En partie. Il ne parvenait pas à ouvrir les yeux ― ou peut-être ne voulait-il pas le faire? Mais un sifflement retentit soudain trop près de lui et ses paupières s’écartèrent d’un coup. Un glapissement étranglé lui échappa lorsqu’il vit la gueule de son visiteur ophidien exagérément ouverte au-dessus de son visage. Paralysé, il s’entendit geindre de frayeur mais ne parvint pas pour autant à mettre en mouvement ses membres tétanisés. Son œil distingua alors une forme mouvante, naissant au creux de la gorge souple. C’était… c’était une main, dont les doigts agrippaient le vide avec la force du désespoir, tentant de se défaire de ce qui devait être leur tombeau. Alors que Drago ne l’avait pas vu auparavant, un bras se découpait derrière, et une épaule, un visage enfin. Le corps de la bête, maintenant qu’il s’en apercevait, était lourd et déformé. Les lèvres du visage défiguré par l’horreur battaient en une supplication désespérée, mais les yeux étaient morts. Non. En fait, il n’y en avait pas : deux cavités vides, desquelles suintaient des larmes de sang, les remplaçaient. Quelque chose de translucide gouttait dans l’antre chaud et s’évaporait en fumant, tel un acide, en rencontrant l’épiderme de la proie engloutie. Des sucs gastriques, comprit Drago en se retenant de tourner de l’œil. Nagini digérait son dîner. Une part de lui en conclut avec un soulagement prudent qu’il ne courait donc aucun risque pour l’instant, ou presque, tandis que l’autre était simplement écœurée, retournée par la vision qui lui était offerte. Drago finit par décrocha ses iris de la gueule du reptile et déglutit en voyant se découper les anneaux larges et la masses longiligne qui mesurait la longueur de son propre corps. Oh, Salazar. Les serpents ne s’allongeaient-ils pas aux côtés de leurs futures proies pour savoir quand ils seraient suffisamment longs pour les engloutir ? Cette chose pouvait l’avaler tout entier si elle le voulait, exactement comme elle l’avait fait pour… Drago releva les yeux d’un coup, comprenant l’identité de la moribonde qui suffoquait au rythme des mouvements des anneaux qui se serraient et se desserraient, victime d’une digestion lente et consciencieuse. C’était cette femme, Charity Burbage. Il se souvenait à présent n’avoir pas été capable de décrocher du spectacle odieux de Nagini se repaissant du corps sans vie de l’ancienne employée de Poudlard. Mais pourquoi bougeait-elle?, se demanda le blond de nouveau en proie à la panique. Elle était morte. Elle était morte ! Le Lord l’avait achevée d’un sort qui l’avait fait chuter sur la table et… « Severus, c’est toi ? La voix sortie d’outre-tombe lui fit frôler la syncope. Severus… Severus, s’il te plait…. Nous étions amis ! » « Je ne suis pas… je suis pas... », bégaya mollement le jeune homme tétanisé par la panique, sentant son front se couvrir de sueur froide. Il avait l’impression que toute force l’avait abandonné. Il reposait sur la couche comme un poids mort et aurait voulu s’y enfoncer, disparaître, échapper à… « Severus s’il te plait… Les orbites creuses le lorgnaient, il en était sûr. Mais comment était-ce seulement possible ? Les plaintes furent interrompues et les restes rongés de Mrs Burbage convulsèrent. Ses doigts se crispèrent comme des serres griffues et, alors que le reste de son être s’enfonçaient, son bras se tendit à l’extrême jusqu’à atteindre Drago, pour le saisir par le col. Une force presque surhumaine l’arracha à son oreiller et il se débattit sans succès pour s’en défaire; les crocs acérés de Nagini étaient tous proches à présent, et il ne savait s’il devait se concentrer sur eux ou sur la main de la mourante qui l’entrainait dans ses tourmentes. Même si tu n’es pas lui, tu aurais dû faire quelque chose, persifla alors la femme d’une voix qui n’avait plus rien de tendre – Tu aurais dû ! », assena-t-elle de nouveau avant de se muer en un hurlement terrible. Celui-ci trouva aussitôt écho en Drago, dont les lèvres se tordaient sur un cri paniqué, et… … et tout s’arrêta. Propulsé hors de son propre cauchemar, il se redressa avec la vivacité d’un ressort et secoua fébrilement la tête. Un mauvais rêve, c’était juste… Il bondit malgré tout hors de son lit et fouilla la pièce des yeux pour s’assurer qu’aucun serpent ne se cachait dans un l’ombre d’un recoin. Il n’y avait rien. Conformément à ses souvenirs, la porte était close… Nagini