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sujet; These are dark days
MessageSujet: These are dark days   These are dark days EmptyLun 19 Oct 2015 - 5:50

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Le 17 octobre 2002

Journée d'inventaire.

Il est dans le plus petit des bunkers que se sont appropriés les Loups, celui où il range parfois ses fringues et ses papiers quand il a besoin d'un endroit plus à l'abri que la grotte de Sam et lui qu'il occupe seul désormais (seul, sans Sam, seul pour toujours). Installé sur une chaise qui a vu de meilleurs jours, un pull à la mode Weasley sur le dos (un des anciens de Bill, en témoigne la couleur d'un brun doré brillant), il trie. Il classe. Les potions qu'il possède et partage, à vrai dire, parfois avec les Loups... parfois avec Sam (partageait avec Sam, partageait). Et bien souvent avec personne. Certaines sont expirées, d'autres ont tourné, et d'autres sont tout simplement non identifiés, volées à des quidams, dans des manoirs et dans des marchés (il est tombé sur un vin d'ortie, précédemment, et une bouteille de Glamour pour cheveux ensuite). Alors il consacre son après-midi à tout reclasser, à tout identifier, baguette à la main et parchemin d'étiquetage non loin. Il a eu d'excellentes notes en Potions, il n'a pas à se plaindre, mais... bon sang, comme ce serait plus facile s'il avait un véritable potionniste comme camarade. C'est à Dorian, qu'il a pensé, par instinct; oui, franchement, en ce moment, il prendrait bien l'aide du Selwyn, qui a toujours eu une maîtrise impeccable du sujet.
Un bruit à la porte – on y frappe. La tête de Dragonfly pointe. Il bien dit à tout le monde qu'il ne voulait pas être dérangé. Sauf à une exception et il espère bien que c'est ça.

« Rook. T'as une visiteuse. Il ne lève même pas les yeux du parchemin, où il écrit soigneusement Goutte du Mort-Vivant. Je sais. » L'homme s'efface, laissant Victoria entrer dans le bunker. La porte est refermée et Davius se lève pour étreindre son amie, un sourire léger sur ses traits. Il l'a appelé, plus tôt, par le biais de son miroir – un message court, à son habitude, lui demandant simplement de venir le rejoindre « chez les Loups » sans lui spécifier ce qu'il voulait lui dire. Dragonfly l'a vraisemblablement escorté depuis une des limites du domaine, puisqu'elle n'est pas dans leur groupe. Et... elle est là. L'étreinte est courte, avant qu'il tire une chaise à la policière, restant lui-même debout. « Je vais finir par croire que tu me fuis, Vic. » Ils ne se voient pas souvent. Pas assez.
(c'est toujours toi qui fui, Davy)

Un coup de baguette et il range les potions identifiées, laisse celles sans étiquette traîner sur la table, bien que le parchemin et la plume viennent également se mettre de côté. Il finira cela plus tard. D'un sac, qu'il traîne en attendant de se trouver un nouveau manteau (ou que Vincianne lui en ramène un de France, mais vu leur dernière discussion, il ne sait pas si elle va le faire, finalement), il sort une pile de journaux et de magazines. Il feuillette les éditions pour en tirer celle qui l'intéresse. « Tu as vu ça, je suppose. » Il lui tend le journal – la une de la Gazette du Sorcier, datant déjà d'il y a un peu plus d'il y a deux jours. LA FOLIE D'UN GÉNIE DE NOTRE TEMPS, qu'elle titre, affichant du même coup le visage au sourire charmant de Keziah Campbell. Ami de l'un, époux de l'autre. Tests divers faits sur des enfants moldus et nés-moldus. Morts. Tortures. Le Département des Mystères horrifié de ces découvertes, ainsi que la CIMS. À des fins inconnues, mais néanmoins terribles. Le portrait d'un meurtrier, celui d'un génie halluciné, dont la folie dépasse celle du Maître. C'est ce que la Gazette peint, à grand renfort d'horreur et d'expériences dégoûtantes, que des témoins racontent. C'est ce qu'on veut que le peuple croit.

C'est ce que Davius Llewellyn n'achète pas. Et certainement pas Victoria Campbell.
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyMar 27 Oct 2015 - 12:05

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Elle n’aime pas venir ici. Elle n’aime pas venir ici, et il le sait. Elle n’aime pas cette forêt, où la cime des arbres cache les faibles rayons du soleil de la campagne britannique. Elle n’aime pas les bruits de ces créatures tout autour d’elle qu’elle ne parvient pas vraiment à identifier, comme autant de dangers potentiels qui pourraient s’en prendre à elle à tout moment, si bien que ses doigts restent crispés tous prêts de sa baguette. Et surtout, elle n’aime pas ce que la forêt cache en son sein, ces bunkers où ils se cachent. Une tanière où ils vivent tous reclus, tous ceux qui ont choisi la voie de la violence pure, de la vengeance aveugle. Où elle est et ne restera qu’une étrangère à cette meute assoiffée de sang. Elle n’aime pas les chuchotements sur son passage, les regards qui la dévisagent. Et elle aime encore moins le fait qu’aujourd’hui, cette curiosité mal placée, cette animosité sous-jacente ne se camoufle pas.

