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sujet; Œil pour œil [Tiago]
MessageSujet: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyMer 22 Juin 2016 - 20:50

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Une pluie battante s'abattait sur la campagne londonienne. Les caniveaux avaient pris des allures de torrents dans les villages, et les champs celles de barbotières boueuses. Les rares courageux osant encore braver le mauvais temps courraient rapidement se mettre à l'abri, le manteau passé par-dessus la tête. Non loin de là, une silhouette encapuchonnée se tenait pourtant immobile à la lisière d'une forêt, comme si les trombes d'eau tombant du ciel ne la concernait en rien. Elle était apparue d'entre les arbres et s'était arrêtée là. Cela faisait déjà bien cinq minutes qu'elle n'avait pas bougé. Son attention semblait portée droit devant elle, sur la vieille taverne de poutres et de torchis qui s'élevait une centaine de mètres plus loin, le long d'une petite route défoncée dont les riverains avaient depuis longtemps oublié l'existence. Et pour cause ; l'endroit était entouré de tellement de sortilèges repousse-moldus que même la silhouette postée près des arbres pouvait sentir le frémissement que la barrière magique faisait planer autour d'elle.

Il était encore temps de faire demi-tour. Tant qu'il n'avait pas encore mis les pieds dans le périmètre de la taverne, Keziah pouvait toujours tourner les talons et s'en retourner comme il était venu, sans un regard en arrière. Il pouvait encore laisser derrière lui les raisons qui l'avaient amené ici. Personne ne saurait et il n'aurait jamais à vivre avec les conséquences de ce qu'il s'apprêtait à déclencher. Mais son visage s'assombrit brusquement à cette pensée et la voix de Gwydion résonna entre les parois de son crâne comme si le mage noir s'était tenu à ses côtés. Moi, Keziah Campbell, je ne crains pas mon propre pouvoir. Un feulement de bête sauvage roula alors dans sa gorge et une soudaine bouffée de haine lui brûla les entrailles. Sa vision se troubla et il vit rouge tout d'un coup, son corps trouvant enfin la force d'amorcer un mouvement vers l'avant. Il fut toutefois bien vite interrompu. Un craquement sonore retentit au même moment dans son dos et lui fit faire volte-face. Si Keziah avait senti son cœur manquer un battement dans sa poitrine, bizarrement il se détendit aussitôt quand il vit le grand loup gris qui venait d'apparaître. Loin de trouver la situation inquiétante ou ne serait-ce qu'incongrue, il alla même jusqu'à s'adresser à l'animal.

_ Tu es encore plus têtue que moi, ma parole ! Je t'ai dis qu'il n'y avait pas d'inquiétude à avoir. Rentre, s'il te plaît... souffla-t-il finalement, d'une voix lasse mais tendre.

Il avait prononcé sa dernière phrase dans un murmure quasiment, pourtant la louve l'entendit très bien. Elle ne fit pas demi-tour pour autant cela dit, mais s’aplatit par terre, venant caler son museau entre ses pattes avant pour pouvoir lui jeter un regard par en-dessous qui aurait pu faire fondre le plus dur des cœurs de pierre. Quand elle se mit à gémir doucement, Keziah n'y tint plus. Il secoua la tête de droite à gauche avant de lever les mains en signe de reddition.

_ C'est bon, tu as gagné ! J'abandonne. Mais quoi qu'il se passe, no funny business, got it ?