ne l’avait plus visité depuis au moins une semaine, depuis qu’il avait pris l’habitude de se cloîtrer à l’intérieur pour ne plus trouver la créature aux écailles glacées, lovée à ses pieds au lever du jour. Juste alors qu’il faisait ce constat, la poignée tourna lentement et il se sentit défaillir. C’était une prémonition, il allait…! Il n’eut pas le temps de saisir l’information paniquée que lui renvoyait son esprit torturé ― la silhouette qui se découpait sur la pas de la porte n’était ni reptilienne ni menaçante. Elle était même familière : c’était celle de sa mère. Pour la première fois depuis des années, Drago ressentit le besoin pressant de se blottit entre ses bras rassurant, mais il se ressaisit immédiatement. Était-elle là parce qu’elle l’avait entendu crier? La honte lui noua la gorge et il s’obligea à relever le menton en un geste qui sonnait plus désespéré que fier. « Je n’arrivais pas à dormir, fut ce qui lui parvint dans un murmure calme, apaisant. Je me demandais si tu étais réveillé toi aussi… puisque c’est le cas, puis-je rester avec toi? Sa mère, tout en délicatesse. Jamais elle ne lui dirait vouloir le rassurer, elle le savait trop arrogant pour accepter de tels mots. Il n’échapperait pas le lendemain aux sarcasmes des Mangemorts, mais elle, elle l’épargnerait toujours… Drago se contenta de hausser les épaules avec une nonchalance feinte, incapable de montrer sa reconnaissance. Il désigna d’un geste vague le lit, l’invitant à s’y asseoir, mais ne fit lui-même pas un mouvement pour s’y diriger… il ne se sentait pas le courage de revenir maintenant à ce qui, dans son rêve, avait failli devenir son linceul. Sais-tu à quoi je pensais ?, reprit Narcissa d’un ton un peu plus enjoué. Je me disais que revoir Théo, Pansy, Daphné et… ton jeune ami nous ferait à tous le plus grand bien. « Ton jeune ami » ― c’était l’unique façon dont elle parlait de Blaise, une façon pour elle de le désigner aussi respectueusement que possible alors qu’elle ne ressentait que mépris pour la réputation que trainait Mrs. Zabini. Elle qui avait toujours pris soin d’éviter mère et fils lors des réceptions qu’elle organisait, avait été dépitée en apprenant qu’hormis Théo dont elle approuvait la compagnie, son fils unique s’était lié d’amitié avec Blaise plus qu’avec nul autre. Malgré l’attitude détachée de Drago, elle n’était pas dupe : elle voyait ses membres se crisper d’indignation lorsque son camarade de dortoir était évoqué avec dédain. Elle entendait ses mots se faire plus critiques, vifs, coupants, alors même qu’il feignait un parfait détachement. C’était le pourquoi de ces précautions. Et pourquoi ne pas proposer à Astoria de vous rejoindre ? Elle est un peu plus jeune, mais elle est charmante et il serait temps que tu te rapproches un peu d’elle. Peut-être pourrions-nous leur proposer de nous accompagner lorsque nous irons chercher tes fournitures pour l’année scolaire à venir? Oh, suis-je bête… elle rit doucement, sa main retournée devant ses lèvres en un geste gracieux. Tu es grand à présent, tu n’auras pas besoin de moi pour acheter ce qu’il te manque. Quoi qu’il en soit, y aller avec eux t’aidera sans doute à te changer les idées, qu’en dis-tu ? » « J’y penserai, répliqua sobrement le blond alors que l’idée était déjà une certitude. Elle avait raison : il avait besoin de voir d’autres visages que ceux, cruels, qui rôdaient au sein du Manoir. Apaisé, Drago contourna le lit pour s’allonger de l’autre côté en tournant le dos à la femme. Laisse-moi, maintenant, exigea-t-il, bourru. Je suis fatigué. » Il ferma résolument les yeux et fit mine de ne pas la sentir tendre une main vers lui, de ne pas entendre celle-ci retomber contre les plis de la robe de chambre de sa mère alors qu’elle renonçait à son geste à mi-chemin. « Bien. » Elle quitta la pièce aussi silencieusement qu’elle était arrivée. ___________________________________________________Cloîtré depuis deux jours dans la seule pièce qui lui appartenait encore, Drago froissa excédé, un parchemin portant à peine deux lignes de son écriture. La boule de papier alla en rejoindre une multitude d’autres au sol, et il les fixa un instant, l’œil vide. Il n’était pas une fichue demoiselle en détresse ― il n’attendait pas que ses chevaliers Blaise et Théo le tirent de sa prison dorée. Mais que signifiait « donner des nouvelles » quand on devait, de