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sujet; you cry a little, so do i (neelon #2) |
PRISONERS • bloodstains on the carpet Simon Rosier | you cry a little, so do i Don't tell me that I'm wrong; I've walked that road before, And left you on your own. And please believe them when they say That it's left for yesterday And the records that I've played, Please forgive me for all I've done Il mastiquait un toast quand le plateau heurta le sol. Dos à la scène, et emporté par une curiosité plus naturelle que légitime, son menton passe par-dessus son épaule pour mirer le visage décomposé du malheureux, dont le regard paniqué est rivé sur les résidus de nourriture jonchant le sol. Le brouhaha indistinct des conversations est brusquement retombé, et les prisonniers, fascinés par cette scène qui, entre ces murs, n’avait rien d’ordinaire, attendent que quelque chose — n’importe quoi — se passe. Des paires d’yeux ricochent sur les gardiens présents dans la salle, d’autres reprennent leur conversation, et Simon, lui, ne détache pas ses billes claires du type. Même le rugissement d’un maton lui ordonnant de ramasser ne le tire pas de sa contemplation malsaine. Sa mâchoire continue pourtant de remuer lentement, à mesure que ses molaires écrasent les restes du toast qu’il n’a pas encore avalé. Il est seul à table, aujourd’hui ; Eirene est partie à l’infirmerie avec Liz. et loin de lui l’idée de se mêler à ses pairs. Il est bien, face au mur. Personne ne l’emmerde, personne ne lui parle, il a un pichet d’eau pour lui tout seul. « Rosier, tu veux sa photo ou quoi ? » Il hausse les épaules, et décide de ramener son plateau. L’ennui a un goût plus saumâtre que lorsqu’il perdait son temps au Centuries, sans être trop différent. Il s’occupe. S’est dégoté un « boulot » à la bibliothèque, range les livres, vire ceux qui sont abîmés, étiquette les nouveaux ; on lui apprend à être moldu malgré lui. C’est ça, finalement, Azkaban. La lente annihilation de leurs capacités magiques. Au moins, entre deux rayonnages de bouquins défraîchis, il a la paix et peut même feuilleter quelques pages. Il marmonne tout seul aussi, peut-être à l’attention des paroles sibyllines valsant dans sa boîte crânienne. Les hallucinations, il en avait déjà eues. Souvent auditives, rarement visuelles ; des voix, des murmures, et souvent il croyait entendre la sienne se mêler à cette mélopée, comme s’il avait un jour prononcé les mots qui se faufilaient dans son esprit. Ces illusions allaient et venaient en fonction de sa consommation d’orviétan, mais il avait toujours refusé de croire qu’il pouvait y avoir autre chose, au-delà d’une évidente toxicomanie. Et depuis qu’il croupissait à Azkaban, avec sa magie volatile, il s’efforçait tant bien que mal de discerner la réalité de ses délires passagers — aucun monstre ne se tapissait sous sa couche précaire, et aucune apparition du passé ne se cachait dans un coin de sa cellule, c’était plus insidieux. Viscéral. Une angoisse qui lui grignotait les entrailles, un bruit parfois assourdissant puis soudainement étouffé. Il avait décidé de prendre sur lui et d’éviter de mentionner ces épisodes au guérisseur chargé de surveiller les effets secondaires de son sevrage, persuadé que ce dernier essayerait de lui expliquer que ce n’était, justement, qu’une réaction au traitement, que c’était normal après un passé comme le sien, qu’il verrait une amélioration dans quelques semaines. La nouvelle politique d’Azkaban manquait terriblement de bon sens ; ils libéraient parfois un détraqueur à l’aube, afin de leur rappeler où ils étaient et ce qu’ils avaient fait pour atterrir là, et avant le dîner, il se retrouvait dans une infirmerie, un billywig planté dans le bras, en attendant qu’un philtre calmant agisse. Il avait le droit à un traitement en dépit de sa condamnation. Cependant, les gestes machinaux et la distance du guérisseur le confortaient dans l’idée que ce n’était là qu’une autre tentative du Ministère pour se racheter aux yeux de l’opinion publique — considérer les criminels comme des humains, les moins dangereux comme les pires. Une certaine tension était toutefois réapparue suite à l’évasion provoquée par la tempête ; il ignorait combien de prisonniers s’étaient échappés, mais suffisamment assez pour que les gardiens redoublent de vigilance à leur égard. Et lui, il a l’impression de devenir fou entre ces murs. « Hey, Rosier, » la fesse sur une table, il jette des livres dans un chariot, et la voix de Galen, mi-gardien mi-allié, le distrait à peine de son ouvrage. « Look. » Le maton s’assure que personne n’épie la conversation avant de lui tendre un bouquin, « qu’est-ce que tu veux que je fasse avec un roman au philtre d’am—oh. » Entre les pages s’étaient glissées deux cigarettes. « Deux seulement ? » Le ton est courroucé, mais son agacement n’ébranle en rien Galen, « c’est pas tes clopes habituelles. C’est nouveau. — Tu me fatigues à parler en énigme, c’est quoi ? — Nouveau, j’te dis. Je sais pas qui a débarqué avec ça mais ça commence à circuler et je me