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sujet; Sleeping Beauty [Hestan #3][post-event 4]

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C’était absolument incroyable le nombre de chose que l’on pouvait faire absolument par hasard. Par exemple, quand Rabastan avait treize ans, c’était purement par hasard que le chien de l’exécrable voisin (voisin de rue, ce Harry Staples habitait au 18 tandis que les Lestrange logeaient au 7) s’était malencontreusement retrouvé coincé et soumis à un très innocent sort de désillusion au beau milieu de la route alors qu’un camion déboulait pour la livraison des meubles Louis XV chez Madame Dawson (qui vivait au 14 de la même rue). Quelques années plus tard c’était encore sous l’effet d’un étrange hasard qu’un élève de sa promotion et de la maison Gryffondor avait fait un vol plané dans les escaliers de Poudlard entre son cours de Métamorphose et de Botanique trois heures seulement après avoir insulté de manière très peu courtoise la famille de Rabastan (il y avait de ces coïncidences dans ce bas monde ma foi !). Enfin comme on pouvait le constater, le Mangemort était un homme habitué à ces curieuses circonstances du destin. Et ce jour là, alors qu’il quittait le Ministère de la Magie ─ d’assez bonne heure pour une fois ─ c’était l’effet d’un hasard tout à fait fortuit et incongru qu’il ne saurait expliquer qui fit qu’il se retrouva à l’issu de son Transplanage devant un magasin déserté : Purge & Pionce Ltd. Ah ça, quel hasard, comme c’était curieux, bizarre, étrange. Il jeta un coup d’œil à sa montre : franchement il était tôt, c’était même fichtrement étonnant qu’il ait quitté les bureaux aussi tôt ─ c’était ça qu’il y avait de beau à être le directeur, personne n’allait se risquer à lui crier dessus s’il désertait le travail avant l’horaire prévu ─ il pouvait se permettre un crochet avant de rentrer chez lui. Un crochet certes, mais pour quoi faire ? Pourquoi diable irait-il mettre les pieds à Saint Mangouste ? Il n’était pas malade, pas blessé, de mauvaises langues pourraient toujours venir persiffler qu’il ne devait pas être bien sain si on commençait à regarder le mental mais malgré tout il n’avait pas plus besoin de l’aide des guérisseur que d’un nouveau chapeau (il ne portait pas de chapeau). Donc certes il avait du temps devant lui ; mais avait-il du temps à perdre en errant dans un hôpital pour en admirer l’architecture et les moulages ? Il en était à ce moment précis dans son fil de pensée quand une voix vint l’arracher à son débat cérébral, une voix qui oscillait entre une intonation pressée et une très légère pointe d’inquiétude : « Monsieur Lestrange ? Vous… avez besoin d’aide ? » Il regarda devant lui : un petit brin de femme avec une plume et un carnet dans les mains le regardait les sourcils à demi-froncés. Il cligna des yeux, regarda autour de lui : plusieurs personnes s’affairaient dans un immense hall où des malades de tout genre attendaient, assis sur des bancs ou debout. Il était entrer à Saint Mangouste sans même s’en rendre compte : eh bien il était heureux de se rendre compte que lorsque son cerveau dérivait sur des questionnements essentiels ses muscles se sentaient assez indépendants et intelligents pour agir de leur plein gré (son corps pouvait-il comprendre le sarcasme ? Était-ce le moment de se poser ce genre de questions ?) « Monsieur Lestrange ?... Vous me semblez confus, êtes vous certain que... » Rabastan la coupa avant qu’elle ne puisse commencer à émettre des hypothèses : « Je viens en visite. » En visite de quoi ? Il comptait sur la jeune femme prompte aux hypothèses pour trouver la solution à cette question. D’ailleurs son visage s’éclaira : « Ah bien sûr, vous venez pour Mademoiselle Shacklebolt, que vous nous aviez emmené… » S’il n’avait pas eu des années d’entraînement à la maîtrise de soi dans le dos (maîtrise de soi qui selon le temps et la situation était quelque chose de plus ou moins réussi) il se serait certainement étouffé juste devant la petite dame. Mais c’est bien sûr ! Shacklebolt ! Incroyable qu’il te faille autant de temps pour t’en souvenir… C’était diablement ironique surtout s’il l’on songeait qu’il ne pensait qu’à ça dans la journée. Enfin enfin… Qu’il ne pensait qu’au fait qu’elle était absente. Enfin… dans le sens où elle n’était plus là pour venir le voir. Dans le sens où il ne la voyait plus débarquer dans son bureau. Dans le sens où elle n’était plus là pour travailler. Voilà ! Une personne en moins dans le département, surtout de son niveau d’efficacité, ça l’ennuyait, voilà tout. Et puis c’était son apprentie. Il avait le droit de s’inquiéter un minimum pour elle, sans avoir à se justifier, non ? Il n’y a que toi que tu tentes de persuader là… BON ! Inspiration, expiration : « Oui, elle-même. Elle va… bien ? » Au dernière nouvelle on avait du la plonger dans un coma pour qu’elle puisse avoir une chance d’en réchapper. La petite femme eut un moment d’hésitation avant de répondre : « Eh bien… pas vraiment. Son état est stable. Mais il n’y a aucune amélioration. » Une ombre dut couvrir un bref instant son visage puisqu’elle baissa les yeux sur son carnet tout en murmurant très bas un faible : « Je suis désolée… » « Si vous y pouviez quelque chose ça se saurait… » gromella-t-il. Elle eut un air surpris, elle ne devait pas s’attendre à autant de compréhension de sa part. « Je peux la voir quand même n’est-ce pas ? » Si elle est dans le coma, tu perds ton temps. Enfin, maintenant qu’il était là, il pouvait bien aller la voir, non ? « Bien entendu Monsieur Lestrange. Je peux vous accompagner jusqu’à sa chambre… »