toute façon, se murer dans le silence concernant ce qu’on vivait ? Il était incapable d’écrire quoi que ce soit de suffisamment parlant et discret à la fois pour passer la sentinelle chargée de la surveillance de tout ce qui sortait du manoir… sans pour autant que son destinateur ne se retrouve devant une lettre vide de sens. Or s’il jouait les Mangemorts fanatiques et que son courrier tombait entre de mauvaises mains, les répercussions ne seraient pas plus gérables. Il passa une main lasse dans ses mèches blondes, prêt à abandonner ; l’idée de sa mère lui revint cependant à l’esprit. Proposer à ses camarades de le retrouver quelque part, afin qu’ils récupèrent ensemble leurs fournitures scolaires ― c’était une perspective envisageable. S’il ressentait le besoin de parler de quelque chose d’autre, il le ferait sur place. Narcissa avait aussi suggéré qu’il fasse parvenir le même mot à Pansy et Astoria et Drago hésita. La première s’accrochait à lui comme un Bandimon à des fondations et ses larmes et autres minauderies s’apparentaient pour lui aux sécrétions purulentes de la dite moisissure : un fardeau qu’il n’était pas en mesure de supporter, pas dans l’état actuel des choses. Alors qu’il s’apprêtait à reprendre la plume, deux coups secs furent frappés à la porte et il rabattit sa main sur sa baguette. D’un geste rapide, il fit léviter les parchemins qu’il avait laissés choir au sol jusqu’à une corbeille qui s’anima, les engloutissant avec un rot sonore. Après quoi, il déverrouilla magiquement la serrure et glissa sa baguette dans sa manche. C’était ainsi, à présent : pour conserver son intimité et sa tête, il ne laissait rien trainer de personnel ou d’intriguant et gardait en permanence sa baguette avec lui. La nuit, elle reposait sous oreiller, et il ne pouvait s’empêcher de garder une main fermée autour du bois rassurant. L’intrus n’était autre que son père. Inconsciemment, le jeune homme se relâcha et il fut surpris de sentir ses épaules se dénouer d’une tension certaine. « Père ? » Lucius attendit d’avoir vérifié que nul ne trainait dans le couloir et d’avoir fermé la porte derrière lui pour parler. « Je suis venu te faire part d’une proposition de notre Maître. Il n’avait l’air ni honoré ni enchanté, et Drago su qu’il n’y avait rien de gratifiant dans ce qui l’attendait. C’est à propos de ta septième année. Souhaites-tu la passer à Poudlard? » Le blond arqua un sourcil inquisiteur. « Ai-je un autre choix? » Lucius croisa les mains sur le pommeau de sa canne, qu’il caressa un instant, le visage crispé. La savoir vide de sa précieuse baguette devait être, Drago s’en doutait, un véritable calvaire pour lui. « Tu pourrais rester au Manoir et te dédier pleinement à la cause. » Drago resta muet de stupeur. « Je ne choisirai certainement pas de…! » Le regard de son père le fit immédiatement taire et tous deux eurent le réflexe de regarder autour d’eux. Ce sentiment d’être épié était… constant. Drago souffla et ferma les yeux un instant, s’accordant quelques minutes de réflexion. Dans un flash, il revit les années passées à persécuter Potter et ce qu’il se plaisait à qualifier de basse-cour ― la belette, le rat de bibliothèque et la masse de moutons qui bêlaient avec adoration sur leur passage. Les altercations dans les couloirs et le train, l’AD débusquée, la pluie de sortilèges que Vince, Greg et lui s’étaient reçue une fois avant d’être abandonnés tels des larves purulentes dans le filet à bagage, Potter l’espion raté découvert et immobilisé à une autre reprise, le craquement de son nez sous sa semelle. Et à la suite de ces scènes de bagarres adolescentes ― peut-être plus virulentes que nécessaire ―, sa sixième année. Chaotique. La mission ― son cœur se serra rien qu’au souvenir de l’angoisse perpétuelle qui avait marqué ces mois-là. L’armoire qui refusait de fonctionner convenablement. Ses essais infructueux qui l’avaient tant paniqué qu’il avait craqué, incapable de se confier à quiconque. Son refuge : les toilettes abandonnées aux mains fantomatiques d’une étudiante décédée. Mimi Geignarde dans le rôle d’oreille attentive, étrangement… non, réconfortante n’était pas le terme. Elle le comprenait trop bien, connaissait sa solitude et lui proposait d’une voix désagréablement douce de mettre un terme à tout ça, arguant qu’elle pouvait être sa compagne, pour l’éternité, qu’ils s’amuseraient