« Try to fix these broken things, all we had were fragments. » ♱ - Jaymes Young, Fragments
« it’s hard looking back knowing what i could’ve done. I’m never going back. I’m always on the run and you never really find the pieces that you leave behind. »
La colère gronde derrière les ailes brisées de ton âme. Ypsös est mort. Lâchement abandonné aux animaux sauvages, sa baguette se retrouve entre les mains d’une impure idiote qui n’en différencie ni le sens ni les affinités. Il ne t’a rien laissé. Et à la place des larmes qui devraient te délivrer de la fureur ne fait que siffler le serpent cherchant le sang et la vengeance. Fred est certes la meilleure chose qu’il te soit arrivé mais l’incendie des doigts de l’héritier ne s’efface jamais complètement de tes souvenirs ; tes ongles sur sa peau, ses lèvres contre ton cou. Coupable. Criminelle d’un pêché de désir incontrôlé. Ne pas ressentir. Ne jamais céder. Tu t’es forgée dans une glace si épaisse qu’elle est devenue ta prison, t’écartant avec brio des plaisirs de vivre pour t’y jeter avec violence.
Le sang, la magie, la mort.
Sur le sol glisse l’animal chasseur, un Daeva aussi noir que tes cheveux, à l’affût de ta contrariété du moment, l’unique personne sur qui passer tes nerfs serait légitime. Tu n’es légitime pour personne.. Maîtresse et bâtard. Errer parmi les insurgés est dangereux mais aucun d’entre eux n’a osé protester, aucun de ceux que tu as croisé, précédée du serpent, n’a tenté d’ouvrir la bouche pour t’arrêter. Ombre morbide. « L’âge vous rend con ? » lâches-tu dans le dos de ta proie. Il est plus grand, plus expérimenté, dangereux et tu t’en fiches. Tu te fiches de tout, comme de la première mue de Mephisto. Ton regard bicolore le fixe avec intensité. Il ne t’apprécie pas, tu ne lui plais pas mais ce qui ne passe pas c’est qu’il se soit opposé aussi férocement à ta famille - à Fred, à Sevastian. « Ou vous êtes juste un enfoiré caractériel de base ? » Ta politesse aux oubliettes. La baguette est dans ta main, suit la ligne du short, mêle sa sombre couleur à celle du long gant couvrant la Marque.
« J’ignore la coutume mais dans le monde d’où je viens, on parle avant de cogner. Ou votre vocabulaire est-t-il trop limité pour demander poliment ? » Au sol, Daeva est vigilant, frôle les chaussures compensées. Garde du corps. Arme meurtrière. Llewellyn n’a pas digéré, et bien toi non plus. Peut-être avais-tu la chance d’avoir eu Fred, d’être sous sa protection mais rien ne l’empêchait de poser des questions, avec calme, tu ne demandais même pas de tact. Le tact était surfait. « On peut régler cela tout de suite ou attendre que votre manteau miteux du siècle dernier tombe en lambeaux, au choix. Mais je ne supporterai pas vos hurlements d’ours mal léché à la prochaine rencontre. » Et tu oubliais la délicatesse, les nerfs à vif, le coeur en sang. Ypsös est mort. Elle a sa baguette.
Sur le sol devant lui, une mer de papiers, de notes, de détails. Ouvert, Tales from another world, qu'il referme quand il entend des pas derrière lui. Laissé plus loin, son pardessus, comme une peau abandonnée, une mue estivale. Devant lui, le lac, celui le plus près de la grotte qu'il partage avec Sam, reliée à tout le système du campement des Loups par l'intérieur, tout en étant la plus éloignée de toutes. Il n'aurait pu supporter d'être aussi près des autres.
