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sujet; (MAI 1996) BELTUS • Flood of blood to the heart

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(MAI 1996) BELTUS • Flood of blood to the heart Empty
12 Mai 1996 & Earle
Tide out, tide in, a flood of blood To the heart through the fear slipstreams. Breath in, exhale, I've poked a nerve. You'll slap me like a whale
Concrètement, et en toute honnêteté, Augustus en avait raz-le cul de courir après Karkaroff.

Pas qu'il lui ai personnellement couru après ces derniers mois. Il avait sérieusement autre chose à foutre que d'aller éplucher la campagne glauque d'Angleterre à la recherche de vermine. Quand on a passé quatorze ans à Azkaban et qu'on sort enfin, on ne va pas renifler les derrières de personnes aussi laides que Karkaroff. Non, depuis qu'Augustus était ressorti, Augustus regoûtait au charme de la vie. Il se trouvait des charmants jeunes hommes, à la peau claire et à la voix douce, et il les salissait, et il les pervertissait, et il les charmait et les jetait et se gorgeait du pouvoir que, enfin, de nouveau, il avait sur les gens. Il brûlait d'envie de s'organiser une orgie, mais il n'avait plus les moyens pour ce genre d'activité, et il fallait tout de même être relativement discret.
Paramétrer leurs prochaines attaques l'ennuyait. Même tuer l'ennuyait. Le Lord s'était enlaidi, et Augustus avait toujours particulièrement aimé le suivre parce qu'il avait été si beau, et qu'il avait toujours si bien présenté les choses. Ils se transformaient de plus en plus en soldats. Cela dit, Augustus était un homme simple, et il n'allait pas faire la fine bouche quand on l'avait enfin sorti de l'enfer.

Il avait donc supposé qu'on lui retrouve Karkaroff assez facilement. L'individu était incompétent, tout le monde le savait. La seule réussite de sa vie avait été de dénoncer Augustus (et quelques autres dont il se contre-foutait). C'était dommage, cela allait lui coûter la vie. Enfin, s'ils le trouvaient. Un an, un an entier que cette vermine glissait entre les mailles de leurs filets. Cela faisait cinq mois que la majorité des forces du Lord (celles qui comptaient) s'étaient évadées, et toujours rien. Incapables. En ce début de mois de mai, alors que Karkaroff continuait à leur échapper, Augustus s'était retrouvé contraint de prendre les choses en main. Ce n'était visiblement pas Mulciber qui avait la finesse nécessaire à une traque.
Pour remplir cette tâche, il lui avait fallu trouver quelqu'un pour l'accompagner. Pas tant par nécessité ou par sûreté que pour l'occuper durant cette navrante activité. Mulciber était, bien entendu, exclu. Il avait une discussion affligeante. Rabastan n'était plus qu'un amas de tremblements et il n'avait actuellement aucune idée d'où se trouvait Rodolphus. Malfoy lui donnait la nausée. Il refusait d'invoquer ne serait-ce que l'ombre de la suggestion d'Avery. Il lui restait sa chère Bellatrix. Ô sa splendide Bellatrix. Il l'avait entourée de toutes ses tournures les plus soyeuses pour qu'elle accepte cette aventure. Il se demandait encore pourquoi elle avait accepté, peut-être par ennui, mais toujours était-il qu'ils avaient facilement semé cet incapable de Mulciber (qui avait insisté pour les suivre, c'était sa traque paraissait-il) et remontaient la dernière piste avec leur habituelle efficacité.