Alors non, elle n’aime pas venir ici. Et l’espace d’un instant, elle se dit qu’elle n’aime plus beaucoup Davius non plus pour l’y avoir convoquée. Un sentiment qui disparaîtra tout aussitôt qu’elle le verra, sans nul doute. Mais il n’empêche qu’à traverser ainsi à la suite de son guide ces couloirs hostiles, avec le goût amer de la bile qui lui remonte à sa gorge, elle serait bien tentée de le maudire sur trente-six générations. Ou pas, alors qu’elle ressent ses entrailles se tordre douloureusement à la pensée qu’il sera peut-être, lui-même, la dernière génération de sa famille. Et elle peut presque entendre, dans un coin de son esprit, la voix de Keziah, le ton joueur, un rien moqueur, peut-être. Tu ne deviendrai pas un rien paranoïaque, Vicky ? Et la dite Vicky de légèrement grimacer à cette pensée, comme une gamine prise en faute. C’est vrai que c’est s’accorder beaucoup d’importance, la plupart de ceux qui la connaissent n’ont peut-être même pas fait le lien. Mais comment pourrait-elle réagir autrement ? Comment pourrait-elle agir sereinement alors que depuis plus d’une semaine elle se nourrit à peine ? Sans parler de dormir…

Plonger dans ses pensées, Victoria ne remarque qu’ils ne sont arrivés que lorsque son guide lui fait signe d’entrer. Un instant désorienté par cette brève absence dans laquelle l’ont poussées ses réflexions, elle se voit obligée de prendre une grande inspiration avant de hocher la tête, le remercier rapidement et, enfin, se retrouver dans l’antre de Davius.

Antre, un lieu n’a que rarement aussi bien porté ce nom. Des affaires un peu partout, une obscurité étouffante. Rien de sale cependant, ou de nauséabond, mais il semblerait qu’elle l’interrompe en pleine tache. Et pour preuve, la plume et le parchemin qu’il range à son entrée, les flacons à moitié étiquetés qui trônent sur la table. Elle enregistre ces informations sans même s’en rendre compte, celles-ci et d’autres détails encore, d’un regard qui embrasse la pièce. Réflexe de flic, aurait dit Kezhia. Réflexe de survie, aurait-elle rétorqué. Même dans un endroit totalement sécuritaire, même au sein même de leur foyer – à l’époque tellement lointaine où ils en avaient encore un, bien sûr – elle avait tendance à s’assurer que l’endroit était parfaitement sauf. Et les quelques mois passés dans la clandestinité n’avaient certainement pas arranger cette méfiance latente.

Mais déjà, Victoria se concentre sur le seul autre être vivant que la pièce, alors que la porte s’est refermé derrière son guide du jour, et elle ne peut que constater qu’il a l’air usé, fatigué. Ou peut-être est-ce elle qui l’est. Peu importe, et une fois une courte étreinte échangée, elle s’installe à son invitation dans le petit réduit qui semble servir de dépôt, un sourire un instant aux lèvres. Plus crispé que réellement amusé. « On a tous nos petites occupations, que veux tu. » Ils ne se sont pas vus. Il faut dire que jusqu’à maintenant, cela fait longtemps qu’il ne l’avait pas contacté. Et qu’elle n’a pas vraiment cherché à le faire non plus. Pas le temps. Sûrement.

Mais ce ne sont que des banalités échangées. Pas de véritable état des lieux de leurs relations. Ce serait trop compliqué. Et elle pourrait jurer que Davius en aurait aussi peu envie qu’elle. Voire moins envie. Aussi ne répond-il pas, ne s’engage-t-il pas sur ce chemin de petites piques amicales qui ne les mèneraient nulle part. Nulle part où ils n’aient envie d’aller, en tout cas. Et Victoria le regarde fouiller dans un tas de vieux papiers, attendant patiemment qu’il lui explique la raison de sa venue ici. Qu’elle n’apprend que trop vite. Car elle reconnaît immédiatement la « une » de la Gazette du Sorcier qu’il vient de retirer de sa colonne de vieilleries.

L’interrogation dans ses yeux est aussitôt assombrie par un profond sentiment de rage qu’elle peine à contenir. Tous les muscles de son corps se sont crispés, ses doigts sont venus naturellement entouré le manche de sa baguette. Un instant, son souffle est si cours qu’elle se demande elle-même comment elle n’a pas encore attaqué. Détruit le journal, faire taire l’ennemi. Et l’effort pour se rappeler qu’il s’agit de Davius lui demande soudain une bonne dose d’énergie. Pour rappeler à sa conscience qu’elle ne doit pas se laisser aller à la colère. Alors elle se contente de relever vers lui un regard sombre. Fermé. Et sa voix charrie des dizaines d’iceberg lorsqu’elle lui répond. « J’ai vu. Et j’ai réduit ce torchon en poussière aussitôt. Je ne comprends pas que tu n’ais pas fais de même. » Le reproche est presque palpable. Et déjà, Victoria se lève. Fait deux pas dans la salle, le regard fuyant vers tout ce qui pourrait attirer son attention. Tout, mais pas Davius et son foutu journal.

Alors elle marche, autant que le permet l’espace réduit dans lequel elle se trouve. Marcher pour ne pas hurler. Mais il n’y a pas la place, ici. Pas la place d’extérioriser. Frustration. Alors de nouveau, elle se détourne vers Davius. Un doute. Plus fort qu’elle. « Ne me dis pas que toi, tu y crois. »

Ce serait la pire des insultes. Pire que tout. Mais non. Ce ne serait pas possible. A moins que ?...
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyLun 2 Nov 2015 - 21:39

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Le journal tendu n’est pas pris. La silhouette féminine ne bouge pas. Enfin, c’est faux. Elle bouge. Assez pour que lui le remarque. Tous ses muscles qui se crispent, de la mâchoire aux mains, aux doigts qui se serrent autour de la baguette – et lui-même qui ne peut s’empêcher de reproduire ce geste, par habitude, par protection, par réflexe. « J’ai vu. Et j’ai réduit ce torchon en poussière aussitôt. Je ne comprends pas que tu n’aies pas fais de même. »