Sam et lui ont d'ailleurs reçu leur prochaine mission. À faire ensemble. Il doit avouer que cela l'angoisse, d'être aussi longtemps avec le petit, aussi loin de leur routine, de ce qu'ils connaissent, de la nature. Dans un autre pays – et pas le moindre pays de foutus emmerdeurs, notons-le. Il s'est tout de même mis à la tâche. Dressant une liste des choses à faire avant leur départ, des informations à chercher, des personnes à contact, des objets à emporter. De la Tue-Loup, par exemple, parce que c'est bien joli jouer au loup libre et sauvage dans les bois de Daeva, mais hors de question de faire ça en sol américain. Ils ne risquent pas de trouver la blague bien amusante, sinon. C'est une pause dans son travail qu'il prend, lorsqu'il entend des pas derrière, faire bouger les feuilles, serpenter dans les aiguilles de pin, dans l'herbe tendre. L'Auror a les sens affûtés, l'habitude, et c'est net qu'il s'arrête dans le déboutonnage de sa chemise élimée, attendant que la personne s'avance tout à fait. Le soleil qui perce dans les branchages et fait briller le lac fait se jeter sur le sol une ombre féminine. « L’âge vous rend con ? Il se retourne lentement. Jusqu'à planter ses yeux dans ceux de Lucrezia Rowle, qui lui fait la fleur de venir le déranger dans sa future baignade. Ou vous êtes juste un enfoiré caractériel de base ? »
Il ne répond pas. De toute façon, on connaît la réponse : enfoiré caractériel de base, c'est même un compliment, dans son irrécupérable cas. Davius estime franchement que Lucrezia Rowle ne mérite pas qu'il lui accorde une once d'importance, mais puisqu'elle en réclame, autant lui en donner. De toute façon, la vipère n'a pas fini de cracher son venin, en témoigne le monologue qu'elle continue : « J’ignore la coutume mais dans le monde d’où je viens, on parle avant de cogner. Ou votre vocabulaire est-t-il trop limité pour demander poliment ? Toujours pas un mot en réponse. Pourtant, la colère déjà afflue, se lit dans sa posture crispée, sans pourtant qu'il cille plus que nécessaire. Il surveille les deux serpents devant lui. Trop facile de se faire mordre par l'un ou par l'autre par la faute d'un mouvement brusque. On peut régler cela tout de suite ou attendre que votre manteau miteux du siècle dernier tombe en lambeaux, au choix. Mais je ne supporterai pas vos hurlements d’ours mal léché à la prochaine rencontre. » Lorsqu'elle se tait, cela semble être pour de bon. Sa main crispée sur sa baguette ne bouge pas, restant immobile, position toujours prête à devenir combative. D'attaque. « De quoi désirez-vous parler, Miss Rowle ? Je croyais avoir hurlé assez fort pour être compris, la dernière fois. » La voix est calme, bien qu'elle tranche, bien qu'elle soit sèche, conforme aux accents toujours rudes qu'emprunte Davius quand il parle. Pas impolie non plus, ce qui peut surprendre, mais sa tension n'a rien de la colère dévorante de mai, de ce qui a brûlé jusqu'à ce qu'il nourrisse l'animal vorace en lui. Curieuse, peut-être, à quelque part, sous la sécheresse. Qu'est-ce qu'elle lui veut, la Rowle ?
« Try to fix these broken things, all we had were fragments. » ♱ - Jaymes Young, Fragments
« De quoi désirez-vous parler, Miss Rowle ? Je croyais avoir hurlé assez fort pour être compris, la dernière fois. » Le mépris de Davius n’avait d’égal que ton entêtement, ta volonté de comprendre. Oh certes, tu n’imaginais pas que l’insurrection t’ouvrirait grand les bras, te montrerait ses belles ailes d’ange et le chaudron au pied de l’arc-en-ciel, seulement la violence de ton arrivée te laissait un goût amer. Pourquoi tant d’agressivité ? D’autant que tu te serais pliée à l’interrogatoire, on te l’avait seulement épargné. « Du fait que j’ai été Mangemort. » C’était dit, lâché comme si tu lui avais parlé du lac ou de la splendeur d’un soleil si rare à Londres. Mangemort. Fidèle petit animal du sombre Lord autoproclamé. L’unique gant que tu portes laisse imaginer ce qu’il y a à cacher, là, sur la peau de porcelaine. « J’ai cru comprendre que vous étiez Auror, vous devriez profiter de ce que je peux savoir au lieu de rejeter en bloc le concept. » Mais tu es jeune. Les vingt-six années ne se lisent pas sur ton visage tantôt glace tantôt poupée. Te pense-t-il simple serpent à la solde d’un monstre, petit pion paumé parmi tant d’autres dont les atouts sont aussi légers que le nombre de printemps passés ? Si tu ne l’avais pas avoué, ton ambition t’avait mené auprès des monstres, de ces noms qui font frémir : Rookwood, Lestrange, Carrow. Curriculum Vitae de choix, de l’autre côté de la barrière. Tu le taisais, ici, même à Fred. Tu préférais passer pour la jeune fille un peu perdue dont la Marque n’était que le symbole d’une erreur ou, supposément, une pression familiale. Tes talents dormaient dans l’atelier, dont seuls les rubis les plus moralement acceptables sortaient. L’émeraude toxique de ta poche n’avait aucune jumelle. Méthodes douteuses.