à hanter les autres élèves jusqu’à leur faire regretter de n’avoir pas su reconnaître leur valeur… Ces mois-là n’avaient rien été d’autre qu’une fulgurante chute, une descente aux enfers. Il avait cru toucher le fond quand Potter s’était faufilé à sa suite dans les toilettes, le surprenant… dans une position dérangeante. Les sorts s’étaient enchaînés et tout à coup il y a avait eu ce sort; des lames invisibles lui avaient entaillé le torse en de longues estafilades aux rebords boursoufflés. Il s’était senti mourir cette fois-là et avait été persuadé que Potter avait réellement voulu ça, qu’il avait sciemment essayé de le tuer. Il avait hésité entre chercher une forme de réconfort dans l’inconscience ou lutter pour se raccrocher à la vie malgré tout, mais n’avait eu d’autre choix que de se laisser choir dans l’eau croupie stagnant au sol alors que ses forces l’abandonnaient. Ce qui suivait restait flou dans son esprit : les cris de Potter, les hurlements de Mimi, des encouragements prodigués par une voix rauque inspirant la confiance; un baume supposément purificateur et guérisseur, mais qui avait provoqué une telle douleur en désinfectant les plaies grossières, et qu’il avait été si désagréable de sentir appliquer. Les semaines de convalescence, le rejet du prolongement des soins : il avait une mission à accomplir et à peine un mois pour y parvenir. La pression de Rogue, qu’il s’obstinait à voir comme un ennemi plutôt que comme un allié. Persuadé de ne pouvoir tomber plus bas, il s’était laissé prendre de cours et n’avait nullement prévu les sensations qui le bousculeraient lorsqu’il se tiendrait face à Dumbledore. Ses pensées étaient restées fixées sur les armoires à réparer, habile moyen de ne pas songer à l’après, et tout s’était enchaîné. Trop vite. Les doutes. La peur. L’échec. Les Mangemorts. L’intervention de Severus. La fuite. Souvent, ces images lui revenaient et il se demandait comment faire face à tout ça. Bien sûr il s’était convaincu qu’il n’avait pas peur, certainement pas, et que tout irait bien puisque le Lord avait à présent la main mise sur l’école. Mais… « Qu’en penses-tu, Drago ? », le relança son père en le tirant du même coup de ses réflexions. Le plus jeune ouvrit la bouche mais la referma sans mot dire. Tout à coup, il n’était plus si sûr de ce qui valait mieux. Poudlard ne serait pas plus un refuge que le Manoir… pour lui, le château n’avait jamais été une seconde demeure, et les derniers évènements qui y avaient eu lieu seraient loin d’arranger les choses. Le regard de Lucius était pressant, cependant, et le jeune homme finit par comprendre que son hésitation était inutile : cette question n’en était pas réellement une. « Je… je vais rester. » Son vis-à-vis hocha sèchement la tête. « C’est une bonne décision. Le Maître appréciera certainement ta dévotion. Il n’avait pas l’air si ravi qu’il le disait ― simplement froidement résigné. Le Lord disposait à volonté de la vie de ses fidèles, une année scolaire n’était rien face à ce dont il avait fait serment. Severus acceptera sans doute de te faire parvenir le programme de l’année, tu pourras l’étudier ici. » Drago tenta d’ignorer la chape de plomb qui s’abattit sur ses épaules alors qu’il se laissait bercer par le silence, la froide solitude de cette nuit sans lune. |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Draco Malfoy | All the wrong choices ―――――――• DISILLUSION (17-20 yo) •――――――― « Tu m’as promis, Draco. Cette fois devait être la dernière. » Pansy avait suspendu ses gestes apaisants et le concerné ouvrit les yeux dans la pénombre de sa chambre au Manoir, incapable de répondre. Il savait parfaitement à quoi elle faisait allusion. Les doigts de la jeune femme se remirent lentement en action, glissant des mèches encore humides qui reposaient sur ses cuisses jusqu'à la joue glacée du blond. « Dis-moi que tu ne partiras plus à sa recherche. » Comme aucune réponse ne venait, elle insista, pressante : « Tu dois te rendre à l’évidence, elle ne vaut pas mieux que ce veracrasse de Blaise ! Elle a trahi nos valeurs, Draco. Enlèvement ? Un rire jaune s’éleva et ses phalanges se crispèrent, l’espace d’une seconde. Tu parles. Les Greengrass se cherchent seulement une excuse pour échapper à la disgrâce. La vérité est tout simplement que leurs deux filles sont des Traîtres à leur –ah ! » La main de Malfoy s’était refermée