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sujet; (Hécate Shacklebolt / Rabastan Lestrange) Knocking on Hell's door (mi-juin 2002)

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Hécate était arrivée tôt au ministère ce matin là.

Sa conversation de la veille avec Ronald Weasley par tableaux interposés l'avait gardée éveillée toute la nuit et elle avait jugé préférable de mettre cette insomnie à profit pour accomplir quelques heures supplémentaires.
Son esprit bouillonnait sans cesse depuis leur entrevue impromptue au milieu de son salon. Il avait cherché à contacter Kingsley et c'était sur elle qu'il était tombé. Les aléas de la communication par portraits.
Elle se souvenait encore avec exactitude du visage du jeune homme, de ses traits tirés, de la manière dont il avait demandé à voir Kinglsey puis, lorsqu'il s'était rendu compte qu'Hécate ne partageait pas ses idéaux, de la vigueur avec laquelle il défendu sa cause, celle des siens.
Il lui avait parlé de choix. De révolte. Il avait remis en cause la vie qu'elle avait construite depuis désormais trois longues années, son existence faîte de soumission et de stratégie. D'aveuglement, de surdité et de mutisme.

Hécate s'était évidemment défendue, mais ses remarques avaient heurté une corde sensible. Combien de temps pourrait-elle encore ignorer ses propres doutes, cette impression de n'être qu'un pantin aux mains d'un père qui ne la percevait que comme un trophée, d'un gouvernement qui la tolérait à peine, d'une société qu'elle ne connaissait pas malgré le temps qui s'écoulait?
Peut être y avait-il effectivement la possibilité d'autre chose. Elle ne savait pas exactement quoi. Peut être que ce que recherchaient ces insurgés était le même sentiment de paix et de stabilité qu'elle avait autrefois connu, assise près de sa grand mère, au sein des conciles.
Une société imparfaite, mais tendant vers l'entente générale.
Une société brutale, mais tentant de ne l'être que quand cela était nécéssaire.
peut être était-ce cela leur idéal: une société humaine. Tout simplement.

Ces ruminations avaient occupé l'esprit d'Hécate toute la mâtinée et elle les aurait volontiers chassées, mais elle en était incapable. Ronald Weasley avait planté quelque chose dans son esprit: le doute. Un doute renforcé par la bonne foi qu'il avait exprimé. Il était ce que l'on appelait "un homme bien" et elle était tentée de le croire. De croire qu'un combat était possible pour elle aussi. Une bataille menée avec courage, qui placeraient ses valeurs d'enfance et son statut social en résonance. Peut être pourrait-elle même se battre tout en gardant Léda et Virgile à l'abris. Il suffirait de les contacter via les voies que le vaudou privilégiait, un canal que le gouvernement ne surveillait pas pour une raison évidente: il ne le connaissait pas.

Hécate revassait dans le couloir, ses dossiers à la main, lorsqu'un hiboux blanc vint à sa rencontre, une lettre dans le bec. La jeune femme tendit le bras avec un sourire et le remercia d'une caresse avant de le laisser s'envoler. La secrétaire qui travaillait à cet endroit du couloir, une jeune femme nommée Polly et qu'Hécate avait appris à apprécier, se pencha:

-Une lettre galante?

Hécate lui lança un sourire espiègle et ouvrit la lettre avant de lire les premiers mots.

C'est très précisément à ce moment, cette matinée du 11  juin 2002, à 11h35 du matin, 56 secondes, que le monde cessa de tourner.

Mademoiselle Shacklebolt,

C'est avec un profonde douleur et un sincère regret que nous vous annonçons le décès de Mademoiselle Leda Maria Shackelbolt , élève de l'école de sorcellerie Poudlard.

Ce jour, jeudi 11 juin 2002, alors qu'elle se rendait avec des camarades au village de Pré-au-lard, Mademoiselle Shackelbolt s'est trouvée mêlée à une embuscade provoquée par un groupe d'insurgés et d'opposants au Magister.

Les nombreux témoins oculaires, comprenant ses propres camarades de classes déclarent que Mademoiselle Shackelbolt, apeurée par le combat en cours, aurait dégainé sa baguette et aussitôt été prise pour cible par un insurgé. Le sort que ce dernier lui a lancé a provoqué une rupture de ses vertèbres cervicales ainsi que de son épine dorsale, causant un décès immédiat.

L'attaque compte une autre victime parmi les rangs des élèves, Mr. Théodore Harnett.

Une veillée funèbre sera organisée en leur honneur par l'école de sorcellerie Poudlard aussitôt que les familles seront venues rendre leurs hommages et récupérer les corps des victimes.

Soyez assurée que les recherches sont en cours afin de localiser les auteurs de cet acte odieux, qui ne restera pas impuni.

Nous vous prions d'accepter, Mademoiselle Shackelbolt, nos plus sincères condoléances,

Bernard Rowen, directeur des relations publiques du département de la sécurité intérieure."



Hécate resta immobile, livide. Polly la regardait et lui demanda quelque chose, mais Hécate n'entendit rien. Elle relut la lettre, encore et encore.
Il devait y avoir une erreur. Ce n'était pas possible.
Il devait y avoir une erreur.
Léda n'avait que 13 ans. Elle ne pouvait pas avoir été prise dans une...embuscade un...elle....

Hécate se sentit vaciller et vit soudain des gouttes tomber sur le papier. Des larmes coulaient le long de ses joues, ses mains tremblaient, ses lèvres demeuraient entrouvertes.

-Pas elle...seigneur par pitié pas elle...murmura-t-elle, pas elle, pas elle...pas elle....je vous en supplie pas elle..

Sa voix se brisa sur la fin alors que les dossiers qu'elle portait s'écrasaient sur le sol. Polly vola à sa rescousse mais un simple regard sur la lettre la fit plaquer une main sur sa bouche.

-Dieu du ciel!

Hécate laissa retomber son bras le long de son corps. Sa respiration devenait plus hachée de seconde en seconde alors qu'elle balbutiait des mots rapides, incapable de former une phrase cohérente. Ses yeux continuaient de pleurer alors qu'elle gardait le regard rivé sur le sol, coupée de son environnement. Emprisonnée dans une bulle de douleur qui semblait la dévorer entière.

-Leda...leda...elle...elle n'avait que...13 ans pourquoi...une fillette de...13 ans...pourquoi des enfants je ne compr...ce n'est pas...elle était une enfant Polly...c'est...pourquoi des..c'était juste une petite fille

Sa voix se brisa misérablement et elle eut un gémissement sourd, la secrétaire s'empressant de la soutenir alors qu'elle manquait de s'écrouler.

Léda. Léda et ses dents du boneur. Léda et ses cheveux crépus ornés de petites barrettes. Léda et ses robes jaune poussin. Léda et ses figurines de cristal ensorcelé qui gambadaient à travers sa chambre. Léda et ses lettres écrites à l'encre parfumées, ses fleurs séchés envoyées en guise de cadeaux toutes les semaines, ses rêves de devenir médecin, léda et son sourire, son rire, son nez qui se fronçait dès qu'elle devenait joueuse.

Léda. Qui ne reviendrait plus.

Hécate crut se sentir mourir. Pourquoi?! pourquoi devait elle enterrer sa petite soeur?! pourquoi devait-elle plonger dans la terre le corps d'une enfant de 13 ans?! qu'avait fait Leda aux vaillants insurgés pour mériter son sort?! Léda était innocente! Elle n'avait rien demandé, à personne, jamais. Elle avait toujours voulu revoir la Nouvelle-Orléans et leur mère. Elle ne retrouverait jamais plus ni l'une ni l'autre.

Le gémissement d'Hécate se transforma en cri de douleur rauque, un hurlement de douleur pure, une peine que ne causent ni le feu, ni les armes, ni les pires des sortilèges.

Polly lui parlait et plusieurs agents s'étaient arrêtés dans le couloir, des administratifs pour la plupart et apprenaient tous peu à peu la nouvelle. Hécate se serait arrachée la peau si elle l'avait pu. Elle pleurait à s'en casser la voix alors que Polly tentait de l'apaiser sans le moindre succès.

C'est alors que dans la cacophonie générale, une voix se fit entendre, la dernière qu'Hécate voulait entendre à ce moment précis.

Blackwood. Son supérieur hiérarchique direct. Il dispersa les agents et jeta un regard irrité à Hécate.

-Shacklebolt, pourriez vous m'expliquer ce que vous faîtes avachie dans le couloir? reprenez vous et au travail! gardez vos ruptures et tout ce qui en découle pour des personnes que cela intéresse!
-Monsieur! intervint Polly d'une voix haut perchée, je vous en prie! elle vient de perdre sa soeur!

Blackwood se tourna vers Polly avec un air d'oiseau de proie.

-Nous sommes en guerre. Les pertes sont inévitables. Il serait temps que certains d'entre vous s'endurcissent! Dégagez le passage! et relevez vous Shacklebolt! vous êtes aussi inutile qu'une cracmole dans cette position! si vous avez de la rage à revendre mettez la au service du bien commun!

Hécate darda sur lui un regard comme nul ne l'avait jamais vu en lancer à quiconque. Son visage était baigné de larme, son corps agité de convulsions, mais ses yeux, ses yeux...brûlaient d'une haine inextinguible.
Avant que quiconque n'ait pu faire quoi que ce soit pour l'empêcher, elle se releva et dégaina sa baguette.

-COMPRESSIO hurla-t-elle.

Blackwood fut rejeté en arrière et s'écrasa au sol avant de pousser un long cri de souffrance, son corps se retrouvant secoué par d’irrépressibles convulsions.
Consumée par la douleur et la rage, elle regarda cet homme qu'elle avait appris à haïr au cours des années et se pencha au dessus de lui, marmonnant une incantation supplémentaire en anglais mêlé de créole.