La faim ronge peut-être ta logique, ton instinct de survie qui se meurt avec ton refus de manger, de te nourrir plus que ce minimum pour couvrir le problème ; que personne ne sache. Miss Rowle, avait-il dit. C’est sans doute la première fois que cela te hérisse autant, allergie à ton identité passée. Tu n’es plus miss, tu n’es plus rien, même plus Rowle. Seulement Luce, celle de Fred, celle de George. Celle dont le coeur n’était pas rongé à l’acide par les déceptions. Ypsös est mort, qu’est-ce qui te retient ? Tu n’en sais rien. Les doigts serrés autour de ta baguette, le regard perçant, les sifflements des serpents et pourtant tu ne bouges pas, retenue par les cordes invisibles d’un deuil difficile. Tu n’étais personnes pour l’héritier des Burke, l’amante d’une nuit, le béguin effrité par la guerre ; le souvenir de ses baisers qui te hante, te revient. Comme un boomerang. « Indésirable n°4. » Joyeusement placardé un peu partout. Rebelle parmi les fuyards.
« J’imagine que pour vous, je suis tout autant indésirable. » Vile traitresse qui pourrait encore retourner sa veste. Être une espionne, la rampante à éliminer. « Vous vouliez des réponses. Je suis là, allez-y. Posez donc vos questions. Je ne suis même pas Occlumens, vous pourriez vous amuser. » à ses risques et périls, cela dit, ton état mental, les noeuds, les tiroirs et les dénis avaient de quoi rendre les intrus fous. C’était sans conteste ce qui t’avait sauvé, durant le mois d’avril, dans ta transition. Si tu avais envie de lui tordre le cou, tu tentais d’abord la politesse. Les ongles dans ses beaux yeux pour plus tard.
Le ton banal, l'air de rien : « Du fait que j’ai été Mangemort. » Il tique, il cille; difficile de cacher son sentiment face à cette condition, qu'il a encore beaucoup de difficulté à dissocier de la femme. Qu'importe le gant, de soie ou de fer, il ne sait effacer la Marque qui la condamne à ses yeux. « J’ai cru comprendre que vous étiez Auror, vous devriez profiter de ce que je peux savoir au lieu de rejeter en bloc le concept. »
Profiter de ce qu'elle sait.
Un éclat, un seul, d'un rire pauvre, un éclat cynique et désabusé. Ses doigts viennent rattacher sa chemise, se disant que cet entretien vaut peut-être la peine qu'il s'habille. C'est que Davius n'est pas un adolescent de seize ans idéaliste, prompt à croire à la rédemption. Il en a trop vu, il a trop souffert. En les Mangemorts, il n'a qu'un mépris teinté de haine, de dégoût. Contre ses vieux ennemis, que des griefs qui s'accumulent sans que leurs torts récents viennent effacer ceux passés. Il a la rancune tenace, le jugement souvent facile quand la Marque s'étale sur un bras. On ne devient pas Mangemort par accident, parce que les convictions du Lord ne sont pas attrayantes, par simple égarement. Il en a trop entendu, des histoires de Mangemorts repentis, plaidant à la manipulation, au chantage, à l'Impero et à l'infiltration pour prendre ses mots au sérieux. Puis, le Lord aime à s'entourer de personnes talentueuses, de sorciers doués; il serait idiot de penser qu'un tel homme garnisse son armée personnelle de crétins finis incapable de lacer leurs souliers. Non. Davius n'est pas dupe. Lucrezia Rowle n'est pas une jeune femme sans défense, ni une enfant perdue, sauvée par la bienveillance des insurgés, deus ex machina passant par un rouquin alcoolique et une Française à la langue trop bien pendue.
La voix s'élève une nouvelle fois. « Indésirable n°4. » Un signe de tête, léger, un geste du bras, révérence non entièrement exécutée, pastiche qui se joint à la moue moqueuse qui a brièvement étiré ses lèvres. Lui-même, pour vous servir. « J’imagine que pour vous, je suis tout autant indésirable. Pas besoin de l'imaginer : ça aussi, il l'a hurlé assez fort pour être compris. Vous vouliez des réponses. Je suis là, allez-y. Posez donc vos questions. Je ne suis même pas Occlumens, vous pourriez vous amuser. »
Oh. Elle risque d'être déçue, la Langue-de-Plomb.