Augustus ne s'était pas toujours vraiment bien entendu avec Bellatrix. Elle avait tendance à en faire trop, et à ne pas assez se laisser faire sous ses sourires tendres. Il avait bien essayé de lui faire faire tout le travail de traque, à force d'éloges, mais elle avait catégoriquement refusé. Sans même une tentative de politesse. Que les gens pouvaient êtres mesquins. Il respectait cependant la Black, l'estimait même. Elle disposait de ce quelque chose derrière lequel Augutus aimait se glisser. Il aimait se dissimuler dans ses ombres, comme il l'avait de nombreuses fois fait avec Rodolphus, et profiter de leur sillage pour s'occuper de ses petites affaires sans être remarqué. Ah, qu'ils avaient été naïfs, tous ses élèves de Poudlard s'imaginant Augustus comme celui qui, peut-être, arriverait à calmer la Black ! Comme il les avait fait marcher, à s'affliger de ses excès, tout en lui soufflant parfois d'aller plus loin, de frapper plus fort. Bellatrix avait quelque chose de la furie en elle, et Augustus pouvait souvent voir clairement comme elle devait serrer les reines pour ne pas se laisser définitivement sombrer. C'était pour cela, avant toute chose, qu'il la respectait.
Quelque chose, cependant, avait changé, depuis janvier. Sans comprendre quoi, Augustus flairait, comme si cela ne le concernait pas, qu'il se retrouvait de plus en plus souvent de l'opinion de la Black, et à ses côtés, et qu'il y avait un quelque chose dans l'air. De l'affection ? De la reconnaissance ? De la similitude ? Oh Merlin, est-ce qu'il avait que cela à faire, de s'inquiéter de la raison qui  l'avait poussé à inviter Bellatrix ? Elle était avec lui, c'était tout. Même si elle refusait de travailler à sa place, malgré toutes ses rondes éloges sur ses capacités supérieures aux siennes. Quelle plaie.

Cela avait donc été à lui de s'occuper des moldus qu'ils avaient trouvé. Un couple de campagnards, perdu au fin fond du Nord de l'Angleterre, à la sortie d'un village nommé Earle. Des moldus. D'affligeants, sales, laids, puants petits moldus. « N'es-tu pas certaine de souhaiter t'occuper d'eux ? J'ai toujours tant admiré ta legilimencie. » Il avait tenté, bien sûr, de lui refiler la corvée. Cette salope avait à peine desserrer les lèvres pour refuser. Augustus ne supportait pas le cerveau des moldus, il avait toujours l'impression d'être souillé par leur analphabétisme. Ils ne comprenaient jamais ce qu'il se passait, ne se détendaient pas, et cela finissait toujours par faire mal. C'était fatiguant. Et Augustus était clairement arrivé à un niveau où il n'aurait pas du être celui en charge de soutirer les informations de ces mauviettes. Il n'aurait peut-être pas du se défaire de Mulciber. Malheureusement, s'il avait du l'entendre encore une fois faire des blagues sur les origines russes de Karkaroff, Augustus aurait été contraint de lui arracher la colonne vertébrale par le cul. Pas qu'il trouva cela offensant, juste que les blagues de Mulciber étaient vraiment affligeantes.

Ce qu'il n'appréciait pas, lorsqu'il était sur le terrain, c'était toujours ce côté extrêmement peu esthétique. Les moldus qui pleuraient et qui criaient. La campagne pauvre de l'Angleterre. La boue sur ses chaussures. Du bout de la pensée, il s'immisça dans leur esprit, non sans les avoir soigneusement Silencio. Ils hurlaient comme des truies. Le tour du propriétaire fut assez vite fait. Les cerveaux de moldus étaient si vides. Au moins, il ne s'était pas sali pour rien, se dit-il tout en se redressant, après avoir haussé un sourcil devant la passion du jardinage de l'épouse. Des préoccupations si vulgaires... Il se redressa, soupira, et, puisque Bellatrix n'était vraiment pas d'humeur à se montrer utile, se fut à  lui de faire jaillir les deux rayons verts pour taire définitivement leurs témoins.
Augustus ne prenait jamais la peine d'Oubliettes ses victimes, même les sorciers.
Trop de travail.

Il se tourna définitivement, sans un regard pour les deux corps sans vie échoués sur leur chaise. Bellatrix se tenait de l'autre côté de la pièce, tout aussi calme que lui, mais sûrement tout aussi irritée.
Il remarqua qu'il ne souriait pas.
Il oubliait.
Il installa donc la mimique habituelle sur son visage. Il avait perdu de sa maîtrise, et malgré ses efforts, la température de la pièce ne monta pas d'un seul degré alors qu'il reprenait ses airs de prince nonchalant et chaleureux. « Excellente nouvelle, chère Lieutenant, ils ont aperçu notre vieil ami il y a quelques jours. Il s'est, à mon avis, réfugié un peu au dessus, à l'Ouest. Nous nous rapprochons, enfin. » Dans ce dernier mot, il était possible, au plus averti, de sentir toute son amertume et son impatience. On pouvait presque entendre quelque insulte survoler ses lèvres boudeuses alors qu'il se dirigeait vers la porte, l'ouvrant pour laisser passer l'estimée épouse Lestrange. « Merci beaucoup de m'accompagner, ton aide est fortement appréciée. Je n'aurais pu rêver meilleure partenaire. » Sale chienne de petite branleuse.
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flood of blood
to the heart
Mai 1996, Royaume-Uni.

