Le 5 août 2002

Eris est flattée que Nyssandra l’ait choisie elle pour organiser sa pendaison de crémaillère – mais à bien y réfléchir, à qui donc aurait-elle pu demander ? Son amie sait parfaitement qu’en terme de bon goût, elle est la valeur la plus sûre du monde sorcier, et qu’elle connaît parfaitement tout ce qu’elle préfère, ses allergies, ses amis, ennemis et vous comprenez le tableau. La seule façon qu’Eris pourrait mieux connaître Nyssandra serait d’être Nyssandra.
Ceci étant dit, elle est tout de même bien contente que sa meilleure amie ait également fait appel à Alastar Doherty pour cette affaire. Le charmant sorcier a encore plus de contacts qu’elle et ses fêtes sont toutes des réussites : à eux deux, ils sauront bien organiser l’Événement avec un grand É qui allait faire rêver l’Élite sorcière.

Ses talons claquent sur le plancher de l’appartement fraîchement meublé de la Poufsouffle. Elle a aidé au choix des meubles (évidemment), de la décoration (évidemment), de l’éclairage (évidemment) et même au choix du contracteur chargé de rénover l’appartement (évidemment). Le petit bijou brut qu’elle a visité, il y a des mois, est désormais une merveille. Puis, regardez-moi ces hautes fenêtres… franchement, Nyssandra y sera à son aise comme jamais. Enfin, elle espère.
Ses doigts tordent une mèche de cheveux, tandis qu’elle observe la ville en silence. La brunette s’est remise vite des événements de l’exécution. Elle n’a pas été blessée, après tout, et la frayeur qu’elle a vécu est entièrement de sa faute. Et si elle était morte ? Ce n’est pas arrivé. Elle ne doit pas y penser.
Eris se refuse à trop penser. À trop réfléchir.
Felix s’est remis de ses blessures, elle a veillé sur lui sans relâche. Nyssandra ne va pas bien, ça, elle ne peut pas se mentir. Guenièvre non plus. Quant à Sue, elle est difficile à attraper, à saisir, trop occupée. Le monde recommence à tourner. Lentement, mais difficilement. Le mécanisme est rempli de sable. Il grince.
Elle ne doit pas réfléchir.

Un cognement de jointures, contre la porte, se fait entendre, puis la haute silhouette – superbement vêtue – d’Alastar Doherty fait son entrée. Le visage pensif de la jeune femme se décore d’un sourire sincère alors qu’elle marche jusqu’à lui pour l’accueillir comme il se doit, presque aussi grande que lui, juchée sur ses souliers, ses longues jambes nues en paraissant encore plus longues (minirobe, comme bien souvent : il fait si beau et si chaud). Les pensées sombres et sérieuses sont effacées aussi rapidement qu’elles sont arrivées. Elle doit penser à la fête. « Alastaaaaar ! Bonjour et bienvenue ici ! J’espère que vous avez fait un vœu, en passant la porte, puisque c'est votre première entrée ici. Smack, smack, les baisers de convenance sur les joues. Alors ? Ça vous plaît ? Les travailleurs ont fait un boulot merveilleux. Quand je l’ai visité, il n’y avait même pas de dressing, vous rendez-vous compte ? Inacceptable. Un petit claquement de langue. Tout est réglé, heureusement. Installez-vous à la table, je sors les rafraîchissements ! Je vous ai préparé ma recette de mojitos, ce sont les meilleurs que vous n’avez jamais bus, je vous le promets, et j’ai pris quelques gourmandises au Natalie’s. Je ne savais pas si vous aviez des allergies alimentaires, alors j’ai évité les allergènes les plus courants. »

Hôtesse parfaite, habituée aux contacts sociaux. Elle s’enfuie aussitôt à la cuisine, laissant l’homme prendre place à la table recouverte de dossiers, sans même attendre une réponse concrète à son bavardage enthousiaste (elle a besoin de parler, quand elle est nerveuse, pensive, besoin de rire). Quand elle revient, c’est avec un plat de pâtisseries et de fruits flottant devant elle et un pichet (oui) de mojitos, ainsi que deux verres. Boire à 10 heures le matin ne dérange aucunement Eris, qui a habitué son système à ces abus alcooliques, et elle suppose qu’Alastar ne voit également aucun problème à cela. Les deux verres se versent, se posent immédiatement à leurs places, tandis que l’assiette se pose sur la table. « Voilà pour vous ! »