Aussitôt, Blackwood sembla suffoquer. Livide, il porta la main à son coeur et agrippa sa robe de sorcier. Hécate le regardait sans pitié, sa main  droite se crispant de plus en plus comme si elle écrasait une chose qu'elle seule pouvait voir.

-Nous sommes en guerre....siffla-t-elle, des pertes sont...absolument...inévitables....


Elle ferma presque complètement le poing et arracha à Blackwood un hurlement de douleur qui sonna comme une douce musique à ses oreilles. Le tuer n'effacerait rien, mais cela apporterait à Hécate une satisfaction que rien d'autre ne pouvait égaler à ce moment. Elle allait montrer à cemisérable vers ce qu'avoir le coeur broyé, signifiait.

Littéralement.


Dernière édition par Hecate Shacklebolt le Lun 15 Juin 2015 - 13:21, édité 2 fois
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(Hécate Shacklebolt / Rabastan Lestrange) Knocking on Hell's door   (mi-juin 2002) Empty
« Il y a eu une attaque d’Insurgés à Pré-au-Lard. » Rabastan leva les yeux du papier qu’il tentait de comprendre pour fusiller du regard le bonhomme qui débarquait à grand renfort de cri et de respiration saccadée dans son bureau. « Je vous félicite de croire que ce que vous avez à me dire est si important que cela vous donne le droit d’ignorer les règles basiques du respect… » siffla le Mangemort avec tant de hargne que son interlocuteur préféra reculer de quelques pas, par mesure de prudence. « Pardonnez-moi monsieur le Directeur… Mais je devais vous avert… », « Je suis déjà au courant bougre de crétin ! » cria Rabastan en agitant le papier qu’il tenait avec énervement. « De qui cette lettre provient, selon vous ? » « Je… euh… » le pauvre homme semblait se demander si transplaner loin de Rabastan n’était pas la chose la plus sûre à faire en cet instant. Rabastan ne criait pas très souvent et ce n’était pas une expérience que l’on pourrait qualifier d’agréable. Notant le manque flagrant d’idée du pauvre homme quant à la provenance de la missive, le Mangemort crut bon de l’éclairer : « De Poudlard ! Figurez-vous que je n’ai pas à attendre votre bon vouloir pour être au courant de ce qui se passe à l’extérieur ! ». L’employé couina une petite phrase d’excuse : « Je n’ai jamais voulu insinuer que… », « Dégage ! » finit par conclure Rabastan « Fout le camp. Tu me tapes sur les nerfs ! » le bonhomme n’attendait que cet ordre pour pouvoir enfin se sauver. Rabastan sentit ses muscles se contracter quand il vit que l’employé angoissé, dans sa précipitation, referma dans son dos la porte du bureau. « LA POOORTE ! » hurla Rabastan en sortant sa baguette. Il l’agita et à l’aide d’un sortilège informulé fit sortir le panneau de bois de ses gonds. Il n’était pas loin lui non plus de faire de même. De pêter un plomb. Merde à cette foutue porte !

Deux morts. Deux satanés morts ! Non pas qu’il s’en soucie plus que ça. Ce n’était que des gosses après tout, il n’y avait aucune perte dans leurs rangs. Mais penser que ces salauds avaient assez d’audace pour venir directement les attaquer à Pré-au-Lard… Ils étaient complètement cinglés, emmerdants au possible avec ça. Des fous-furieux qui s’en prenaient littéralement à tout ce qui bougeait en pensant que c’était ce genre d’actions qui feraient la différence… Un jour ils iraient encore plus loin. Ils avaient déjà foutu un sacré bordel sur le Chemin de Traverse… Rabastan craignait de les voir débarquer au Ministère. Évidemment qu’ils seraient facilement maîtrisés dans un tel environnement, rempli de Mangemorts, mais ils avaient déjà prouvé qu’ils se moquaient pas mal des conséquences quant à leur personne. Des missions-suicides ne les dérangeaient absolument pas. Et s’il y avait bien une chose que Rabastan n’avait pas envie de voir, c’était bien un carnage au sein du Ministère. Deux de ses enfants travaillaient ici. Et son frère n’était pas bien loin non plus. Il buterait les premiers impurs ou traîtres qui oseraient toucher le moindre de leur cheveux…

Certaines personnes maintenant passaient dans le couloir et jetaient un regard étonné sur le cadavre de la porte qui gisait à quelque pas de son encadrement, mais personne n’osait le moindre commentaire. Ils ne voulaient sans doute pas subir le même destin tragique que cette malheureuse porte. Après avoir lancé quelques regards sombres, Rabastan se remit à la lecture de la lettre porteuse de mauvaises nouvelles. Théodore Harnett et Léda Shaklebolt. C’étaient les infortunés victimes de la journée. Au mauvais endroit, au mauvais moment… Autant le premier prénom ne lui disait pas grand-chose, autant le second ne lui était évidemment pas inconnu. Shaklebolt. Un emmerdeur lui aussi. La gamine devait être reliée à lui d’une manière ou d’une autre… Shaklebolt… Comme s’il était brusquement frappé par un éclair de génie qui lui permettait de voir clair à travers son classement de dossier, Rabastan se leva de sa chaise, se dirigea vers l’armoire qu’il ouvrit avec grand soin (pour que tout ce qui y logeait ne lui retombe pas dessus) puis après quelques minutes de recherche… il décida de sortir sa baguette. « Accio dossier Shaklebolt », il aurait bien rajouté un juron à tout ça tant ça l’énervait de ne pas y avoir pensé plus tôt mais il doutait que ça ajoutât à l’efficacité du sort. Un léger frémissement secoua l’armoire, un léger frémissement menaçant… « Merlin-dite-moi-que-c’est-pas-vrai ! » ce n’était pas sa journée. Il eut juste le temps de reculer avant que tout les papiers ne décident de s’écraser sur le sol. Ce n’était pas une si bonne idée que ça en fait de déplacer magiquement un dossier qui devait se trouvé tout en fond de cale. Il aurait peut-être pu se bouger dans un autre bureau où il y avait des copies rangées de tout ce foutoir mais juste… non. Trop tard maintenant. Il regarda avec lassitude le dossier ensorcelé par l’accio voleter vers lui avec allégresse. Il l’attrapa avant qu’il ne décide de retomber pour rejoindre ses camarades. Au moins il avait vu juste : il y avait bien une Shaklebolt dans son département… Hecate. Au renseignement. Il parcourut rapidement les informations la concernant pour tomber sur la mention de la famille. Une sœur et un frère. Léda et Virgile Shaklebolt. Bim. Léda. Devait pas y en avoir quatre cents. Apparemment il n’y avait pas que pour lui que cette journée serait pourrie.

Était-elle au courant ? Cette question lui traversa l’esprit un bref instant avant de repartir aussi sec. Il avait assez d’ennui comme ça. Il voulait parler de cette histoire avec Carrow, le sous secrétaire d’État. Il hésita un moment devant le cimetière de fiches qu’il avait créer puis haussa les épaules avant de sortir de son bureau en piétinant la porte défoncée au passage. Il fila à travers les couloirs pour atteindre les ascenceurs mais avant d’y parvenir il entendit un nom qui le fit s’arrêter immédiatement. « Relevez-vous Shaklebolt ! » Um ? Shakle-quoi dites-vous ? Qu’ouïs-je ? Il se tourna pour assister à la scène en cours et reconnu les deux protagonistes. L’un d’eux était Blackwood, un confrère Mangemort. Et la jeune femme qui se faisait visiblement remonter les bretelles par le susdit collègue était… l’employé du dossier défonceur d’armoire. Il la reconnaissait grâce à la photo qui avait été agraphée à sa fiche. Sachant ce qu’il savait, il comprenait pourquoi elle n’avait pas l’air particulièrement aux anges. Mais Blackwood avait raison dans l’absolu : pas le temps de pleurnicher plus que ça… Mais son abattement était tout de même compréhensible. Il allait passer son chemin (satisfait de savoir que maintenant il savait que la jeune femme était au courant) quand du coin de l’œil il la vit sortir sa baguette.

Il entendit l’incantation quelques dixièmes de seconde plus tard.
Merlin…
Elle n’avait pas osé ?
Merlin…
PUTAIN DE MERLIN !

Il était à terre. À TERRE ! Il resta immobile, comme tétanisé un bref instant avant de pouvoir réagir, comme un sombre idiot. Un Mangemort venait de se faire agresser, ici, au sein même du Ministère. Par une employée. Dans son Département. Dans son putain de Département ! Quelqu’un dans cette histoire allait prendre très cher. Et il ne voulait pas que ce soit lui. Avant que son cerveau ne puisse vraiment comprendre sa baguette était déjà pointée droit devant lui. Il n’était pas le seul à avoir dégainé, mais d’autres se contentaient de rester figé, incapables de bouger. La jeune Shaklebolt commençait à partir dans des drôles de délires alors qu’à ses pieds Blackwood semblait en train de rendre l’âme. DAMNIT ! Elle pétait littéralement un cable. Il allait crever. Il le sentait. Il allait crever. Sur le sol. Là. Devant eux. Au niveau 2. Dans SON Département ! Toutes ces pensées lui traversaient l’esprit si rapidement qu’il n’avait pas eu encore le temps de faire un pas. Le Maître allait s’énerver… Il ne fallait SURTOUT PAS que ça lui retombe dessus.