Elle avait l’air assez pressée de se débarasser de lui : alors qu’il la suivait dans les couloirs de l’hôpital elle avançait d’un pas rapide, certainement bien plus hâtif que celui qu’elle devait avoir en temps normal. Habitué à ressentir ce genre de choses il voyait bien que quelque chose tracassait la jeune femme.. « Une guérisseuse a disparu récemment… » finit-elle par dire alors qu’ils arrivaient dans un long couloir clair. Qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire ? « Elle s’occupait de Mademoiselle Shacklebolt. » Pardon ? C’était donc pour ça cet air inquiet : « Comment ça "disparu" ? Elle ne s’est pas évaporé… », « Eh bien… la situation est très floue, nous… ne savons pas où elle se trouve. Cela fait quelques jours et… Elle a été remplacée bien entendu mais… » Il avait déjà mal à la tête : « Ecoutez je m’en contre-fous de comment vous gérer les employés ici, ce qui compte c’est qu’il y ai quelqu’un pour s’occuper de votre patiente. Je ne vais pas courir à la recherche de toutes les personnes qui décident de disparaître… » Juste après avoir terminé sa phrase il se rendit compte que c’était exactement ce en quoi consistait son travail, bien, espérons qu’elle n’aurait pas le courage de le relever. « Bien entendu Monsieur Lestrange. Excusez-moi. Nous arrivons… » Bingo ! C’était beau de pouvoir compter sur sa réputation. La petite femme ouvrit une des portes et le laissa entrer à l’intérieur : « Les guérisseurs disent qu’elle peut peut-être nous entendre. N’hésitez pas à lui parler. Mais ne vous attendez pas à un miracle. Elle n’a montré aucun signe de vie depuis qu’elle est dans le coma… » Ce n’était pas vraiment ce qu’il désirait entendre. Il pénétra dans la pièce. Celle qui l’avait conduit jusqu’ici referma alors la porte dans son dos, dans le but de lui accorder un peu d’intimité certainement mais le claquement dans son dos l’électrisa. Sans avoir à se retourner pour faire face à la porte il attrapa la poignée à tâton en tendant son bras en arrière et quand ses doigts la rencontrèrent il la tourna et donna un coup dans le panneau de bois qui eut la décence de s’entrouvrir dans un doux grincement. Il espérait bien que personne n’aurait la mauvaise idée de la refermer de nouveau en passant dans le couloir. Sans plus se préoccuper de ce détail il reporta son regard sur l’élémet principal de la petite chambre dans laquelle il se trouvait. Une petite table, deux sièges, un lit. Et dans le lit il y avait Hécate Shacklebolt. Immobile, droite et comme morte. Il eut un frisson et crut pendant un bref moment que la porte avait de nouveau claquer dans son dos. Mais ce n’était pas le cas. C’était juste l’atmosphère, c’était juste cette vision. Il s’approcha. Ne s’assit pas et resta droit, debout, près du lit. Il ne l’avait jamais vu comme ça : Hécate ne dormait pas au travail (du moins pas quand il était là pour l’observer) et les quelques mois pendant lesquels il l’avait connu elle avait toujours été vive, prompte à la répartie, pleine de vie en quelque sorte. Là, vraiment, elle semblait morte. Morte. Il voyait sa poitrine se gonfler et s’abaisser doucement, preuve qu’elle vivait belle et bien mais après un long moment à contempler ce mouvement, il eut l’impression qu’au contraire elle restait immobile, trop immobile. Il jeta un regard vers la porte. Personne. Il posa deux doigts sur le cou de la jeune femme. Sous sa peau il sentait le sang battre, faiblement, mais le rythme était là, régulier et rassurant. Il fit glisser le revers de sa main sur sa joue, brièvement, pour sentir sa température et il la trouva froide. Il recula. « Allez Shacklebolt. Je sais que tu simules tout ça rien que pour éviter d’aller au travail. » Il se sentait idiot de parler à quelqu’un de mort dans le coma mais la petite lui avait bien dit qu’il y avait une chance qu’elle l’entende. Autant la saisir. « Je ne sais pas ce que tu espères mais tu devras rattraper toutes ces journées dès que tu reviendras au Ministère… » Si tu reviens un jour au Ministère. Enfin, elle n’allait pas crever là, non ? Elle ne pouvait pas. On l’aurait certainement prévenu s’il y avait un risque. Il y avait une différence entre aucune amélioration et état critique et désespéré n’est-ce pas ? « Tu me connais maintenant, tu sais que je ne suis pas un homme patient et je préfères te prévenir mais tu es en train de passer les bornes là… » Réveille-toi putain ! C’est quand même pas si dur d’ouvrir les yeux non ?
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Il était parti.
Le Manzazuu, le nécromancien était parti et Hécate s'éveillait désormais, toujours coincée dans l'Entre-Deux. Les ombres veillant sur elles s'égayèrent lorsqu'elle ouvrit les yeux et sussurèrent:

Bonjour petite princesse
T'as dormi un moment
Faut se remettre en route oui ça presse
Y'a quelqu'un qui t'attends.


