Le tic est plus que nerveux, il est devenu seconde nature, signe irréfléchi d’un dégoût dissimulé de tous, tout ton être jouant la comédie ; tout, sauf cette main qui couvre régulièrement le tatouage magique, symbole d’une irréversible soumission. Quant à la perte pour la gente masculine, si tu ne réponds rien, la moue s’affichant sur ta bouche signifie bien à quel point tu es sceptique. Il s’efforce sans doute d’être sympathique. Tout vous glisse entre les doigts, quoi qu’il en soit, le Destin se jouant de vos failles, vous jetant dans des erreurs de débutants sans que vous ne parveniez à anticiper, obnubilés par le présent, désireux d’oublier le passé, peut-être trop inconséquents face à l’avenir. Et sa question t’embarrasse plus que tu ne veux l’avouer. Ce qui t’a attirée. Un instant, tu baisses les yeux. Comment exprimer cette vérité que trop peu sont aptes à comprendre ? C’est à peine si tu te trouves toi-même des excuses, tanguant vers le précipice, entre les doutes et la certitude d’autrefois. «
Tout les sorciers qui ont mal tourné sont passés par Serpentard.. » souffles-tu, replaçant tes choix dans le contexte de la première année, de ce qu’on dit de votre Maison chez les braves lions ou les sages Serdaigle. «
Et même chez nous, on voit souvent d’un mauvais oeil le fait de parler aux serpents. » Parce que ça n’est pas naturel. Parce que ces reptiles n’ont qu’une triste réputation et une grande faculté à provoquer le dégoût. «
J’ai passé les trois quarts de ma vie à cacher ça pour qu’on cesse de me juger, pour ne pas faire honte aux Rowle. Le Lord assume parfaitement ce qu’il est, tout ce qu’il est, et si j’étais réticente à l’idée de m’engager, l’échec cuisant de mes cousins m’a poussé à collaborer. Puis.. » La pente est glissante, tu le sais. Il semble éviter le nom, l’irréfutable réalité de la créature depuis le début de votre échange, tu tentes donc de faire preuve d’autant de délicatesse de timbre que possible en poursuivant. «
Nagini est .. fascinante. Dans toute l’horreur de ce qu’elle représente, je crois que c’est elle - plus que la puissance ou le guide qu’Il ne sera de toute façon jamais - qui m’a poussée à plier. » Tu n’es qu’une ombre, un jouet de plus sur l’étagère des sbires, quoi que beaucoup tentent de se convaincre. Aucun des Mangemorts ne vaut réellement mieux qu’un autre, à la moindre déception, à la moindre incartade, c’est la mort assurée ou pire, d’infinies tortures. Que tu partages ce talent avec Lui ne te rend pas spéciale à ses yeux. Au fond, tu savais aussi qu’il n’y avait rien de normal à trouver tant d’intérêt à ce qu’on pourrait nommer chose tant elle est loin de ce que la Terre semble capable d’engendrer.. mais tu es chercheuses de mystères, circonstance atténuante à ton attirance pour les bizarreries.
«
être au fait d’une telle information est bien plus intéressant lorsque le secret est bien gardé. Sinon le rôle de confident n’a plus rien d’excitant. » Tu as un instant d’hésitation, interloquée. Pourquoi accepterait-il de faire cela, de prendre ce rôle ? Tu n’es aucunement irréprochable, tu viens de lui en donner la preuve, pourtant.. il ne te dénonce pas, ne te fuit pas, semble même compréhensif. Il refuse, par dessus toute logique, de te laisser mourir, de te pousser vers une punition que les vôtres estimeraient justifiée. Et tu ne sais comment exprimer ta gratitude, ces remerciements qui ne passent pas ta gorge, au risque d’ébranler l’équilibre instable de ton esprit menacé de rupture au moindre débordement. «
Pourquoi avoir pris le parti de — » Ton regard se tourne vers le groupe d’intrus. Tu n’es pas certaine d’être d’humeur au bavardage sans consistance après une telle conversation. Un brin décontenancée par la situation, tu forges le visage de glace qu’on te connaît, seul Draco dans le lot pouvant repérer ces détails fragiles qui marquent le masque. Il te faut plusieurs secondes avant de comprendre de quoi la soirée digne de ce nom retourne pour la jeunesse sorcière d’une sidérante oisiveté. Devais-tu mettre cela sur le compte de la bêtise ou du déni de la guerre ? Juger n’est cependant pas le plus sage, tu es bien placée pour savoir qu’on ne peut réprimander brutalement ce qu’on n’a jamais approché de si près. «
Rien de mieux que l’Excess pour oublier. » … La réponse ne te vient pas en instantané, rien de grave puisque le petit club du planons-heureux n’est plus apte à déceler les temps de latence depuis un moment, semble-t-il. Et il n’est pas difficile de mettre ton silence sur le compte de ton caractère taciturne brodé de neige. «
.. Draco je.. »
ne peux pas me le permettre. La poussière d’euphorie, les plaisirs interdits, les excès en pastilles, tout autant de choses dont tu es restée à distance parce que tu as l’intime conviction qu’il s’agit d’un réel risque pour toi : ta psyché est compartimentée, nouée dans une complexe organisation qui n’est que trop souvent menacée d’overdose émotionnelle. Imaginer les dégâts que pourrait représenter ne serait-ce qu’un quart d’heure d’oubli te donne des frissons. Que tu dissimules soudainement sous la digne façade de l’intellectuelle trop sérieuse pour ce genre de jeux. Lui saura où tu veux en venir, ça n’est pas le fuir, c’est te fuir. «
Je suis navrée mais je vais devoir te laisser en si douce compagnie. » La musique rend la discussion plutôt compliquée. En guise d’explication, un sourire mutin parfaitement factice et l’art délicat de s’éclipser. Si on te demande, tu ne t’es pas enfermée chez toi pour travailler, non, bien sûr que non, tu diras que tu avais rendez-vous; Il a bien le droit de profiter. Rien ne servait de le mettre dans l’embarras en provoquant une crise de nerfs, dont il n’imaginerait même pas la teneur au vu des derniers évènements.
Amuse-toi as-tu soufflé, du bout des lèvres, avant de t’évaporer.
886 mots.
Fourchelangue ; italique.