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Jour 1 (AOÛT 04), 8pm.
Ça tourn'ra pas mal hein ? La nuit est limpide, placide comme l'eau qui se rétracte, pour mieux s'amasser en un raz-de-marée destructeur. Menace silencieuse. Il ne répond pas, avare de mots comme souvent, mais le dos de sa main frôle les phalanges de Mist. Elle voudrait la saisir et entrecroiser leurs doigts, pour l'attirer jusqu'à elle et tracer de ses lèvres contre les siennes les ombres de son inquiétude, du mauvais feeling qui lui noue l'estomac. Mais au cœur de la géométrie bancale, asymétrique et érodée par le temps de Wuthering Heights Cemetery, il n'est pas son Aspen. Il est Fangs, Numéro 3, l'homme de Mood, soldat sans failles. Il la dépasse et l'échange s'achève en une fraction de seconde, suffisamment discret pour qu'un œil extérieur ignore qu'il a même eu lieu, tandis qu'il rejoint Mood, Sand et Crow au sommet du chemin de pierres et se lance avec eux dans une discussion cryptée, à voix basse. Ce soir quelques membres choisis du Path et des Breaches s'unissent pour une mission ambitieuse, collaboration risquée qui floute les limites et sort plusieurs d’entre eux de leur zone de confort. Indie n'est pas certaine d'être si à l'aise avec l'idée de perdre les jeunes Troublemakers de vue et de s'écarter du confort de son propre rôle de pickpocket pour dépouiller une demeure nullement abandonnée — celle de l'ancien ministre intérimaire qui plus est : fdp ayant juré de démanteler les gangs avant de chuter lui-même, entraîné par le poids de sa malhonnêteté. Corrompu peut-être mais pétri de ressources de contacts pratiques à même de l'aider à s'arracher sans condamnation aux accusations pesant sur son nom. Le système est pourri mais les SM, rancuniers ; et ils ont leur propre idée de vengeance pour faire payer à Ioan Rhys de s'en être pris à eux.

Les Troublemakers choisis pour la mission sont inconscients et déterminés, eux, squelettes sur pattes niant connaître l'effroi. Ils sont téméraires et aveugles parce que bien dressés et certains de n'avoir rien à perdre. Indie avait fini par devenir comme ça, aussi, jusqu'à se rappeler du goût de la mort un mois plus tôt, avec une lame contre la gorge et une baguette sur la mâchoire. Le genre de rencontres qui rappellent aux rats comme eux qu'ils sont aussi dangereux que vulnérables, dans le monde magique. Mais l'heure n'est pas à l'appréhension, d'un instant à l'autre le signal du départ sera donné et toute trace d'hésitation, à bannir.
Peu importe, de toute façon, que ça puisse tourner mal. Ils n'ont rien d'autre que ça : précarité et misère, famille de fortune réfugiée parmi rocs, ronces et macchabées. Alors même s'ils ne s'en tirent pas, il n'y aura personne pour s'émouvoir : no mourners, no funerals.