Il s’avança tout à fait vers eux, sortant de la masse des quelques personnes qui assistaient à la scène. Comme dit, Rabastan n’avait pas pour habitude de crier, il préférait la hargne aux hurlements, mais il admettait qu’il y avait des circonstances ou un ton glacial ne vaut pas une bonne extinction de voix en règle. Et il n’avait pas besoin d’ensorceler sa voix pour que tout le monde puisse l’entendre : « VOUS VOUS FOUTEZ DE MOI SHAKLEBOLT ? » (quelle classe de faire croire qu’il parvenait à se rappeler du nom de ses subalternes sans problème) « ARRÊTEZ DE SUITE VOTRE PETIT MANÈGE ET LAISSEZ-LE TRANQUILLE ! » Il avait sa baguette pointée droit sur la gorge de la jeune femme, il était près à lancer un Doloris à n’importe quel moment (il était un peu réputé pour ça) et ses yeux allaient, avec une certaine nervosité d’ailleurs, de sa cible à sa victime de collègue qui continuait de se trémousser sur le sol. Quel crétin aussi de ne pas réussir à se défendre… Quand on fait passer quelqu’un sur le grill, on s’attend à se faire attaquer. Les gens de nos jours, plus aucun instinct de survie… « Laissez-le tranquille ! » répéta-t-il d’une voix cette fois ci moins forte mais nettement plus glaciale comme il profitait du silence qui s’était gentiment installé. « Par Merlin, vous n’avez même pas idée du niveau de crasse dans lequel vous vous êtes enfoncée… »

Elle avait des tripes, la bonne femme, il ne pouvait pas lui nier ça. Et un manque flagrant de retenue. Mais cela, ça pouvait s’apprendre. L’audace, c’était inné. Il aimait ça. C’était mauvais, très mauvais ce qui se passait là mais… cette nana… lui plaisait. Elle avait du potentiel. Attenter à l’intégrité physique d’un Mangemort sous le pif d’un autre Mangemort, c’était quand même assez couillu. Il n’aurait pas osé lui-même. Mais c’était sûrement parce qu’il était doté d’une once d’intelligence et de désir de survie. Il espérait qu'elle démontrait tout de même assez d'intelligence pour ne pas s'opposer à lui.
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Il y a plusieurs sortes d'idées: les bonnes idées, les mauvaises idées réprimées de justesse, les mauvaises idées mises en pratiques et regrettées puis enfin, les mauvaises idées mise en application, assumées et réitérables.

Agresser Blackwood au beau milieu de niveau 2 aurait normalement du se placer dans la catégories des "mauvaises idées réprimées de justesse" mais pour une drôle de raison, Hécate trouvait qu'elle avait eu un coup de génie. Le voir se tortiller sur le sol comme un chiot à peine né lui donnait des idées relativement colorées.


La jeune femme leva néanmoins les yeux et fixa le bout de la baguette de Rabastan Lestrange d'un air méfiant. Elle n'avait  vu cet homme que deux fois, toujours en coup de vent, mais elle était bien entendu au courant de son incapacité congénitale à classer ses dossiers et de sa manie de laisser son bureau ouvert aux quatre vents. Quant à ses activités mangemort, il aurait fallu vivre sous une pierre elle même enterrée sous un roc pour les ignorer.

Qu'il prononce son nom lui fit un effet étrange. Il n'aurait même pas du savoir qui elle était, vu l'application qu'elle avait mis à rester sous le radar. Du moins jusqu'à ce qu'elle décide de crucifier Blackwood sur le sol du couloir.

D'un geste lent, elle abaissa la main, le mangemort reprenant subitement sa respiration et crachant une gerbe de sang avant de s'allonger, tremblant et suant. Il avait frôlé la mort de quelques secondes. Peut-être en retirerait-il un choc post traumatique. On pouvait rêver.

-Sale...garce...tu me le paieras! tu vas pourrir...au fond...d'Azkaban...pour le restant...de ta sale...et misérable...existence! éructa Blackwood dont le visage était désormais un masque de fureur.

Hécate ne répondit rien mais inclina légèrement la tête sur le côté. Elle était en plein dilemme. L'achever ou pas? lui faire exploser la cervelle, ou pas? Dur choix que le sien...une Shacklebolt ne commettrait jamais un acte d'une telle violence mais une St Marc...elle eut la pensée fugitive que si sa mère -ou pire sa grand mère - s'était trouvée à sa place à cet instant précis, les intestins de Blackwood tapisseraient déjà les murs en un savant construit-déconstruit.

Mais elle n'était pas sa mère. Et Rabastan Lestrange la tenait en joue, un point non négligeable.

Levant la main gauche au niveau de son visage en signe de paix, elle rangea tranquillement sa baguette et enjamba Blackwood avant de se présenter devant Lestrange. Il était impressionnant, terrifiant même, mais elle était bien trop engourdie pour ressentir la peur avec autant d'acuité qu'à l'ordinaire. Elle se contenta de le regarder et déclara platement:

-Monsieur le directeur.

-Lestrange...fous la...dans une cellule!! brailla Blackwood, arrache lui la peau à cette...foutue...catin! elle a faillit me tuer!

La cerise sur le gâteau. Ne la fermait-il donc jamais?Cette fois Hécate ferma brièvement les yeux et se retourna comme une vipère.

-Et vous vous êtes défendu comme un cracmole retardé! Vous êtes visiblement aussi habile en combat qu'en investigation! Cet état pitoyable découle de votre propre fait, ne me mettez pas les conséquences de votre médiocrité  sur le dos et estimez vous heureux que je ne vous ai pas envoyé par la fenêtre!! Vous n'êtes pas un mangemort, vous êtes un CHIEN DE CIRQUE AFFUBLE D'UNE BAGUETTE! et si je dois payer ces mots d'une décennie à Azkaban, alors allons y! et gaiement! Vous tuer aurait été rendre un service à tout le département et une EXCELLENTE THERAPIE pour la majorité de ses inspecteurs, moi la première!

Cette fois ça y était. Elle était dans le toboggan. Il n'y avait plus qu'une voie et elle était descendante. On aurait même pu dire qu'elle tenait de la pente verglacée et que le terminus serait la cellule la plus froide d'Azkaban, voire le cimetière. Mais ces deux perspectives ne semblaient plus si terribles à Hécate.

Elle n'avait pas pu protéger Léda. Elle ne pourrait pas plus protéger Virgile. Elle s'était crue un rempart entre eux et le monde, elle était en fait aussi efficace qu'un golem aux pieds d'argiles. Qu'ils l'emmènent, qu'ils l'incarcèrent. Elle ne se sentait plus la force de mettre en sourdine ses émotions, ce qui constituait le coeur de son identité, pour se fondre dans la masse: Blackwood avait joué avec le feu pendant trois ans et elle se trouvait déjà satisfaite d'avoir tenu tant de temps.

Tout cela n'avait de toute façon plus beaucoup d'importance.Elle connaissait la réputation du directeur: pas de quartiers, pas de corps, pas de preuves. Ironique pour un homme en charge de la justice...

Se tournant vers Rabastan, dont le visage acéré mais étrangement paternel lui parut incroyablement beau, elle lâcha:

-Là, j'ai finit. Dura lex sed lex, je vous remets ma baguette.

Et joignant le geste à la parole, elle sortit son arme avant de la lui tendre directement,le regardait droit dans les yeux. "Quitte à partir, autant partir avec panache". Cétait ce que sa grand mère lui avait toujours dit et celà n'avait jamais semblé plus vrai.


Dernière édition par Hecate Shacklebolt le Sam 13 Juin 2015 - 0:11, édité 1 fois
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Il crut pendant un moment, un très long moment, qu’elle allait l’ignorer. Complètement l’ignorer, qu’elle n’allait même pas se tourner vers lui et achever sa victime comme si de rien n’était. L’adrénaline que l’on éprouvait quand on avait la vie d’autrui couinante entre ses doigts, il savait ce que c’était. Il l’avait lui-même ressenti un très grand nombre de fois : parfois on ne sait plus s’arrêter, on veut juste sentir la vie de l’autre s’échapper lentement, comme si elle glissait hors de son corps, comme si on la traînait de force hors de son corps. Et quant à cette sensation se mêlait la rage… Lui-même avait tué pour moins que ça, presque par ennui parfois. Alors il pouvait très bien imaginer qu’elle puisse mettre fin aux jours de son collègue sans même avoir conscience de son acte. Il crut que ça allait se passer ainsi. Et il trouvait que ça sentait extrêmement mauvais. Pour elle, pour lui… Elle le regardait maintenant. Il pouvait la désarmer d’un sort s’il le désirait, mais presqu’inconsciemment il avait décidé de lui laisser une petite chance d’améliorer sa situation.

Il ne la lâchait plus des yeux, prêt à réagir si elle faisait le moindre geste à son encontre mais — Merlin merci ! — elle décida d’obéir et abaissa sa baguette. Le léger soupir de Rabastan fut complètement masqué par Blackwood qui revenait brusquement à la vie, de manière plutôt douloureuse apparemment. Mais il était en vie. Dans un sale état, le premier maléfice ne lui avait pas vraiment fait de cadeaux, mais en vie. Il pouvait s’estimer heureux. Après, il était encore dans une assez bonne forme pour réussir à s’exciter contre son bourreau. Il aurait peut-être du s’en abstenir parce que Shaklebolt tenait toujours son arme entre ses doigts et elle pouvait très bien brusquement changer d’avis pour lui faire cracher tripes et boyaux sur le parquet ciré du couloir (ce qui serait pour le moins dégoûtant et ennuyant). Mais à la grande satisfaction de Rabastan elle parut décider qu’il ne valait peut-être pas la peine de se prendre un rendez-vous pour une séance de discussion avec lui puis avec le Maître agrémenter d’un aller simple douloureux direction cimetière. Pas si bête.

Elle rangea sa baguette et Rabastan baissa la sienne sans pour autant la rengainer. Autour de lui, les quelques personnes présentes rabaissaient leur armes également. La tension sembla diminuer d’un cran. Elle s’était avancée jusqu’à lui et quand elle parla sa voix était atone : « Monsieur le Directeur ». Bien, comme le naïf petit Mangemort qu’il était, Rabastan s’était attendu à plusieurs choses : déjà à des excuses de la part de la jeune femme… mais apparemment il pouvait toujours se brosser, elle ne semblait pas regretter son geste outre-mesure. De deux, même s’il n’avait pas imaginé que son collègue irait lui rendre grâce à genou de l’avoir tiré de là en vie, il avait tout de même espérer un petit mot de remerciement pour sa peine. Nada de ce coté là aussi ! Mieux que ça, son camarade marqué crut que ce serait une bonne idée de l’appeler uniquement par son nom comme s’il n’était rien d’autre qu’une petite recrue et de lui donner des putains d’ordres ! D’accord il était en colère, d’accord il venait de passer à deux doigts de le mort mais ce n’était pas une raison !