April 1996 — Somewhere. « C'est assez. », verse le phonème du Serpent, à même le tympan de sa Disciple. Le sinueux décret s'y coule, sensuel mais froid, jusqu'à se caver un accès jusqu'à la cervelle, organe torride qu'il frigorifie en s'y lovant. Ainsi givrées et domestiquées sous la glaciale tutelle, c'est au tour des synapses de gicler les sommations survoltées, jusqu'à ce que la horde neuronale, enfin, renonce à sa vandale émeute. Palpitant d'une lancinante émersion, les paupières incisent alors le portrait, et dévoilent l'aliénation d'un regard encore laqué d'une jouissive géhenne. Nonobstant, le trouble rafle bientôt chaque relief de délice aux prunelles hyalines, lesquelles voltigent tels un couple d'oisillons folingues, en quête d'un rameau auquel se cramponner. « Je... je n'y vois plus. » C'est au creux de la dextre qu'en désespoir de cause elles se dégotent un asile à leur pathétique cécité, tandis que la caresse ossue des phalanges seigneuriales harponne le galbe oscillant, en proie au vertige. « Shh, shh... » siffle le Reptile, campé si proche qu'elle éprouve, dans le ravin de sa nuque ainsi ployée, la langue glacée de son souffle. « Qui sème le vent... » L'adage ébauché est alors soudain ponctué d'un fracas céleste : récolte la tempête. À défaut d'être en mesure de mirer le succès du sortilège, pour sûr qu'elle l'entend, et le ressent par ailleurs dans cette étreinte s'éternisant autour de ses hanches, pressante de satisfaction. Toute aussi déplacée que ne l'est déjà leur proximité, le contact n'est cependant pas davantage réprouvé ; ce serait injurier une créature dont on préfère sans équivoque exciter les bontés que les contrariétés. Sait-Il, qu'elle n'y goûte pourtant guère ? De toute évidence oui ; Il lui ratisse la matière grise depuis des lustres, sans que ce flagrant désintérêt n'y ait pourtant jamais mis terme. Jadis au fait du malaise occasionné, de la même façon est-Il conscient de la morosité avec laquelle, désormais, sont accueillis ces prétendus égards. Car si quinze années d’incarcération à Azkaban exalte quoi que ce soit, ce n'est sans doute pas le désir d'être touché. Mais s'il est un appétit qui, quant à lui, s'est creusé, c'est celui-là même que, sous la régence de son Précepteur, la boulimique engave, tel un louveteau claque-dent tirant à ce point sur la mamelle qu'il lui faut s'assujettir à l'autorité d'un plus chevronné pour brider sa gloutonnerie, et qu'ainsi soit obvié tout risque de suffocation morbide des facultés — à côté de quoi l'éphémère aveuglement n'est qu'un anodin désagrément. En l'espèce, et pour l'heure, il n'y a ainsi que cette concupiscence-ci, pour les arts noirs, qui la tisonne, reléguant ainsi le charnel à une dignité bien subalterne. Tandis que la vision reflue enfin, la Lestrange hasarde un œil, puis le second, hors de sa visière carnée, ne tardant pas à les hisser de concert avec la trogne difforme, dardant vers les nues un regard comblé. Là, lacérant le tantôt quiet crépuscule vernal, la tempête électrique fait rage, formant un dôme apocalyptique aux teintes mouvantes et vives au-dessus de la lande désertique. « Nous n'avions demandé qu'une tiède pluie printanière, cela dit. Notion qui, si je ne m'abuse, t'échappera toujours. », note le Seigneur, relaxant les reins féminins désormais stables et croisant plutôt ses pognes étiques sous ses propres lombes, dans une attitude méditative si souvent observée. Roideur que la Mangemorte se fait force d'imiter, roulant des muscles sous ses étoffes noires. « Navrée de vous décevoir, Maître. », murmure-t-elle, intonation piquée d'une espiègle canaillerie, suscitant la bruissante ricanerie du Leader. « Nul doute que notre cher Augustus aurait a-do-ré. » Quoi donc, le spectacle, ou sa mièvrerie ? La Mangemorte soulève un sourcil, tandis que les prunelles dégringolent sur le profil mutilé, afin de quêter explication à cette subite sollicitude. Celui-ci conserve cependant sa position songeuse, un reliquat de sourire distrait lui tailladant encore portrait. C'est qu'il n'a point besoin d'en exprimer d'avantage ; la simple mention d'un nom, dans leurs échanges, suffit à ce que tout soit dit. Il s'inquiète, et c'est normal. Lorsque la majorité des Évadés patauge gaiement dans la mare aux diables, Augustus n'a l'air d'avoir à se rétablir que d'un vague rhume des foins. Talentueux — au moins — en ce qui concerne l'art de prétendre, le faraud couve peut-être un mal plus insidieux qu'il la charge vraisemblablement de diagnostiquer. Qui mieux qu'elle pour tirer les vers du nez de semblable cachottier ? Aussi opine-t-elle, attestant par là que le cas serait dûment pris en charge, avant que la conversation n'embraye aussitôt sur une toute autre matière ; « Au sujet de Gringotts. (...) »