Il n’est pas marié à Keziah (et toutes les réminiscences d’une ancienne vie, d’un feu brûlant contre son visage et de coups de fouet dans son dos, ne suffisent certainement pas à lui donner des sentiments de ce genre). Il n’a pas partagé sa vie, n’a pas d’enfant avec lui. Peut-être alors ne peut-il pas comprendre ce qui rend Victoria aussi furieuse – parce qu’elle l’est, bien au-delà des accusations portées contre son époux. Quelque chose qui est dirigé tout spécialement contre lui, qui se lit dans sa façon d’éviter son regard, de marcher nerveusement, de chercher à s’enfuir, comme une bête traquée. Il la confronte et cela ne lui plaît pas.
Qu’elle prenne son mal en patience, ma foi. Il n’a pas terminé.
Il pose le journal sur la table, à nouveau, attendant la suite évidente. Ce qui couve dans les yeux de Victoria, dans sa voix glaciale, plus froide pour uniquement cacher le feu qui menace de se déverser.

« Ne me dis pas que toi, tu y crois. » Ses yeux se plissent, jusqu’à devenir des fentes meurtrières, alors que ses lèvres s’ourlent dans un sourire de carnassier. Un sourire si faux, si acide, grotesque à en être une grimace de gargouille. Il ne peut pas se retenir, s’en empêcher. Elle le cherche : elle peut le trouver. « Mais bien sûr, voyons, je suis prêt à condamner un de mes amis sur les seules accusations faites dans le torchon qu’est devenue la Gazette du Sorcier, c’est tout à fait mon genre. Le sarcasme est lourd, presque trop, résonnant avec force dans le commentaire – qui passe de sarcastique à exaspéré dans le même moment, les accents moqueurs se faisant insultés. Par Merlin, Vic, pour qui tu me prends ? » Comment ose-t-elle penser qu’il puisse croire ce qui est écrit là-dedans ? Il connaît le doute, il connaît la paranoïa, mais il a toujours pensé qu’elle était de son côté. Qu’elle avait confiance en lui. Elle ne te fait pas confiance, Davy, tu es un loup. Elle sait que tu peux mordre. « Que ce soit vrai ou non, on s’en fout, en fait. Il n’en reste pas moins recherché pour quelque chose comme crime contre l’humanité. »

Il faut toujours qu’il fasse plus fort que les autres, ce Keziah.
Quoique là-dessus, il a été tout sauf un génie.

Le blond lui adresse un sourire, du haut du journal, puis un clin d’œil taquin, comme s’il savait qui le regardait. Comme s’il voulait leur dire que tout ceci n’était qu’une mauvaise blague. Qu’un jeu. Qu’un autre jeu. Mais personne ne rit. Personne ne s’amuse. Davius tourne le journal, face contre la table, pour ne plus voir Keziah, et retourne son attention vers Vic. « Je voulais savoir s’il avait tenté de te contacter, avant ou après sa fuite. D’une façon ou d’une autre. » Il ne dit pas tout. Pas tout de suite, dans tous les cas. Ce qu’il cache, ce n’est pas pour longtemps.
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyLun 16 Nov 2015 - 23:15

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Elle refuse. Elle refuse de le regarder. Elle ne veut pas - ne peut pas - prendre le risque de voir ce qu'il peut y avoir dans ces yeux là. Alors elle fuit, sans s'en aller. Dans ses gestes, son visage qui se tourne, ses yeux qui se posent sur rien et sur tout à la fois. Jusqu'à ce que la pression du regard de Davius devienne proprement insupportable. Tout autant que ses mots, en fait. Et elle ne sait pas ce qui l'atteint le plus. Si c'est le ton, si c'est les paroles. Si c'est cette façon de la toiser. Ou bien encore si c'est le fait d'avoir, au fond, mériter ces accusations.

Sauf que tout son corps se rebiffe à cette pensée, et ses muscles se crispent, encore. Elle n'a rien mérité. Elle n'y est pour rien. Et Keziah, son Keziah, non plus, bien sûr. Parce qu'ils ne le connaissent pas, ces imbéciles qui écrivent de telles accusations. Ils ne le connaissent pas comme elle, comme ils le connaissent, eux. Ils ne savent pas qu'il serait juste incapable de faire une chose pareil, parce qu'il est trop - trop quoi, Vicky ? Trop lâche ? - gentil, trop... Trop lui. Keziah est incapable de faire une chose pareil. Keziah vaut mieux qu'eux. Keziah ne s'abaissera jamais à leur niveau, il ne sera jamais l'un des leurs !

Mais elle n'a pas à dire ça à Davius, n'est-ce pas ? Pas à passer sa colère sur lui, à laquelle il répond par ce ton si coupant. Alors elle serre les lèvres, tait la réplique cinglante qui lui vient. Ravale un peu le fiel qui menace de lui brûler la langue, même si elle a du mal à déglutir, pour pouvoir marmonner un peu comme elle peut "Excuse-moi." Mais c'est trop tard, peut-être. Ou pas assez fort pour que Davius entende. Parce qu'il continue, comme si elle n'avait pas parler. Comme si de rien n'était. Comme si elle ne pouvait pas se saisir de sa baguette, là, maintenant, et lui faire subir les pires tortures pour ce qu'il ose dire. Surtout que lui, plus que quiconque, plus que Keziah lui-même, sait que ce n'est pas les quelques Loups présents ici qui l'arrêteraient. Ou plutôt, si, ils le feraient sans doute avant qu'elle ait réussi à sortir. Mais pas avant qu'elle n'ait pu lui infliger la douleur qu'il mérite dans son esprit fatigué en réponse au doute qu'il ose émettre.