Et évidemment l’autre repartait de plus belle, et sa voix n’était plus du tout plate alors qu’elle refaisait verbalement son portrait à sa victime. Rabastan ferma les yeux un bref moment comme si un soudain mal de tête venait de lui tomber dessus. Il la sentait s’enfoncer petit à petit et elle arriverait peut être à un stade ou même lui ne pourrait rien pour la sortir de là. Pourtant tout cela, sa rage et son culot monstrueux, était des points que l’on pouvait creuser, que l’on pouvait sublimer. Une telle femme, dans leurs rangs, ne pouvait pas être une mauvaise chose. Il n’avait pas envie de gâcher une telle opportunité, de laisser crever un aussi bon potentiel. Mais il ne pouvait apparemment pas compter sur Blackwood pour l’aider à étouffer l’affaire. Las, il la laissa terminer sa tirade : elle parlait vite et il semblait que même l’arrivée fracassante d’un Magyar à pointes n’aurait pu l’interrompre. Elle s’arrêta d’elle-même. Elle lui remit sa baguette. Il la récupéra de sa main gauche et la passa à sa ceinture.

« Tu parles de chose que tu ne connais apparemment pas, jeune fille… » dit-il froidement en plantant ses yeux bleus dans les siens. Elle avait le mérite, se dit-il, de ne pas ciller. Ce qui était appréciable. Il n’aimait pas les regards fuyant. Oui… sans même avoir besoin d’entrer dans son esprit il sentait la colère qui vibrait en elle. Elle pourrait transformer cette haine en pouvoir. « Tu ne sais pas ce que c’est que de passer dix ans à Azkaban. Si tu le savais, si tu avais la moindre idée de ce que tu y pourrais y subir, tu ne parlerais pas ainsi. Tu penses peut-être que tu n’as rien à perdre ? Laisse-moi te dire que tu préfèrerais endurer ce que tu viens de faire à ton supérieur pendant des jours entiers sans interruption plutôt que de passer dix ans dans cette prison. » Et il savait parfaitement de quoi il parlait. Il se tourna vers les autres employés du Ministère qui se trouvait là : « Occupez-vous de lui » ordonna-t-il en désignant le Mangemort à terre de bout de sa baguette. « Qu’on le remette sur pied. » puis il s’adressa directement à Blackwood : « Elle n’a pas tout à fait tort tu sais… » remarqua-t-il d’un ton mauvais, comme pour se venger du manque de courtoisie de son collègue à son égard. « Tu aurais du pouvoir te défendre. Je ne pense pas que le Maître apprécierait de savoir qu’un de ses serviteurs se laissent avoir par une jeune fille en train de pleurnicher. Et tu sais comment il traite les gens qu’il juge indigne de sa confiance ? Je ne pense pas que ce serait bon pour ta santé que cette affaire remonte à ses oreilles. » Par acquis de conscience il pénétra rapidement dans l’esprit de son collègue et put y voir assez distinctement l’image du Maître levant sa baguette. Bien, pas besoin d’en faire plus… Il avait compris. Rabastan limitait largement la casse en clouant le clapet de la principale personne qui pouvait se plaindre de l’attitude de Shaklebolt. Bien sûr, Blackwood ne le porterait pas dans son cœur après ça, mais Rabastan n’était devenu Mangemort pour la saine fraternité qui régnait entre les serviteurs du Lord. Qu’il essaie de se venger s’il le voulait, Rabastan savait se défendre.

« Bon, reprenez tous vos affaires. Je ne veux plus entendre parler de ce qui s’est passé ici. » finit-il par dire pour disperser les dernières personnes présentes. « Sauf vous Shakelbolt. Vous, vous venez avec moi. » Il l’attrapa par le bras et la poussa un peu devant lui : même si elle n’avait plus sa baguette il ne voulait pas lui tourner le dos. Règle élémentaire et peut-être idiote mais qui lui avait permis de survivre jusqu’ici. « Mon bureau n’est pas très loin. Je voudrais avoir une petite discussion avec vous. » Il gardait son ton froid. Ils avancèrent jusqu’à son bureau qu’il avait quitté quelques minutes auparavant. Bien entendu la porte ne s’était pas réparée toute seule. Il marmonna un juron qui aurait fait rougir une lady mais passa outre : « Après vous » siffla-t-il à la jeune femme avant de lui emboîter le pas dans son bureau qui ressemblait à un champ de bataille. Il pointa sa baguette sur une chaise et la fit s’avancer jusqu’à Hecate : « Assied-toi. ». Il restait debout. Face à elle. « Tu sembles avoir besoin de quelques petits éclaircissements sur comment les choses fonctionnent ici… » commença-t-il. Sa voix venait de redescendre de quelques degrés, si c’était possible, et sa mâchoire était fortement contractée. Il remonta sa manche gauche pour exhiber son avant bras sur lequel le Maître avait apposé sa Marque. « Tu vois ça ? Tu sais ce que c’est, n’est-ce pas ? Ce que tu sembles ignorer en revanche c’est qu’agresser une des personnes porteuses de cette Marques est vraiment la plus belle connerie qu’on puisse faire. Comme tu l’as dit toi-même tu pourrais écoper d’un aller-simple pour Azkaban. Tu pourrais perdre un ou deux membres. Tu pourrais perdre la raison, tout simplement. Blackwood n’est peut-être pas l’homme le plus appréciable au monde mais c’est UN PUTAIN DE MANGEMORT ! » sa voix avait brusquement monté d’un ton. « ET S’IL N’ÉTAIT PAS AUSSI LÂCHE, TU SERAIS CERTAINEMENT EN TRAIN DE PASSER UN DES PIRES MOMENTS DE TA MISÉRABLE VIE ! » Il pointa sa baguette directement sur elle : « Je pourrais te faire sentir un erzats de ce que te ferait subir le Maître s’il a vent de ce qui se passe, mais j’estime que la douleur que tu ressens est déjà suffisante. » Il inspira, passa sa main gauche dans ses cheveux. La température était toujours aussi basse. « Je suis au courant pour ta sœur Shaklebolt. Cette rage que tu ressens n’a pas à être rejeté sur les nôtres. Tu te trompes de cible. Tu voudrais que ceux qui ont tué ta sœur s’en tirent ? Parce qu’en agissant comme tu l’as fait, tu ne fais que les aider… »

Il était prêt à la couvrir, mais évidemment il n’allait pas le lui dire explicitement. Il était prêt à l’aider. Il était prêt à l’entraîner. Les femmes de son type l’intéressaient. Il aimait cette audace et il aimait cette haine. Elles étaient porteuses de bon fruits. Il voulait lui mettre le grappin dessus… Mais elle devait comprendre que non, on ne pouvait pas tenter de tuer n’importe qui !
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Hécate s'était laissée mener jusqu'au bureau de Rabastan et retint à grand peine un haussement de sourcils lorsqu'ils pénétrèrent dans la pièce.
Par Merlin, Morgwen et Viviane.
Jamais elle n'avait vu un pareil foutoir. En d'autres circonstances elle se serait fendue d'un commentaire cinglant, la première idée lui venant étant qu'une truie ne retrouverait pas ses petits dans ce souk.
Mais elle n'avait pas l'envie, ni même la force d'y accorder de l'importance. Elle s'assit sur la chaise que lui désignait le directeur du département et écopa alors du plus atroce passage de savon de sa courte vie. La voix de Rabastan Lestrange était terrifiante quel que soit le niveau de décibels. Et tandis que ses mots la frappaient comme des obus lancés à pleine vitesse, elle commençait à comprendre ce qu'elle avait fait, à s'éveiller, comme après un long sommeil.
Les cris de son supérieur dissipaient la peine, l'engourdissement, le désintérêt et lorsqu'il pointa sa baguette sur elle, elle ressentit un pic aigu de peur, qui acheva de dissiper le brouillard dans lequel la lettre de Poudlard l'avait plongée.

Elle avait agressé Blackwood.
En plein milieu du couloir.
Elle l'avait torturé.
Et pire que tout: elle avait utilisé un sort vaudou d'écrasement. Un sortilège si noir qu'elle n'avait jamais jamais osé le pratiquer ne serait-ce que sur un rongeur.

"Je pourrais te faire sentir un erzats de ce que te ferait subir le Maître s’il a vent de ce qui se passe, mais j’estime que la douleur que tu ressens est déjà suffisante.Je suis au courant pour ta sœur Shaklebolt. Cette rage que tu ressens n’a pas à être rejeté sur les nôtres. Tu te trompes de cible. Tu voudrais que ceux qui ont tué ta sœur s’en tirent ? Parce qu’en agissant comme tu l’as fait, tu ne fais que les aider… »"

Elle lui jeta un regard presque las. Cette propagande était éculée, avait été utilisée tellement de fois qu'entendre cet homme en énoncer les principes lui donnait mal à la tête: les ennemis de mes ennemis sont mes amis. Un adage vieux comme le monde qu'il était visiblement en train d'essayer de lui fourrer dans le crâne. Mais si sa douleur lui avait fait perdre son sang froid, elle n'avait en rien entamé ses capacités de réflexion.

Quand elle parla, ce fut d'une voix rauque mais étonnamment calme:

-Vous vous moquez totalement de ma soeur, Monsieur le directeur. Vous avez lu...son nom dans un dossier mais elle n'est rien pour vous, pas plus que moi. Seul compte le Magister et vous le savez. Il me reste assez d'intelligence pour voir quand on cherche à m'avoir par les sentiments...

