Before it breaks
Damaged people are the most dangerous.
Because they know they can survive.
Quand ils arrivent dans le
Crac sec et claquant d'un transplanage réussi, elle le sent qui tangue et vacille. Comme une vieille habitude prise avec Scorpius, elle veut poser sa main libre par-dessus ses doigts crispés. Mais à peine effleurée, la poigne de l'homme, contre son avant-bras, se serre plus fort entre l'avertissement toutes babines retroussées et une crainte toute d'instincts de survie. Jeremiah oscille entre prédateur et proie. Et en lui, Nyssandra sent que tout hurle qu'
elle est dangereuse. «
On est arrivés chez moi. » Essaie-t-elle, rassurante mais pas vraiment rassurée, se demandant si ce qu'elle a fait est bien judicieux. Acheter Jeremiah s'est imposé comme une évidence, la seule chose possible pour le sauver. Stupidement naïve dans son ignorance, elle n'a jamais pensé à ce qu'il resterait à sauver. «
Ca va aller. » Elle ignore qui elle tente de convaincre, lui au dos barré de cicatrices fraîches ou elle à la bouche pleine de doutes. Quoi qu'il en soit, Jeremiah n'est pas vraiment dupe de ses jeux et de ses masques. Un reniflement sarcastique râcle sa gorge et un rictus tord sa bouche.
Il ne la croit pas, sa chair brûle encore de la marque qu'on lui a apposé. Sa fierté crame encore en braises chaudes sous sa liberté en cendres.
Sa main se retracte, bat en retraite dans la poche de sa veste alors qu'elle avance d'un pas - renonçant à l'aider, craignant que le prédateur ne veuille arracher quelques doigts à la main compatissante qui essaie de le nourrir. Inaudible, son souffle se relâche, un peu tremblant entre les lèvres, évacuant la tension et la déception. Puis de sa poche, ses doigts vont pêcher un trousseau de clés qui cliquètent dans la serrure. «
Tu es en sécurité ici. » Annonce-t-elle en ouvrant la porte avant de lui céder le passage. Mais il n'entre pas, reluctant, et le regard qu'il pose sur elle a le mépris de leurs premières rencontres. Comme s'il hésitait à lui parler, à elle et ses futilités d'adolescente. «
Ici, grince-t-il de sa hauteur :
Je suis un esclave. » Les mots sont accusateurs, corrosifs. Douloureux. Nyssandra croise les bras, mécontente, à la fois vexée et blessée. Autant elle peut encaisser l'indifférence, il lui est difficile d'avaler l'agression. «
C'est toujours mieux qu'Azkaban. » Ses mots crissent entre ses dents serrées. Mais Jeremiah, peu soucieux de l'épargner, renifle. «
Ca dépend pour qui. » Un
tu es une vendue claque dans le dernier mot. Un instant, la puérilité prend le dessus, et elle veut lui signaler
pour information qu'elle aide les insurgés,
pauvre con. Puis, sous le regard clair aux sourcils arqués par le défi, elle ravale ses mots, grimace sous leur amertume. Ca ne le regarde pas, décide la sorcière en le poussant pour entrer et abandonner ses chaussures dans l'entrée. Elle n'a rien à lui justifier, ce n'est pas à lui de la juger. «
J'ai fait ce que j'ai pu. » Et c'est vrai. Elle fait ce qu'elle peut. «
Alors ce n'est pas assez. Encore que ça semble bien suffisant pour conserver ton petit confort, Ollivander. » Et elle fait ce qu'elle
veut aussi, merde. Elle ne voit pas pourquoi elle devrait sauver des gens comme lui, qui se croient assez bons pour la juger. Qui sont tellement suffisants, tellement arrogants alors qu'ils sont
tous du même tissu qu'elle. Egoïstes. Menteurs. Tricheurs.
Des gens qui ne l'ont jamais sauvée.