* * *

May 1996, Earle. L'opportunité s'était présentée sur son perron, bouche en cœur, le mois suivant. Ah, comme elle avait savouré le reluquer s'en prendre au cul des mouches, jusqu'à ce qu'elle daigne lui accorder une faveur qu'elle n'avait point l'intention de lui refuser, en premier lieu. Ça lui avait épargné l'embarras d'avoir à prétexter elle-même une broutille pour susciter un tête-à-tête ; une aubaine. Qui plus est, si l'idée d'une telle expédition au fin fond du fion du pays ne l'affriandait pas plus que cela, elle n'aurait boudé pour rien au monde l'occasion de ne plus avoir à souffrir les puantes incursions de Lucius dans son espace vital ; double aubaine. « Si tu y tiens. », avait-elle alors cédé, du bout des lèvres, l'air de ne point y toucher. La garce avait même poussé le vice jusqu'à lui tapoter l'épaule en le congédiant, une fois l'affaire rondement menée. Elle avait toujours tant aimé le perturber, ce cher bon vieux Gus ; triple aubaine.

L'exultation s'était cependant quelque peu atténuée, à mesure qu'ils labouraient de leurs piaffant sabots la brande anglaise. Là, rencognée dans l'angle du salon pas plus spacieux que le crâne de ses habitants, la Maudite broie sa patience entre crocs sanglés. Sureau engainé et bras croisés — ainsi moins tentée d'en faire usage sur une impulsion —, elle s'obstine pourtant à observer, sans plus broncher qu'en arborant sa mine des grands jours. Aussi n'a-t-elle à rétorquer qu'une saccade de mandibule crispée, à la prétendue excellente nouvelle. Mulciber leur avait tantôt fait le coup dix fois, déjà. On n'est pas loin ; on est tout près. En ce qui la concerne, elle ne se rapproche bel et bien que d'une chose, et ce de façon absolument certaine : la rupture de ses nerfs usés, constamment chatouillés par la verve du fieffé flagorneur, qui n'a de cesse de lui suriner ses ineptes flatteries, escomptant qu'elle se foule à sa place. Et puis quoi, encore ? Aussi la brune marque-t-elle halte à sa hauteur, le reluquant des pieds à la tête, jusqu'au sourire pré-fabriqué dont il ose la gratifier. « Attention, c'est un coup à choper une crampe. », qu'elle lâche, en le débordant pour sourdre hors de la piteuse masure, trop aise de recouvrer l'air libre — bien qu'empuanti par l'ambiante fragrance de purin, exacerbée par la chaleur précoce de la matinée. À ce train-là, l'automne déboulerait qu'ils y seraient encore, à rabattre la cambrousse en quête du ruskov. « Bien... », marmonne-t-elle alors, exécutant volte-face pour confronter son comparse paraissant à sa suite, tout en nouant crinière dans un geste empreint de lassitude. « Primo, il a pu faire le tour du monde deux fois, en quelques jours ; secundo, l'ouest n'est pas une localisation, mais une énième présomption ; tertio, c'est un crétin certes, mais pas moins fourbe que... » Butant sur un toi qui, pour sûr, serait interprété comme une insulte, elle se reprend : « Qu'un autre. Il est temps d'y aller à l'instinct. Ça suffit, ces conneries d'ouest ou de nord. Vois où ça nous mène. Cesse donc de... prévoir, et lâche-toi un peu, vas-y au feeling, bordel. » Ce disant, la paluche s'était déportée sur son propre bedon. L'heure de vérité était donc là : Augustus Rookwood disposait-il, ou non, de viscères et, si oui, qu'allait-il en surgir ? Car ce n'est pas la boue, ni même le bousin, qui la rubéfie, la Maudite, mais bel et bien l'absence de fureur, de véhémence sans lesquels ils crèveraient gueule ouverte de vieillesse avant d'avoir débusqué ne serait-ce qu'un poil de bouc de l'enflure.
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12 Mai 1996 & Earle
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Augustus aurait pu faire à croire à quiconque lui aurait demandé que son temps à Azkaban n'avait été qu'une promenade de santé. A l'entendre, on aurait pu imaginer qu'il n'avait fait que passer quelques temps enfermé, à lire et à converser avec se geôliers. Cependant, personne, bien entendu, ne venait lui poser ce genre de question. Ses collègues ne savaient que trop bien ce qu'Azkaban était réellement et ses victimes n'avaient soit aucune conscience de son identité, ou bien n'avaient pas le temps de commencer à formuler ce genre de navrantes questions.
Parler d'Azkaban, en tout cas en parler ouvertement, était voué à l'échec avec le Mangemort. Le sujet glissait sur lui, comme tant d'autres, et n'écopait le plus souvent que d'un sourire distrait et d'un mouvement de la main lassé. Parler d'Azkaban n'avançait à rien, disait-il, et il avait autre chose à faire que de ressasser ce genre de souvenirs, ou de s'apitoyer sur son sort. Ils étaient sortis, c'était tout ce qui devait compter.