disais que t’aimerais bien essayer. Elles sont plus corsées. — Tu veux me faire consommer de l’orviétan alors que j’ai un check-up hebdomadaire ? — C’est pas de l’orviétan. T’as qu’à imaginer un espèce de substitut si tu veux. » The fuck ? À la bouche de Rosier de s’ouvrir quand Galen déguerpit, et il n’a plus que ses yeux pour fixer les deux cylindres coincés dans le bouquin. Il se hâte de les fourrer dans sa poche, termine de balancer la pile de grimoires dans son chariot et ça résonne derrière lui, une voix bourrue éclatant de nulle part — il en lâche un livre de surprise, « Rosier ! Parloirs, maintenant. » Putain, c’est Merlin qui essaye de le dissuader de fumer une connerie. Sa dernière visite avait été Elias — et ça s’était mal terminé. Depuis Anna, silence radio de la part de ses « proches ». Charlotte lui manquait. Il s’empêchait de penser à elle mais l’absence de sa fillette lui pesait bien plus encore que le reste. Elle l’apaisait, qu’elle dorme à poings fermés ou s’époumone entre ses bras, sa seule présence le réconfortait — lui donnait la sensation de ne pas être un bon à rien. D’avoir réussi quelque chose. Il regrettait d’avoir demandé à Anna de ne pas amener Lottie avec elle, mais il tentait de se convaincre que c’était pour le mieux, même si cette séparation lui était insupportable. Et alors qu’il suit le gardien vers les bulles de visite, il ignore à quoi s’attendre.
« Neelam ? » Il y a un moment de flottement. Sa cousine le transperce du regard. Bien portante en dépit de son air fatigué, il a l’impression qu’elle a mûri. Il a quitté une gamine pétrie de nobles idéaux et se retrouve face à une jeune femme — il l’avait délaissée, en prenant à son tour la fuite. Le nombre de fois où il avait demandé après elle devait se compter sur les doigts d’une main. Obsédé par Charlie, par Anna, par Elias — et Neelam, Neelam qui s’était évanouie dans la nature. Quand les rendez-vous dans leur maison de vacances s’étaient espacés, il ne s’était pas inquiété outre-mesure. Elle était avec Elias, rien ne lui arriverait. Quand il avait été embarqué dans les geôles du Ministère, personne ne lui avait annoncé sa disparition. Cornelia ne se serait jamais comportée de cette manière si quelque chose était arrivé à sa cadette, au contraire, elle avait pris le temps de lui dire que « Neelam va bien, pas grâce à toi, c’est sûr ». « T’es… t’es venue toute seule ? » Il hésite à s’approcher, s’asseoir, contourner la table, rester campé sur ses jambes un peu flageolantes. Sa main se raccroche au dossier de l’une des chaises. Il a sa mine des mauvais jours, une barbe un peu trop fournie et pas vraiment soignée. Il n’a pas les mots, merde, il sait pas quoi dire, il ne sait pas, il ne sait plus. Tu m’as manqué ? Je suis désolé ? Tu vas bien ? Assis-toi ? Quoi de neuf ? « T’as l’air en forme. » T’as l’air en forme. Et aussitôt ces paroles prononcées, il s’en mord l’intérieur de la joue. |
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HERO • we saved the world Neelam Rosier | neelon #2 + you cry a little, so do i
Le sorcier chargé de contrôler les allées et venues la fixe d’un oeil si morne qu’on le dirait tout juste retiré d’un animal empaillé. Neelam n’est donc pas surprise lorsqu’elle entend une voix à la fois ennuyée et abrupte lui demander : « Vous venez pour… ? » Il la toise plus qu’il ne la regarde, ce qui en soi n’est pas compliqué puisqu’elle n’est pas bien grande, mais ça l’agace doublement — parce qu’elle est héroïne de guerre depuis peu, mais qu’elle reste toute de même vélane avant, et ça fausse la donne à leurs yeux. « Simon Rosier » qu’elle marmonne tout de même, comme à reculons, un air désapprobateur sur le visage. Elle n’aime pas prononcer le nom de son cousin à voix haute ; ces quelques mots lui apparaissent comme une chose… fragilisée, sur le point de se briser, qu’elle doit garder contre elle pour la protéger avec sa chaleur. Et elle y était plutôt bien parvenue jusqu’ici, ne les ayant plus vraiment entendus depuis le procès — bien qu’elle les ait lus parfois par la suite, dans les journaux ou sur quelques papiers à la maison. Dans la bouche de Cornelia, Simon a l’air d’une insulte les plus mauvais jours, d’une simple tâche indésirable dans les meilleurs. Dans la bouche d’Elias, Simon n’a tout simplement aucune place, mot tabou devenu banni. Mais Neelam n’y arrive pas — à l’oublier, à le délaisser, à se sortir de la tête qu’il est là, en train de pourrir à Azkaban, tout seul. Elle voudrait avoir la force de Cornelia pour prétendre qu’il ne lui manque pas mais elles sont différentes, si différentes que la cadette se retrouve à attendre que les lourdes portes ne s'ouvrent, avec ses tâches de rousseur et son air d’outre tombe. Cornelia est en meilleur état, elle — elle est indéniablement en meilleure santé et la fin de la guerre lui a apporté une classe supplémentaire, des opportunités de plus que les autres de la famille n’ont pas, ou plutôt n'osent pas saisir ; tout est plus simple pour elle, qui a regardé le conflit de loin, tout est plus… détaché.