Jeremiah se décide finalement à entrer, et c'est idiot, elle en siffle de mécontentement quand les chaussures boueuses laissent des traces sur le parquet bien propre de son salon. Autrefois, il en aurait ri. Avec Ian, il se moquait souvent de ses petites maniaqueries. Aujourd'hui, il n'a que sarcasmes à la gueule quand il se plante à côté d'elle. «
La bourbe te dérange, Ollivander ? Tu as toujours eu les priorités mal placées. Tu n'as pas changé : tu ne sers à rien. » Le coup est parti tout seul, la main rejettée en arrière s'imprime brutalement sur la joue. «
Je t'interdis de me juger. On n'a pas tous nos cicatrices sur le corps, Anderson, pour montrer qu'on fait la guerre. » A nouveau, elle veut le frapper, rendre coup pour coup, mais sa grande main d'homme s'enroule autour du poignet gracile, l'immobilisant en l'air et stoppant net l'attaque. «
Qu'elle est difficile avec toi, la société, Ollivander. » Elle s'agite et s'agace. Mais c'est inutile. Il ne veut pas la laisser partir si facilement. «
Lâche-moi. Putain, lâche-moi ! » C'est assez, elle ne veut pas qu'il continue de l'assommer de ses reproches amers et de ses vérités salées. Nyssandra en a assez de sentir la mépris de l'homme flamber à chaque fois qu'il pose les yeux sur elle.
Elle ne mérite pas ça. «
Pauvre petite, c'était difficile de te pavaner dans les soirées, n'utilisant ta cervelle que pour des conneries. Autant que de passer de Ian à ce Mangemort, n'est-ce pas ? Ce Llewellyn aurait dû te tuer. » Il lui en veut. Tellement. Il la déteste pour les chaînes qu'elle a fait mettre à ses pieds, à sa chère liberté. Et il se hait pour avoir joué le jeu.
Dans ces conditions, ça ne vaut pas la peine de vivre. Dans le coeur de l'américain, le désespoir flirte avec le mépris. «
Tu t'es dit que tu allais compléter la collection avec un rebut ? L'accessoire à la mode, c'est comme ça que vous l'avez appelé dans ton journal, non ? » Le bras se tord, se vrille et elle tire pour échapper à sa poigne. Mais ses doigts se resserrent plus fort. Juste assez pour lui faire un peu mal, juste assez pour qu'elle cesse son manège et l'écoute. «
Et toi, tu la fermes comme si t'avais jamais vécu avec nous. Comme si t'avais rien appris de Ian. » ...
tu ne valais rien avant Ian, tu ne vaux rien sans lui. Il ne le dit pas, mais c'est ce qu'elle entend et les larmes percent brutalement, s'échouent sur les cils bruns, dévalent les joues. La douleur est silencieuse, pernicieuse sous la colère qui s'exclame : «
Je t'emmerde, Anderson. Je t'emmerde, toi et tes principes. Tu ne sers à rien. » Elle lui ressert ses propres mots. Espère un peu qu'ils s'enfonceront aussi douloureusement qu'ils l'ont fait avec elle. «
Tu crois que ça va changer quelque chose, ce que tu fais ? Ca ne changera rien parce que tu n'es rien. » Parce qu'ils sont humains et les humains ne sont rien plus qu'impuissants. Et laids, tellements laids. «
J'ai fait ce que j'ai pu, merde. J'ai payé, pas pour avoir un connard imbuvable sous mon toit, mais pour sauver ta putain de vie. On était amis, non ? »
«
On n'est pas amis, Ollivander. On est seulement des étrangers avec des souvenirs. »
Les mots sont brutaux, lourds - elle les entend presque se fracasser au sol et laisser leur marque sur le parquet. Comme le sort qu'elle lui lance sur un coup de sang avant de se plier en deux à son tour sous la douleur captée.
Très bien.
Ils ne sont
pas amis, mais elle le sauvera
quand même.