Il appréciait la Black pour cela : aucune chance qu'elle vienne aborder le sujet, avec les yeux plein de larmes et les mains encore tremblantes, pour savoir si lui aussi il n'arrivait pas à oublier (ou n'importe quelle autre niaiserie qui pouvait trainer parmi les rangs du Seigneur des Ténèbres dernièrement). Elle, au moins, avait conservé un semblant de dignité. Aucune larme sur son visage d'acier. A peine quelques perturbations comportementales, une dévotion toute particulière au Lord (qui ne serait pas reconnaissant ?) et des rumeurs courant sur son intérêt renouvelé pour la magie noire (Augustus pouvait simuler tant qu'il le désirait le désintérêt, il ne manquait jamais de récolter toutes les informations disponibles au sujet de sa consœur).
Cette qualité primordiale n'empêchait pas cependant Bellatrix Lestrange d'être absolument insupportable. « Attention, c'est un coup à choper une crampe, » osa-t-elle rétorquer à son sourire. Ce n'était pas parce que la Sang Pure pensait pouvoir se dispenser de  la plus simple des politesses, et envoyer paître les résidus de la bienséance qu'il devait faire de même. Il avait passé sa vie à observer l'Elite sorcière, et avait toujours trouvé navrant qu'ils dénigrent aussi facilement les règles les plus simples de la cordialité. Augustus, lui, avait comme ancré dans la chair d'être politiquement correct. Si ses victimes précédentes avaient été sorcières, il les aurait très certainement salué avant de leur expliquer calmement et honnêtement qu'ils n'avaient rien contre eux et qu'ils n'avaient pas à prendre personnellement ce qui allait suivre. Il les aurait ensuite exécutés avec un Merci attentionné.
Il n'accorda qu'un pincement de lèvres comme réaction à la pique de la Black. « Ta sollicitude me touche, » articula-t-il avec douceur. Son sourire aurait presque pu paraître honnête, en cet instant. L'irritation le rendait toujours bien plus agréable.