sur son poignet, douloureuse, et il se redressa aussi sec pour la vriller d’un air mauvais, les traits tordus par la rage. « Ne parle pas de lui. Jamais. Et ne te permets pas de les comparer, Daphné est sans aucun doute à l’origine de la désertion d'Astra. » Leurs regards s’affrontèrent, recelant une tempête qui n’exploserait jamais ; Draco ferma les paupières et appuya son front contre celui de la brune, exténué. Sa prise s’était faite cajolante. Il massa la chair légèrement meurtrie en des gestes apaisants ; excuse muette. Elle le savait, pourtant, que Zabini était un sujet sensible, tabou. « Je souffre autant que toi lorsqu’il est question de lui, Draco », fit-elle tout de même remarquer d’un timbre laconique, et il se détourna pour se relever. « Je sais. Mais Astoria n’est pas comme lui. » « Qu’est-ce que tu en sais ? » Elle était et resterait leur seul véritable sujet de discorde – à quoi bon insister ? « Tu te voiles la face, Darling. » Il récupéra sa tenue souillé par un savant mélange de sang, de boue et de terre séchée et les plia machinalement ; incapable de résister au besoin compulsif d'ordre qui le poussait à trier même le linge sale que récupéreraient les elfes. « Je ne veux pas que tu subisses à nouveau la colère du Lord à cause d’elle. Et tes ASPICS, l'AO, tu y as pensé ? Tu as déjà manqué 2 semaines de Pratique, Rookwood finira par te supprimer du programme ! Et il y a... » — son joli nez se plissa d'agacement, comme si elle goûtait quelque chose de déplaisant — « Scorpius. Tu ne peux pas passer ton temps à errer à la recherche d’une fugitive et à décharger tes nerfs tout ce qui te tombe sous la main, puis revenir complètement amoché et refuser de le laisser te voir des jours durant sous prétexte que tu n'es pas présentable. Tu comptes être forcé de retourner à Poudlard l'an prochain, au lieu d'être ici à prendre soin de lui ? » La voix de son amie s'était faite coupante cette fois, implacable ; ce n’était plus une requête, elle lui intimait de reprendre en main le cours de son existence. Et il savait qu’elle avait gagné, cette fois. « Soit. », répondit-il simplement d’une voix trainante, avant qu'elle ne prenne congé ; sa visite venait de confronter Draco à l'arrivée des vacances scolaires. Déjà. Peut-être n’avait-elle pas tort, après tout. Il arrivait parfois à Draco de penser ainsi, lui aussi ; de se dire que cette histoire n’avait pas de sens, que l’enlèvement était une piètre excuse pour tenter de nier l’évidence. Mais Astoria, plus qu’une ancienne fiancée, plus que l’amante d’une autre époque, avait été un véritable pilier durant quelques mois aussi brefs qu’intenses. Et par dessus tout, elle était la mère de son enfant. Il l’avait crue sincère, tout comme il avait voué à Blaise une confiance aveugle. Avant de se faire poignarder dans le dos, à deux reprises. Sur un coup de tête, il transplana, les pensées fixées sur un conseil que lui avait donné sa tante autrefois. Pour repousser la douleur, tu ne trouveras pas mieux, avait-elle ricané en lui mettant en main un portoloin menant du côté moldu de Londres. Lorsqu’il apaisa son esprit tourmenté en faisant payer à un moldu crasseux sa contrariété, ce soir-là, ce fut sans ressentir la culpabilité qui l’avait arrêté autrefois. ___________________________________________________ MINISTÈRE DE LA MAGIE DÉPARTEMENT DES MYSTÈRES DIVISION DE FORMATION DES LANGUES-DE-PLOMBRÉDACTION : 19 novembre 1997 MISE À JOUR : 25 juin 2001 AGENT RÉDACTEUR : Augustus Rookwood, LDP formateur OBJET : rapport d'évaluation de l'apprenti Draco Malfoy et suivi de ses activités de Langue-de-Plomb N° DOSSIER : L6-78C 98 L6-17A 99 Classifié - state secretCe rapport est rédigé dans le cadre des formations de langues-de-plomb, conformément aux normes de Régulation des Informations du Département des Mystères de 1897, et concerne l'évaluation de l'apprenti Draco Malfoy. NAISSANCE : 05 juin 1980, Wiltshire (Angleterre) PÈRE : Lucius Malfoy, né le 08/01/1954. Conseiller du Ministre jusqu'en 1997, Mangemort, investisseur. MÈRE : Narcissa Black-Malfoy, née à Londres le 12 août 1955. Sans emploi. STATUT : Fils unique. Fiancé de 1997 à 1998 à Astoria Greengrass. Père de Scorpuis Malfoy (03/04/1998). SANG : Pur. PARCOURS RÉSUMÉ : L’élève Draco Malfoy a entamé son éducation en sorcellerie après la découverte de ses pouvoirs, à l’âge de sept ans, sous l’égide du