Hécate s'assit et se massa le front alors qu'une ombre venait glisser autour de son bras dans un salut chaleureux.

-Personne ne m'attends.

Tu n'écoutes pas! entends un peu!
Ecoutes la voix qui vient des cieux!


La jeune femme s'efforça de débrouiller ses pensées, sans grand succès et soudain, un écho parvint jusqu'à ses oreilles, clair, puissant. Comme si quelque part dans les nuages, au coin de la rue, derrière elle, une voix s'adressait à elle. La présence était nulle part et partout ce qui poussa Hécate à se remettre sur ses pieds. Cette voix avait une sonorité différente de toutes celles qu'elle avait entendu jusque là dans l'Entre-Deux, ce monde destiné aux comateux dansant sur le fil du rasoir. Elle était moins ouatée, plus....réelle?

Hécate connaissait cette tonalité, ce timbre et elle se sentit tirée vers le son. Si elle avait pu saisir les sons, les toucher, elle aurait attrapé celui çi pour ne jamais le lâcher. Le nom du propriétaire lui échappait de nouveau et elle secoua la tête en se tournant vers les ombres.

-Je sais à qui est cette voix! je le sais! j'ai oublié mais...je le savais il y a à peine une heure!

Ce n'était pas il y a une heure
C'était il y a plusieurs jours
Le temps ne passe pas ici comme ailleurs
Il fait des tours et des détours

Tu as oublié c'est bien normal
Réfléchit et retrouve son nom
Ca va te cramer le cervelet, te faire mal
Mais ça va te sauver pour de bon!


-Vous connaissez son nom, pas vrai?

les ombres lui firent des sourires et Hécate leur adressa un geste dédaigneux avant de se mettre en route, marchant dans les rues de nouveau propres et désertes du Londres désertique qui constituait ses limbes. Les signes du combat titanesque qui avait eu lieu sur les lieux avaient disparus à présent et c'était comme si tout ce paysage, tout ce silence avaient toujours existé, existeraient toujours. Hécate tendit l'oreille.

« Je ne sais pas ce que tu espères mais tu devras rattraper toutes ces journées dès que tu reviendras au Ministère… »

-Je refilerai mes tâches à un stagiaire! je ne suis pas née de la dernière pluie moi!

Elle savait que l'homme qui lui parlait depuis l'autre côté du miroir, depuis la réalité terrestre, ne pouvait pas l'entendre, elle était tout à fait consciente de parler dans le vide, mais Hécate avait besoin de garder une connexion même infime avec cette voix qui la guidait. Le son avait cessé de résonner partout autour d'elle pour ne retentir que dans une direction bien précise: celle du ministère. La jeune sorcière voyait le haut bâtiment se découper quelques rues plus loin et la voix de l'inconnu -pas si inconnu- la tirait vers le bâtiment. Il s'en échappait une énergie particulière et Hécate sut alors qu'elle continuait d'avancer, que rejoindre le ministère, fouler l'endroit où tout s'était joué pour elle avant ce coma, serait la clé. La clé de sa survie. Il y avait quelque chose là bas. Quelque chose qui la reliait à la vie.

« Tu me connais maintenant, tu sais que je ne suis pas un homme patient et je préfères te prévenir mais tu es en train de passer les bornes là… »

-Ma vocation c'est de passer les bornes, marmonna-t-elle, vous devriez le savoir, qui que vous soyez!

Elle avait le coeur lancé au galop tandis qu'elle accélérait le pas. Les ombres la suivaient toujours et soudain, vinrent se poser sur ses épaules, adaptant leur forme et leur taille à la mince silhouette d'Hécate.

Pourquoi tu caracole comme ça?
Le mec qui te parle, tu sais qui est ce gars?
Tu te souviens de ce qu'il fait, de c'quil te doit?
Tu te souviens de ce qu'il est pour toi?


-Mon patron, je crois.

C'est rigolo comment tu le dis!
On dirait que tu ne sais pas!
T'as pas l'air claire sur ça, baby
Tu veux nous en parler ou pas?


Hécate tenta de les chasser d'un geste de la main et tourna dans une ruelle, le bruit de ses talons résonnant sur les pavés alors qu'elle approchait de la place d'honneur du ministère. Son estomac commençait à se tordre. Il s'était passé sur cette place une chose affreuse. Et à la seconde où elle posa le pied dessus, les souvenirs revinrent. De nouveau. Ce que le nécromancien avait fait revenir à la surface avant que le déchainement des puissances mystiques n'ensevelisse Hécate sous la torpeur, venait de refaire surface et pour la deuxième fois en peu de temps -du moins selon sa perception- la jeune femme fut heurtée de plein fouet par la puissance des images, des sons, des odeurs qui lui revinrent en mémoire.

C'était pas du joli
C'était pas du gateau
La guerre est infinie
et c'est jamais très beau...


-J'ai...participé à cette bataille...j'ai aidé à tuer ces gens...pour Voldemort?


Pas pour lui tu le sais
C'est pas lui que tu sers ma grande
Y'a un nom et tu le connais
tu l'as sur le bout de la langue.