« Je n'ai rien à vous demander. C'est net, ainsi. Un peu détaché, également. Comme s'ils parlaient de la pluie et du beau temps. Vos motivations, vos talents et vos remords ne m'intéressent pas. Vous non plus. » Il est sincère. Chaque pensée dirigée envers Lucrezia Rowle a été pour la détester, pour le mettre en colère, mais jamais il ne s'est penché sur elle. Il ne désire pas la connaître, ne désire pas la côtoyer, lui parler, être son allié. Il n'a pas le choix, pour ce dernier point, et il fait alors le choix d'éviter au maximum d'être dans ses parages. Davius fait tourner sa baguette entre ses doigts, lentement, fait passer ses yeux du serpent au sol à celui debout, se concentrant sur ce regard perçant (bleu, ou vert, peut-être, il n'en est pas sûr). Il accepte toutefois une concession, dans son discours, une nuance qui peut être considérée comme une grande avancée, vu le spécimen d'enfoiré caractériel que nous avons ici : « Vous n'êtes plus Mangemort, grand bien vous fasse. J'espère seulement que lorsque le crachat retombera, ce ne sera pas sur le nez de vos alliés. »
C'est bien ce qui l'inquiète le plus, dans toute cette histoire. Que malgré sa potentielle sincérité, ses actes retombent sur ceux qui l'ont soutenue, qui l'aident, et que les bombe explose au sein des insurgés.
On ne quitte pas le Lord impunément. À chaque fois, c'est les pieds devant.
« Try to fix these broken things, all we had were fragments. » ♱ - Jaymes Young, Fragments
« Vos motivations, vos talents et vos remords ne m'intéressent pas. Vous non plus. » Si la révérence avortée t’avait fait sourire intérieurement, ses mots, eux, te firent hausser un sourcil. Tes remords ?, mais tes seuls remords concernaient Gabriel, la vie que tu n’aurais jamais, pas les tortures, les meurtres ou l’ambition. Certes, parfois la conscience secouait ta stabilité et chaque acte te revenait dans les longs cauchemars nocturnes, silencieux, serrée entre les bras de Fred.. seulement tu ne prétendais pas être là par remords. Tu estimais faire ton possible pour les insurgés, suffisamment pour qu’il ne t’ignore pas de la sorte. Ne pas être aimée, c’était normal, mais lui. Lui. Tu devais comprendre. Juste comprendre. « J’aurais su réparer votre vieillerie. » Le pardessus. Il y avait moyen de lui redonner un peu de couleur, de résistance. Ta mère savait faire ça. Sa vieille robe préférée ou des réparations d’accessoires usés par le temps. Il n’accepterait pas, de toute façon. « Et je ne suis pas là par remords. Je suis là pour ma famille. » Ils le sont, désormais. Malgré ce défaut incurable te poussant à penser qu’ils vont t’abandonner, qu’ils vont laisser tomber la lutte pour te faire tenir debout, t’apprendre à aimer. Ils sont tout ce que tu as. Tu avais sacrifié une possible vie paisible pour gagner la fuite et.. tellement plus. Ypsös est mort, avec lui tes espoirs de petite fille.
« Vous n'êtes plus Mangemort, grand bien vous fasse. J'espère seulement que lorsque le crachat retombera, ce ne sera pas sur le nez de vos alliés. » Il fait tourner la baguette entre ses doigts, la tienne reste immobile. Ton regard demeure fixé sur son visage ; encore quelqu’un de grand. « Je serai toujours Mangemort. Reniée, déshéritée, traquée, mais on ne se défait pas de la Marque, pas de la laisse, pas du nom. » On ne part jamais, on mange seulement les pissenlits par la racine. Et le temps viendrait où la douleur finirait par achever ta volonté. Tu connais la rage du Lord et sa violence. Il se vengerait de la trahison, même du bout du monde. « Pourquoi n’acceptez-vous pas d’aide ? » Borné ou abruti ? Tu penches pour la seconde option. Tu n’as pas fait attention à la chemise, parce que tu es en colère, tu es un peu désorientée. Tu veux tes réponses et partir. Il est trop fort pour lui casser le nez. Il le mériterait, pour Sevastian.