Lorsque tu transplanes près du Chemin de Traverse, sur votre lieu de rendez-vous, tu es parfaitement à l’heure. Quoi d’autre, bien sûr ? Tu es toujours à l’heure. Tu es toujours parfait. Tout ce que tu entreprends l’est. Tu essayes d’oublier, rapidement, que ça n’a pas toujours été le cas. Qu’il y a une dizaine d’années, une vingtaine d’années, le garçon que tu étais, volait pour se nourrir, se faisait poignarder pour s’associer à de mauvaises personnes. Tu n’étais en contrôle de rien, à cette époque. Aujourd’hui, heureusement, ce garçon est mort, et enterré bien profondément au fin fond de ton esprit. Il faudrait plus qu’un occlumens pour l’en sortir. Aujourd’hui, tu contrôles ton environnement. Tu te contrôles toi, mais tu contrôles aussi ceux qui t’entoures par ton talent, par tes capacités sociales. Si bien même, que tu ne manques jamais de travail. Un jour dans la vie d’Alastar Doherty n’est jamais ennuyeux.

Tu réajustes ton nœud papillon d’un coup de doigts expérimentés –les cravates sont pour toi synonyme de paresse- avant de frapper à la porte qui se tient devant toi. Rapidement, des bruits de talons se font entendre sur un sol de parquet, et on t’ouvre la porte. Tes yeux se retrouvent alors étrangement à la même hauteur, à quelques centimètres près, de ceux de ta collègue pour l’occasion, Miss Eris Burke. Ton sourire option extra charme s’affiche sur tes lèvres presque automatiquement, tant la situation t’est familière. Cependant avec Eris, c’est un peu différent. Tu n’as pas à t’adresser à elle pendant les cinq premières minutes, tant elle n’arrête pas de jacasser. L’excitation, tu penses. Une bise, puis deux. Peu t’importes, vraiment. Tu profites de ses bavardages pour analyser d’un coup d’œil le matériel à ta disposition : la maison te semble neuve –remise à neuve, disons, à en juger par certains murs, spacieuse mais pas trop, bien aérée, bien agencée, et assez agréablement décorée. Un coussin de plus à gauche et à droite, une toile sur le mur ici, un tapis là, quelques bougies… Oui, ça devrait aller. Rien de bien compliqué, tu penses.

Rapidement, la brune te guide vers la salle à manger avant de s’échapper pour vous servir des rafraichissements. Il te semble l’entendre dire quelque chose à propos des « meilleurs mojitos de ta vie ». Une mention au Natalie’s aussi, peut-être. Tu hausses les épaules, sans même regarder ta montre à gousset –les montres bracelets sont pour les hommes qui manquent de classe. Matin ou soir, tu as décidé il y a bien longtemps déjà que l’alcool était ton ami. Tu es plus habitué au champagne, ou au whisky pur feu, mais un mojito fera l’affaire. Si avoir quelque chose dans la bouche lui permet de te laisser en placer une, après tout…

Lorsqu’elle revient dans la pièce, tes propres dossiers ont déjà rejoint la table recouverte d’un simple coup de baguette. Bien sûr, ils sont organisés par thème. « Oh, Eris ! Il ne fallait pas vous donner autant de peine, par la barbe de Merlin ! Je peux survivre avec un simple jus de citrouille, vous savez ? » tu l’accueilles dans la pièce, en te levant pour lui tirer une chaise, un sourire espiègle au visage. Tu laisses la demoiselle s’asseoir avant de rejoindre ta propre place et de tremper te lèvres la boisson si tendrement préparée pour toi. Comme promis, elle dépasse toutes les attentes. « C’est exquis Eris ! Oh, vous devez ab-so-lu-ment partager votre recette avec moi, je ne vais plus pouvoir m’en passer ! » Tu bois une nouvelle gorgée, comme pour attester de la véracité de tes paroles. Lorsque tu déposes ton verre, c’est pour t’emparer de la plume à papote –une plume de paon, rien de moins- que tu gardes dans la poche intérieure de ton costume. Dès que tu la lâches sur le papier, elle commence à gribouiller quelques-unes de tes notes mentales sur la maison. « Je suppose que Miss Ollivander vous a laissé des notes quant à la soirée dont elle rêve ? Ce qu’elle aime, ce qu’elle n’aime pas, toutes les informations peuvent être utiles, vraiment. » Les documents devant toi, probablement, mais la politesse te force à demander. Bien sûr, tu connais Nyssandra Ollivander – vraiment, qui ne connais-tu pas ? Mais tu as bien trop peu d’informations sur elle pour organiser sa soirée, celle qui ne conviendra à personne d’autre qu’elle. Et c’est dans ça que tu te spécialises, il faut bien l’avouer.