Hécate se mit à réfléchir puis souffla:

-Rabastan. Son nom est Rabastan. Il est mon mentor. Il m'a aidé quand Léda est...

Ca y est ça commence à venir!
Mais tu te poses pas les bonnes questions
Nous on te regarde faire d'en bas
On est pleines d'interrogations!


-Je n'ai pas le temps d'écouter vos simagrées! s'exclama Hécate en s'approchant du Ministère, il faut aller par là! l'entre deux est un monde fictif, en sortir ne peut se faire qu'en trouvant un chemin que notre inconscient à tracé pour nous! si j'arrive à trouver le lieu où mon esprit se sent en sécurité dans ce monde, j'arriverai à m'en servir comme d'un pont vers le monde terrestre!

On sait tout ça, tu nous ennuies!
parles nous du gars, parles nous de lui!


-De qui? Rabastan?!
s'exclama Hécate avec un geste excédé, mais...qu'est ce que ça peut bien vous faire?!

On se pose des questions
Il y a plein de choses bizarres
Des évènements et des mystères
des actes pas dus au hasard!

Pourquoi ton père est absent? pourquoi c'est lui qui est là?
Pourquoi il te parle maintenant comme s'il avait peur pour toi?
Un patron c'est comme un maitre, ça va et puis ça vient
Pourquoi il te regarde comme si t'allais mourir demain?


Hécate traversa la place, tentant de ne pas penser à ce qui s'était produit lors de la bataille. Les images l'envahissaient, ralentissant sa marche, la fatigue revenait et les questions des ombres commençaient à lui donner le tournis.

-Mais je n'en sais rien moi! lâchez moi avec vos énigmes! Il est mon mentor! mentor et élève se soutiennent, c'est le deal! Si vous aviez un peu plus que du vent dans la cervelle vous comprendriez le concept!

Pas à l'aise, ça te dérange?
Qu'on te gratte où ça te démange?


-Ca ne me démange pas, comme vous dites! d'aussi loin que je me souviennes vous et vos soeurs avez toujours été d'horribles commères! vous seriez prêtes à tout pour voir des problèmes où il n'y en a pas!

C'est sa voix que tu suis
Pourtant c'est pas le premier
A avoir du soucis
A vouloir te ramener

J'sais pas comment tu le sens
Mais nous ça nous étonne
Toute ta rage de vivre
C'est pour lui que tu la donnes!


-MAIS FERMEZ-LA A LA FIN! hurla Hécate.

**

Le médecin de garde, chargé entre autres de la chambre 64, dans laquelle reposait la petite dernière des Shackelbolt releva le nez de son café et fixa le nez sur les différents miroirs magiques suspendus dans la salle de veille. Celui de la chambre 64 venait de se mettre à luire et les capteurs bariolés criblés de boulons et de verrous s'activaient avec un bruit de locomotive. Par la barbe de Merlin! elle entrait en phase de réveil! après trois semaines?! Mais qu'est ce qui se passait avec cette fille bon sang de bonsoir?! les infirmières disparaissaient, et voilà qu'elle faisait la foire d'un seul coup!

Tous les capteurs étaient au rouge. Le coeur commençait à s'emballer et tout le corps semblait se crisper comme si la patiente était submergée par une colère ou une souffrance violente. Inhabituel, très inhabituel. Le médicomage avait entendu dire que la gamine avait des amis hauts placés et si elle leur claquait entre les doigts ça allait faire tâche! surtout pour lui! Regardant l'écran, il plissa les yeux pour reconnaître l'homme qui se tenait près du lit alors que la jeune femme commençait à trembler.

Merlin, Viviane. Pourquoi lui? Pourquoi aujourd'hui? Rabastan LESTRANGE se trouvait juste à côté du lit et le vit ouvrir la bouche sur l'écran. Une seconde plus tard, la terrible voix du directeur de la justice magique se répercuta dans tout le couloir et glaça le sang de l'employé plus efficacement que n'importe quel procédé de cryogénisation.

"MEDICOMAGES! BORDEL DE MERDE EST CE QUE QUELQU'UN FAIT SON BOULOT DANS CE PUTAIN D'HOPITAL OU EST CE QUE JE DOIS VENIR VOUS CHERCHER MOI MEME?! MEDICOMAGES!!"


Il se rua hors de son bureau et appela de la main ses collègues, le petit groupe se précipitant dans la chambre. Voir une si petite femme convulser aussi fort fit presque peur au médicomage pourtant habitué aux cas extrêmes.

-Mais qu'est ce qui se passe?! Johnson! qu'est ce qui a déclenché ça?
-Je n'en sais rien!! ses veilleurs étaient immobiles et soudain ça a été la panique totale!


Un médicomage se tourna vers Rabastan comme une vipère, prêt à lui demander agressivement ce qu'il avait bien pu "foutre" pour la mettre dans cet état mais en réalisant l'identité de son interlocuteur, il se contenta de froncer les sourcils avant d'articuler:

-Ecartez vous monsieur s'il vous plaît.
-Le pouls continue de grimper!
-L'activité cérébrale est intense ça brille de partout! On dirait qu'elle..qu'elle est en plein sommeil paradoxal mais ça ne correspond pas! cria une infirmière en tentant de couvrir le bruit des machines magiques qui désormais faisaient autant de bruit qu'un escadron de nimbus 2000.
-Elle est en phase de réveil?!
-Je ne sais pas! je ne sais pas ce qui se passe!!
-Mademoiselle Shacklebolt?! vous nous entendez?!



