Y'a bien eu une époque où Sol côtoyait des gens, sortait sans trop y penser. Il n'a jamais été un mordu des soirées ou des grands rassemblements, mais était habitué aux réceptions, aux invitations, contraintes familiales obligent. Il jouait dans l'équipe de Quidditch de son école pour faire plaisir aux parents, essayait de bosser ses cours etc, mais ce n'était jamais assez. Il n'était jamais suffisant et a fini par craquer, plaquant vers ses 15 ans toutes les activités extrascolaires qui au fond lui mettaient plus de pression qu'autre chose sans que ses efforts ne soient salués à la maison. Et puis progressivement... il s'est comme renfermé sur lui-même. Parfois il s'aperçoit qu'en présence d'autrui il n'est pas si mal : il est capable de lancer et de tenir une conversation, ses connaissances variées, random, peuvent aller du très concret à l'amusant et donner l'impression qu'il est un puits de connaissance (à ça il répond avec un haussement d'épaules : "j'suis juste curieux"), et il rentre fatigué de l'interaction mais satisfait. Le problème... c'est de réussir à quitter son confort. Bizarrement, cette épreuve là semble insurmontable : l'idée de se confronter au monde, de devoir se préparer physiquement et psychologiquement, ça le plombe et s'il n'en tenait qu'à lui, il resterait en permanence dans son antre, n'en ressortirait que pour récupérer de quoi grailler dans les placards. sauf que bien sûr, d'abord il y avait son vieux pour l'obliger à se bouger et le traiter d'incapable (d'aucun dirait que son impression de suffoquer à chaque fois qu'il doit se plier à des ordres vient de là). Et maintenant, il y a Nell pour tenir ce rôle. "Tu comptes un jour sortir de cette chambre ? T'as pas eu tes ASPICs pour dormir toute la journée !" C'est con mais il se sent... trahi ? Et jugé. Et ça le braque tellement ?? Parce que jusqu'à récemment, elle sidait toujours avec lui, prenait sa défense face à son père, disait qu'il était juste un "nocturne", que tout le monde ne pouvait pas fonctionner de la même façon... elle le rassurait lui-même à vrai dire et il croyait qu'elle le comprenait. Mais maintenant elle a l'autorité et elle devient un tyran comme les parents avant elle, elle impose même un couvre-feu. ça le soule, c'est pas comme si elle était sa mère ! Il a vraiment l'impression qu'elle abuse, culpabilise un peu quand elle lui apporte ses repas dans la chambre ou fait à sa place la paperasse et autres trucs ennuyeux qu'il n'a pas le courage de faire, mais enterre vite le sentiment lorsqu'elle commence à faire sa relou en le critiquant à fond.

Honnêtement, Sol ne saurait pas dire ce qui l'a rendu ""comme ça"" (est-ce que c'est vraiment mal, d'être ""comme ça"" ? Juste parce que la société a établi un modèle et exige que tous s'y plient ?) ; il sait juste qu'il a eu des coups durs, entre la pression des parents, la guerre, puis l'acharnement à l'école à la suite de l'emprisonnement de son père. Et en ce moment il n'a plus vraiment envie de sociabiliser. Les potes appellent ses soeurs en mode "Salut Jelena/Diez, j'pourrais parler à Sol ?" parce qu'ils s'inquiètent et n'arrivent pas à le contacter directement, et il secoue la tête en panique jusqu'à ce que les filles acceptent de prétendre qu'il n'est pas dispo. En parallèle pourtant, il est presque h24 en contact avec des "inconnus". Les discussions virtuelles lui conviennent, l'écrit le rassure bizarrement. Il trouve tout un tas de gens super passionnants que la communauté qualifierait probablement de weirdos s'ils révélaient au grand jour leurs insécurités, leurs passions, etc. Mais surtout, il se consacre énormément à la sienne, de passion : Sol est un gamer. Il s'est acheté le casque, les goggles et les gants commercialisés par Shape the Future pour entrer dans un univers fictif et y faire évoluer son personnage, accomplir des quêtes seul ou en équipe, etc. Il a payé de sa poche (après que son coffre ait été vidé par le gouvernement intérimaire rapace dû à la condamnation de son père) et plus tard, ce qui n'était qu'un passe-temps lui a permis de lâcher son job de l'époque, qu'il détestait : Sol s'est mis à concevoir des éléments adaptés à l'un des jeux — personnages, armes, etc ; en a donné un aperçu sur des forums de discussion et a eu la surprise d'être contacté par un des concepteurs du jeu. Depuis il continue d'en créer et de les proposer, environ une fois par mois, obtenant en contre-partie un cachet assez conséquent. Il n'en dit pas la provenance à Nell quand il lui en donne une part pour participer aux frais, parce qu'il y a quelque chose de satisfaisant dans la dose de stress qu'elle éprouve quand elle gueule "d'où tu sors ça alors que tu sors quasi pas ?? Sol ISTM- si tu vends de la drogue je t'arrache les viscères et je te pends avec !!" Il n'est pas un incapable.