Pr Lindley Hodgkin. S’en suivit un honorable parcours scolaire à l’école de Sorcellerie Poudlard entre septembre 1991 et juin 1997. Il bénéficie en effet d’un dossier irréprochable en termes de résultats scolaires. Qualifié de studieux et de respectueux par la majorité de ses professeurs, il est cependant à noter quelques écarts de conduites tenant notamment de l’oppression d’élèves nés-moldus, de sang impur et de quelques sorciers dits « authentiques » témoignant ouvertement leur tolérance des susnommés. Aucune mesure sérieuse ne fut cependant prise à cet égard, son élitisme agressif ayant été excusé par l’ambiance conflictuelle que connut la célèbre école durant cette époque, puis légitimé une fois l'Angleterre soumise à un meilleur gouvernement. Il manifesta au début de sa 7ème année la volonté de suivre un Apprentissage Orienté (AO) dans le but de devenir Apprenti Langue-de-Plomb à sa sortie de Poudlard. Il entama ses semaines de Pratique le 15 novembre 1997 aux côtés de Travis Grant, employé de catégorie C. À la disparition de ce dernier à la fin dudit mois de novembre (voir Enquête Close M-D 379 97 conservée dans les Archives du Département de la Justice Magique), Draco Malfoy fut pris en charge par moi-même, en ma qualité de maître formateur de catégorie A. Les résultats de ses examens d’« Accumulation de Sorcellerie Particulièrement Intensive et Contraignante », ou ASPIC (voir ANNEXE 1), furent néanmoins juste suffisants pour lui permettre de confirmer son admission en Apprentissage du métier de Langue-de-Plomb. Sa position de Mangemort joua en sa faveur, puisqu'il fut reconnu que les activités menées dans ce cadre jouèrent un rôle conséquent dans la baisse de ses résultats. Les Tests Sommatifs des Capacités justifièrent le remplacement de son numéro d’étudiant (78C) par un second : 17A. Un nouveau numéro de dossier lui fut également attribué en conséquence. APPRÉCIATIONS DU PRÉCÉDENT FORMATEUR : Les notes de Travis Grant à propos de l’élève qui portait alors le numéro 78C témoignent de plusieurs mésententes entre l’apprenti et son formateur, probablement dues à l’ascendance du second. L’intolérance prononcée de son élève est mentionnée à plusieurs reprises dans ses rapports et accompagnée de remarques concernant les doutes du formateur quant à la capacité du numéro 78C à faire preuve d’impartialité dans le cadre de certains projets de recherche. Elle engendra notamment le refus de l’étudiant de se plier aux expériences en lien avec les pratiques moldues dites « technologies de pointe », qui comptaient encore, alors, au nombre des recherches des Langues-de-Plomb. L’enquête concernant la disparition de Travis Grant aboutit à la mi-décembre, à la découverte d’affinités de ce dernier avec le mouvement des rebelles communément qualifié d' Insurgés, sévèrement réprimés au cours des derniers mois par le gouvernement en place. Des liens de parenté avec deux rebelles exécutés en août 1997 furent également mis en évidence. Travis Grant aurait supposément eu accès aux résultats d’enquête ayant révélé la responsabilité de Mangemorts, et de l’appartenance de Lucius Malfoy à ce groupe. En conséquent, il fut jugé personnellement impliqué et inapte à évaluer l’étudiant. Ses remarques ne peuvent donc être prises en compte. Pour plus d’informations, se reporter au dossier classifié portant le numéro C1-78C 07. APPRÉCIATIONS DU FORMATEUR : L'encadrement de la Pratique de l'étudiant Draco Malfoy dans le cadre de l'AO me fut confié a compter du 1er décembre 1997. Les semaines de Pratique suivantes furent placées du 15 avril au 6 mai 1998. Au terme d'une semaine assidue, l’élève cessa de se présenter au Ministère. Son absence injustifiée dura jusqu'au déclenchement de la Bataille de Poudlard, entre le 1 et le 2 mai 1998. Elle se prolongea au terme de la semaine de suspension des activités qui suivit la bataille et lui aurait valu un renvoi si le Directeur de Poudlard, Severus Snape, n’avait posé le 9 mai, en son nom, une demande de suspension temporaire de l'encadrement (ANNEXE 2) due à la disparition d'une proche. Le motif fut confirmé par le dossier concernant l'enlèvement supposé d'Astoria Greengrass (voir Enquête Ouverte E-D 004 98 conservée au Département de la Justice Magique), génitrice du fils de l'apprenti (Scorpius Malfoy). Le début de l’absence de l'élève coïncide en effet avec la date dudit