Ce n'est pas la question.
Ce.
N'est.
Pas.
La.
Question.

Alors qu'est-ce que c'est, la question ? Qu'est-ce qui est plus important que de savoir si Keziah ne s'est pas transformé en monstre ? S'ils n'ont pas réussi - si elle n'a pas réussi ? - à détruire sa santé mentale, peut-être définitivement ? Qu'est-ce qu'il y a de plus important que ça ?!

Mais c'est Davius, Davius et ses yeux trop bleus qui fixent cette photo qu'elle refuse même d'effleurer du regard, parce qu'elle n'a pas le courage d'affronter l'accusation de son sourire. Davius et sa putain de voix, trop grave, ce ton si égal. Davius et ses mains qui cachent enfin cet article infernal, qui même sans la regarder, la toise. Et surtout, Davius qui la connaît trop bien, peut-être, toujours, ou alors qui ne fait même pas attention, pas attention à son souffle qui s'est coincé dans sa gorge alors qu'elle manque éructer des insultes, pas attention à son corps tendu dans une position de défense, pas attention à ses doigts qui se sont de nouveau refermer sur sa baguette. Pas attention à tout ça et il continue. Parce qu'au fond, c'est un peu tout ça, c'est un peu le problème et la solution à la fois, et c'est Davius, sa voix, ses yeux, son attitude désinvolte et son histoire, et sa colère, et leur histoire. Et c'est Davius qui lui parle de Keziah.

« Je voulais savoir s’il avait tenté de te contacter, avant ou après sa fuite. D’une façon ou d’une autre. »

Est-ce qu'il vient vraiment d'elle, ce rire nerveux, glaciale, qui vient de ponctuer cette phrase ? Elle a senti sa gorge vibrer, ses lèvres s'entrouvrir, mais elle ne se souvient pas avoir ri. Pourquoi aurait-elle rit, d'ailleurs ? Comme si la situation pouvait avoir quoi que ce soit de drôle. Comme si quoi que ce soit pouvait être drôle, depuis des mois.

Et pourtant. C'était bien là, ça a bien résonner, entre eux, autour d'eux. Aussi bref qu'un courant d'air qui souffle une bougie. Aussi glacial, aussi. Des nouvelles. Des nouvelles de Keziah. Des nouvelles qu'elle a essayé d'avoir, en vain. Pas de le contacter, surtout pas. Il n'a pas besoin qu'en plus de cette toute nouvelle et flamboyante image de criminel, elle vienne rappeler au bon souvenir des autorités qu'il a une femme traître à leur régime et rechercher activement. Non. Elle n'aurait même pas voulu lui parler, même si elle avait pu. Mais juste tenter de savoir. Pourquoi, comment. Pourquoi lui, maintenant, comment est-ce qu'il a pu se laisser piéger ainsi. Comment est-ce qu'il va ?

Mais rien. Rien, à part les accusations, murmurées ou plus franches que l'on retourne contre elle à défaut de l'atteindre lui - est-ce que c'est ça que tu as vécu, Keziah, pendant tout ces mois ? Ceux qui sont assez bêtes pour y croire, ou juste les biens-pensant qui prône la stupide devise de pas de fumée sans feu. Ceux-là même à qui elle enfoncerait bien sa baguette dans le fondement pour leur prouver qu'avec le bon instrument, on peut très bien enfumer quelqu'un sans lui faire ressentir la moindre chaleur. Surtout quand son regard peut être de glace.

Alors elle secoue la tête. S'efforce de retrouver son calme, ou, tout du moins, de ne pas trop laisser transparaître qu'elle est, au fond, proche d'une bonne crise de nerfs. "Non. Je penses qu'il doit être un peu occupé, en ce moment." Ou qu'il a mieux à faire. Ou qu'il ne veut pas. Ou que... Les mèches volent lentement autour de son visage alors qu'elle secoue la tête. Ponctuation de phrase, évacuation de pensées inopportunes. "Je suppose que toi non plus." Sinon il le lui aurait dit, n'est-ce pas ? C'est Keziah. C'est Davius. C'est elle. Il ne lui aurait pas fait ça.

Mais sinon, pourquoi l'aurait-il fait venir ? L'espoir fou, soudain. Qu'elle voudrait étouffer sous la colère, la frustration. Mais qui est bel et bien là. Et si lui avait eu des nouvelles ? De vrai nouvelles ?...
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyVen 8 Jan 2016 - 23:37

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Tout émane de Vic. Toute cette colère, toute cette haine, souffle à la fois brûlant et glacial, qu’il s’apprête à encaisser, à endurer. C’est à lui de le faire – parce qu’il fait exprès de générer cette colère, il la cherche, il la veut. Il a bien vu son regard et son expression, quand il a dit que les actes de Keziah n’étaient pas la question ; il est bien au-dessus de la monstruosité du monde, mais Vic ne l’est certainement pas, surtout pas quand il est question de son époux. Le rire de la brune, qui n’a rien d’amusé, se casse dans ses oreilles, en première réponse à sa question. Un doux sarcasme le suit ensuite, néanmoins satisfaisant : « Non. Je pense qu'il doit être un peu occupé, en ce moment. Je suppose que toi non plus. »

C’est là que le bât blesse.

La voix reste calme. Le regard encore plus.
Là où Davius brûle, habituellement, il est d’un froid presque encore plus tranchant. Encore plus choquant.