S'il y avait une chose qu'il concédait à sa sortie d'Azkaban, c'était d'avoir perturbé sa vision de la météo. En sortant de la maison moldue, il fut satisfait de retrouver  ne serait-ce que l'air frais. Il faisait un temps affligeant de grisaille, et lourd avec cela. Pourtant, Augustus trouvait toujours l'ambiance bien plus lumineuse, sèche et agréable que dans sa cellule. Il se surpris donc à prendre une longue inspiration, avant de chercher l'Ouest avec docilité. « Bien... » Merlin, que voulait-elle encore, la truie ? Il lui jeta un regard, la découvrant visiblement déterminé à un il ne savait quoi d'important. Elle nouait même ses cheveux, dans un mouvement qui devait certainement dire qu'elle passait aux choses sérieuses. Augustus, lui, était aussi lisse sur son canapé qu'au milieu du carnage, à peine relevait-il ses manches pour éviter de les éclabousser de sang. A la vue du regard sévère de la Lestrange, il hésita tout à coup : peut-être préférerait-il qu'elle continue de s'occuper de ses affaires ?
« Primo, il a pu faire le tour du monde deux fois, en quelques jours ; secundo, l'ouest n'est pas une localisation, mais une énième présomption ; tertio, c'est un crétin certes, mais pas moins fourbe que... qu'un autre. » Une liste ? Vraiment Bellatrix ? Une putain de liste juste pour se plaindre et lancer des banalités ? Il avait senti l'hésitation, et la félicita mentalement de ne pas avoir osé comparer son niveau de fourberie à celui d'un vulgaire Karkaroff. Certainement, Augustus n'aurait jamais laissé autant d'indices que cet incapable et, à sa place, serait déjà en train de siroter des cocktails en Côte d'Azur. (S'il lui venait un jour le désir d'avoir ce genre de passe-temps affligeant.) « Il est temps d'y aller à l'instinct. » Le sourire d'Augustus s'agrandit avec cette phrase, la regardant avec une expression fascinée. « Ça suffit, ces conneries d'ouest ou de nord. Vois où ça nous mène.  » Oh, madame avait une opinion sur  la marche à suivre maintenant ? Madame voulait contester les points cardinaux ? Mais que n'y avait-il pas pensé plus tôt ! « Cesse donc de... prévoir, et lâche-toi un peu, vas-y au feeling, bordel.  » Au quoi ? Au feeling ? Mais où étaient-ils, en pleine session de psychothérapie ? A quel moment avaient-ils cessés de s'intéresser à Karkaroff pour soudain qu'une détraquée mentale notoire ne vienne lui faire des leçons de morale ?

Augustus se laissa aller au rire à cette remarque, une sorte d'expansion de sa voix ronronnante, comme un roucoulement de joie et d'amusement qui alluma, un instant, une lumière presque tendre dans ses yeux. Il secoua la tête, encore souriant et amusé de cette remarque. Que ne fallait-il pas entendre... « Je crains que tu ne te sois trompée de camarade de route, ma chère Bellatrix. Tu ne fais pas ta route avec un Avery ou je ne sais qu'elle autre créature abandonnant la logique pour apprécier l'opinion d'un quelconque organe interne. » Il étouffa cette fois le rire, ne laissant échapper qu'un ricanement moqueur, avant de reprendre. « Je n'arrive pas à comprendre ce que tu attends de moi, ni ce qui t'étonne dans mon comportement. Je suis et resterai un homme logique et organisé, et je ne saurais même pas par où commencer pour adopter ta... ton... d'y aller au feeling. » Et pourquoi pas écouter ses sentiments et ses sensations afin de choisir ses proches ? « N'hésite cependant pas à prendre les choses en main si tu trouves ma méthode inadéquate. Nous savons tous deux que je ne suis qu'un bien piètre homme de terrain, et que nous autres sommes tous avides de tes enseignements. »
Il lui sourit. Les muscles avaient commencé à s'échauffer avec l'échange, et il reprenait, de plus en plus, contact avec le contrôle parfait qu'il avait habituellement de ses expressions faciales. Il ne supportait pas qu'on relève son manque absolu de tripes. Il savait, depuis longtemps déjà, que sa plus grande faiblesse était sa prédictibilité. Augustus n'était pas sanguin. Il ne ferait jamais rien poussé par la colère, ou même par l'amour, et toutes ses actions pouvaient être facilement comprises, pour quiconque acceptait de suivre sa logique pragmatique et froide. Il avait du, durant ses années au service du Lord, développer des techniques complexes pour arriver à pallier un tant soit peu à ce terrible handicap. Lui qui haïssait le gâchis avait organisé, à de nombreuses reprises, des massacres qu'il devait définir aléatoirement. Le reste du temps, il essayait de se fondre dans les ombres de ses camarades, pour que leurs fureurs puissent influencer ses actes, et flouer ses intensions.

Ce fut donc un regard imperturbable, et presque serein qui confronta la colère de la Black. « Concentrons-nous sur Karkaroff, veux-tu ? » Au lieu de commencer à vouloir s'intéresser à ce qu'il se passe, ou plutôt ce qu'il ne se passe pas,  chez Augustus Rookwood. Il leur laisse la rage, à tous, et il conserve sa flegme, qui reste peut-être son bien le plus précieux.
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