enlèvement. Il reçut cependant un avertissement, figurant dans son dossier et stipulant que le moindre écart de plus se solderait par son renvoi définitif du programme (ANNEXE 3). Le 78C fit son retour au Ministère le 28 mai de la même année, soit près de trois semaines après la reprise des activités et deux jours avant l’annulation de sa candidature. Je n’eus dès lors aucun autre point négatif à relever dans son comportement et son apprentissage accéléré, auquel il se consacra pleinement durant les périodes imparties, avant de passer les tests finaux avec succès. La réussite de ses ASPIC lui permit de prétendre au titre d'Apprenti Langue-de-Plomb. Il fut soumis le 20 août 1998 au Test Sommatifs des Capacités, et les résultats obtenus permirent un passage de classe C à la catégorie A : l'Apprenti démontrait une capacité à recevoir une formation normalement réservée aux membres du Service comptabilisant déjà une à deux années d’expérience. Son matricule fut troqué en conséquence pour le numéro 17A. • FORCES : étudiant motivé et travailleur, capacités exacerbées par une soif de connaissance et une ambition sans limites. Facilité notables et connaissances étendues en matière de Magie Noire théorique et pratique. Pragmatisme et détachement face à la souffrance. Loyauté et discrétion quasi irréprochables. • LACUNES : Lâcheté potentiellement handicapante face au danger. Tendance à tenter de se défiler par la ruse ou par la fuite. Il effectua des efforts notables pour corriger la lacune relevée au cours des tests durant les mois suivants et son parcours en tant qu'Apprenti fut irréprochable. Il obtint son Attestation avec un cumul de 95% d’épreuves réussies. Ses résultats sont joints au dossier des trois apprentis de la promotion de septembre 1998 à avoir atteint en le niveau requis et souscrit aux exigences du Département des Mystères, bien qu'il acheva son parcours avec un an d'avance, en juin 2000. Il semblait évident que le 17A avait été mis en contact très tôt avec la branche de Sorcellerie dite « Obscure ». De ce fait, des tests de son métabolisme et de son psychisme ont été effectués avant qu'un poste ne lui soit proposé, afin de certifier son aptitude à prendre part aux expériences gérées par le Département des Mystères. Aucun dégât sérieux n’a été noté, bien qu’une augmentation du sadisme et de l’indifférence de l’étudiant face à la douleur, au cours des deux dernières années, mérite d’être notée. Le métier de Langue-de-Plomb nécessitant cependant un certain détachement des valeurs humaines et éthiques au profit de la recherche, ceci ne représente pas un problème suffisant pour menacer les progrès de 17A, tant qu'aucun abus n'est à signaler. J’atteste donc que le statut de Langue-de-Plomb a été attribué au numéro 17A et a pris effet le 25 juin 2000. À ce titre, il a été soumis au contrat magique de Préservation des Mystères, et sa baguette accordée aux sortilèges de protection restreignant l’accès aux Salles du Département. ――――――-―• ASPHYXIA (21 yo) •――――-――― « Laissez-moi la voir. » Draco aurait voulu que sa voix soit ferme. Objectif échoué : Snape avait toujours le don de le remettre dans sa peau d’étudiant, d’adolescent de 16 ans. Traqué, soucieux et mal assuré. « Severus… » « Il suffit ! Vous savez parfaitement que le Lord a refusé que quiconque puisse approcher Mrs Malfoy, et cela vaut autant pour votre père que pour vous. » Draco voyait sur ses traits son agacement grandissant, mais le gouffre de détresse qui menaçait de l’engloutir l’empêchait tout simplement de battre en retraite. « Je ne partirai pas », affirma-t-il d’une voix blanche. « Je dois savoir. » Le rictus impatient de Snape disparut et l’homme posa sur l’épaule de Draco une main compatissante. « Ce n’est pas beau à voir, Draco. Il n’y a dans cet pièce qu’un atroce spectacle de plus qui nourrirait tes cauchemars. » Le passage au tutoiement conférait à l’instant un aspect plus tragique : le directeur de Poudlard ne se le permettait que lorsque son ancien étudiant se trouvait dans une situation réellement désespérée. Glacée, Draco se dégagea brutalement de sa poigne et le fusilla d’un regard tout aussi perdu que furieux. « Je ne suis plus un enfant, Snape. Je n’ai pas besoin de vous pour me dire ce qui est bon pour moi, alors je vous conseille de me laisser passer. » L’instant d’après, le bout d’une baguette reposait à la