C’est un peu comme lorsqu’elles étaient gamines, en fait. Cornelia s’en sort tandis que Neelam se contente de se débattre.
La plume du sorcier griffonne quelque chose sur le registre — surement son nom à elle et celui du détenu qu’elle est venue voir, juste à côté, probablement des horaires pour compléter. En attendant la fin des formalités, l’ancienne insurgée serre contre elle sa robe bleu nuit pour se donner une contenance mais ses bras nouvellement croisés ne font que lui donner l’air revêche. Tant mieux, tant mieux parce qu’Azkaban lui fille des frissons, même rénové, même transformé, même… amélioré selon les réclamations de l’opinion publique. Il règne entre ces murs quelque chose de définitivement mauvais, comme une ombre perpétuelle que tous les changements du monde ne parviendraient jamais à annihiler et elle doute profondément qu’un tel endroit puisse pousser qui que ce soit à devenir meilleur. « Suivez-moi. » Le sorcier morne reste à l’entrée tandis qu’elle en suit un autre, d’un air plus avenant mais aussi plus faux, et leurs capes à tous les deux se mettent en mouvement et passent portes et portes jusqu’à arriver enfin aux parloirs. « Attendez-là, ça vous va ? » Neelam suppose que la question est purement réthorique et ne prend pas la peine de répondre autrement que par un simple hochement de tête. Sa manie d’économiser les mots s’est accentuée pendant la guerre, même si elle était déjà bien ancrée auparavant — surement à force de laisser Cornelia parler pour elle, lorsqu’elles étaient gamines, elle qui n’était pas remise en question en permanence parce qu’à moitié créature.
La pièce est plus spacieuse qu’elle ne s’y attendait et elle se demande si elle ressemble à ça uniquement parce que les visiteurs sont voués à y mettre les pieds, comme un témoin lumineux qui dirait regarde, l’établissement n’est plus ce qu’il était lorsque les mangemorts le dirigeaient. Mais elle n’a pas le temps d’y penser plus que déjà des pas se font entendre et entre deux gardiens, elle aperçoit son cousin, les yeux tirés de fatigue et pire, de lassitude. Elle l’a déjà vu éreinté, malmené, surtout pendant les rendez vous clandestins qu’ils se fixaient dans la maison de vacances de la famille — ils finissaient souvent par se déchirer et repartaient régulièrement avec le coeur plus lourd qu’à l’arrivée mais au moins ils savaient qu’ils étaient vivants. Elle l’a déjà vu dans de tels états mais jamais aussi… usé. Presque résolu. Et pendant une seconde, elle en oublie qu’elle est venue là pour lui faire la peau, mais il lui tend la perche pour que le sarcasme revienne au galop : « T’es… t’es venue toute seule ? — Non, avec mon ami imaginaire. » Elle désigne la chaise vide à ses côtés en levant les yeux au ciel mais Simon ne se laisse pas abattre et déjà, il relance : « T’as l’air en forme. » Elle avale sa salive de travers. Des jours de torture perpétrée par son camp à lui et il lui clame en toute innocence qu’elle a l’air en forme. « Toi aussi » qu’elle assène avec un sourire brulant de rage tant il est évident qu’il ne l’est pas.
Simon daigne enfin s’asseoir, Neelam tente de se mettre à l’aise. Peine perdue. Le temps semble flotter étrangement jusqu’à ce qu’elle déclare, tout en haussant les épaules : « Ne crois pas que j’suis venue là pour toi, parce que c’est pas le cas. Cornelia m’a simplement demandé de voir quelques points avec toi, elle voulait pas venir elle-même. » Prends ça. « Alors j’me suis dévouée. » Et ça. « Elle dit que légalement, y’a des trucs qui vont pas avec la succession du Centuries ? J’ai pas tout compris. » Elle sort des papiers qui n’ont aucune réelle importance et les aligne devant eux. Cornelia s’en serait parfaitement bien sortie seule et Simon doit le savoir mais Neelam avait besoin d’un prétexte pour venir, d’une raison. Quelque chose qui l’amènerait à pouvoir poser ses questions. Des questions qui commencent par « trafic de vélanes ? » et se terminent par « comment t’as pu me faire ça ? » ; des questions qu’elle n’arrive plus à poser à présent tellement elle est tétanisée à l’idée de ce que pourrait être la réponse. Il a toujours été son préféré, Simon a toujours été son préféré — et aujourd’hui on lui demande de le détester, tout et tout le monde le lui demande, mais elle ne sait pas si elle en est vraiment capable et surtout, elle a terriblement peur de l’être s’il lui répétait tout ce qu’elle a appris au procès, en la regardant dans les yeux, ces yeux qu’ils ont toujours eus en commun.
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