« Ecoutez, je veux simplement savoir d’où vient la baguette de la gamine rousse, vous semblez attentif et j’espérais que vous le sauriez. » tu dois savoir. Et puis tu avais envie de te défouler sur quelqu'un, d'emmerder l'énervé du bocal. Ici, perdue entre les indésirables, tu te sentais démunie face aux évènements d’une vie normale, lointaine, où l’on pouvait pleurer les morts sur les tombes. La tristesse de ton regard se mêle au fond de colère, tu tangues entre les deux choix, les deux excès. Les serpents au sol sont roulés sur eux-mêmes, paisibles mais attentifs. « .. s’il vous plaît. » Vas-y, tente la politesse, comme si ça allait assouplir une tête de con.
« J’aurais su réparer votre vieillerie. » Sa vieillerie se porte très bien, merci. Il ne baisse même pas les yeux pour regarder le pardessus au sol, fronçant tout de même les sourcils. Ça ne sert à rien de le réparer. C'est à lui de faire son deuil, d'accepter que Jillian ne reviendra pas et que tout le matériel du monde ne peut la remplacer. Il n'a pas besoin de cela pour se rappeler d'elle. Il ne baisse pas les yeux, mais il mord légèrement l'intérieur de sa joue – signe de réflexion, de conflit. « Et je ne suis pas là par remords. Je suis là pour ma famille. » Sa famille. Tiens donc. Il mord un peu plus fort l'intérieur de sa joue, retenant les commentaires féroces qui lui viennent à l'esprit. Il en a déjà assez dit, déjà assez hurlé.
« Je serai toujours Mangemort. Reniée, déshéritée, traquée, mais on ne se défait pas de la Marque, pas de la laisse, pas du nom. Reniflement de mépris. Elle est toujours Mangemort. Grand bien lui fasse également. On devient Mangemort et on meurt Mangemort. » Juste un murmure – de compréhension, étrangement, peut-être, pour elle. Le seul commentaire qu'il s'autorise. Il le sait trop bien. Il connaît trop bien ce discours, cette réalité, et elle le sait tout autant que lui. Mieux, puisque c'est elle qui porte la Marque. « Pourquoi n’acceptez-vous pas d’aide ? » D'aide ? D'elle ? Si elle le pense abruti, lui n'accorde pas non plus grande valeur à son intelligence, en ce moment. Elle n'a définitivement rien compris. Elle ne pense pas. D'aide ? De Lucrezia Rowle ? D'une Mangemort ? S'écoute-t-elle parler ? T'écoute-t-elle ? Non, sans doute que non, sans doute pense-t-elle uniquement à sa famille, son esprit étriqué se fermant à la compréhension. Et de l'aide en général, il en a beaucoup. Il en accepte, même. Pas toujours. Il le fait quand même. Sa voix est lasse, quand il répond, ne voulant pas s'étendre davantage sur les raisons pour lesquelles il ne désire soi-disant pas d'aide (il n'en veut pas, non, jamais, de personne, il est trop orgueilleux, tout est de sa faute, il mérite ce qu'il vit – en accepte, malgré tout, parce qu'il n'a pas toujours le choix, parce que sinon, il va s'effondrer) : « Vous n'êtes pas la première que je rencontre. » La première Mangemort. La première personne qui veut l'aider. La première récalcitrante. Qu'importe. Elle n'est simplement pas la première.
Émanant de Davius que cette lassitude agacée, traduisant ce désir d'être seul. Émanant de Lucrezia, une colère froide, sourde. Les serpents sont calmes, mais leur maîtresse ne l'est pas, malgré toute la façade qu'elle gade. Ses mots tranchent, ses yeux attaquent. « Ecoutez, je veux simplement savoir d’où vient la baguette de la gamine rousse, vous semblez attentif et j’espérais que vous le sauriez. Ha! La voilà, la question qui brûle, celle qui motive le dérangement et la venue de la Rowle à lui. Une ombre de sourire sardonique. Il était temps qu'elle crache le morceau. La gamine rousse, c'est Blair. La baguette, c'est celle d'Ypsös Burke. Souvenir qui rallume en lui un feu, subitement, une légère flamme. La chasse. Il a chassé. .. s’il vous plaît. »
Oh. La baguette tourne encore entre ses doigts, prête à être empoignée fermement pour se protéger, pour attaquer. Comme si elle ne savait pas. C'est justement cette pensée qu'il verbalise : « Si vous me posez la question, c'est que vous le savez déjà. C'est même qu'elle en sait plus que tous les autres. Prise à un Mangemort. Mort. » Lequel ? Elle le sait. Il n'a pas besoin de dire son nom. Que désire-t-elle ? Qu'il avoue ? Il n'a honte de rien. Il ne sait juste pas s'il se pliera à son désir. Peut-être. Pour qu'elle brûle, pour qu'elle s'enrage, pour qu'elle se casse. Peut-être que non. Pour qu'elle brûle encore plus.