« Il a essayé. »

Entre eux tombe un journal. Un magazine, en fait, un Sorcière Hebdo aux couleurs criardes dont il a ouvert les pages au courrier du cœur de Miss Eris. Entre les conseils amoureux de la Burke se retrouve une lettre, qualifiée de tellement romantique et tragique. Signée d’un pseudonyme, s’adressant à un autre, à un présent et à un passé tout à la fois. À un homme qui n’a pas su voir au bon moment. Sam lui a gardé tous les magazines et tous les journaux, pendant son voyage aux Etats-Unis, et c’est uniquement maintenant qu’il a réussi à tout lire et à tout analyser. Et qu’il est tombé sur cette lettre. Bien trop tard. Et il s’en veut.

Keziah Campbell a écrit:
« Chère miss Burke,

De vos paroles avisées, je n'attends aucun réconfort. Je vous demanderai seulement, si vous l'acceptez, de vous faire la messagère d'une lettre que j'écris aujourd'hui le cœur lourd, bercé par l'espoir fou qu'elle saura parvenir à un prince sans couronne de jadis.
Voilà trois mois que les feux de Beltane te rappelèrent à mon souvenir, aimé. Trois mois depuis que tes lèvres enivrées déposèrent sur les miennes un baiser. Te rappelles-tu l'ombre du chêne et le chant du vent dans les herbes ? J'oublie, mon aimé. Le souvenir de ton sourire disparait peu à peu, remplacé par le grondement des flammes rampant vers le bûcher. La douleur ne devait durer qu'un temps avant de nous réunir enfin, pour toujours, c'est ce que tu disais, pourtant j'ai tellement mal. Un nouveau feu s'annonce, je le sais, plus terrible encore que celui de jadis et il vient pour nous dévorer. Je ne sais vers qui me tourner si ce n'est toi et ta douce étreinte qui ne m'a jamais quitté. Alors je t'attendrai, aimé, là où les morts reposent en paix, là où ils mirent en terre tes espoirs brisés, à l'heure où nous nous sommes rencontrés.

Boucles d'Or. »

Davius guette le visage de la Campbell, en attente d’une expression. D’une réponse. D’un cri, d’un hurlement. Lui hurlerait, sans aucun doute. Keziah n’a pas tenté de la rejoindre elle, il a tenté de le rejoindre lui. Et lui n’a pas été là. Il était absent. Tout ça pour une mission dont l’issue a été plus un échec qu’une réussite, tout compte fait. À quoi ça a servi ? Son ami est perdu, chassé dans tout le pays, et lui ne peut rien y faire. Ce qu’il ne donnerait pas, pour être un putain de Traceur. La voix, toujours aussi calme, froide et presque provocatrice, se fait une nouvelle fois entendre – tentant, encore, de générer il ne sait quoi chez Victoria : « Certaine, maintenant, qu’il n’a rien essayé pour te contacter ? Parce que si je l’ai raté… c’est pas impossible que tu l’aies raté toi aussi. » Les sous-entendus, les grincements, sous le froid curieux de sa voix et de ses yeux. Les excuses de Victoria, plus tôt, il les a acceptées. Lui ne s’excuse pas de ce qu’il dit sans le dire. Que Vic est faillible. Que Vic, aussi, n’a pas été là.
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyJeu 28 Jan 2016 - 10:32

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« Il a essayé. »
« Non. »

Le mot a fusé avant même qu’elle ne pense à le retenir . Plus qu’une évidence ou une affirmation. Une fin de non recevoir. Non. Ce n’est pas possible. Non. Ce n’est pas vrai. Non.. Elle ne peut pas y croire. Elle refuse d’y croire. Non !

Nul doute que s'il n'avait pas posé, ou plutôt jeté, le magazine sur la table, elle le lui aurait arraché des mains, peut-être même sans s'en apercevoir. Et elle ne met qu'une seconde pour s'en saisir, avant même de comprendre de quoi il en retourne. Mais déjà ses doigts glissent sur le papier glacé s’agrippent aux pages à peines racornies, menacent de le faire tomber. Est-ce elle qui tremble à ce point ? Elle est presque tentée une seconde de penser que non, de se croire victime d'un quelconque maléfice, sortilège ou même une potion. Mais elle n'a rien bu depuis qu'elle est arrivée et elle est seule avec Davius et…

Et plus rien. Le blanc. Les lignes ont cessé de trembler devant ses yeux. Les mots ont cessé de danser sous sa peur. Parce que son regard vient d'accrocher la signature, alors qu'elle a lu sans comprendre, qu'elle a déchiffré sans voir. Trois mots. Trois mots et le rire de Keziah qui résonne sous les moqueries de Davius. Trois mots et sa voix qui s'élève pour répondre. Trois mots et les fameuses boucles d'or qui volent autour de son visage – quand il ne les fait pas couper, et elles sont trop longues et ils en rient, et elle lui dit de remédier à cela, mais elle sent presque le contact de ces boucles sous ses doigts et - quand il lève les yeux au ciel, exaspéré ou tout du moins tentant de le faire croire.

« Non. »

Un murmure presque éteint qui s'est échappé de ses lèvres. Un murmure qu'avec un peu de chance, Davius n'a pas entendu. Parce qu'il ne lui appartient pas. Comme ce moment de faiblesse. Qu'elle voudrait cacher, même à lui. Se cacher en fait. Ne pas sentir ses jambes soudain si faibles qu'elle pourrait s'écrouler alors qu'elle ne sait pas vraiment comment elle tient encore debout – et, qu'à vrai dire, en cet instant, elle s'en moque. Ne pas avoir l'impression que ses propres yeux vont la trahir et laisser passer des torrents d'amertume, parce que les larmes qui viennent lui brûler la pupille ne seront que cela. Ne pas avoir l'impression que sa tête est vide, tellement vide qu'elle en oublie jusqu'à son prénom.

