| Quand Lorcàn ne s’était pas montré pour exécuter la nouvelle tâche que leur avait donné leur père (réaliser une baguette à partir du bois qu’ils maîtrisaient le moins), Ardal avait immédiatement su qu’il lui faudrait une pause à un moment ou à un autre. Il avait tenu quelques temps, procédant avant de s’y mettre à quelques exercices respiratoires pour se vider l’esprit. Le jus de citrouille avait permis de prolonger leurs effets bénéfiques quelques temps, jusqu’à ce que ce ne soit plus efficace. Il avait donc fini par émerger de l’arrière-boutique, des poches sous les yeux et son père n’avait fait aucun commentaire. L’absence de son fils devait tout autant lui peser. Remontant les rues, Ardal se retrouva rapidement au Marché d’Hiver. Il aimait cet endroit, qui avait des allures de fête et de normalité qui avaient à la fois un goût amer et quelque chose d’étrangement réconfortant. Il pouvait tenter d’oublier tous les problèmes pendant quelques temps et c’était tout ce qu’il demandait pour l’instant. Il retournerait travailler après.
Aussi déambulait-il à l’heure du déjeuner, un peu perdu quand une barquette de nourriture à l’odeur absolument alléchante surgit devant ses yeux. « Bonjour, Ardal. Comment vas-tu ? Tu me sembles un peu perdu. Tu viens faire quoi dans ce lieu ? » Et une ravissante apparition l’accompagnait. Un sourire naquit sur les lèvres du jeune homme en reconnaissant Rosalinde. Un visage familier n’était pas de trop en ce moment et surtout le sien. Rosalinde ! Quelle charmante surprise ! Il relégua ses sombres pensées au fond de son esprit. Profiter du moment présent, c’était pour ça qu’il était venu. Je suis en plein exercice de style sur bois, il fallait juste que j’arrive à en sortir. Il glissa sa main sous la seconde barquette de nourriture avant que celle-ci ne s’écrase au sol : Vous tombez toutes les deux plus que bien. Il reposa la barquette en place, demandant stupidement : C’est pour moi ? Ou tu attends quelqu’un ? Après tout, si elle était là c’était qu’elle était sans doute de repos et peut-être voyait-elle quelqu’un … Il scruta la foule alentour, à la recherche d’un potentiel rendez-vous qui pouvait arriver…et croisa le regard d’une demoiselle qu’il n’avait pas franchement envie de voir. Décidant de passer outre, il détourna les yeux pour revenir à Rosalinde qu’il taquina : Je ne voudrais pas faire capoter un rendez-vous galant que tu aurais grandement mérité. Cela faisait quelques temps qu’ils ne s’étaient pas vus après tout, peut-être y avait-il eu du nouveau pour la jeune femme. Et elle aussi était une jeune femme de Sang Pur, peut-être avait-elle eu des propositions, voire un mariage arrangé. Comme celui auquel il avait échappé de peu, mais dont les fantômes le poursuivaient de temps en temps. |
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