« Try to fix these broken things, all we had were fragments. » ♱ - Jaymes Young, Fragments
« On devient Mangemort et on meurt Mangemort. » Tu acquiesces. Pas de démission, pas de retraite auprès du Lord ; servitude jusqu’à la mort. Tu te souviens encore de la douleur, de l’implosion de tes barrière émotionnelles, de ce grand ouragan envahissant ton âme lorsque tu avais reçu la Marque. Rongée, cassée, brisée. Détruite, sans doute, seulement maintenue par les fils de l’amour que te porte Fred, marionnette désarticulée, sans autre but que le protéger. Les baisers d’Ypsös, la sécurité des bras de Fred. La faim, latente, à peine ressentie, et les nerfs à fleur de peau. « Vous n'êtes pas la première que je rencontre. » Ton visage se penche légèrement tandis que tu réfléchis, avec la sensation qu’il n’a pas compris ce que tu as dis. Tu as l’habitude alors tu tentes, tu fais l’effort de reformuler. « Je.. Je voulais dire : pourquoi rejeter les repentis, en général, pas.. » Il t’a déstabilisée. Et le château de cartes de ta rage s’effondre lourdement. Accroche-toi. Son sourire, le matin.
« Si vous me posez la question, c'est que vous le savez déjà. » Tu fixes cette baguette qui tourne et Daeva ne lève que sa tête noire ornée de la coiffe, Cobra Royal méfiant, prêt à défendre. « Prise à un Mangemort. Mort. » Il y a un tremblement, sous le gant, dans cette main qui tient l’arme toujours dirigée vers le sol. « Sentence ? » siffle l’animal, à tes pieds. Il est toujours à demi roulé sur lui-même. Et l’absence de mots s’étire, tu imagines tant de façons de le torturer. Tu sais, tu sais que c’est lui. Et tu le détestes par tous les pores de ta peau. Un Acidum Anguis te démange. Tu voudrais l’enchaîner avec un de ces bracelets magiques rongeant la peau, rongeant lentement chaque muscles, savourer avec langueur son agonie, parce qu’il t’a volé ta dernière chance. « La mort ? » Interroge Lucifer, qui a également relevé la tête, tendu son petit corps. Il n’a pas la terrifiante taille de Daeva mais son venin ne pardonne pas.
Tu es en détresse mais le lien avec les créatures est net, le contrôle implacable. Tu pourrais jeter les deux tueurs sur l’homme trop fort pour tes poings, pour lutter avec ta seule baguette. Et Morgane sait combien tu en crèves d’envie. Le voir mourir à petits feux. « Non. Aucune. » Tu ne peux pas. Tu leur donnerais raison, à tous. Tu craquerais plus tard ; en attendant, ton nez se relève, la couche de givre se reforme. « C’est vous, le coupable. » Ca n’a rien d’une question. Il y avait presque une vibration dans sa façon de le dire, quelque chose de sombre glissé dans.. tu ne sais pas vraiment quoi mais tu es certaine que c’est lui, l’enfoiré qui a tué Ypsös. Un insurgé. Tu.. un allié. « Pourquoi ? Vous .. » Le vocabulaire te manque. « Ca n’est même plus un instinct de survie. J’ose espérer que votre épouse est fière d’avoir un animal sauvage pour mari. » Tu l’as craché avec une telle amertume. Tu n’as même pas senti ta main se poser sur ton ventre. Et tu ne penses pas réellement un seul mot de tout cela ; vous étiez tous réduits à ça. A tuer, à vous battre. Mais Ypsös gardait dans ton esprit cette image papier glacé de l’adolescent doux, du premier homme qui t’a regardée.
« J’ai mes réponses, je vous laisse en paix. » La saveur de l’inachevé. Les serpents se sont glissés plus loin, comprenant qu’il fallait rentrer mais toi, tu ne consens pas à tourner le dos. Tu ne sais pas faire le deuil. Tu ne sais pas aimer.
La jeune femme est légèrement déstabilisée par ta réponse.
« Je.. Je voulais dire : pourquoi rejeter les repentis, en général, pas.. »
Ils ne se sont pas compris. Il s'en fout. La réponse s'y applique également. Elle n'est pas la première qu'il rencontre.