Keziah. Son Keziah. Il a eu besoin d'aide. Il a tenté de communiquer. Il a tenté de prendre contact. Et pas avec elle. Avec Davius. Pas avec elle.

Cette réalisation la saisit soudain à la gorge et une seconde, les larmes sont vraiment là. En même temps que la bile qui vient brûler son œsophage et que son cœur qui semble vouloir ressortir par ses lèvres. Appuie sur un pied, puis l'autre, prête à s'enfuir dans l'instant alors qu'elle se demande si elle ne va pas simplement rendre son déjeuner et peut être même tous ces derniers repas, et que Davius n'apprécierait certainement pas que ce soit sur ses affaires. Et puis il n'a pas besoin de le voir, de le savoir. Pas besoin d'avoir cette image-là d'elle.

Mais ça passe. Elle se fait violence, et ça passe. Même si la nausée reste présente, elle n'a plus l'impression de pouvoir rendre trippes et boyaux. Pas tout de suite, en tout cas. Pas avant d'en savoir plus. De comprendre. Tenter de comprendre. Alors elle secoue la tête. Un coup d'œil sur le magazine qui n'est plus dans sa main, et elle ne sait même pas quand elle l'a lâché en vérité. Peu importe. Et aussitôt ses yeux se détournent pour se poser de nouveau sur Davius. Elle ne veut plus voir ce texte, ces mots. Elle ne peut plus. Alors elle se rassoit, quand ses jambes menacent de vraiment la laisser tomber. Les yeux fixés sur lui.

« Certaine, maintenant, qu'il n'a rien essayé pour te contacter ? Parce que si je l'ai raté… c'est pas impossible que tu l'aies raté toi aussi. »

Signe négatif de la tête, avec une inspiration. Reflué l'accès de colère, de rage. Parce qu'elle a cherché. Tous les jours. Partout. Et que si elle a manqué le petit mot doux de son cher et tendre destiné à Davius, elle est certaine que rien ne lui était destiné. Quasi certaine. Alors elle verra pour la colère après. Elle verra pour hurler plus tard. Sur Davius. Sur Keziah, peut-être, un jour. Mais pas maintenant. Garder la tête froide. Et oublier la blessure à vif sur son cœur. Juste retour des choses, ma belle. Et ne pas écouter la voix de Keziah qu'elle sait être le pur fruit de son imagination. Juste rester concentrée.

« Non. Je l'aurai vu. » Une inspiration, difficile. Les mots ont plus de mal à passer ses lèvres, râpent sur sa langue. Garde l'amertume qu'elle contient tant bien que mal, prenant les terribles accents de l'indifférence glaciale. Elle boue intérieurement. Elle sait qu'elle ne donne pas le change à Davius. Elle espère simplement qu'il aura la délicatesse de ne pas le relever. « Qu'est-ce qu'on va en faire ? Je suppose que ce n'est plus vraiment d'actualité désormais. Mais tu peux toujours lui venir en aide. »

Elle cherchera plus tard à savoir ce que signifie exactement le texte. Elle laissera plus tard aller sa colère. Elle hurlera plus tard toute la peine qui étouffe son cœur. Quand elle sera seule. Elle pleurera aussi, peut-être. Plus tard. En attendant, elle fait face à Davius, retient les tremblements de son corps et de son esprit. Et elle aidera, bien sûr. Car si Davius l'a invité - convoqué - ce n'est pas simplement pour pouvoir la narguer. Ça aurait pu, en d'autres temps et d'autres époques. Pas maintenant. C'est qu'il a besoin d'elle, pour elle ne sait encore quoi. Pour aider Keziah. Et Morgane sait qu'elle est prête à tout pour cela.

Même si, vraisemblablement, le dit Keziah n'a pas envie qu'elle lui vienne en aide. Et sans doute pas plus envie de la revoir.
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptySam 30 Jan 2016 - 20:49

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A-t-il vu des larmes briller dans les yeux de Victoria, retenues et ravalées ? Que lit-il, dans ses gestes d'automate, celui qui repose le magazine sur la table sans même s'en rendre compte ? Dans ce corps raide qui s'assit sur la chaise, les genoux tremblants, terrassé par la colère comme par la tristesse ? Davius préférerait qu'elle hurle, en vérité, plutôt qu'elle garde le feu à l'intérieur d'elle. La voix est encore de glace, râpeuse, et il hoche la tête pour accueillir ses quelques mots : « Non. Je l'aurai vu. » Sa confiance envers Keziah est totale, ainsi que sa confiance envers elle-même. Oui, elle l'aurait vu, si Keziah avait tenté de s'adresser à elle d'une façon détournée. Ils sont mariés, ils s'aiment. Elle ne peut pas l'avoir raté.
(il est jaloux, bon sang, qu'il est jaloux – de ne plus jamais avoir ça, cette confiance, cette intimité, cette complicité, cette assurance imperturbable, cet amour, ce putain d'amour qu'il jalouse et dont le seul effleurement récent a suffi à créer le malheur)
« Qu'est-ce qu'on va en faire ? Je suppose que ce n'est plus vraiment d'actualité désormais. Mais tu peux toujours lui venir en aide. » Oui. C'est bien le but de cette rencontre. Il veut retrouver Keziah, il veut le ramener chez les insurgés, il veut le ramener à Victoria. Il veut que son ami soit là. Statue immobile, de marbre, depuis trop longtemps, l'insurgé se décide enfin à bouger, à effectuer quelques pas pensifs dans le bunker. Joue avec le bas des manches du pull. « Je suis allé... ... Il secoue la tête. Keziah n'était pas . Pas où les corps de son épouse et de ses filles reposent, carcasses récupérées en morceaux par Stanley, qui s'est occupé de leur donner une sépulture à peine décente. À peine, car il ne restait d'elles que des cendres et des souvenirs. À peine, parce que les Mangemorts ne voulaient pas croire que la famille d'un ennemi méritait un tel honneur. J'ai dit à mes contacts de me garder au courant, s'ils le voyaient, mais y'en a qui sont pas bien jouasses à l'idée de laisser passer un tueur d'enfants. » Il ne rit pas. Ne sourit pas. Ne blague pas non plus. Davius ne croit pas aux accusations portées contre son ami, convaincu que le gouvernement a simplement trouvé en lui une cible idéale à qui faire porter cet hideux chapeau : ce n'est cela dit pas le cas de tout le monde. Et même les criminels les plus notoires, les plus bas, la crasse la plus immonde du Royaume-Uni, aime à se gargariser de principes et de limites. Compréhensible.

