――――――-―• Titre titre titre •――――-――― De la Ginny du début, il ne restait que l’enveloppe. Une vieille enveloppe ayant subi avec acharnement le poids des années. Une enveloppe pliée, dépliée, froissée, délabrée, brulée, humide, moisie, une enveloppe de chair endolorie et d’os brisés. Du papier, si affiné par le temps que la moindre contrainte viendrait déchiqueter. De la Ginny du début, du début de la fin, de l’avant-guerre, de l’avant-tout, il ne restait que l’enveloppe : sa peau autrefois blanche, noircie et rougie par les coups, ses cheveux dont le flamboyant d’autrefois n’était que souvenir, et ses yeux, vides, miroirs d’une âme qui avait déserté. Elle avait été, n’était plus. Un passé, pas de futur, figée dans un présent sans espoir. Une enveloppe vide. Une enveloppe charnelle sans émotion ni volonté. Ils avaient fait d’elle un objet. Ils avaient fait d’eux des objets.

――――――-―• Titre titre titre •――――-――― « Comment… » La voix de la jeune fille s’étouffe dans un râle crépitant qui laisse naître une toux violente. Ginny passe rapidement son bras derrière ses épaules et la redresse. Elle attrape sur le sol à sa droite un tissu dont la blancheur d’autrefois n’apparaissait plus que sous la poussière grisonnante et la place à quelques centimètres de la bouche de la jeune fille. Une expectoration sanguinolente jaillit de ses poumons et vient se loger au cœur du tissu. Les yeux humides, la jeune fille peine à reprendre son souffle. Ginny l’aide à rester droite et lui essuie la joue à l’aide de son pouce. « Ne parle pas, garde tes forces. » La jeune fille ferme les yeux et fait un effort qui semble surhumain pour respirer plus profondément. Elle reprend contrôle de son corps et s’extirpe de l’étreinte de Ginny pour se caler assise contre le mur froid et humide du cachot. Elle désigne d’un coup de menton le bras de Ginny sur lequel serpente, au milieu de nombreuses cicatrices, blanches, rouges et noires, une balafre purulente qui peinait à guérir dans la crasse ambiante. « Comment supportes-tu la douleur ? » Ginny se crispe. Elle pourrait répondre à la question de la façon la plus honnête qui soit. Elle pourrait dire qu’elle ne sent plus aucune des douleurs affligés sur son corps. Que plus aucune blessure sur aucune parcelle de son anatomie n’est déplaisante tant son âme saigne. Que son esprit, si profondément meurtri par son cauchemar constant a obtenu le monopole de la souffrance. Elle pourrait. Mais elle sait que cela n’aidera pas. Elle préfère alors donner le secret de son esprit, l’unique raison de sa sanité. « L’espoir. » Depuis la venue de Harry à Poudlard, la flamme qui brulait en son sein et qui lui avait donné le courage et l’entêtement pour refuser la soumission de Carrow et continuer la lutte à Poudlard, avait été amplifiée et avait donné naissance à un feu suffisamment puissant pour lui permettre de continuer. Elle ne comptait pas les jours qu’ils passaient dans ce cachot, elle craignait que le poids du temps d’éteigne son feu. « Je sais qu’on va venir nous chercher, je dois être en vie pour les accueillir. » Elle esquisse un sourire en direction de la jeune fille. « Qui ? elle s'interrompt pour reprendre son souffle. Qui vient nous chercher ? » Ginny pense : Harry. Elle répond : « L’ordre. » Elle observe l’espoir se glisser sur les joues de la blessée et tirer les commissures de sa bouche pour s’insérer dans son âme par la fente de son rictus. Dans ses yeux sombres, déjà, une étincelle prend vie.