**

Elle entendait. A vrai dire, elle n'entendait que ça. Les voix hors du monde de l'entre deux résonnaient dans celui çi comme une infâme cacophonie. Le timbre rassurant de Rabastan avait disparu, remplacé par des cris, des personnes inconnues. Leurs hurlements vrillaient la tête de la jeune femme et elle pénetra dans le ministère par la grande entrée aussi vite que possible, fermant les lourdes portes derrière elle d'un coup de baguette magique.
Les bruits furent étouffés.
Mais pas supprimés.

Les ombres se glissèrent sous la porte. Autour d'Hécate, la réalité recommençait à s'altérer. La peur que provoquaient les voix et la confusion qu'elle ressentait commençaient à altérer son monde.

On va manquer de temps
C'est maintenant ou jamais
Faut courir prestement
Veiller à ce qu'on fait!

Trouves la sortie tu sais où aller!
Le lieu où te sens le plus en grande sécurité!
Tu connais les niveaux, prends vite des mesures!
Avant que ce monde fou ne cède sous l'usure!


-Niveau 2 alors! Niveau 2! mon bureau! je me sens en sécurité dans mon bureau! si un passage s'établit ça sera là!


Hécate courut à travers le hall et poussa un cri de surprise quand un bout du plafond s'écroula, manquant de l'écraser. tout tremblait Tout vacillait. Le sol se fendit et la jeune femme roula en avant de tomber dans la brèche qui venait de s'ouvrir dans le carrelage de marbre. Glissant jusqu'à l'ascenseur, elle écrasa le bouton, sans succès, puis s'élança dans les escaliers, courant si vite qu'elle aurait du attraper un point de côté, eut elle été dans le monde terrestre.

Le niveau 2 était en pleine déliquescence quand elle y parvint enfin. Les vitres se fendillaient,les murs pourrissaient et au dehors, une brume opaque commençait à envahir les airs, s'infiltrant sous les fenêtres. Tout ce qu'elle touchait semblait disparaître, s'effacer et les ombres hurlèrent.

C'est le brouillard!! il dévore tout!!!
Faut prendre tes jambes à ton cou!!
Le monde s'effondre, tu dois partir!!!
Faut se réveiller faut revenir!!!


-J'Y TRAVAILLE! s'écria Hécate en tentant de couvrir le bruit des voix venues du monde réel, mêlée au vacarme des étages s'écroulant en dessous d'elle. Elle atteint son bureau, tira sur la poignée. Fermé. Verrouillé.

-Ouvres toi bon sang! OUVRES TOI! Bordel de MERDE!

Un coup de pied dans la porte ne suffit pas à l'ouvrir et Hécate tâta ses vêtements. pas de baguette. Furibonde, elle cogna de nouveau, encore et encore, jusqu'à s'en écorcher méchamment les jointures des doigts et soudain, poussa un hurlement. Un bras de brume venait de s'enrouler autour de sa cheville et de son poignet. Hécate recula brusquement, gémissant alors que sa chair semblait se dissoudre sous les assauts du brouillard, qui grignotait son corps comme il grignotait le reste de cette réalité. Ca brûlait, ça brûlait plus que n'importe quel feu. La sorcière tituba un peu plus loin de le couloir, et cria:

-Ca ne marche pas!! la porte ne s'ouvre pas!!

Un morceau du plafond se détacha à ce moment, un éboulis s'écrasant sur elle alors qu'elle poussait un hurlement de douleur. Sa tête saignait, mais elle rampa un peu plus loin. Toutes les portes étaient fermées! toutes! il n'y avait rien ici qui lui permette de s'échapper! elle allait mourir. Le brouillard continuait de se rapprocher et Hécate rampa plus loin, le sang lui bloquant presque la vue. C'est alors que le brouillard allait s'emparer de sa jambe qu'elle la vit.

La porte ouverte, au bout du couloir.
La seule qui était toujours ouverte, dans ce monde comme dans le monde terrestre.
Le bureau du directeur.

C'est là bas, remets toi sur tes pieds
Vite vite princesse, tu vas te faire bouffer!


Hécate tira sur ses muscles et ignora l'atroce décharge de douleur qui lui transperça la cheville alors qu'elle se mettait debout. Le bureau. Elle allait l'atteindre, elle pouvait l'atteindre. Chancelante, le brouillard sur les talons, la jeune sorcière donna ses dernières forces. Quitte ou double. Le bureau dégageait une énergie chaude, puissante, et il semblait en émaner une chaleur trop réelle pour appartenir à ce mode là, où tout n'étais au mieux que factice et sans saveur.

-Plus que quelques mètres....

**

-Mais qu'est ce que c'est que ça?! bon dieu, Rupert!

Le corps de la patiente était en train de se couvrir de blessures. Ce furent d'abord les jointures de ses doigts, puis une brulure crépitante à la jambe, au poignet...et enfin la tête. Quand il virent la plaie s'ouvrir sur le front de la jeune femme, les médicomages semblèrent se liquéfier sur place.