Déstabilisée, certes, mais pas autant qu'après son commentaire sur la provenance de la baguette de Blair. Le commentaire plat, implacable, ne laissant pourtant rien à deviner. Davius est attentif, ses prunelles passant du visage de Lucrezia à sa main tenant sa baguette, à son bras ganté, aux reptiles qui se sont dressés, au sol. Le silence est long, frissonnant; elle tremble, légèrement. L'Auror attend l'attaque, la réaction, prêt à encaisser le coup, les coups autant que les mots. Les serpents sifflent et leur maîtresse leur répond, d'un sifflement bas qu'il ne peut comprendre. Ils ne l'attaquent pas, cela dit. Pas tout de suite. Pas encore. « C’est vous, le coupable. » Affirmation. Vérité. Pas d'assentiment, pas de négation : ce meurtre, il ne l'a pas réclamé, parce qu'il n'avait pas besoin de le faire. Il n'a pas besoin de plus de célébrité, de plus de noms à son actif, l'indésirable n°4. « Pourquoi ? Vous .. Ca n’est même plus un instinct de survie. J’ose espérer que votre épouse est fière d’avoir un animal sauvage pour mari. »
Son épouse.
Les battements de son cœur ralentissent. Encore. Et encore. Le sang bat lentement à ses tempes. Son visage basané pâlit, l'esquisse de sourire d'emmerdeur fond, jusqu'aux yeux qui semblent se délaver. Les mots comme un crachat au visage, comme un couteau qui remue dans la plaie ouverte, encore, jamais refermée. Le sang qui coule, par vague, à l'intérieur de lui – il a froid, brusquement, froid alors que son cœur bat au ralenti. Son épouse. « J’ai mes réponses, je vous laisse en paix. » Elle ne bouge pas, pourtant. Deux statues de marbre, dont l'une s'anime. Un pas. Puis un autre. Automate qui avance lentement, jusqu'à venir près de Lucrezia. Trop près. Venant la jauger de sa hauteur. Son épouse. Le froid fait place au chaud, brûlant, les joues redeviennent rouges et le cœur bat vite, trop vite, la machine redémarre brusquement, trop brusquement. La baguette se lève, lentement, comme une menace – mais l'attaque ne vient pas de là. Elle vient de la gauche, du poing crispé qui s'abat avec fureur contre le visage de la brunette. La baguette est rangée, rapidement, pour que la main droite attrape les cheveux de la femme et la force à se pencher – coup de genou, brutal, au plexus solaire. Elle est si mince, presque maigre. Fragile. Si facile à casser. Il veut entendre ses os craquer, il veut goûter son sang, il veut la tuer. Automate, l'homme aux sentiments qui bouillent, qui brûlent. Une main qui retient et l'autre qui cogne, qui gifle, qui tire, qui pince, les doigts larges qui se crispent et se serrent, les jointures qui frappent jusqu'à ce que la peau se fende, celle de la Rowle et celle du Llewellyn. Les mots, dans un souffle court, grognés, soufflés, sifflés. « Mon... épouse... serait fière, oui. Un coup. De savoir que je... chasse... ceux qui l'ont tué... Un coup. Elle et nos... nos filles. »
Il frappe encore. Il ne sait pas combien de temps. Il arrête quand il a mal.
Il la laisse tomber au sol, poupée de chiffon, poupée de cire, poupée de son. Poupée silencieuse, poupée cassée. Elle n'a rien dit, n'a pas crié, n'a même pas gémit. Rien. Les cheveux noirs, les yeux bleus, ou verts, il ne sait pas, la peau si pâle. Elphaba. C'est ce qui l'arrête. Ce qui le laisse immobile, ce qui l'empêche d'achever la femme. Il le ferait. Merlin, il le ferait. Il en a envie. Les larmes ont dévalé sur ses joues. Sa langue vient lécher le sang sur ses jointures. Salé. Elle respire encore. Lui reprend son souffle. La chose a vibré, se gargarise de la douleur, mais elle n'en demande pas plus. Il n'en a pas besoin. Davius se penche et retourne Lucrezia sur le dos, contemplant son visage tuméfié, sanglant. Il en a rêvé, de faire cela, et ce n'est même pas aussi satisfaisant qu'il l'espérait.