Alastar est un parfait gentleman qui prend la peine de se lever pour tirer sa chaise, attention qu'elle remercie d'un sourire coquet. « Oh, Eris ! Il ne fallait pas vous donner autant de peine, par la barbe de Merlin ! Je peux survivre avec un simple jus de citrouille, vous savez ? On ne pourra pas m'accuser de mal recevoir. » Surtout pas par l'homme qui est sur toutes les lèves, l'homme dont les soirées font la pluie et le beau temps. Si Alastar Doherty en a contre elle, sa réputation risque réellement d'en pâtir. Il est bien une des quelques personnes qu'elle considère à son niveau, en terme d'oiseau de soirées et de société. Autant le lui manifester et lui montrer qu'elle estime réellement son avis et sa personne.
Bien installée sur sa chaise, elle suit l'homme des yeux, devenant même légèrement nerveuse quand il prend une gorgée du breuvage soigneusement préparé pour eux. C'est tout de même sa fameuse recette de mojitos, dont on parle. Heureusement, la réaction est enthousiaste – et c'est bête comme elle se sent subitement soulagée (cette rencontre ira bien, Alastar a aimé ses mojitos) : « C’est exquis Eris ! Oh, vous devez ab-so-lu-ment partager votre recette avec moi, je ne vais plus pouvoir m’en passer ! Son expression se fait satisfaite, flattée également. Merciiiii ! Alors, cette recette est secrète, mais j'en ai une de mimosas que je vous donnerai avant que vous partiez. »

Histoire qu'il reparte non seulement en confiance face à l'organisation de sa soirée, mais face à ses futurs matins alcoolisés avec délice.

« Je suppose que Miss Ollivander vous a laissé des notes quant à la soirée dont elle rêve ? Ce qu’elle aime, ce qu’elle n’aime pas, toutes les informations peuvent être utiles, vraiment. Hochement positif de la tête. Oui, évidemment. Elle sort un morceau de parchemin d'un dossier, morceau de parchemin qui s'ouvre en fait en plusieurs volets et est bardé de couleurs différentes, soulignant chacune un aspect des goûts et des couleurs de sa meilleure amie. C'est un sommaire, les détails sont dans chacun de ces dossiers, mais j'y ai également répertorié quelques notes plus importantes que les autres à propos de Nyssandra. La première étant que Nyssandra est allergique aux fleurs et que si on décide de placer des pivoines, ses fleurs préférées, celles-ci devront être conservées sous verre, ou entourées d'un sort empêchant leurs effluves de se diffuser. C'est triste, des fleurs qu'on ne peut humer, mais c'est bien mieux qu'une réaction allergique non désirée. » Son doigt souligne la note, déjà soulignée en rouge, pour qu'elle n'échappe en aucun cas à l'oeil du Serpentard.
Eris sort de sous un dossier sa propre Plume à Papote, à la plume d'un violet vif, qu'elle place en équilibre sur un carnet de notes sorti d'une autre pochette. Une expression plus sérieuse a pris place sur ses traits, désormais, et même sa voix s'éloigne de celle vive et joyeuse qui lui est propre, atteignant les accents propres et nets de marchandeurs propres aux Burke : « Je vais vous confier toute cette paperasse, vous pourrez l'éplucher en paix à votre manoir, et je vous ferai visiter l'appartement ensuite pour mieux illustrer certaines idées – des plans et des photographies sont fournies, mais ce n'est rien à côté de s'inspirer de l'ambiance réelle de l'endroit. Un large signe de la main a enveloppé tout ce qu'elle a amassé comme notes et suggestions, le tout classé avec soin. Il ne s'y perdra certainement pas. Il y a par contre quelques petites choses que je tiens à régler avec vous, soit la liste d'invités, l'orchestre et le buffet. Pas nécessairement dans cet ordre d'importance, d'ailleurs. Léger sourire. Guenièvre lui en voudrait, si elle mettait le buffet comme dernière priorité, alors que c'est probablement la première d'entre toutes. Par quoi désirez-vous commencer ? »