-J'ai jamais rien vu de tel! mets la sous tranquillisants!
-Elle est DEJA sous tranquillisants! ça va la tuer!
-Elle est DEJA en train de mourir, tu veux continuer à pérorer?! fais cesser ces convulsions!


Le ton était monté à un tel point que Rabastan Lestrange ne semblait même plus être le prédateur dans la salle. Les médecins avaient tenté de lui faire comprendre subtilement qu'il aurait mieux valu qu'il soit ailleurs mais non, il restait, proche du lit, dans leurs pattes! Il y eut un sifflement terrible et soudain, les machines déraillèrent. Un boulon sauta, un rouage bloqua et ce fut le silence.
Hécate Shacklebolt retomba inerte sur le lit, pâle.

-...Bordel de Merlin. Prenez le pouls, regardez la respiration, il faut la ramener! Mademoiselle Shacklebolt! où sont les sorts de stimulation?! sortez vos baguettes et...
-Ca ne sert à rien!
-Les instruments ont surchauffé, d'accord mais...
-C'est n'est... pas ça. Regardez, elle ne respire plus.

Un silence de plomb tomba sur la pièce. Les médicomages semblaient frappés par la foudre et un seul d'entre eux osa jeter un regard rapide à l'homme près du lit qui à ce moment fixait le corps, les traits si contractés qu'on aurait pu le croire figé pour toujours. Les mains du mangemorts étaient serrées si fort que ses jointures en étaient blêmes et soudain, l'interne de Sainte-Mangouste sut qu'ils paieraient tous cette mort là. Shacklebolt n'était pas le première à trépasser entre ces murs, mais il la leur avait confiée. Et elle venait de mourir sous leurs yeux. Sous les siens.

-Monsieur...M-Monsieurs Lestrange nous...sommes désolés. Toutes nos cond...

L'infirmière ne finit pas sa phrase, un médecin venait de la saisir par le poignet. Il avait les paumes moites.

Une seconde s'écoula. Puis deux. Hécate était plus pâle que jamais, ses cheveux lui retombaient sur le visage. Rabastan Lestrange amorça un geste et tous se prirent à reculer instinctivement, mais il ne sortit pas sa baguette et au lieu de cela, se rapprocha encore un peu du lit. Le silence était mortel. Ses doigts s'approchèrent du visage de la jeune femme et plus doucement que quiconque aurait pu le penser, il repoussa de devant ses yeux une boucle noire, avant de la replacer sur le côté de sa joue. Son pouce effleura la pommette d'Hécate et tous l'obsèrverent retirer sa main lentement. Avec crispation. Frustration. Peine.

Et c'est précisément à ce moment que le miracle se produisit.

-Uuuugh....

Avec un bruit de machine à vapeur mal boulonnée, la patiente inspira brutalement. S'ensuivit une violente quinte de toux qui lui fit cracher un reste de sang et de...poussière, puis la main d'Hécate jaillit, s'accrochant à la chemise de Rabastan alors que ses yeux restaient hermétiquement clos. Elle tira, l'attira, le força à se pencher et un médecin poussa un juron fort peu convenable avant d'encourage la scène que ses collègues regardaient eux avec des yeux de poissons hors de l'eau.

-C'est incroyable! parlez lui! tenez là! allez-y, le contact à l'air de l'aider! Parlez lui! peut être que votre présence a constitué un stimulus! par Merlin c'est du jamais vu!

Hécate ne savait pas bien à qui elle s'accrochait. Tout ce qu'elle savait était qu'elle avait passé la porte. Elle avait passé la porte. Contre son oreille retentissait un bruit sourd, mais étonemment réel.

Tu-tum Tu-tum Tu-tum

Les odeurs étaient fortes elles aussi, il y avait un parfum d'ambre et de...cèdre. Ambre et cèdre. Toussant légèrement, elle s'accrocha, dans cet état de demi-conscience qui suit habituellement un sommeil profond et continue à écouter.