Elle baissa les yeux sur le tatouage de Rabastan. Il était la marque d'une idéologie dans laquelle elle ne se reconnaissait pas, d'une dévotion qu'elle ne partageait pas. La marque d'un fanatisme de la première heure. Mais alors que ses yeux observaient l'encre si noire contre la peau de Rabastan Lestrange, elle sembla changer de signification.

Au diable les idéologies. Au diable les idées. Ronald Weasley avait des idées, les insurgés qui avaient brisé les cervicales de Leda avaient sans le moindre doute, des idées. Des principes. Et ces principes venaient de se révéler fatals à la survie de ceux qu'elle avait de plus cher. Ils avaient tué sa petite soeur et un autre enfant et pour quoi? prouver leur supériorité? leur présence?

Hécate serra les dents. Elle se força à effacer de son esprit l'image de la lettre, qui continuait de s'imposer à elle depuis maintenant près d'une demi-heure et prit une décision.

Cette décision lui coûterait son âme et l'estime de certains, à commencer par sa mère. Mais cette décision était la sienne. Son choix. Plus jamais un Shacklebolt ne subirait-il les assauts de qui que ce soit sans en payer le prix. Plus jamais ne recevrait-elle de courrier, de missive ou de message lui apprenant la mort d'un être aimé dans une guerre à laquelle elle ne prenait pas part.

Et jamais, ô grand jamais, ne se retrouverait-elle de nouveau impuissante. Elle avait jusque là méprisé les mangemorts comme les insurgés, les uns se battant pour un eugénisme à vomir et les seconds pour des rêves tout aussi prompts à lui taper sur les nerfs. Mais elle voyait désormais le combat pour ce qu'il était.

Le pouvoir. La sécurité. L'assurance de ne plus jamais être au bas de la pyramide. Et soudain, alors qu'elle regardait la Marque de Rabastan, tout devint clair.

Elle avait trop souffert et trop donné pour le "bien commun", en Louisiane comme ici. Sa mère lui avait confié le fardeau de veiller sur ses cadets, son père celui de redorer le blason familial quant à  sa grand mère, elle la voulait pour héritière, mais qui se souciait d'elle?! de ses désirs?! de sa vie?! elle avait obéit sagement, comme elle l'avait toujours fait et voilà où tout cela l'avait menée: dans un ministère obscur, à classer des papiers aux ordres d'un roquet pendant qu'à l'autre bout du pays, sa soeur cadette était assassinée. Elle avait été une fille parfaite. Et elle l'avait payé. Mais cette fille parfaite était morte en même temps que Leda.

Virgile ne subirait pas le même sort et elle non plus. Il était temps de passer du côté du manche et d'acquérir la seule chose qui important vraiment au milieu de tout ce chaos: du pouvoir.

Elle leva les yeux vers Rabastan. Elle avait connu peu d'hommes au cours de sa vie, les conciles vaudous étant avant tout des matriarcats au sein desquels les représentants du "sexe fort" s'effacaient, mais il avait dans les yeux une lueur qu'elle connaissait: la détermination. Une détermination sans faille, causée par un endurcissement progressif et violent, par la souffrance, la guerre. La détermination allait souvent avec le courage, quel que soit le camp dans lequel on se trouvait. Son père à elle n'avait ni courage ni détermination. Il avait fuit l'Angleterre lors de la première guerre sorcière, avait fuit la Louisiane en y abandonnant sa femme au retour de Voldemort, abandonnant toute dignité, enorgueillit qu'il était de ses nouvelles fonctions.
Rabastan était fait d'un autre matériau: l'acier. Et Hécate n'avait à cet instant aucune autre envie que de devenir aussi solide et brillante que l'homme en face d'elle.

Il avait la réputation d'être un legilimens de grand talent. Sans doute avait-il déjà tout compris, tout perçu de son esprit. Néanmoins, Hécate le regarda et déclara d'une voix sourde:

-....Mais si vous me donnez les moyens de les traquer, je les traquerai. Sortez moi de ces bureaux minables et je vous assure qu'ils paieront. Tous autant qu'ils sont. Je n'ai pas de Marque pour vous convaincre, aucun fait d'armes sur ce territoire, mais je suis une guerrière. Donnez moi une opportunité et je vous le prouverai.

Elle le vrillait des yeux. Il avait des iris étonnement claires et calmes, même dans la colère. Des iris presque métalliques. Elle baissa la tête, inspira un grand coup et conclut:

-Je vous présente mes excuses pour le...regrettable incident de tout à l'heure et le chaos qui en a résulté. Cela ne se reproduira pas.


Dernière édition par Hecate Shacklebolt le Sam 13 Juin 2015 - 0:12, édité 1 fois
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Sa colère retombait petit à petit : il sentait ses muscles se détendre. Le calme de son bureau aidait certainement, l’attitude beaucoup plus pacifique de la jeune femme ne faisait pas de mal non plus. Il fallait dire qu’elle aurait été bien en peine sans baguette de continuer son esclandre, mais il n’empêche qu’il était plutôt satisfait de la manière avec laquelle cet incident s’était résolu : il se trouvait là, isolé avec la fautive et la victime était bien trop terrorisé par les éventuelles retombées pour aller pleurnicher dans les plis de la robe du Magistère. Parfait. Ce n’était pas un mensonge, songea-t-il pour se rassurer un peu plus, il ne ferait qu’omettre cette mésaventure. Le Maître avait beaucoup d’autres chats à fouetter, il pouvait bien ne pas absolument tout lui dire. Une part de lui, la plus lucide, lui murmurait que c’était loin d’être une bonne idée et qu’il ferait mieux d’abandonner la jeune femme, quitte à perdre une potentielle bonne recrue. Une autre part, la dominante et qui n’avait parfois pas grand-chose à voir avec la lucidité, le poussait à vouloir mettre le grappin sur cette Shaklebolt. Peut-être regretterait-il ce choix un jour… Mais il se pomettait qu’il ne serait pas le seul à souffrir si de tels remords étaient un jour de mise.

Elle gardait son calme et ne broncha pas lorsqu’il lui remonta les bretelles en règle et l’informa du principe de hiérarchie au sein du Ministère. C’était impressionnant déjà qu’elle ait réussi à survivre plusieurs années sans craquer, se disait-il. D’ailleurs, depuis combien de temps créchait-elle là ? Il jeta un bref regard vers le dossier de la jeune femme qui se trouvait par la force des choses en haut de l’affreux gros tas. C’était écrit là-dedans. Bah, il verrait ça plus tard. Elle avait réagi à sa remarque sur sa sœur. Il s’en moquait ? Bien entendu ! Comme de son premier dragée de Bertie-Crochu. Mais il n’avait jamais tenté de la persuader du contraire. Rabastan haussa les sourcils, la mention de sa frangine décédée avait tout de même eu un effet intéressant. La jeune femme s’était réfugiée dans un silence réfléchi. Il ne la troubla pas : il avait déjà assez crié et commençait à ressentir un certain mal de tête. Il baissa son arme, qu’il avait gardé pointée sur elle, vers le sol. Toutefois malgré la douleur qui commençait à s’insinuer derrière ses tempes, il se concentra pour frôler l’esprit de la jeune femme. Il ne voulait pas fouiller son esprit, juste suivre le fil… Comme pour s’assurer qu’il prenait bien le chemin que Rabastan voulait le voir prendre. La forte présence de la famille, du désir de protection et de puissance suffit à le rassurer sur ce point. Elle était en bonne voie en effet.

Ce qu’elle lui déclara après ce silence confirma ce qu’il pensait. En plein dedans. La mention du bureau le fit presque sourire : lui-même se retrouvait dans une de ces boîtes… C’était quelque chose de presqu’inévitable. Il sentait dans sa voix la détermination, toujours cela lui plaisait. Il avait du être un peu comme ça, plus jeune… Un peu moins impulsif peut-être, quoique… Puis elle baissa les yeux et enfin, ENFIN, vinrent les excuses tant attendues. Au moins n’aura-t-il pas eu à les réclamer, bien que tardives, elles en restaient appréciable. Il hocha la tête : « J’ose espérer en effet que ce genre de comportement n’est pas une habitude chez toi. Je peux fermer les yeux une fois et me débrouiller pour que personne ne se souvienne plus de ça mais deux fois… » Il marqua une pause et machinalement vint frôler sa Marque avec le bout de sa baguette « Ce sera à plus haut que moi que tu devras en référer… » Il fit un pas en arrière pour s’appuyer contre le bord de son bureau, sans cesser de faire face à Shaklebolt. « Très inspirant ton petit discours… Vraiment. » Il soupira « Mais tu dois bien te douter que les choses ne peuvent pas être aussi simples… Ces bureaux minables, comme tu le dis, sont nécessaires. Le gouvernement à besoin d’eux. De nous. » rajouta-t-il en levant brièvement les yeux vers le plafond. « Tu ne resteras pas toujours là où te trouves, mais si tu veux bouger il va falloir que je puisse m’assurer de ta personne. Je veux des preuves. Des preuves de ton investissement. Cela ne se fait pas en un jour. Je ne m’attends pas à ce que cela se fasse en un jour. » Il tira de sa ceinture la baguette d’Hécate, il la colla à la sienne, les compara d’un regard appréciateur avant de reposer ses yeux sur la jeune femme : « Tu veux traquer les responsables ? Les tuer ? Je peux te donner l’occasion de le faire. Je peux te donner les armes. » Il se rapprocha d’elle et lui tendit sa baguette magique pour qu’elle la reprenne. « Mais je peux t’assurer… » finit-il « que je ne supporte pas qu’on me tourne le dos. Et je ne m’appelle pas Blackwood. Si je t’aide à obtenir ce que tu souhaites, j’attends de la loyauté en retour. La déception n’est pas un sentiment que j’apprécie. »