La louve se remit debout d'un seul bond joyeux et vint lui lécher le bout des doigts. Son geste lui arracha un sourire et il lui grattouilla alors le haut du crâne. Keziah savait bien qu'il s'était fait avoir comme un bleu. Il avait cédé beaucoup trop vite et la pseudo condition qu'il avait posé à la fin n'en était pas vraiment une. Si les choses dégénéraient lors de sa rencontre avec Le Bâtard, il savait pertinemment que rien n'empêcherait son animagus de mère de s'en mêler. Elle aurait arraché les mollets de dix hommes avant de permettre que qui que ce soit ne lui fasse le moindre mal devant elle.
Quand il pénétra dans la taverne, Keziah dut bien reconnaître qu'il y avait quelque-chose de rassurant dans la présence de Leanne à ses côtés. Le Chien qui Hurle abritait la lie de toute l'Angleterre sorcière. Petites frappes sans scrupules, escrocs patentés, contrebandiers, mercenaires et assassins au sang froid avaient fait de ces murs défraîchis leur repère de prédilection. Les Mangemorts ne fréquentaient pas l'établissement, mais les hommes et les femmes qui tournèrent la tête vers lui quand il fit son entrée n'avaient rien d'enfants de cœur eux non plus. Keziah ne cilla pas pour autant. Il avait eu sa chance de faire demi-tour et il l'avait balayé comme on se débarrasse d'un vieux torchon. Il n'y avait pas l'ombre d'un doute dans sa démarche quand il s'avança jusqu'au comptoir derrière lequel s'affairait un vieil homme à la soixantaine bien avancée. Malgré le fait qu'il ait gardé sa capuche et qu'un foulard noir dissimulait le bas de son visage, les autres clients étaient rapidement retournés à leur besogne quand ils avaient vu le loup inhabituellement massif qui marchait dans son sillage. Il ne devait pas être le seul ici cependant à chérir son anonymat car le barman ne s'en offusqua pas une seconde quand il tourna la tête vers lui.

_ Qu'est'c-que j'vous sers ?
_ Je cherche Le Bâtard.
_ Et moi la reine d'Angleterre. On f'rait un beau couple vous trouvez pas ?
_ C'est sérieux.
_ Écoutez, c'pas une agence matrimoniale ici. Vous consommez ou vous vous tirez.

Il avait prévu ce genre de réaction. Il se doutait bien que le premier clampin venu ne pouvait pas débarquer ici la bouche en cœur et espérer obtenir satisfaction d'un simple claquement de doigts ou parce qu'il avait demandé poliment. Sa main glissa alors dans la poche de son long manteau gris et il en tira une carte à jouer qu'il posa face contre table sur le comptoir, laissant apparaître un soleil jaune se découpant sur un fond d'un rouge pourpre. Le barman y jeta d'abord un œil distrait, par réflexe, mais son expression changea rapidement. Il eut d'abord l'air surpris, puis une grimace contrariée prit très vite la place de la brève lueur de crainte qui s'était allumée dans la niche de son regard. Oh oui, Amos Fortescue, connaissait bien les forains ! Il avait l'habitude des truands en tout genre mais, ceux-là, il fallait bien reconnaître qu'ils étaient d'une espèce à part, pour sûr ! Toujours en bande et plus fêlés encore que les vieux chaudrons de sa grand-mère ! La dernière fois qu'ils étaient passés par ici, il y a déjà plusieurs années de ça, un de ces dégénérés avait arraché la langue d'un type avec ses dents. De vrais barbares. Ils ne respectaient rien. Keziah sentit un léger sourire étirer ses lèvres. Il pouvait presque suivre les pensées du barman qui s'était mis à nettoyer ses verres avec un peu plus de dureté qu'il n'était nécessaire.

_ Il est pas là. La table du fond, là-bas, près des escaliers, c'est là qu'il s'assoit. Vous pouvez toujours l'attendre mais j'vous promets rien. Et j'vous préviens, ajouta-t-il précipitamment, j'veux pas d'embrouilles moi, hein, c'est un commerce ici pas une estrade de duel !
_ Je ne suis pas venu pour ça, vous avez ma parole. L'autre émit un grognement. Il n'avait pas l'air convaincu par les promesses d'un saltimbanque mais il n'avait pas vraiment d'autre choix que de faire avec. Mettez-moi deux verres de ce qu'il a l'habitude de boire.

Et se disant, il posa quelques pièces sur le comptoir qui suffiraient largement à payer n’importe lequel des alcools frelatés proposés par la maison. Quand l'homme l'eut servi, il se dirigea alors vers la table qu'il lui avait indiqué. Il s'assit de manière à avoir une vue d'ensemble sur les lieux et regarda Leanne se poster près de lui.
Que le spectacle commence, pensa-t-il.
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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptySam 3 Sep 2016 - 21:46

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Tiago avait eu une journée maussade et contrariante. Il n'aimait pas rencontrer ses fournisseurs des docks de Londres, tout simplement parce que ces petits cons se croyaient tout permis en bouffant à tous les rateliers. Vendre à un tueur, à un mangemort où à Abraham Lincoln ne faisait pas la moindre différence pour cette bande de vautours en manque de pouvoir. Piètres sorciers, mauvais combattants, hommes sans opinions, sans convictions, sans talents particuliers sinon celui de la rapine et du mensonge.