Tu-Tum Tu-Tum Tu-Tum

Elle avait réussi.
Elle était revenue.
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« Qu’est-ce qui a déclenché ça ? » « … la panique totale ! » « Écartez-vous. » « le pouls continue de grimper ! » « Écartez-vous. » « … sommeil paradoxal. » « Qu’est-ce qui a déclenché ça ? » « Elle est en phase de réveil ? » « Écartez-vous. » « Je ne sais pas ce qui se passe ! » Oh Merlin… Rabastan avait déjà assisté à des scènes de panique, à beaucoup de scènes de panique et c’était exactement ce qu’il était en train de revivre en cet instant. Les Médicomages, les putains de Médicomages ne savaient pas quoi faire. PAR MERLIN ! C’était leur métier, non ? Ils en avaient déjà vu d’autres, non ? Ils devaient comprendre ce qui se passaient, ils allaient l’aider, non ? Par Salazar, s’ils n’étaient pas foutus de faire leur travail correctement, il leur montrerait avec plaisir à quel point lui savait bien remplir ses fonctions « Je ne sais pas ce qui se passe ! » « Qu’est-ce qui a déclenché ça ? » Merlin… « Qu’est-ce qui a déclenché ça ? » C’était lui ? Les guérisseurs le regardaient de travers. L’un d’entre deux avait même été à deux doigts de lui hurler à la figure s’il ne s’était pas repris au dernier moment, reconnaissant très certainement le bonhomme à qui il avait affaire. Maintenant ils se concentraient tous sur la petite silhouette de Shacklebolt qui s’agitait avec tant de violence sur son matelas que le lit se soulevait régulièrement, les pieds du sommier se décollant légèrement du sol pour retomber tout aussi rapidement avec des claquements secs. Mais ils regardaient par-dessus leur épaule parfois pour le dévisager et c’était le genre de regard que Rabastan connaissait extrêmement bien : qu’est-ce que vous avez encore fait putain de de monstre ? Le "monstre" était optionnel, mais c’était bien souvent la moindre des choses qu’on avait envie de lui balancer. Et si c’était facile d’ignorer ces regards lorsqu’on était parfaitement conscient de ce que l’on avait fait, lorsqu’on avait désiré faire ce pour quoi on nous accusait, ça l’était beaucoup moins lorsqu’on ne comprenait absolument rien à ce qui se passait. « Qu’est-ce qui a déclenché ça ? » Il ne voulait pas... il n’avait pas voulu que ça se passe comme ça… Qu’est-ce que tu avais espéré ? Qu’elle se réveille en battant délicatement ses paupières endormies ? Juste qu’elle se réveille… Juste peut-être l’aide… La petite femme te l’avait dit, te-l’avais-dit ! Il faudrait un miracle ! Mais je… Tu n’es pas un miracle Rabastan. Et à se prendre pour le Tout-Puissant tu n’arrives qu’à chuter encore plus bas… Regarde là ! Ils allaient la stabiliser, ils étaient nombreux autour d’elle… C’était un hôpital ici ; ils sauvaient des gens tous les jours ! Une main chaude posée sur son bras lui fit détourner son regard d’Hécate qui continuait d’être agité par d’atroces tremblements, il baissa les yeux vers une jeune femme qui avait un air pour le moins inquiet : « Monsieur Lestrange, vous devriez par- » tout en parlant, sournoisement, elle l’entraînait vers la sortie avec la très claire envie de lui faire passer le palier pour claquer ensuite la porte à son nez. Il se dégagea de son emprise d’un geste bien plus brutal que nécessaire : « Je ne veux pas partir… » il aurait voulu dire autre chose, de peut être plus menaçant, plus inquiétant, plus hautain, plus aristocratique, plus Rabastan en quelques sortes, mais son cerveau était vide, sa voix était blanche. Il ne voulait rien ; juste rester. Juste surveiller les guérisseurs, veiller sur elle. Il s’éloigna de la porte, se rapprocha du lit histoire de bien leur signifier que s’ils voulait vraiment le mettre dehors, ils allaient devoir s’y mettre à plusieurs. C’étaient des personnes intelligentes, les Médicomages savaient qu’ils ne fallaient mieux pas s’interposer entre Rabastan et ce qu’il désirait, on le laissa donc s’approcher de la malade. Et s’il les emmerdait, peu importe ! Tu ne peux pas te contenter de partir quand on te le demande ? Tu ne penses pas avoir déjà assez fait ici ? Mais il avait cru bien faire… Il continuait de la regarder et était presque fasciné par les spasmes incessants d’Hécate : les seules fois où il avait vu des personnes s’agiter ainsi, c’était lorsqu’on les torturait. Qu’est-ce qu’elle était en train de vivre ? Dans sa tête ? Est-ce qu’on pouvait souffrir dans un coma ? Elle avait l’air de souffrir là, pourquoi est-ce qu’ils ne faisaient rien ? Il avait envie de lui foutre une gifle. Pour qu’elle cesse de gesticuler, pour qu’elle se remette les idées en place… Elle est dans le coma ! Une gifle ne va pas lui remettre les idées en place ! Franchement, tu en as assez fait, tu devrais sortir… Il voulait rester. Il tendait doucement, imperceptiblement la main vers celle, tremblante, de la jeune femme lorsque soudain il vit les phalanges de cette même main rougir, s’ouvrir, s’abîmer exactement comme si, comme si… Comme si elle avait tenté de péter un mur en frappant dessus. Mais c’était impossible ! C’était apparut brusquement, sans qu’elle ne fasse rien ! C’était impossible ! Puis ce fut sa jambe qui fut comme brûlée, puis son poignet… Une blessure vint s’ouvrir sur sa tête. MAIS QU’EST-CE QUE VOUS LUI FAITES PUTAIN ? Rabastan avait envie de hurler mais ses cordes vocales pourtant surentraînées étaient engourdies et se bloquaient. Sa gorge était sèche. Tu lui portes malheur ! Dégage ! Dégage ! Était-ce de sa faute ça aussi ? Ils t’ont dit de sortir, sors ! C’est de ta faute ! TA FAUTE ! « Je n’ai jamais rien vu de tel ! » « Ça va la tuer ! » « Elle est déjà en train de mourir… » De mourir… mourir. Va-t-en ! Va-t-en ! Je t’en prie, tu vas le regretter si tu restes, pars ! Son cœur battait au même rythme que les instruments qui sonnaient près du lit. Sa respiration était tout aussi irrégulière que les convulsions qui saisissaient tout le corps d’Hécate. Puis soudain…

Tout s’arrêta.
Les machines ne faisaient plus de bruit.
Hécate ne trembla plus et retomba sur les draps comme une poupée au cou brisé.
Respire. Respire. RES-PIRE ! L’inspiration qu’il prit fut étranglée, forcée.

