Ne serait-ce pas un sourire idiot sur les lèvres de Saevus Lancaster ?
Saevus, l’insensible, passait en ce jour les portes de sa demeure avec un étirement inhabituel sur le coin des lèvres. Il apparaissait tellement plus jeune. Il marchait dans les rues et son pas léger et sautillant lui donnait l’impression d’être proche de l’envol. Devant un tel entrain, il n’aurait pas été étonnant de le voir exécuter quelques petits pas de danse !
Imaginer Saevus Lancaster danser était aussi incongrue que de rêver d’un mariage entre un scroutt à pédales et d’une vélane. Pourtant le bonheur apparent de l’ancien Serdaigle n’avait rien du fantasme. La veille, Saevus avait appris une nouvelle qui était la cause de toute cette joie : Lyra attendait leur premier enfant.
L’épouse avait attendu qu’ils montassent se coucher pour annoncer ce qu’elle savait déjà depuis les premières heures du matin. Durant l’après-midi, elle avait acheté de petits chaussons blancs et les avait déposés sur le lit au niveau de l’oreiller de son mari.
Saevus entra le premier dans la chambre, exposant à sa femme le dernier projet de loi sur la réorganisation du bureau des aurors que les membres du gouvernement lui avaient demandé d’analyser. «A croire qu’ils marchent sur la tête, jamais les aurors n’accepteront de travailler avec...» Lancaster ne finit jamais cette phrase. Les mots lui étaient restés coincés dans la gorge au moment même où ses yeux s’étaient posés sur les deux petites chaussons blancs. Ces derniers trônaient avec grâce sur l’énorme coussin azur comme de minuscules perles perdus dans un écrin bien trop grand.
Saevus se tourna vers sa compagne :
«Tu es..»
Lyra acquiesça de la tête en souriant légèrement.
«Sûre ?»
Jamais le caustique Saevus ne manqua autant de mots pour s’exprimer. Lyra s’approcha de lui et lui déposa un tendre baiser sur les lèvres.
«Tu es heureux mon Amour ?»
Saevus reste un instant silencieux. Il avait du mal à assimiler ce qu’il venait d’apprendre. Un petit être était en train de grandir dans le ventre de sa compagne. Il allait avoir un enfant. Dans quelques mois, il serait père. Papa ? Lui, papa ?
Un sourire s’invita discrètement sur le visage de Saevus Lancaster. Il prit ses quartiers et resta durant toute la soirée. Il n’avait pas décampé le lendemain alors que Saevus se dirigeait vers la maison de son parrain, Timéus Grant.
De toutes les personnes que Saevus connaissait, il était le seul - mise à part Diogène - avec qui le futur père avait envie de partager cette incroyable nouvelle.
Le sorcier arriva bientôt devant la petite maison s’occupait son parrain à Londres. Saevus avait toujours eu toujours de sympathie pour cette vieille demeure. Elle avait été son refuge quand il n’avait décidé de couper toute relation avec son frère jumeau Victor. Le jeune Lancaster n’avait alors que dix sept ans. Il venait de quitter Poudlard et de perdre son père qui avait toujours été un modèle pour lui. Il n’avait nulle part où aller et presque pas d’argent (Victor, en tant qu’aîné s’était emparé d’une grande partie du patrimoine de la famille). Timeus Grant l’avait accueillit les bras ouverts, lui offrant le gît et le couvert le temps qu’il se trouvât une situation.
Saevus monta les quelques escaliers devant la porte d’entrée et frappa une première fois. Il eut aucune réponse. Il réitéra l’opération et fronça légèrement les sourcils. Le secrétaire de la directrice de la justice connaissait bien les habitudes et emplois de temps de Grant. Il savait que l’auror ne travaillait pas aujourd’hui et qu’il n’était pas du genre à sortir de son trou facilement. Lancaster sortit sa baguette après un léger coup d’oeil aux alentours et prononça le mot de passe d’urgence. La porte s’ouvrit aussitôt et le laissa passer.
L’intérieur de la demeure était calme presque morbide comme si quelque chose d’étrange et de sinistre était sur le point de se produire. Saevus fit quelques pas et appeler Timéus à plusieurs reprises sans obtenir de réponses. Un simple sort de perception lui permit de confirmer la présence de Grant entre ces murs. Ce dernier était à l’étage, dans sa chambre. Lancaster allait poser le pied sur la première marche de l'escalier quand son regard fut attiré par un amas de parchemins posés sur la table du salon près de la cheminée. Saevus avait la curieuse impression que Timéus avait hésité à brûler les documents. Il entra dans la pièce et jeta un rapide coup d’oeil aux parchemins.
Il s’agissait d’une série de lettres, toutes écrites de la main de Grant. Des lettres d’amours enflammées adressées à une certaine Lizzie... Timéus était épris ?!
Lancaster entendit des pas provenant de l’escalier et se tourna vers la porte du salon pour croiser le regard de son parrain. L’espace d’un instant, il avait oublié la raison de sa visite. Ses yeux s’étaient posés un instant sur la valise que tenait Timéus dans les mains.
«Tu fais quoi Tim ?»