Parmi les voleurs et la lie de l'humanité, il demeurait tout de même une pyramide et les receleurs étaient les cafards relégués tout en bas, à côté des macs, des informateurs à la sauvette et des toxicos en manque de cam. Tiago lui occupait le haut du plateau et regardait le reste de cette joyeuse bande colorée avec le mépris qu'ont tous les prédateurs. Mais même les prédateurs devaient parfois fricotter avec les rats.

Lorsqu'il poussa la porte du Chien qui hurle, il jeta un regard au barman et ce dernier eut un froncement de sourcils particuliers, auquel Tiago répondit en plissant les yeux, ses iris perçantes contenant une question silencieuse. Le patron astiqua un verre et eut un infime geste de la tête vers la table qu'il réservait toujours d'office au tueur à gages. Suivant son regard, Tiago observa l'homme qui s'était assis là et le détailla. Blond...plus âgé que lui mais jeune d'apparence...pas le physique d'un combattant et encore moins d'un type habitué de ce genre de bouges. Probablement pas un client venu non plus pour quémander ses services, il avait l'air trop...assuré. Trop peu nerveux. En outre, le gérant n'aurait pas eu cette expression si le business avait été au beau fixe et les choses, dans leur ordre habituel. Ce dernier eut d'ailleurs un geste surpenant : il forma un cercle a l'aide de son pouce et de son index, puis ouvrit la main en entier, ses doigts se dépliant vers l'extérieur comme les pétales d'une fleur ou les rayons d'un...soleil.

Los gitanos del sol

Leur réputation n'était inconnue que des abrutis notoires et des séniles du troisième âge. Aussi Tiago s'approcha-t-il lentement, de l'air de celui qui ne compte pas se presser pour savoir ce qui amène son interlocuteur. En silence, il alla s'asseoir non pas en face, mais à côté de l'inconnu, restant ainsi fidèle à sa règle de toujours demeurer dos au mur. Olliver lui, alla renifler la louve et s'assit en face d'elle, stoïque. Patient. En alerte. Il était après tout chez lui.

-Tu devrais apprendre à poser tes fesses ailleurs que dans le fauteuil de quelqu'un d'autre, gitano.

Voyant l'air détendu de son compagnon forcé de soirée, il prévint:

-Et vu que tu as typiquement la tête d'un gars qui a la langue bien pendue, je te conseille d'éviter avec moi, le patron fera pas un geste si je décide de te la clouer à la tête, loup de compagnie ou pas. Alors parles : qu'est ce qui t'amène? t'as intérêt à avoir une très bonne raison de me déranger, surtout de cette manière.


Tiago claqua des doigts et le patron envoya voler dans sa direction une pinte de bière, qu'il attrapa avec un clin d'oeil de remerciement avant de sortir un livre défraichi qu'il se mit à lire, marque suprême de désintérêt, que l'autre ne manquerait pas de décrypter en tant que tel. Bel Ami. Un roman français du XIXe siècle. Assez bon, mais pas vraiment sa tasse de thé jusque là. Il n'en était qu'à la 50e page et avait déjà envie de défenestrer le personnage principal.

-Allez, craches là ta valda. Et magnes toi, mon temps est plus précieux que le tiens.


Gitan du soleil ou pas, Tiago n'avait pas l'intention de lui montrer la moindre marque de respect. Les clans, les bandes, les familles, les dynasties, formaient un réseau auquel il était parfaitement étranger et pour lesquels il n'éprouvait que dédain et colère. On crachait toujours sur ce que l'on ne connaissait pas. Il avait en horreur leur mentalité clanique et leur facheuse manie de toujours se comporter comme des meutes de chiens enragés. Il aimait mieux les enragés solitaires.

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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyDim 4 Sep 2016 - 21:13

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Près de deux heures s'écoulèrent, pendant lesquelles Keziah resta sagement à sa place, se contentant de réajuster parfois sa position ou de flatter distraitement le crâne de la louve assise à ses côtés. Pas une fois ses gestes ne trahirent la moindre impatience. Il n'était pas pressé, et cela ne l'avait jamais dérangé de faire le pied de grue. Si sa présence avait pu susciter une certaine curiosité parmi la lie de la taverne, les clients du Chien qui Hurle avaient fini par se désintéresser de lui passé un moment. Keziah avait toutefois noté un fait intéressant. Personne n'était venu lui parler ou ne serait-ce que s’asseoir près de lui. Tous semblaient garder leurs distances, comme s'ils ne souhaitaient pas être pris à traîner dans les parages au moment où le Bâtard ferait son apparition et trouverait le curieux personnage osant siéger à sa table sans y avoir été invité. Ce constat lui avait tiré un sourire alors qu'il réalisait qu'en l'absence du maître des lieux il venait plus ou moins de s'octroyer sa place. Au moins il savait maintenant qui tenait lieu d'alpha entre ces murs, et tant mieux car c'était lui qu'il était venu voir !