Avec des parents aussi étouffant, Diez a toujours été un peu forcée à la soumission. Un rôle de suiveuse auquel elle s'est involontairement cantonnée pendant longtemps, faute de connaître autre chose, d'avoir le choix.

Là où Sol tentait de se faire entendre et se mettait immanquablement les parents à dos, Diez tentait de compenser, de satisfaire pour deux. C'était sa façon à elle de calmer les choses et d'essayer (avec plus ou moins de succès) de tempérer leurs réactions vis-à-vis de son frère, mais aussi une manière de rester hors de la zone rouge : des cris et des reproches et des commentaires rabaissants qui la brisaient de l'intérieur lorsqu'ils s'adressaient à elle. Sol et elle s'entendent vraiment bien mais parfois, il ne comprenait pas son attitude — en venait à lui reprocher de profiter du fait qu'il soit mal vu pour, elle, se faire mousser. Il lui disait qu'elle était lâche ; incapable d'assumer ce qu'elle pensait tout comme lui et lui avouait loin des parents : à savoir qu'elle en détestait cette pression, le fonctionnement de leur famille, la voie qu'on voulait lui imposer, etc.

Le fait est que Diez était juste... plus prudente. Moins affirmée peut-être. Trop incertaine quant à ses propres envies : n'ayant pas forcément de passion ou de plan d'avenir à la base, elle n'avait pas de solide raison de s'opposer, parce qu'elle n'était pas de nature à se rebeller sans fondement, juste pour le plaisir de le faire. Arrivée en Angleterre elle s'est fait quelques amies, des filles qui généralement la voyaient comme un tremplin vers Sol et passaient leur temps à demander à Diez ce qu'il aimait, son emploi du temps, son numéro... Elle a encaissé pendant un temps, pensant qu'elles s'intéressaient sûrement un peu à elles quelque part. Au fond. Même... un peu. Mais il a bien fallu accepter que non. Comme par exemple la fois où sa gouvernante est morte (la femme qui a été sa nourrice, qui lui a donné de l'amour, qui l'a encouragée) et où elle a été inconsolable (alors même qu'elle est restée très détachée à l'enterrement de sa propre mère quelques années plus tôt) et où tout ce que les filles trouvaient à dire était "Tu crois que ton frère a besoin d'être consolé ?".

Petit à petit, sans faire de scène, elle s'est mise à refuser leurs propositions de sorties et à se faire discrète, jusqu'à s'extirper de leur groupe, se laisser oublier. C'étaient juste des filles normales, pas plus intéressantes que d'autres, pas de grandes pertes, et elle était épuisée, Diez, de les écouter pleurnicher et parler de trucs superficiels comme s'il s'agissait de grands drames, se plaindre du fait que leurs parents ne leur aient pas acheté ci ou ça alors qu'au moins ils les aimaient ; de devoir les consoler même si elles ne lui rendaient jamais la pareille, se contentant de lui dire "toi tu sais pas ce que c'est, tu peux avoir tout ce que tu veux. Comme si le fait que ses parents soient riches garantissait son bonheur.

