La torture serait moins pénible. Si Sue n’était pas si attrayante. Si séduisante. Enveloppée dans cette robe. Les joues encore rosies. Les quelques mèches échappées du chignon sur sa nuque dénudée. Sa main posée sur son cou frêle. A couper le souffle. Même avec ses prunelles agacées. Et la tempête qui danse à l’intérieur. Même aussi énervante. Elle brûle comme elle pouvait le faire il y a longtemps. Combien de fois ai-je craqué devant ses opales rageuses ? A mettre mon égo de côté. A oublier le pourquoi de cette fureur. Pour presser son corps contre le mien. Pour mieux obtenir une trêve entre deux disputes. Pour mieux la redécouvrir à chaque fois. Mais c’est différent maintenant, n’est-ce pas ? Les adolescents fougueux et insouciants ne sont plus là. Laissant la place à deux adultes, campant farouchement sur leurs positions. Ils sont partis. Et nous, on n’est plus capable de ranger l’orgueil. De passer outre les blessures. Pour se réconcilier. Puisqu’il n’y a plus rien à raccommoder. Plus d’amoureux à réunir. « Bien, maintenant que tu as terminé de jouer avec moi, je me retire … » Elle se fout de moi. Son insolence m’irrite une fois de plus. Anime l’agacement. A croire qu’elle ne sait faire plus que ça. Et elle en abuse. Encore et encore. Sans relâchement. Mais bordel, pour qui elle se prend ? A m’accuser pour ne pas reconnaître ses torts. Elle ne comprend pas. Elle ne saisit pas. Le bouleversement quand l’imperium se lève. Ce remue-ménage de contradictions. D’anciens sentiments et d’engagement actuel. Transpercé par sa comédie. Et ce putain de sentiment. D’avoir été manipulé de tous les côtés. Non, elle ne peut pas le comprendre. Elle en est incapable. Elle se positionne en victime. Comme si j’étais le responsable du jeu qu’elle voulu créer. C’est ce que je m’apprête à lui balancer. Avant que sa main ne m’arrête. Encore docile, je laisse mes mots se bloquer dans ma gorge. « Assez, Marcus ! J’en ai assez eu. Tu me souffles le chaud puis le froid, je suis épuisée. Je rentre chez moi, je te laisse. » Et bien casses-toi. Tu n’aurais même pas du venir ici ce soir. « Va retrouver ta fiancée, c’est avec elle que tu dois être. Je ne t’importunerais plus. » Casses-toi. J’aimerai le lui hurler. Lui crier de dégager. Mais aucun mot ne parvient à s’extirper de mes lèvres. Encore bloqués dans poitrine. « Tâche d’être plus heureux avec elle qu’avec moi. » Et elle s’en va. En emportant avec elle les morceaux de palpitant. Brisés et ramassés par ses soins. Et la colère chute. Pour laisser toute la place à la peine. Qui se fait un plaisir de tordre ce qu’il me reste de conscience.
Je me retourne vers la fenêtre. Mes doigts s’aidant de mon reflet pour renouer correctement la cravate. L’image de Susanna a disparu. Ses formes ne perlent plus sur la paroi vitrée. Il n’y a plus que le vide. Et ce regard désespéré d’adolescent qui m’observe. Je souffle un instant, les paupières closes. Et me laisse bercer par le silence quelques secondes. Avant de sortir de la pièce. Pour retrouver le tumulte de la fête. Je perçois l’agitation. Mais elle n’arrive pas à m’atteindre. Les oreilles entendent. Mais n’analysent pas. Créant une bulle qui me sépare de l’atmosphère environnante. Je redescends les escaliers. J’entre dans le salon. Je suis là. Mais mon esprit est ailleurs. Il est encore là-haut. Avec le corps de Sue contre mes hanches. Avec ses reproches contre mon cœur. Mais ma silhouette avance. Mécaniquement. S’engouffre parmi les invités. Mais j’ai l’impression de ne plus appartenir à cette scène. L’esprit décalé. Etranger à tout ce vacarme. Je m’efforce de redescendre. Petit à petit. Mes opales observent. Pour mieux revenir à la réalité. La soirée continue. Comme s’il ne s’était rien passé dans la bibliothèque. Comme si le temps n’avait pas défilé. Tout le monde encore à la même place. L’ambiance festive toujours présente. Je redescends encore un peu plus. Mes yeux glissent sur les invités. S’attardent sur l’ombre d’un gosse isolé des autres. Les prunelles vides de Wayland. Une étincelle de satisfaction. Minime. Mais existante. Qui anime un instant le néant ancré dans ses rétines. Je dévie une fois de plus le regard. Le décor s’éclaire. La bulle s’étire. Le brouhaha s’amplifie. Les détails se forment. Le sourire de mon père. Qui s’efface. Face aux traits crispés de mon visage. Il se tient près de la baie vitrée. Un verre à la main. La bulle s’efface un peu plus à chacun de mes pas. Ma mère. Enjouée. Jusqu’à parler avec ses mains. Sa voix qui monte dans les aigus. Pour appuyer son monologue. Et Aliss. Sa mine rassurée en me voyant. Son soulagement qui s’effondre sur ma culpabilité. Sa consolation qui la pousse et l’enfonce sur mon cœur fraîchement endommagé. Ma bulle s’envole. Je reviens enfin sur terre. Le sourire aux lèvres. Simulé. Pour ne rien laisser paraître. Faire semblant. Pour mieux oublier Susanna.
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