La porte de la taverne s'ouvrit dans un grincement plaintif, laissant entrer un courant-d'air humide alors que la silhouette imposante d'un homme apparaissait dans l’entrebâillement. Quelques têtes se levèrent pour aviser le nouveau venu, et à la manière dont elles pivotèrent rapidement vers lui avant de repiquer dans leur chope, Keziah comprit que l'attente venait de toucher à sa fin. Il se redressa alors dans sa chaise et sentit Leanne en faire de même. Il n'était pas anxieux, mais au regard sombre que l'homme fit glisser sur lui avant de venir prendre place à ses côtés, il prit conscience d'une chose. Le Bâtard ne l'aimait pas. Il n'aimait sûrement pas grand monde cela dit – il avait quasiment une pancarte défense d'entrer coller sur le front – mais il n'y avait pas que cela. Ce n'était pas seulement qu'il ait pris ses aises à sa table ou que sa présence ne coïncidait pas avec son emploi du temps. Il y avait autre-chose. Et cet autre-chose ne tarda pas à s'éclairer dès les premières paroles du mercenaire. Gitano. Keziah retira le foulard lui masquant le bas du visage et haussa alors innocemment les épaules, l'air de dire oopsie, même s'il était évident qu'il ne trouvait rien à se reprocher.

_ Et vu que tu as typiquement la tête d'un gars qui a la langue bien pendue, je te conseille d'éviter avec moi, le patron fera pas un geste si je décide de te la clouer à la tête, loup de compagnie ou pas.
_ Ce n'est pas une louve, glissa-t-il presque machinalement, sans forcément chercher à interrompre son interlocuteur ni à rentrer plus avant dans les détails. Il venait de lui dire d'éviter de jacasser à tort et à travers après tout, non ?
_ Alors parles : qu'est ce qui t'amène? t'as intérêt à avoir une très bonne raison de me déranger, surtout de cette manière.

Il avait beau poser la question, la réponse ne donnait pas l'impression de l'intéresser autant qu'il le disait. Il avait à peine refermé la bouche qu'il se tournait en effet déjà vers le barman pour commander à boire, ignorant avec superbe le verre que Keziah avait mis de côté pour lui. Loin de s'en offusquer, le blondin se sentit sourire. Il aurait du le voir venir. Considérant la branche dans laquelle le Bâtard officiait, la paranoïa semblait un trait de caractère évident, si ce n'est vital. Il fut plus étonné par l'ouvrage de Maupassant que le mercenaire sortit et se mit à feuilleter. Bien... S'il voulait jouer les difficiles, cela ne le dérangeait pas. Keziah se laissa alors à nouveau aller contre le dossier de sa chaise jusqu'à ce le Bâtard s'impatiente de son silence.

_ Allez, crache là ta valda. Et magnes toi, mon temps est plus précieux que le tiens.
_ C'est simple, je voudrais vous engager pour un contrat, lâcha-t-il de but en blanc avant de lui décocher son plus beau sourire.

Le Bâtard pouvait se rassurer ; Keziah n'avait pas l'intention d'y aller par quatre chemins. Il sentit une interrogation pourtant, dans le froncement de sourcils que l'homme releva soudain vers lui. Pourquoi diable un forain viendrait-il faire appel à ses services quand il avait toute une famille de malfrats derrière lui pour se charger des basses besognes ? Ces gens là n'étaient pas connus pour déléguer. On préférait laver le linge sal en famille chez eux. Keziah anticipa sa réaction et posa alors la carte du Thousand Splendid Suns sur la table.

_ Je n'ai utilisé ceci que pour obtenir plus rapidement ce que je voulais en arrivant ici. Ce n'est probablement pas très fair-play, mais il faut reconnaître que c'est efficace, plaisanta-t-il avec un petit rire. Ma demande n'a rien à voir avec les forains cependant, je peux vous l'assurer. C'est plus... personnel. La personne concernée s'appelle Marcus Powell. Je ne veux pas que vous le tuiez, mais que vous m'aidiez à le faire.