Il posa la main sur son épaule, brièvement. Puis retourna au niveau de son bureau. Il poussa quelques papiers du plat de la main et s’assit sur la surface libérée. « Par rapport à ce que tu as dit un peu plus tôt… » fit-il d’une voix qui s’était légèrement adoucie. « Bien sûr que je me moque de ta sœur. Et je ne cherche pas à te persuader du contraire. Pourquoi devrais-je ressentir quelque chose ? Je ne la connaissais pas, pour moi ce n’est qu’une victime de plus des Insurgés. Je n’ai pas le temps ni l’envie de verser une larme pour chaque mort que causent ces salauds. Mais que je m’intéresse au sort de ta sœur ou non ne devrait pas être la question… Ne t’attend pas à ce que les autres s’apitoient sur ton sort. Ils ne le feront pas. Jamais. Tu es seule avec ton destin, avec tes choix et leurs conséquences et il n’y aura que toi pour le déplorer. Personne n’est venu pleurer quand on m’a enfermé à Azkaban. La seule chose dont tu puisses t’assurer c’est de faire payer au centuple les gens qui t’ont mené là. C’est la première chose que tu dois te mettre dans la tête. Ne compte pas sur la pitié des autres, ils n’en ont pas et n’ont pas à en avoir. » Rabastan estimait avoir eu une part de sa revanche sur ceux qui l’avaient enfermé pendant quinze ans : il avait même récupéré l’ancien poste de cet enfoiré de Crouch… Mais sans savoir qui avait pu le dénoncer, lui et les siens, il n’avait pas pu se la jouer à la Rookwood qui avait fait la peau à Karkaroff. Ce qu’il venait de dire à Hécate, il y croyait dur comme fer. Vivre en comptant sur la miséricorde était une erreur. Elle le savait certainement, mais il fallait qu’elle en prenne conscience dans ce moment où elle était particulièrement touché par un malheur.
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"Ne t’attend pas à ce que les autres s’apitoient sur ton sort. Ils ne le feront pas. Jamais. Tu es seule avec ton destin, avec tes choix et leurs conséquences et il n’y aura que toi pour le déplorer. Personne n’est venu pleurer quand on m’a enfermé à Azkaban. La seule chose dont tu puisses t’assurer c’est de faire payer au centuple les gens qui t’ont mené là. C’est la première chose que tu dois te mettre dans la tête. Ne compte pas sur la pitié des autres, ils n’en ont pas et n’ont pas à en avoir."

Les mots de Rabastan infligèrent à Hécate une douleur sourde mais différente de celle qu'elle avait ressenti un peu plus tôt dans la journée. Il y avait dans cette douleur une part de peine, liée à Léda, et celle ci était glaçante, ineffaçable. Mais il y avait également une douleur liée au fait d'entendre la vérité et d'accuser le choc. Les mots qu'il avait employés étaient simples, dénués de toute cruauté et c'est peut être cela qui fit le plus mal à la jeune femme.
Il ne cherchait pas à la faire souffrir.
Il lui énonçait juste une vérité universelle, qu'elle avait été trop naïve, trop sentimentale et trop stupide pour voir.

Il avait raison. Qui aurait pitié d'elle sinon elle-même? qui subirait les conséquences de ses choix, sinon elle-même? ses proches? ses collègues?

Personne. Pour la simple et très bonne raison que les premiers l'avaient mise dans cette situation et que les seconds n'étaient pour elle rien de plus que des visages du quotidien, familiers mais lointains et inintéressants. Elle était seule mais avait choisit son destin pour les autres en attendant de la reconnaissance et aujourd'hui, de la compassion.
Elle avait envie de se mettre des claques ou de se frapper la tête contre le mur, comme certains elfes de maison le faisaient parfois.

Comment, comment avait-elle pu être aussi IDIOTE?! on avait toujours loué son intellect, son intelligence, mais il fallait croire que celui çi s'était sérieusement mis en sourdine toutes ces années. Le deuil était en train de se mélanger en elle à une rage presque adolescente, celle d'une révolte qui n'était jamais venue, de mots jamais prononcés et de cris jamais poussés.

Son père n'aurait pitié que de lui même, il la blâmerait même surement de ne pas avoir fait barrage à ce qui était arrivé. Ne travaillait-elle pas au service du renseignement? Sa mère était loin et désormais neurasthénique, incapable de leur venir en aide et sa Grand-mère se murerait dans un silence égoïste, digne, adapté à son statut.

Elle était seule. Elle avait été seule depuis l'instant où elle avait posé le pied dans ce pays de malheur.

Elle afficha brièvement une moue dégoûtée, comme si on venait de lui faire ingérer un médicament infect.

Parfait. Parfait dans ce cas. Elle prendrait ses décisions seule.

Rabastan Lestrange, malgré sa dureté, son empathie quasi-inexistante, avait raison sur un point: il était temps de grandir. Et la leçon qu'elle venait d'apprendre lui avait fait l'effet d'un voyage initiatique. Il lui avait dit la vérité. Et pour cela elle lui était presque...reconnaissante. Oui c'était le mot: reconnaissante. Il avait un cran que personne autour d'elle n'avait jamais eu et une franchise abrupte mais appréciable. Elle était calme désormais et assez honteuse d'avoir laissé ses nerfs prendre le pas sur sa raison. Elle avait offert une bien piètre image d'elle. Mais tout cela pouvait se rattraper. Virgile était la tête brûlée de la famille, pas Hécate. Elle inclina la tête vers Rabastan alors que celui ci la fixait d'un air dur mais calme et le regarda.

-Je comprends, dit-elle en mettant dans ces deux mots toute la profondeur et le sérieux nécessaires.

Elle jeta un bref regard à sa baguette. Gravée de symboles vaudous la rendant inutilisable pour quiconque à part Hécate, elle constituait un trésor sans prix pour cette dernière et Rabastan venait de la lui rendre. Il effaçait sa dette. Un seul point de son discours la titillait toutefois et tout en sachant qu'il aurait mieux valu s'en tenir là, elle lâcha:

-Je vous...suis reconnaissante. Pour votre indulgence et pour ce que vous venez de dire. J'ai perdu le contrôle de mon tempérament aujourd'hui et je le regrette. Mais...

Elle marqua une pause, réfléchit, et repris:


-Si mes défauts sont nombreux la déloyauté n'en fait pas partie. Si tu donnes ta parole, tiens là. Si tu ne la respecte pas, tiens bon. J'ai appris cet adage à l'âge de trois ans. D'où je viens, le respecter était une question de survie...je n'ai pas atteint l'âge de 26 ans en tournant le dos à qui que ce soit. J'ai pris les coups de face...comme vous. Comme maintenant. Je vous donne ma parole que vous n'aurez pas à regretter votre choix. Et vous aurez des preuves.

Elle retenait presque sa respiration. Elle n'avait pas peur de cet homme, mais il déclenchait en elle un sentiment d'admiration, de respect et d'humilité. Il l'avait épargnée. Ce n'était pas le genre d'élément qu'on oubliait. Pas chez les St Marc.

"Les enfants du marais n'oublient jamais. Un autre adage. Tout aussi important.

Elle regarda de nouveau sa baguette puis, à contrecoeur, le tas de dossiers, de papiers, de fiches, de notes, de brouillons et bien évidemment de boules froissées entassées sur le côté droit de la pièce. Il y avait véritablement de tout, même des éléments de papeterie et...est ce que c'était un papier de Chocogrenouille près de cette note ministérielle?!

Surtout ne rien dire. Ne rien dire.
NE. RIEN. DIRE.

-C'est un choix esthétique?

Les mots étaient sortis, presque innocents, avant qu'elle ait pu les retenir. Oh ciel. Elle se serait arraché la langue parfois. Sa baguette tournait maintenant entre ses doigts, signe que s'en servir la démangeait.

Ordo Chartarum

Deux petits mots qui lui avaient sauvé la vie plus d'une fois. Rabastan Lestrange avait-il des instincts de kamikaze administratif ou ce bourbier était-il une déclaration de forme dans l'esprit de "Je me moques de vos paperasses comme de mon premier endoloris et si quelqu'un y trouve quelque chose à redire, qu'il se magne le cul pour les ranger lui même?". Dur à dire. Elle penchait pour la seconde option. Puis elle pensa qu'après plus de dix ans dans une prison vide de mobilier, de compagnie, d'effets personnels, le désordre devait avoir quelque chose de réconfortant. Là où il y avait du désordre, il y avait de l'activité, de la vie.

La vue du dépotoir en face d'elle lui parut soudain moins insurmontable.

-C'est bien fait, murmura-t-elle pensivement en un trait d'humour totalement involontaire, j'ai essayé une fois mais mon tas n'était pas aussi beau...
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Elle comprenait, disait-elle. Et il pouvait sentir dans sa voix que c’était la vérité. Ce n’était pas quelque chose de si aisé à comprendre : la solitude fondamentale de l’homme. Les jeunes enfants pensent qu’ils sont le centre du monde : que tout ce qui existe autour d’eux n’existe que pour eux et par rapport à eux. Une perception qui s’étiolait pour finir par disparaître au fil du temps, de l’expérience. Pourtant la plupart des gens paraissaient encore croire en une sorte de solidarité qui rendrait les autres sensibles à leurs malheurs. Cette certitude là était difficile à laisser s’échapper. C’était après tout si rassurant de s’imaginer ne pas être seul dans sa tristesse, dans ses erreurs… Rabastan y avait cru assez longtemps, lui aussi. Avant de déchanter. Comme Hécate en ce moment même. Plus la manière d’apprendre cette leçon était rude, plus elle entrait vite en mémoire. La douleur, selon lui et d’après sa propre expérience, était le marqueur le plus efficace.