« Penses-tu qu'il va quitter le pays ? Par les moyens moldus, par exemple ? Aller rejoindre ses forains ? Y'aurait pas un endroit où on pourrait le chercher, qui vous est cher ? Ou à Louise ? » Il ne sait pas où chercher. Il ne sait certainement plus où chercher. Il est son ami, mais certaines clés ont toujours échappé à sa compréhension. Et il serait si facile de le perdre, tout ça parce qu'il n'a pas répondu à son appel à l'aide. Tout ça parce qu'il était ailleurs. Davius s'avance et va se placer devant Victoria, se penchant pour appuyer ses mains sur les bras de la chaise. Le visage à la hauteur de celui de la brune, proche. « Sinon, Vic, j'ai juste à attendre de le croiser dans la forêt. J'peux aussi interroger quelques Rafleurs, pour savoir s'ils ont vu sa jolie tête blonde encore attachée au reste de son corps, ou s'ils ont gardé quelques morceaux en souvenir. » Il la provoque. Il la cherche. Il peut sentir la colère émaner d'elle, se réverbérer contre son visage. Ses traits sont farouches, durs. Il se rapproche encore, tout à fait dans la bulle de sa camarade, envahissant son espace sans gêne, jusque à ce que leurs visages s'effleurent. Et pourtant, où le ton était presque bravache, il est maintenant plus doux : « J'ai besoin de toi. Et lui aussi. »
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MessageSujet: Re: These are dark days   These are dark days EmptyDim 21 Fév 2016 - 14:02

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En temps normal, en ce temps lointain où les choses allaient encore à peu près bien, ou presque, Vitoria aurait levé sa main et l'aurait posé sur le bras de Davius. Non. Elle se serait sans doute levé et l'aurait pris dans ses bras. Une étreinte amicale, un soutien. L'aider à supporter un peu la douleur qu'elle sait bien pourtant insupportable. Etre là, à défaut de pouvoir faire quoi que ce soit pour ce qu'il y a là-bas. Parce que c'est trop tard, pour elles – et des fois Victoria pense que c'est trop tard pour lui aussi.

En temps normal, nul doute qu'elle aurait agis, réconfort peut être vain, mais elle aurait au moins essayé. Sauf qu'on n'est pas en temps normal. Et que Victoria n'a pas vraiment l'esprit à penser à ça. Pas vraiment l'esprit à penser à Davius parce qu'il y a Keziah et que tout disparaît dans les brumes de son esprit. Et ça se bouscule, sans lien et sans attache, file entre ses doigts sans qu'elle ne parvienne à rien saisir.  

Les informations. Trier les informations par ordre logique, par ordre d'importance. Se souvenir de ce qu'elle a appris, dans sa formation, agir avec sang-froid sans surtout se laisser déborder. Elle a fait cela des années, réfléchir et analyser et se concentrer. Et trouver sa proie, pour l'arrêter. Enquêter n'est pas son métier à la base, bien sûr, elle est tireuse d'élite avant tout et ne se sent véritablement à l'aise que dans l'action. Mais il y a des fois où elle n'a pas vraiment eu le choix, où retrouver un fugitif a été une priorité et dans ces cas-là, chaque indice, chaque parcelle de donnée peut avoir son importance.

« Penses-tu qu'il va le quitter le pays ? Par les moyens moldus, par exemple ? Aller  rejoindre ses forains ? Y'aurait-il un endroit où on pourrait le chercher, qui vous est cher ? Où à Louise ? »
« Je ne sais pas… »

Il faut qu'elle le fasse, elle le sait, elle sait le faire, elle sait comment on fait. Il faut qu'elle le fasse et qu'elle arrive à trier ses pensées et ses idées. Réfléchir. Arrêter de s'éparpiller et se concentrer. Faire abstraction de tout ce qui tord ses entrailles en tous sens pour ne voir que la réflexion, la logique. Les propos de Davius devraient l'aider, il pose les bonnes questions  Et elle sait qu'elle doit s'y raccrocher et l'écouter et se concentrer, Vic, par Morgane !

Louise. Louise, il l'a certainement mit en sécurité. Elle va bien, Victoria en est sûre, elle peut le sentir au fond d'elle-même. Il l'a mise en sécurité. Elle ne sait pas ce qui a bien pu exactement se passer. Elle ne sait pas s'il l'a vu venir, le piège qui s'est refermé sur lui-même, s'il s'est douté de quelque chose de plus grave que ce qu'elle lui a fait subir avec sa fuite. Mais elle sait qu'il a mis Louise à l'abri. Pas en Irlande, parce que c'est trop évident, parce que c'est couru d'avance et que c'est le premier endroit où ils la chercheront. Mais Louise est en sécurité. Elle ne sait simplement pas où.