La première impression qu'il avait du donner à son interlocuteur devait être celle d'un joyeux clown, pourtant toute bonhomie déserta subitement son visage angélique au moment où il prononça sa dernière phrase. Il était sérieux.
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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyLun 5 Sep 2016 - 12:58

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Tiago l'écouta parler, continuant de lire en parallèle. Le protagoniste du roman était définitivement un véritable petit salopard, voilà qu'il plaquait la présidente, cette bourgeoise qui s'était entichée de lui jusqu'à la folie. Tiago apprécia la scène dramatique et grotesque, dépeinte à grand renforts d'adjectifs et de descriptions participant à tracer dans l'esprit du mercenaire les couleurs de la France du XIXe siècle. Un mince sourire vint même poindre sur ses lèvres, mais il fut de courte durée. La magie des livres et de leurs lettres -qui autrefois avaient représenté un véritable cauchemar- n'avait souvent pas assez de poids contre la connerie du monde extérieur. Il referma l'ouvrage d'un coup sec, avant de se tourner vers son interlocuteur.

Le sourire amusé de Tiago s'était mué en rictus prédateur. Il croisa les jambes, alluma une cigarette et rejeta la fumée piquant qui s'en échappa en direction de son...client. Puisqu'il tenait visiblement à le devenir.

-Regardez le avec son air décidé...tu ne veux pas le tuer, mais tu veux que je t'aide. La belle affaire. Saches que le prix reste le même, des tueurs low-cost il y en a plein cette bon dieu de taverne, mais j'en fais pas partie. Alors avant d'aller plus loin, je veux savoir que tu as les moyens de passer à la caisse. Quant à ta paire de couilles, je me fais pas de soucis, sinon tu serais pas assis le cul dans mon fauteuil. A moins que tu sois complètement con.


Tiago leva de nouveau les yeux vers le gitano et l'avisa longuement puis lâcha:

-...Ça reste à voir.

Il reprit une gorgée de sa bière et se mit à réfléchir, tout en attendant que ce perturbateur nocturne se décide à montrer qu'il parlait la langue locale, c'est à dire l'argent. Le fric. Les gallions sonnants et trébuchants.

Marcus Powell.
Powell, Powell, Powell...ce n'était pas la première fois qu'il entendait ce nom.

Tiago avait de bonnes oreilles et la décence de garder pour lui tout ce qu'il pouvait grapiller, sans jamais l'oublier pour autant. Marcus Powell...un marqué. Un mangemort.

Ce petit rigolo voulait que Tiago "l'aide" à tuer un mangemort. La pensée arracha un sourire au mercenaire et la scène suivante de son livre -qu'il avait rouvert- ne l'en amusa que plus. On ne tuait pas un mangemort comme un égorge un mouton, et on ne s'improvisait pas exterminateur de cafards comme ça, en se levant du lit avec des velléités de vengeance. Ce type pensait visiblement que l'affaire était un peu comme une ballade touristique ou un safari en Centrafrique: un bon guide, une bonne arme et roulez jeunesse!

S'il n'avait pas fait partie de la bande des gitans du Soleil, Tiago l'aurait déjà envoyé se faire voir auprès des populations du Péloponnèse, mais il était prêt à lui donner un petit peu de crédit. Après tout, les monstres et les durs à cuir avaient parfois l'air doux. C'était même parfois grâce à cet avantage de physionomie et cette apparence engageante qu'ils parvenaient à leurs fins. Alors une chance pour le blondinet, de prouver qu'il n'était pas aussi naïf que sa proposition de contrat le laissait supposer.

Tiago était prêt à lui accorder juste une petite chance de le convaincre.

S'il avait de quoi payer.