Elle avait récupéré sa baguette. À présent, elle était parfaitement calme. Et c’était presqu’incroyable pour lui de penser que la femme à l’aspect presque serein qui se tenait en face de lui était celle qui avait explosé de manière si impressionnante il y avait moins d’une heure quelques couloirs plus loin. Ce qui était tout aussi incroyable était que cette affaire se soit réglé sans aucun échange de sort, sans aucune punition quelconque. Juste un sermon. Un sermon et une mise en garde. Il l’avait prévenue cependant : il se la jouait peut-être à la Dumbledore a donné une seconde chance, mais il n’était pas tolérant jusqu’à en accorder une troisième. Comme si le fil de ses pensées avait suivi ceux de Shaklebolt, la jeune femme reprit la parole. « Je vous...suis reconnaissante. » En effet, elle pouvait l’être. Il y avait d’ailleurs quelque chose d’étrange à entendre quelqu’un le remercier. Non pas que ça n’arrivait jamais, on le remerciait machinalement pour beaucoup de choses, mais il lui arrivait rarement d’entendre une personne exprimer une reconnaissance sincère à son encontre. Il n’était pas en règle générale le genre d’homme à ravir ses interlocuteurs. Elle revenait sur la loyauté. Et lui assurait qu’il n’avait en quelque sorte pas à s’en faire. Vingt-six ans… À cet âge là il s’était lui-même en effet pris plusieurs très mauvais coups en pleine figure ; à cet âge là cela faisait trois ans qu’il attendait le jour où il serait enfin libre de nouveau. Pour une femme de cette âge, s’il n’attendait pas de la sagesse il désirait voir de la détermination et comme elle le disait, de la fidélité. Sa dernière phrase le fit esquisser un sourire ironique : mieux valait pour elle en effet qu’il n’ai pas à regretter. Rabastan était du style à partager ses déceptions et une mauvaise conclusion de cette histoire serait certainement pire pour elle que pour lui. « Parfait. » conclua-t-il simplement « Je me garde le droit de te faire resouvenir de ces paroles si un jour… ta loyauté décide de ne plus être aussi honorable. J’ai une bonne mémoire, sache-le. » Il préferait être absolument clair sur ce point. On disait Rabastan soupçonneux, paranoïaque même. L’idée de sa faire trahir était une peur viscérale qui le hantait. Insister sur ce point le mettait plus à l’aise : comme s’il utilisait un bouclier.

« C'est un choix esthétique ? » Il haussa les sourcils et suivit le regard de Hécate. Il était posé sur son bureau et même sur l’ensemble du fatras qui agrémentait joliment la pièce. Elle se permit même d’ajouter un petit compliment sur la hauteur de la montagne de dossier qui s’étaient retrouvés au sol suite à sa malencontreuse altercation avec Madame l’Armoire. « Je dois admettre que c’est assez rare » dit-il « qu’une personne qui se retrouve emmenée ici pour une petite conversation avec moi après avoir agressé un supérieur hiérarchique se permette de faire des remarques sur l’agencement de mon bureau… » Si son ton était froid, il n’était pas agressif, tout du moins pas autant qu’il aurait pu l’être. « C’est d’autant plus mal placé, je trouve, puisque c’est par ta faute, Shaklebolt, que mon sol se trouve dans ce lamentable état. C’est en cherchant ton dossier que les autres sont tombés. » La porte défoncée n’ajoutait rien de bon non plus. Il pointa sa baguette vers elle : « Reparo. » souffla-t-il presque sans y prendre garde. Le panneau de bois se souleva et vint docilement se replacer sur les gonds de l’encadrement. Cependant le bois gardait des traces du sort envoyé par Rabastan. Bah, elle en verrait certainement d’autres. Il ne fit aucun geste pour la fermer toutefois, fallait pas pousser. Il contourna son bureau pour se mettre à sa place habituelle, sans s’asseoir toutefois sur son siège. Il ouvrit un des tiroirs et sans prêter attention à ce qu’il y avait déjà dedans fit glisser d’un large revers de la main tout une part de paperasse qui poireautait depuis déjà une semaine sur le coté droit. C’était comme ça qu’il gérait ces affaires : à l’aventure. Il finissait toujours par s’y retrouver de toute manière, même si cela devait impliquer dix sortilèges et une bonne cinquantaine de jurons. « Je trouve que les hommes sont beaucoup plus faciles à dresser que les papiers les concernant. » reprit-il en se posant cette fois-ci sur son siège « J’aime la dimension humaine de mon travail : l’administration en revanche, comme tu l’as fait remarqué, n’est pas mon point fort. » En réalité, il appréciait cette position même si elle l’obligeait à se plonger jusqu’au cou dans des rapports écrits en patte de mouche, sur des formulaires parfois incompréhensibles… Tout cela semblait l’assurer d’un certain degré d’importance, et même si c’était un complet bordel il réglait toujours tout à temps et avait appris à gérer les crises. Il avait surtout accès à tous les dossiers concernant tous les Sang-de-bourbe, Insurgés et autres racailles : un de ses passe-temps (étrangement) était de les trier. L’ordre variait en fonction des informations dont il pouvait disposer, du plus dangereux au sans-défense, de celui avec le plus de famille atteignable au solitaire… Et quand il les trouvait, il fichait leur dossier dans un recoin de l’armoire, en en prélevant une des photos, puis gardait ce petit trophée (et parfois la baguette) d’abord dans un tiroir puis chez lui. Il aimait son travail et savait profiter des opportunités que la paperasse lui accordait. Mais certes, il restait (plutôt) désordonné. Et s’en moquait pas mal par ailleurs.

Mais puisqu’elle avait l’air de trouver cela assez surprenant, autant en profiter : exploiter les employés était une chose comme une autre : « Enfin, comme je t’estime personnellement responsable de ce souk, tu n’as qu’à y mettre bon ordre. Être impertinente est une chose, qui n’est parfois pas la meilleure des idées à avoir d’ailleurs, se retrousser les manches en est une autre. Si ce bordel est à ce point digne de sarcasmes, tu n’as qu’à te débrouiller pour qu’il revienne à un niveau acceptable de rangement et ainsi tu n’auras plus vraiment besoin de faire de telles remarques sur l’organisation de ton Directeur. Compris, Shaklebolt ? » Il ne voulait pas lui brider cette liberté qui l’avait poussé à exploser tout à l’heure et qui faisait vibrer en elle tout ce que Rabastan pouvait considérer comme du potentiel. Mais il voulait tout de même lui apprendre que retourner trois fois sa langue dans sa bouche avant de parler pouvait être une bonne option. Il n’était pas l’homme le plus intolérant au Ministère et il y avait des personnes qui pourraient très mal prendre ce genre d’attitude…


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Hécate le regarda d'un oeil pensif.
Celle là,elle l'avait cherchée. Pas de doute là dessus.
Rabastan la fixait de ses yeux bleus et glacés comme pour la mettre au défi de contester ses instructions. Hécate sentit sa bouche s'étirer en un sourire.
Elle n'allait pas le contredire, certainement pas. Ses instincts belliqueux avaient leur limite. Non , elle allait faire exactement ce qu'il attendait d'elle.

-Compris, Monsieur le directeur.

Elle se leva élégamment et brandit sa baguette.

-Ordo chartarum! ordonna-t-elle d'une voix ferme.

Aussitôt les dossiers se mirent à frémir puis bondirent dans les airs avant de se mettre au garde-à-vous devant elle comme des soldats bien entraînés. Elle fit tourner sa baguette entre ses doigts tout en regardant l'armoire et énonça rapidement.

-Insurgés appréhendés et décédés ou incarcérés, dernier étage, classement alphabétique! Insurgés appréhendés et en cours d'interrogatoire, étage intermédiaire, ordre alphabétique! laissez un espace! Insurgés en fuite, ordre alphabétique, partie droite de l'étage intermédiaire! Sangs-de-bourbe à surveiller premier étage secteur gauche et ordre alphabétique, indicateurs et espions premier étage et côté droit, même instruction!

A peine avait-elle finit que les dossiers filèrent vers l'armoire, se rangeant à l'intérieur avec un bruit de mitraillette tandis que certains se battaient pour entrer les premiers. Hécate observa avec satisfaction les fiches décoller du sol et rejoindre leur dossier d'appartenance. D'un geste de baguette, elle envoya les différents détritus rejoindre leur juste place, c'est à dire la poubelle, avant de regarder les notes étalées sur le tapis.

-Notes urgentes, pile droite! notes signées et à retourner, pile du milieu! notes lues et à conserver pile de gauche! classement par date!

Les piles s'entassèrent devant Rabastan avec une telle rapidité que le bureau accusa le choc. Derrière Hécate, les portes de l'armoire se fermèrent avec fracas alors que le dernier dossier se rangeait à sa juste place.

La jeune femme tapota son index du bout de sa baguette avant d'inspecter les lieux. Un sourire léger flottait toujours sur ses lèvres. Le sol était dégagé, le bureau ordonné, les fichiers classés.
Un dernier détail.

-Evanesco, dit-elle en pointant la poubelle.

Les détritus qui la remplissaient après le passage de la tornade blanche s'évaporèrent et la jeune femme sentit dans sa poitrine la satisfaction d'un travail bien mené avec en prime, une petite pointe de joie insolente.

Tout cela avait pris au grand maximum une toute petite minute. Peut-être s'attendait-il à ce qu'elle trime toute une nuit afin de mettre de l'ordre dans sa porcherie, mais pourquoi faire compliqué quand on pouvait faire simple?

Elle se tourna vers Rabastan et d'un ton tout ce qu'il y a de plus sérieux et innocent, demanda:

-Autre chose, Monsieur?

Elle pouvait voir une expression indéfinissable sur son visage alors que ses yeux allaient rapidement de la pièce à elle et d'elle à la pièce. La jeune femme se retint de sourire. Eh oui. C'était aussi simple que cela.

Elle était peut être insolente, impertinente, impulsive, mais elle était efficace et pour être honnête...relativement chafouine et perméable au défis. S'il avait cru la faire se décomposer en lui imposant une tâche administrative il avait mal joué son coup. Il aurait cependant été bien mal avisé de lui faire la moindre réflexion.

Elle avait parfaitement obéit aux ordres.

