La campagne. La forêt. Des étangs, des marais. Des arbres de tous les côtés. Ca faisait un bon point de rendez-vous, non ? L’Epping Forest, ou
Forêt d’Epping, tel était le nom que Nathan avait donné à son collègue (compatriote ? congénère ? camarade ? quel était le mot précis ? bonne question). Il n’avait donné pas plus d’indications que ça, et il fallait l’admettre, c’était très vague. Mais si son « collègue » voulait le trouver, il le trouverait, point. Une espèce de petit défi personnel, en soi, parce que c’était bien beau de transplaner ici, mais la forêt était vaste ; quatre kilomètres de long au moins et presque vingt au plus. Cela constituait une bonne zone de recherches, que Nathan espérait d’ailleurs vierge de ces foutus Mangemorts et ces Rafleurs et leurs « meutes » ou « gangs », ces
salauds de pions du Gouvernement....
Pas de mission aujourd’hui. Ou pas d’officielles, plutôt. Il fallait dire qu’ils l’avaient encore tous au travers de la gorge, les évènements récents… Rien qu’à y repenser, Nathan grogna. Littéralement, avec les crocs et compagnie. Avec une envie de bondir sur le premier venu et de lui arracher la jugulaire avec les dents. Ce qui n’était pas
humain, s’évertuait à lui rappeler Lily, qui prônait l’innocence et toutes ces conneries, qui disait qu’on ne nettoyait pas du sang avec du sang alors qu’elle était mal placée pour dire ça.
Oui, ces Rebuts
brûlés vifs le faisaient tellement grogner qu’il en venait même à s’énerver sur Lily,
Lily quoi, et du coup, il prenait du recul, l’avait saluée vite fait, et était parti très tôt dans la matinée du QG, sa capuche presque semblable à celle des Mangemorts rabattue sur sa tête, sa main sur sa baguette
au cas où, traversant Londres à grands pas avant de transplaner hors de la ville, pour se retrouver dans cette forêt, et de laisser l’animal, le loup, prendre la place.
Il n’y avait même pas participé, à l’attaque. C’était ça le pire.
S’imaginer. C’était un peu égoïste, tout de même. Mais ça le mettait hors de lui, alors il piqua un sprint, histoire d’évacuer le stress. Les cigarettes moldues sous forme de loup, ce n’était pas pratique, et puis il essayait d’arrêter totalement. Ah ah, on lui aurait ri au nez, sûrement ; eux, les pro-sang-pur. Un sang-pur fumer des cigarettes
de sang-de-bourbe alors qu’il y avait des drogues magiques bien plus intéressantes ? Risibles. Ils devaient sûrement trouver risible aussi le fait de griller au barbecue des êtres humains, pouf, en un claquement de doigt.
Il s’arrêta, souffla, laissa le loup disparaître et appuya son dos à un arbre – non, il n’allait pas rester planté comme un idiot
au beau milieu de la forêt. Et il hésita longuement sur cette cigarette, avant de se rappeler qu’il n’en avait même pas sur lui, comme il le constata concrètement en fouillant ses poches. Des bombes à peinture rouge moldues, son drapeau rouge, son dé porte-bonheur, et rien d’autre, pas de clope. Tant pis. Il se calmerait bien tout seul, va, sans tabac, sans artifice.
En se disant qu’ils allaient tous payer, entre autres. En se disant que, de toute façon, la pitié n’avait pas sa place dans cette guerre, puisque les Mangemorts et autres n’en avaient jamais eu. Eux non plus, les Insurgés, d’ailleurs ; plus aujourd’hui, en tout cas.
Bref, il souffla un petit nuage de buée pour passer le temps. Il était très tôt, cinq heures et demie du matin à tout casser, le monde s’éveillait à peine ou pas du tout. Nous étions en juillet pourtant, presqu’en août, bon sang, mais les matinées anglaises étaient fraiches. Il regretterait presque la Grèce, pays de sa mère – sa
folle de mère aux idéaux puristes – mais chassa rapidement cette pensée. De toute façon, on ne sortait plus du pays,
à moins que.
À part ça, il commençait à s’impatienter, alors qu’il était en avance. Il avait fixé la rencontre à six heures, sur demande de son « collègue ». Enfin, collègue… C’était vite dit, ce n’était qu’un Insurgé de plus. Lysander, quoi. Nathan avait eu vent des ambitions de Lysander ; ça l’avait fait sourire. Et puisque ni l’un ni l’autre n’avait mieux à faire, du moins pas à cette heure (oh, Nathan voyait pourtant bien des choses à faire, comme aller casser la tronche au Gouvernement, entre autres), ils avaient programmé une rencontre. Parce que la requête de Lysander avait piqué la curiosité de Nathan, et parce qu’il voulait tout de même raffermir son statut d’alpha, aussi.