Un peu perdue et n'ayant plus que son jumeau pour repère (jumeau qui a, d'ailleurs, plaqué le Quidditch un peu plus tard en partie pour lui-même et en partie pour elle, parce qu’écœuré qu'elle fasse les frais de cette popularité qu'il n'avait même pas demandée), elle s'est...  laissée approcher par Kelly. Reine des abeilles, pimbêche, mauvaise derrière un charisme captivant ; fille populaire qui, inconsciemment, lui rappelait sa mère. C'est con, non, de se promettre "plus jamais" mais de quand même refaire les mêmes erreurs, sans le vouloir ? Kelly n'a eu de "meilleure amie" que le titre, profitant du fait que Diez l'adorait et la croyait pour la pousser à lui rendre toutes sortes de services à l'école comme en dehors, telle un simple larbin, alors qu'elle lui faisait des coups de pute en quantité avec plus ou moins de discrétion. Pour la convaincre d'encaisser les conséquences désagréables également quand Kelly était en fait en tort, et pour la convaincre de s'en prendre à certains étudiants, suivant des plans qui mettaient Diez mal à l'aise. Le plus triste étant que ces sacrifices étaient vains : aux yeux de cette fille Diez était tout juste un faire-valoir.

Elle a moins ri quand Nell a explosé et criblé sa magnifique chevelure de chewing-gum jusqu'à la racine pour qu'elle n'ait d'autre choix que de tout raser, pendant des vacances d'été que Kelly passait chez les Kuodzevikiute (insupportable, elle s'était mis leur père dans la poche et arrivait à le faire assommer Diez de critiques en les comparant l'une à l'autre). Satisfaction de courte durée, mais qui a été suivie de beaucoup d'autres coups, plus tenaces, auxquels Nell et Sol ont convaincu Diez de participer le reste de l'année : ça été cathartique et l'occasion de s'émanciper. Après que Poudlard ait été attaqué, elle a fini son 1er cycle au CEPAS sans trop faire de vagues, tentant de se défaire de la réputation de bitch (et de larbin) qu'elle s'était taillée en côtoyant Kelly de trop près.

Aujourd'hui Diez est un peu plus à l'aise dans sa peau. Pas débarrassée des anxiétés et des doutes nourris par son éducation puis par la guerre, mais elle se raccroche fermement à la certitude d'avoir de la valeur et s'efforce de ne plus se laisser marcher sur les pieds. Elle a des amitiés plus saines à présent qu'elle entame son cursus au Sawl Centre, mais à la maison c'est un peu compliqué. Depuis l'emprisonnement de leur père, Nell a repris le flambeau de leurs parents en se montrant aussi étouffante qu'ils l'étaient avant elle. C'est pas facile, parce que bien qu'elle ait des connaissances Diez ne se confie plus aussi facilement qu'avant (pour avoir eu le déplaisir de voir ses secrets ou états d'âmes étalés au grand-jour par une Kelly mal intentionnée), et que sa sœur était un peu sa copine, sa confidente. Entre ça et l'enfermement quasi permanent de Sol, elle ne sait pas trop comment arranger les choses. Au moins il y a Raffa, avec qui partager certaines des choses qu'elle ne peut plus faire avec son jumeau.

uc uc uc.

Il y a quelques mois, une fille à l'école s'est suicidée ; c'était une sang-pure, persécutée par les autres élèves à cause de ce qu'avait fait son père ; tout le monde le savait mais personne n'a rien fait. Raffa s'en veut un peu parce que c'est bête, mais elle l'aimait bien et lui a fait une déclaration qu'il a gentiment rejetée, préférant sortir avec une autre, plus sexy, plus populaire... rien de dramatique, juste un choix d'ado. Non ? Mais il ne peut s'empêcher de penser que si elle avait été sa copine, les autres l'auraient peut-être laissée tranquille et alors elle serait encore en vie ; enfin, il aurait pu la protéger quoi. Ou non. Il ne sait pas trop.

Toujours est-il que ça l'a sérieusement marqué et que plus tard, quand netwitch a parlé de médiatiser l'histoire en l'adaptant en série pour sensibiliser la communauté au sort des victimes de harcèlement (sang-pur ou non), Raffa s'est présenté au casting sans la moindre hésitation et il a été pris. uc uc uc.