Une petite voix dans l'esprit d'Hécate lui fit remarquer que cette gentille petite blague était encore un cas d'école de mauvaise idée et qu'il allait sérieusement falloir revoir sa technique de survie mais il y avait quelque chose chez Rabastan qui la poussait à jouer avec le feu. Elle avait supporté les hurlements de Blackwood, le mépris des magistrats, l'arrogance des rafleurs et le désintérêt de ses collègues pendant des années mais cet homme amenait à la surface une partie d'elle même qu'elle avait cru effacée, laissée derrière elle en Louisiane.

La "petite reine". L'héritière assurée de Léonora St Marc, la main armée du clan, celle qui avait un jour mené une opération de vendetta contre le couvent sorcier de Bâton-Rouge, qui avait charmé son premier crocodile à trois ans et avait conservé depuis un lien inexplicable avec ces prédateurs. Elle avait du étouffer cette personne, la baillonner et revêtir le masque de Mademoiselle Shacklebolt, fille de l'Hagiographe officiel du gouvernement. Un titre ronflant pour une gamine qui à peine une décennie plus tôt pataugeait dans la gadoue à la recherche d'ossements de raton-laveur. Une identité lourde à porter pour une enfant habituée aux discussions agitées, aux conciles bruyants et aux vapeurs d'encens.

Deux mondes. Deux personnes distinctes.

Elle ne savait pas comment Rabastan s'y prenait, mais son visage,sa voix, son attitude franche voire brutale, sa violence, fracassaint le masque lisse et policé d'Hécate plus efficacement que n'importe quel sortilège. L'annonce de la mort de Leda l'avait déjà irrémédiablement ébreché, mais Lestrange était en train de l'éclater sur le sol.

Mais apprécierait-il ce qu'il découvrirait lorsqu'il commencerait à apercevoir la petite fille caïman qui, il y a si longtemps déjà, était pour son peuple ce qu'il était pour le sien: un membre de la classe dirigeante et surtout, surtout, une meneuse sans pitié avec ses ennemis?

On dit que les prédateurs se reconnaissent entre eux. Dur de dire si la clairvoyance de Lestrange allait jusque là. Tout ce qu'Hécate savait était qu'à cet instant précis, où la rage, la haine et la douleur la dévoraient sa la moindre once de pitié, seul cet homme avait réussit à lui donner un semblant d'énergie. De hargne. D'insolence. la seule question qui demeurait était celle de savoir s'ils allaient s'étriper mutuellement (les chances qu'il l'étripe étant toutefois largement supérieures), ou s'ils marcheraient l'un à côté de l'autre.

La balle était dans son camp....plus qu'à espérer qu'il ne la lui jette pas en pleine poire.
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Rabastan suivit les opérations sans bouger d’un iota de sa place : le cul bien calé au fond du siège et ses pieds confortablement installé sur le bureau. Mais s’il ne bougeait pas, ses yeux en revanche suivait parfaitement le mouvement de tout son fatras qui, bien obéissant, suivait à la lettre les instructions de Hécate pour aller se ranger dans son armoire dans un grand bruit de froissement et une odeur de vieux parchemin. Pas mal. Tout ce qui créchait sur son bureau eut aussi le droit à une petite manipulation et maintenant ses pieds, au lieu d’être posés au milieu d’une forêt vierge foisonnante de notices, mandats et autres, se tenaient sur une surface rangée, presque dégagée. Pas mal du tout. Le claquement des portes de son armoire qui se refermaient majestueusement dans son dos lui fit hausser les sourcils : les portes réussissaient à se fermer ? Quand lui tentait de la fermer, c’était toujours la croix et la bannière et il devait lutter avec toute la paperasse qui voulait s’échapper. C’était les quelques moments où il aurait apprécié pouvoir fermer la porte. Enfin, apparemment ce problème était réglable plutôt simplement.

Une simplicité qui semblait fort ravir la jeune femme par ailleurs : même si son visage restait de marbre il pouvait très bien imaginer ce qu’elle pensait. Trop facile. Eh bien, figurez-vous que non, Rabastan n’est pas un expert des sorts de rangement. Non, il n’était pas non plus un prodige de la cuisine et non, mille fois non, il n’était pas plus foutu de balayer son salon que de jouer au Quidditch. Il n’avait jamais eu à faire ça auparavant dans sa vie et il ne s’était pas vraiment donné la peine de se renseigner sur ce qui pouvait éventuellement l’aider. Jusque là il avait toujours réussi à forcer quelqu’un à ranger son bordel quand cela paraissait devenir hors de contrôle. Les doigts de sa main gauche tapotaient la surface de son bureau dans un rythme régulier et sur son visage se dessina une moue mi-appréciatrice, mi-crispée. « Non, merci ce sera tout. ». Il avait la vague impression qu’elle se fichait de lui. Mais à mots couverts, pas comme Bulstrode qui elle y allait franchement dans l’impertinence. Ça l’agaçait, mais à un moindre niveau. Contrairement à Loletina, qui ne montrait (et n’éprouvait sans doute) absolument aucun respect envers lui, Hécate semblait faire exprès de poser son pied sur la limite, comme pour tester sa réaction, sans jamais toutefois la franchir.

Il trouvait ça hautement dangereux. Dans sa vie, il s’était pris des sanctions dures à encaisser pour bien moins que ça : quand on se retrouvait face au Maître un mot de trop, même dit avec le plus infini respect, pouvait être amèrement regretté. Et comme il faisait parti des Mangemorts depuis qu’il avait quitté Poudlard, il avait appris dès ses dix-huit ans à ne pas dire un mot plus haut que l’autre, à ne pas broncher si son voisin se faisait torturer sous ses yeux, à ne pas murmurer quelque chose qui pourrait s’apparenter de près ou de loin à une contestation et surtout à ne pas jouer sur le sarcasme ou l’ironie. Il n’éprouvait aucune difficulté maintenant à courber l’échine face au Magister, à se la fermer quand il n’a pas à parler et à attendre le bon vouloir du Maître pour même respirer s’il le fallait. C’était peut-être des choses dures à se mettre dans le crâne mais c’était cette obéissance qui l’avait emmené où il se trouvait à présent. La nouvelle génération, apparemment, avait beaucoup plus de mal à avaler cette pilule. Et comme il le disait : c’était dangereux. Mais également plutôt courageux. Rabastan ne se serait pas qualifié lui-même comme étant particulièrement brave : s’il le pouvait il faisait absolument tout pour éviter les ennuis ou d’éventuelles souffrances. Du moment que cela ne touchait pas à ses convictions profondes : pour le Maître il serait prêt à tout, bien évidemment. Pour ses enfants aussi… certainement. Mais sinon il ne s’estimait pas courageux. Cette jeune femme en revanche démontrait une certaine fierté audacieuse intéressante. Il était habitué à ce que les gens lui lèchent les pompes sans être vraiment loyaux, en revanche c’était rare qu’on se comporte de manière effrontée envers lui sans qu’il n’y ai pourtant derrière cette attitude quelque chose de mauvais. Il appréciait tout comme il réprouvait.

C’était étrange et il ne savait pas s’il devait réagir comme le ferait le Lord : de manière brutale histoire de faire taire définitivement ce genre de vélléités insolentes ou bien s’il devait laisser passer. Il opta pour un mélange des deux, penchant plus vers la seconde option : « Mais la prochaine fois que tu auras quelque chose à critiquer, je te péterai ta baguette en deux, cela m’amuserait beaucoup de voir comment tu te débrouilles sans magie. Et de voir si ce ton que tu aimes employer survivrait à quelques heures de trime. » En réalité ce n’était pas tant le ton que toute l’attitude qui laissait deviner une certaine effronterie, mais il savait qu’elle comprendrait ce qu’il voulait dire. Quant à la menace, il en était capable, peut-être pas pour si peu mais c’était parfaitement dans ses cordes d’aller briser l’arme d’autrui : une petite revanche pour sa propre baguette qu’on avait détruit il y avait déjà longtemps. Penser à son ancienne baguette lui fit revenir quelque chose en mémoire.

« Tiens… » fit-il en se relevant pour aller se planter face à elle « Je me pose une petite question à ton sujet. » Évidemment il lui aurait demandé ça un jour ou l’autre, certains de ses collègues préféraient attendre avant de marcher sur ce terrain mais Rabastan n’était pas très patient sur ce sujet : c’était son domaine, c’était ce qu’il connaissait le plus. Alors quitte à avoir la jeune femme en face de lui à ce moment précis, autant en profiter pour se renseigner plus avant sur ses capacités et son expérience : « As-tu déjà lancé un sortilège impardonnable, Shaklebolt ? » Il étudiait son visage brun et ses yeux francs comme s’il pouvait y deviner la réponse. « Ou encore mieux, en as-tu déjà subi un ? » Pour le coup Rabastan effectuait presqu’un sans faute : il avait déjà évidemment lancé des sorts impardonnables, chacun des trois et avec une petite préférence connue pour le Doloris, avant son incarcération et encore plus suite à sa libération. Il avait également subi deux des ces sort (et comme il ne s’appelait pas Potter et que sa brave mère ne s’est jamais sacrifié pour lui c’est plutôt heureux qu’il ne se soit jamais pris le troisième sinon il ne serait évidemment plus de ce monde) avec cette fois-ci une légère réprobation pour le Doloris qui était bien moins sympathique à subir qu’à faire subir. « Voudrais-tu essayer ? » C’était plus un ordre qu’une invitation, mais Rabastan savait mettre les formes de politesse quand il s’exprimait. Son sourire s’agrandissait : c’était son champ d’expertise. « C’est bien beau de connaître les sorts pour ranger un bureau, mais face à un Insurgé cela ne servirait pas à grand-chose. » Il en profitait pour prendre sa revanche. Même s’il l’avait vu pratiquer un sort offensif face à Blackwood, un Sectusempra n’était pas au niveau d’un sort impardonnable.
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