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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyMar 6 Sep 2016 - 19:25

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Derrière son apparence bien mise et ses sourires enjôleurs, Keziah n'avait pas grand-chose à voir avec l'image du gentil garçon qu'il s'était façonné depuis l'âge le plus tendre et qu'il portait aujourd'hui comme une seconde peau. Personne ne l'aurait accusé d'avoir un mauvais fond – il avait la violence gratuite en horreur et méprisait bien des travers de l'humanité – mais il avait toujours été trop rusé pour être honnête. Trop intelligent pour éprouver beaucoup de compassion pour la majorité de ses semblables. Il n'était pas un tueur cela dit. Il le savait et, fort de sa longue expérience du métier, le Bâtard l'avait sûrement pressenti lui aussi. Pourtant cela ne signifiait pas que Keziah était incapable de tuer. C'était un choix, le sien, et peu importait si son geste devait remplacer une blessure par une autre dans le foutoir sans nom qu'était devenue sa jolie petite tête blonde. Il avait accepté d'en payer le prix à l'instant où il avait mis les pieds dans ce bouge.

Il n'avait besoin de personne pour lui dire quoi faire ou non. Encore moins pour décider à sa place. La condescendance à peine voilée de son interlocuteur le fit alors grincer des dents intérieurement. Il se fichait éperdument qu'il lui souffle sa fumée nauséabonde au visage ou qu'il le traite d'imbécile heureux. S'il n'y avait que ça pour satisfaire son bon plaisir et lui donner l'impression d'avoir l'ascendance sur lui, soit, ça ne lui faisait véritablement ni chaud ni froid. On l'avait insulté plus crûment que ça par le passé et ça ne lui avait jamais fait beaucoup plus d'effet. Keziah était hermétique à ce genre de provocations. Les chiens pouvaient bien aboyer, ça n'empêchait pas la caravane de passer. C'était ce que l'on disait, non ? Un nouveau sourire affable ourla alors ses lèvres et il se contenta de balayer l'air devant lui pour dissiper la fumée ayant formé un petit nuage autour de sa tête.

_ L'argent n'est pas un problème. Je ne comptais pas vous payer en bons sentiments, je vous rassure. Si Cesare était considéré par toute la plèbe de l'Angleterre comme le roi des voleurs, il en était après tout indéniablement le prince ! Et je sais bien qui vous êtes. Si j'avais eu besoin d'un mercenaire bas de gamme, je ne serais pas venu vous voir. Mais Marcus Powell est un de ces nouveaux Mangemorts. Il a dû obtenir la Marque il y a quelques mois seulement, après avoir participé à une mission top-secrète mise en place par le Ministère. Vous comprendrez que ça ne fait pas de lui une cible anodine. Je ne peux pas me permettre d'échouer et je n'ai qu'un maigre laps de temps pour agir. À Londres, cela serait trop compliqué de lui mettre la main dessus, mais la semaine dernière, le village sorcier de Horndean, dans le Pays-de-Galles, s'est rebellé contre les taxes toujours plus abracadabrantes exigées par le gouvernement. Je sais de source sûre que le Ministère a dépêché une escouade de rafleurs pour remettre de l'ordre là-bas, sous le commandement d'un jeune Mangemort ayant encore tout à prouver. Ce cher Mr Powell.

Le sourire qui étira alors ses lèvres n'avait plus rien de charmeur ou de doucereux. C'était celui d'un prédateur venant de trouver la faille dans les défenses de sa proie et se délectant à l'idée de sonner la chasse. Keziah n'était pas un tueur, non, mais il n'était pas non plus un justicier du dimanche et il venait certainement de le prouver au Bâtard. Comme pour les mettre d'accord et couper court à toutes défiances supplémentaires de la part de son interlocuteur, le blondin glissa la main dans la poche de son manteau et en sortit une bourse épaisse qu'il fit glisser sur la table.

_  Vous me direz si cela vous convient comme acompte. Le reste suivra après exécution du contrat. C'est bien comme cela que vous opérez, n'est-ce pas ?
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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyDim 11 Sep 2016 - 12:18

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En vérité, Tiago trouva le fait de ne pas avoir à réclamer d'informations...reposant. La plupart de ses clients étaient si secrets, farouches ou si embarassés par leur propre présence qu'il fallait leur tirer les vers du nez avec une pince chauffée à blanc. C'était la partie du travail qu'il détestait le plus : le social. Tout le monde se sentait l'obligation quasi religieuse de lui confesser ses péchés, pour justifier du fait qu'ils allaient acheter une vie comme lui achetait des clopes.
Pardonnez moi Blacksmith, parce que j'ai pêché.
Vous qui êtes un professionnel de vile et basse nature, et dont la faute est au delà de toute repentance, dites moi que je mérite la mienne et que mon acte est au fond bien peu de choses.
Pardonnez mes offenses et ne me jugez pas, car moi je vous juge, et vous êtes pire que moi.
Amen.