La voix graveleuse et rauque. « Vous serez toujours une Mangemort et je serai toujours un Auror, miss Rowle. Je vous traquerai jusqu'au dernier. » Sa baguette ramasse les papiers étalés en un paquet soigneusement ordonné, amène à lui sa vieillerie dans laquelle il range ses effets. Prêt à partir. Prêt à quitter. « La prochaine fois que vous me parlez... d'elles... je vous tue. » Pas une menace. Une promesse.
« Try to fix these broken things, all we had were fragments. » ♱ - Jaymes Young, Fragments
Ca a craqué. Tu ne sais même plus où. Tu sens juste le sol, dur, sous ton corps qui proteste. Et chaque goutte de sang, chaque filet qui coule sur ta peau, exorcise les douleurs de l’âme. Les serpents ont cessé leur progression mais pas une seconde tu n’as fait appel à eux. Tu n’as demandé aucune aide, aucune pitié. Les minutes qui s’écoulaient et les poings de l’homme te rapprochaient de Gabriel. D’un monde où tu pouvais rêver d’une autre vie. Tes doigts se sont agrippés quelques secondes au bras masculin avant que tu ne t’effondres. La tendresse contre cette agressivité brute. Merci.
L’air semble se faire rare.
Fred, tu as promis à Fred. Que gagne-t-il, avec toi ? Rien. Tu n’as rien à offrir. La mort en parure, les larmes en paiement. Les pensées embrumées te mènent vers un avenir doux, ce grand espace vert où seule la paix avait droit de règne, où seul l’amour existait. Est-ce que tu aurais fait le bonheur de ton ami, dis ? Est-ce que tu faisais vraiment tout ce que tu pouvais pour que son sourire irradie encore l’atelier, comme autrefois ? Tu n’avais jamais fait ce qu’il fallait pour ceux qui t’entouraient. Une incapable. Insipide créature qui ne parlait pas assez avec ce coeur déchiré brûlant la poitrine. A moins que ce ne soit un os brisé. Tu voudrais pleurer mais ça ne vient pas. Pas encore. Tu ignores si tu t’accroches à la consciences ou si tu tentes de la fuir, de te fuir, de tout fuir.
Aucune lutte. « La prochaine fois que vous me parlez... d'elles... je vous tue. » « Faites-le.. » t’es-tu entendue souffler alors que tout le reste de ton âme te hurlait de te relever, d’aller retrouver Fred, de t’effondrer dans ses bras et de ne jamais, jamais, jamais plus en bouger. De lui dire combien tu l’aimes, combien tu n’as plus que lui. Combien son sourire est la plus belle chose au monde, chaque matin, comme un lever de soleil. Parce que ça n’est pas seulement ton meilleur ami, c’est une partie de toi.. et loin de lui, tu ne sais plus où tu vas, pourquoi tu vis.
Lancinante douleur qui se répand, s’éveille. Daeva glisse vers toi, passe sa langue sur une plaie sanglante avant d’aller mordre à ton poignet, sans brutalité aucune, pour injecter une infime dose de venin. « .. à l’atelier. » lui ordonnes-tu. Qu’ils rejoignent les Weasley. Tu as eu ce que tu cherchais et tu n’as aucune envie de partir, de bouger, de résister.
Draco pourrait t’aider. Ce soir, tu resterais dehors. Et quelques jours, encore. Perceval serait satisfait.
Il te reste à peine assez de volonté pour te relever, te rattraper à un arbre. Tout te ferait hurler de douleur mais rien ne s’échappe, si ce n’est un gémissement léger, douce plainte. Tu l’as mérité. Tu l’as provoqué. Pas de larmes, toujours pas, et Merlin savait combien tu voulais pleurer, tarir la tristesse de ces trois années d’espoirs bafoués.
Tu renonçais. Ypsös était mort. Le coupable était plus fort.
« J’ignorais pour.. » les mots t’arrachent une indécente brûlure qui te coupe le souffle. Alors tu te tais. Inutile. Tu veux cesser de te souvenir. Tu veux qu’on l’efface, lui et ses doigts sur ton corps. Les coups, les bleus, la souffrance couvrent les souvenirs lascifs. Il a effacé l’homme d’une nuit, pour quelques jours.
Les insurgés devaient être le seul centre de ta vie. Ne pas voir plus loin. Fred t’aimait ainsi, avec tes défauts, tes failles, que demander de plus ? Il fallait panser les plaies, et oublier.
Tu seras toujours différente, Lucrezia, effrayante et seule. Mère avait presque raison.
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