base de son cou, menaçant. « Ne vous avisez plus jamais de vous adresser à moi de cette façon, Malfoy », susurra l’aîné en le vrillant d’un regard implacable qui lui donna de nouveau l’impression de retomber en enfance. « Je ne partirai pas… », insista-t-il pourtant, défiant, en s’efforçant de contrôler l’inquiétude que provoquait l’arme en lui. Il était des causes qui valaient n’importe quel danger – le devenir de sa mère en faisait largement partie. Des longues secondes s’écoulèrent, une éternité aux yeux de Draco. Le regard d’Onyx qui vrillait le sien le sondait trop profondément pour être honnête : très vite, la sensation habituelle d’une intrusion effleura les barrières qu’il avait appris à garder érigées en quasi permanence autour de ses pensées. Crispé, le jeune homme se livra à l’exercice qui avait rythmé sa 6e année ; il pouvait presque entendre la voix de sa tante lui susurrer des consignes à l’oreille. C’était devenu mécanique, bien que la concentration restait largement de mise : compartimenter ses pensées, barricader les images sensibles, projeter en premier plan un mur d’idées peu compromettantes et inutiles pour laisser penser au legilimens qu’il ne tentait pas de lui cacher ses réflexions. Les secondes s’étirèrent en minutes et, bien que rôdé depuis ses 16 ans à cet expérience pénible, Draco serra les dents. Si Snape insistait, il le repousserait purement et simplement de son esprit – le laisser rôder à la lisière de ses peurs était trop risqué, cet homme était un sorcier puissant. Mais la pression finit par s’évanouir, et le Maître de Potions lui tourna le dos sans mot dire pour ouvrir la porte que le fils Malfoy avait tant espéré atteindre. Il s’effaça derrière le panneau de bois, que le plus jeune s’attendit à voir claquer entre eux... Mais non. L’entrée resta entrouverte, invitation muette et réticente. Et soudain, les doutes l’envahirent. L’hésitation, la panique intérieure. Paralysé par ce qui l’attendait, Draco hésita une fraction de seconde, mais se fit violence. Il devait le faire. Sa paume frôla la poignée, d’abord avec méfiance, avant de s’en saisir fermement. Et il la poussa. A l’intérieur, dans un décor au luxe trompeur, siégeait un immense lit à baldaquins. Et en son centre, la silhouette frêle de Narcissa reposait sur des draps de soie. Un pas en avant. Un second. Les iris gris se heurtèrent violemment à ce que lui avait annoncé Snape : le bras mutilé, salement sectionné là où Nagini s’était nourrie. De la chair à vif de part et d’autres des jambes dénudées jusqu’aux cuisses, rendues visqueuses par un mélange de sang séché et d’onguents, au terme d’un traitement signé de la baguette des mangemorts. Tout cela à cause d’une erreur de Lucius et de son fils. L’air était chargé de magie, autant que l’esprit de Draco l’était par sa culpabilité ; le bond devina qu’il avait interrompu Snape en pleine séance de soins. Il continua d’avancer sans réellement s’en rendre compte, le cœur au bord des lèvres et le mot qui lui échappa attira sur lui le regard bleu, trop vide, que sa mère avait jusque-là gardé fixé au plafond. « Maman… » Depuis combien d’années n’avait-il pas aligné ces lettres ? Toujours froid à son égard, toujours ingrat, exigeant, infect. Et elle était là à présent, brisée, sa beauté littéralement rongée par les crocs du Serpent de Celui dont Draco baisait le bas des robes. Elle murmura quelques mots qu’il ne comprit pas – les hurlements de douleurs, qu’elle avait laissé échapper malgré elle, avaient transformé sa voix mélodieuse en un souffle rauque et laborieux. Son fils posa deux doigts contre ses lèvres pour l’inciter au silence et, sans rien ajouter de plus, s’allongea à ses côtés, le visage enfoui dans son cou ; les draps étaient moites, l’odeur rance qui flottait autour d’eux accentuait sa nausée, mais tous ces détails qui l’auraient habituellement révulsé le poussèrent seulement à renforcer légèrement sa prise sur la taille fine de celle qu’il avait connue si parfaite. Il resta là longtemps, à lui parler de Scorpius, à lui promettre de le lui faire voir, un jour ; à lui mentir quant à sa propre vie, à lui jurer que leurs choix n’avaient pas simplement pourri leur existence. Dupe ou non, elle avait aux lèvres un demi-sourire épuisé, dans son sommeil agité, lorsqu’il quitta la pièce au lever du jour. |
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