Tiago avait horreur d'être confondu avec un prêtre, mais celui là n'avait visiblement pas l'impression de lui faire une petite scène de fausse contrition. Il avait le lieux, probablement l'heure, le contexte, la détermination, et des gallions. Plus que ce que Tiago obtenait au quotidien. Toutefois, le tueur résista à l'insidieuse tentation de penser qu'il s'agissait d'un job facile. Il n'y avait que deux types de jobs : les difficiles et ceux qui faisaient semblant de ne pas l'être. Cette prise de conscience qui allait à l'encontre de l'arrogance pourtant souvent caractéristique des tueurs, lui assurait ses résultats on ne peut plus parlant. On ne le buterait pas parce qu'il avait péché par arrogance, lui.

Il soupesa la bourse de gallions puis la repoussa sur le côté comme si le détail de l'argent n'était plus assez intéressant pour attirer son attention. Il avait cette grâce paradoxale des professionnels à la fois vénaux et complètement au dessus des considérations matérielles...tant que les choses se faisaient selon leurs règles.
Il ne se serait jamais abaissé à vérifier le compte.

-Marcus Powell donc...


Il faudrait être prudent. Les jeunes mangemorts étaient les plus zelés, et à raison : formés et adoubés sous l'hégémonie de Voldemort ils n'en avaient connus que les avantages, que la puissance écrasante, sans jamais perdre leur superbe de petits arrivistes aux dents longues. Tiago n'avait pas le moindre début de respect pour toute cette clique, tout au plus avait-il une sorte de...considération légèrement étrange pour les plus anciens des mangemorts. Eux avaient connu l'ombre et les débuts d'une guerilla de longue haleine, le risque, la perte et pour certains, l'enfermement dans le pire lieu qui puisse être conçu. Ils avaient des cicatrices et avaient gagné leur place en les acceptant et en en étant fière. Dans la fosse de vipères du nouveau gouvernement, ils se dressaient comme des cobras royaux, endurcis. De véritables combattants. Tiago ne les admirait pas, mais il y avait quelque chose de terriblement proche entre tous les combattants, tous les soldats, les vieux amis de la mort, quel que soit le camp. La même lueur dans les yeux qui disait "j'ai vu la douleur. Je la comprends. Ne me défie pas". Des personnes comme Marcus Powell ne la possédaient pas, elles étaient seulement des enfants capricieux jouant à la guerre, de sales mioches bouffis de pouvoir, bouffis d'ambition. Zelés, jusqu'au boutistes sans en comprendre la raison, assoiffés de sang pour la "beauté" de la chose.
De sombres cafards.

-On va être très clairs. Une fois sur le terrain, je mène l'opération, on suit mon plan, selon ma manière de faire. Je te dis de te cacher, tu te caches, je te dis d'agir tu agis. A la première incartade, t'es seul avec Powell et ses amis. Compris?


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MessageSujet: Re: Œil pour œil [Tiago]   Œil pour œil [Tiago] EmptyLun 7 Nov 2016 - 21:10

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Keziah se recula dans le fond de sa chaise avec la satisfaction du devoir accompli. Sa dernière petite tirade avait fait mouche ; il en eut la conviction à l'instant où son interlocuteur cessa de s'intéresser à son fichu bouquin pour relever vers lui un regard tendu. Intense. Il évaluait encore certainement le pour et le contre, cherchant à jauger le degré de détermination de l’hurluberlu assis à ses côtés, mais Keziah savait qu'il avait fini par réussir à piquer son intérêt. Le doute ne fut plus permis lorsqu'il attrapa la bourse de gallions posée sur la table et la fit glisser de son côté après l'avoir brièvement soupesée, ce simple geste scellant à lui seul l'accord tacite entre les deux hommes. Le Bâtard venait de lui tirer sa révérence.

_ Marcus Powell donc...
_ Lui-même, acquiesça-t-il sur un ton guilleret, presque chantant, alors qu'il lui décochait un sourire éblouissant.

