Le doux soleil d’hiver, perçant au travers de nuages cotonneux, glissait une lumière envoutante dans le grand salon d’été, perle protégée par une véranda magnifique. Le mobilier entourait le parquet verni de la piste de duel, faite d’un bois exotique aux reflets foncés. Sur la surface se reflétait la silhouette terrible d’une des plus grands duellistes du siècle. Bellatrix Lestrange n’avait perdu qu’un seul combat de toute sa vie. Molly Weasley l’avait ridiculisée, avait bafoué son honneur et les triomphes dont elle avait toujours été l’héroïne. L’ancienne Serpentard n’en était pas restée là. The Red Chalk Manor, la demeure d’Herpo Creek, accueillait une infrastructure digne des camps d’entrainement les plus rigoureux.  Jadis, elle aurait vue de nombreuse victime tomber sur son cirage parfait. Le duel codifié de la tradition demandait au perdant d’avoir passé l’arme à gauche. Sans doute était-ce là l’une des règles ancestrales les plus regrettée de l’épouse de Rodolphus ! Quoiqu’il en soit, en des positions rapides, la sorcière pivotait sur elle-même, aux aguets, afin de ne pas manquer ses cibles. Des tâches sombres glissaient au sol, comme au plafond, passant sur les murs. On aurait dit une scène d’un film moldu, parlant d’un garçon orphelin au pouvoir de voler, cherchant avec obstination son ombre perdue. Les formes étaient humaines et rappelaient étrangement des visages d’une résistance échouée, du premier Ordre du Phénix. La mémoire de la baguette de noyer, entrainant sa propriétaire dans un jeu malsain, se souvenait avec exactitude de toutes les âmes auxquelles elle avait ôté la vie.

Une fois touchée, la cible se consumait comme du papier et de ses cendres renaissait une autre silhouette de renom. Tout perception du relief de la pièce était faussée par ces apparitions fantomatiques, tantôt de simples voiles, tantôt des souvenirs solides et convaincants. Les sortilèges infernaux brisaient des pans de fenêtres entiers dont les morceaux, avant de toucher le sol, faisaient marche arrière pour reconstituer leur paroi. L’ensemble de l’exercice se matérialisait en un balai digne d’un opéra prestigieux. Le duel ressemblait à une danse déchirante, pleine d’émotions et de rages, pleine aussi d’éclats de maléfice qui tombait en poussière. Les producteurs/trafiquants seraient devenu fou face à cette véranda saturée de résidus de magie, matière première de leur Navitas si précieuse, s’enfuyant par les portes ouvertes sur le jardin. L’air froid d’engouffrait en faisant divaguer le chemisier hémoglobine de Bellatrix, plutôt occupée à rire comme une gamine qu’à se soucier de sa coiffure mise aux épreuves du vent hivernal. Entre ses mains, elle sentait le noyer chauffer, demandant encore plus de magie noire, encore plus de cruauté, si bien qu’un sortilège odieux toucha l’ombre pervertie d’Alice Londubat, faisant résonner le cri de la femme devenue folle, écho des heures légendaires de l’héritière des Black.

« Signa Inferre » et les ombres s’évanouirent immédiatement, répondant au sortilège d’entrainement moyenâgeux. On racontait que Salazar Serpentard lui-même en faisait l’utilisation pour former ses élèves… Remettant en place une mèche rebelle, Bellatrix Lestrange s’en retourna vers un canapé sur lequel apparu un service à thé - résultat sans doute du sens de l’observation de son elfe de maison. Torturer ces créatures donnait des résultats d’efficacité incroyable. « Ugley ! Mon neveu est-il arrivé ? » Sans un regard, et n’attendant une réponse que d’une oreille distraite, elle se servait déjà une tasse d’un thé particulièrement vert alors que la table basse accueillit ses jambes couvertes d’un pantalon de combat emprunté à son époux. L’épouse de Rodolphus était contente de son entrainement alors que d’un geste sec de la baguette, les portes extérieures se fermèrent pour mettre un terme au courant d’air.