Et les idées se mélangent un peu plus alors qu'elle tente de trouver des réponses. Parce que chaque lieu auquel elle peut penser lui paraît toujours plus évident. Parce que chaque lieu que son esprit évoque lui semble être comme un lumos maxima dans l'obscurité la plus totale et qu'elle sait que Keziah n'aurait pas prit le risque d'y laisser sa fille. Leur fille.

Mais alors quoi ? Est-ce qu'elle connaît si peu cet homme qu'elle est incapable de déduire ce qu'il a fait ? N'aurait-elle vécu toute ces années qu'avec un inconnu ?

Elle ne sait pas. Elle ne sait pas, et elle sent sa le nœud dans sa gorge se resserrer à chaque seconde qui passe. A chaque mot de Davius, tous plus accusateur les uns que les autres. A chaque centimètre qui le sépare de lui qu'il semble engloutir à une vitesse folle, un rapace se rapprochant toujours plus de sa proie. Ou un loup, en l’occurrence. Si bien qu'il n'est plus qu'à quelques centimètres d'elle, beaucoup trop proche pour son souffle qui s'échoue dans sa trachée avant d'avoir atteint ses lèvres. Elle pourrait le repousser, oui, pour retrouver son espace vital et pour toutes les horreurs qu'il dit. Elle pourrait parce qu'il est plus qu'à portée de main, penchait sur elle, trop proche, beaucoup trop. Mais est-ce qu'elle pourrait vraiment ? Cela voudrait dire relâcher les bords du siège sur lequel ses jambes l'ont lâchés, qu'elle n'a même pas confiance de serrer tellement fort que ses jointures en blanchissent. Cela voudrait dire perdre cet appui dont elle ne sait pas avoir besoin, et prendre le risque de s'écrouler, là, directement devant lui. A ses pieds. A croire que son instinct de survie est encore opérationnel, à défaut d'être le cas pour son cerveau.

Et pourtant, ce n'est pas la pression que lui met Davius qui finissent d'achever ce fragile contrôle qu'elle pensait encore avoir sur elle-même. Ce n'est pas sa provocation, ces mots si durs qu'elle a l'impression qu'ils pourraient trancher dans sa chaire aussi bien que dans son cœur. Elle résiste à la pression. Pas au reste.

« J'ai besoin de toi. Et lui aussi. »

Et c'est un signal pour son esprit malmené. Une vanne qui s'ouvre.

« Parce que tu crois que je n'en ai pas assez fait comme ça ?!! »

En temps normal, elle n'aurait pas reconnu sa voix. Cette voix aigrelette, beaucoup trop aigüe qui n'arrive même pas à véritablement crier. Ce cri presque animal qui est venu lui déchirer la poitrine aussi bien que la gorge. En temps normal, elle se serait même moquée d'elle-même. Mais, une fois de plus, il n'y a  plus de temps normal. Il n'y a plus que cette rage contre elle même et contre Davius et même contre Keziah qui ne lui fait plus assez confiance. Il n'y a plus que cette peur pour Louise et même pour Keziah et pour Davius à qui il peut arriver n'importe quoi n'importe quand sans qu'elle ne puisse rien y faire. Et pour Keziah surtout qui est peut-être déjà mort et le seil espoir qu'elle a c'est que personne ne s'en est vanté nul part de sa mort et que c'est peut être un bon signe puisqu'avec la publicité qu'ils lui ont fait ils l'auraient dit s'ils l'avaient tué. Et c'est le seul espoir et il est bien maigre, maintenant, face à la panique qui rend les battements de son cœur trop rapides et désordonnés, qui menace de la submergée à chaque seconde. Une vanne qui cède.

Il n'y a plus de temps normal, plus rien. Plus les rires de Keziah et les taquineries gentilles de Davius. De Keziah, elle n'a plus que ce silence assourdissant. Et de Davius, juste des piques méchantes censées la faire réagir. Et sa voix à elle, dont elle n'a conscience qu'elle s'élève entre eux juste parce que sa gorge la brûle un peu plus à chaque mot qui passe. « Pourquoi est-ce que tu crois qu'on en est là, maintenant ? Pourquoi tu crois qu'il est obligé de fuir devant toutes les baguettes de Grande-Bretagne ?! Tu crois vraiment qu'il aurait été en danger, si je n'avais pas éprouvé le besoin d'aller jouer les héros ?! Et tout ça pour quoi, hein ?! Tenter de sauver quelques vies et risquer de les perdre ! Tout ça pour quoi, Dav' ?! »

Elle veut s'écarter, se lever. Les mots s'écoulent et la brûlent et l'air frais des lieux ne peut même pas l'appaiser. Parce qu'elle n'en avale pas assez, peut être. Parce qu'elle a l'impression de suffoquer. Et Davius est là, tout prêt, trop prêt pour lui permettre de se relever. Alors il faut l'éloigner. Et c'est ce qu'elle tente de faire, la main sur son torse. Le pousser, le repousser. Ce qui serait peut être plus aisé si la main qu'elle a posé sur sa poitrine ne s'accrochait pas avec autant de force au tissus de son haut.  

Et puis soudain, tout s'arrête. Parce qu'elle ne peut plus parler et que sa voix se brise, tout comme les barrières qui retenait ce flot trop violent d'émotions l'ont fait plus tôt. Et il ne reste dans la pièce plus que son souffle trop rapide et des sanglots qu'elle retient encore, elle ne sait trop comment. Et puis, la voix qui s'élève, si faible qu'elle n'est même pas certaine que Davius puisse l'entendre.

« Qu'est-ce que je peux faire ?... »
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