Il venait de signer l'arrêt de mort d'un homme, pourtant, Keziah donnait l'impression de venir de se mettre d'accord pour lui organiser le plus bel anniversaire surprise de son existence. Dans un sens, il y avait un peu de ça ! Marcus Powell était en effet bel et bien sur le point d'avoir la surprise la plus inattendue de sa vie ! Mais, celle-là, il n'était pas prêt de s'en remettre. Un gémissement plaintif se fit alors entendre près de lui et Keziah tourna la tête tandis que la louve à ses côtés se redressait sur ses pattes avant et venait poser sa tête sur sa cuisse. Elle en profita pour lui décocher à nouveau un de ces regards par en-dessous dont elle avait le secret, de ceux qui vous transperçait en plein cœur, mais le blondin ne se laissa pas attendrir cette fois-ci. Son regard s'adoucit et son sourire lui glissa même légèrement des lèvres, mais il tint bon, se contentant de lui flatter brièvement le haut du crâne avant de reporter son attention sur son interlocuteur. Il était trop tard pour reculer. Le Bâtard dictait déjà ses termes et Keziah n'avait aucune intention de lui donner la moindre raison de douter de sa détermination maintenant qu'il avait accepté de monter à bord de son funeste bateau.

_ Je préfère quand même vous prévenir : j'ai une fâcheuse tendance à improviser quand une opportunité se présente. Mais j'ai compris le message. Je vous promets d'être aussi sage et obéissant qu'il m'en sera humainement possible. Je ne suis pas du genre à jouer les héros de toute façon, cela devrait vous rassurer. Maintenant, je ne voudrais pas avoir l'air de vous bousculer mais, comme je vous le disais, nous n'avons pas beaucoup de temps devant nous. Shall we ?

D'un geste poli, l'ancien langue-de-plomb invita alors son compagnon d'infortune à ouvrir la marche. Il avait été très clair sur ce point. Il était celui qui mènerait la danse. Keziah ne voyait pas l'intérêt de le priver de ce petit plaisir. Tant qu'au final il obtenait ce pourquoi il faisait appel à ses services, le mercenaire pouvait bien le mener à la baguette, ça ne le dérangeait pas. Les deux hommes quittèrent ainsi le Chien qui Hurle sous le regard soulagé de son barman. Dès qu'ils eurent mis le nez hors de la bicoque, ils furent aussitôt accueilli par la pluie qui ne cessait de discontinuer et Keziah se tourna alors vers le Bâtard pour lui présenter son bras. Peut-être était-il déjà allé traîner ses guêtres du côté de Horndean et aurait-il été capable de transplaner seul jusque là-bas, mais c'était mieux ainsi, et le blondin était certainement le dernier d'eux deux à y avoir mis les pieds. Il savait où atterrir pour ne pas mettre les pieds dans le chaudron dès leur arrivée. Malgré un temps d'arrêt emprunt de méfiance, le mercenaire finit cependant par accepter son offre et leurs silhouettes ne tardèrent alors pas à disparaître dans un crac sonore.

Contrairement à là d'où ils venaient, le temps était un peu plus clément au-dessus de Horndean. Les larges flaques présentes au sol et les grasses gouttes d'eau perlant au bout des feuilles des arbres laissaient deviner un passage récent de la pluie, mais ils n'auraient pas à s'inquiéter de se mouiller plus qu'ils ne l'étaient déjà. Keziah les avait fait transplaner à la lisière des bois entourant le village, et attira aussitôt son compagnon à l'abri d'un large tronc avant de lui indiquer une direction d'un coup de menton. Devant eux, à une centaine de mètre de là, assis sur des tabourets branlants à l'entrée d'une auberge, trois compères fumaient tranquillement leur pipe tout en discutant. Ils étaient trop loin pour que le Bâtard et Keziah puissent discerner leur sujet de conversation mais, visiblement, il y avait de quoi se fendre la poire à en juger par les éclats de rire tonitruants qui parvenaient jusqu'à eux. Ils ne portaient aucun uniforme particulier, mais le doute n'était pourtant parmi quant à leur identité.

_ En plus de ces trois là, j'ai déjà repéré quatre autres Rafleurs, sans compter Powell. Il pourrait y en avoir plus cela dit. Je n'ai pas eu exactement le temps de faire le tour du périmètre avant de venir vous voir. Ma tête étant mise à prix, ce n'est pas très pratique, conclu-t-il enfin, comme s'il s'agissait d'un détail insignifiant. Le Bâtard n'était pas idiot de toute façon. Il devait déjà s'en douter, voire l'avoir reconnu depuis l'instant où il avait posé les yeux sur lui au Chien qui Hurle.
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