Tout autour du lit, ils s’agitaient de nouveau mais c’était en vain. Il le savait. Rabastan restait immobile et alors que son cœur ralentissait sévèrement après avoir épousé un bref instant le rythme effréné de celui d’Hécate il sentait une atroce léthargie s’emparer de ses membres. « Ça ne sert à rien ! » Exactement comme si on lui avait coulé du plomb dans ses veines. Une sensation familière, une sensation qui n’était que trop familière ces derniers temps… Tu aurais du partir… « Regardez, elle ne respire plus. » Et tout allait bien avant que tu ne te pointes. Il n’avait pas voulu ça. Il avait juste pensé que peut-être… peut-être… Tu n’es bon que pour tuez Rabastan. Pas pour aider. Pas pour sauver. « M-monsieur Lestrange nous… sommes désolés. Toutes nos cond- » Il ne lança même pas un regard à la jeune femme ; il n’était pas empathe, loin de là, mais même l’homme le moins sensible au monde aurait pu dire que dans cette pièce, la tristesse n’était pas le sentiment qui l’emportait. Comme un chien, Rabastan sentait la peur, et cette pièce transpirait la terreur par absolument toutes ses ouvertures. Et lui ? N’était-il pas triste ? Tu te sens coupable ? Il aurait du partir… Je te l’avais bien dit que tu le regretterais. Il n’aurait pas du essayer de lui parler… À se croire Tout-Puissant… Il n’aurait même pas du venir. Tu regrettes, hein ? Pourquoi était-il venu d’ailleurs ? Hein ? Elle n’est rien pour lui, juste… HEIN ? Hécate Shacklebolt. N’était rien pour toi, nuance. Mais la ferme ! Elle est morte ! La ferme ! Et par ta faute ! LA FERME ! Si elle était là le jour de l’éxécution, c’était parce que tu lui avais ordonné. Si elle s’est prise cette estrade, c’est de ta faute. Si on a du la mettre dans le coma, c’est de ta faute. Elle était stable et tu t’es pointée et voilà. C’est de ta faute. Pardon… pardon. Pourquoi devait-il toujours tout rater ? D’abord ses enfants, sa mère maintenant… Pourquoi devait-il toujours perdre les personnes qu’il… Que tu ?... Pardon. Il avait encore, encore, encore tout foiré. Et laissé tomber une personne qu’il aurait du protéger. Bien sûr… c’était de sa faute. Quand il tendit finalement sa main en avant, il ne prit pas garde à la brusque tension qui s’était emparée du personnel présent dans la chambre. Ne la touche pas, tu pourrais encore plus aggraver les choses. Juste une dernière fois. Elle était si pâle, et c’était si étrange de la voir… si pâle. Si immobile. Un mois et quelques plus tôt elle bondissait dans un forêt et maintenant elle était morte. Morte dans un putain de lit d’hopital. Elle n’aurait pas voulu ça. Par Merlin, il s’en voulait. Sans lui elle serait encore vivante, avec roulement d’yeux, ses soupirs, ses gestes de la main, ses attitudes toujours à cheval entre le jeu et l’insolence, ses remarques déplacées, ses remarques pertinentes, son attention, son attention, son attention… Tu casses tout ce que tu touches. Il tend la main vers une mèche de cheveux qui retombe devant ses yeux, ses cheveux n’étaient pas lisses comme il avait pu toujours les voir mais bouclés, indisciplinés après autant de convulsions, ils roulaient partout sur le lit mais elle n’aurait certainement pas apprécié d’en avoir devant les yeux. Il repousse la mèche, frôle sa joue. Ça semblait remonter à plusieurs années le jour où il l’avait surprise en train de réduire en bouillie un confrère dans les couloirs du Ministère. Mais cela ne faisait que quelques mois. Il avait réussi à casser en quelques mois à peine une femme qui avait survécu à tellement, tellement de choses. Pourquoi faisait-il ça ? Alors qu’il essayait, il essayait tellement de bien faire… Il retira sa main, il était si glacé que la peau d’Hécate lui semblait brûlante sous ses doigts.

Et le temps, qui passait si lentement depuis ces dernières minutes, s’accéléra soudain.

Son cœur s’emballa alors que sous ses yeux la poitrine d’Hécate se gonfla et qu’elle fut secouée par un quinte de toux. Quoi ? Quoi ? Est-ce qu’il hallucinait ? La main d’Hécate l’agrippa par le devant de sa chemise et le tira en avant. Par réflexe il résista. Laisse-toi faire ! Il ne comprenait pas, que se passait-il ? Laisse-toi faire ! Elle vit ! Elle vit ! Elle était vivante ! Il se pencha en avant, il sentait sa poigne sur le tissu : elle ne le lâchait pas. Dans son dos il entendait un des Médicomage s’exciter mais il ne comprenait pas un mot de ce qu’il disait, trop pétrifié par ce qui se passait. Comment est-ce possible ? Merci Merlin… Mais comment est-ce… Merci, merci, merci… Il était penché en avant, son visage proche de l’oreille d’Hécate, sa poitrine presque collée à la sienne. Il sentait son cœur battre contre le sien, son souffle glisser contre sa joue. Cassé en deux comme il l’était, il était proche de perdre l’équilibre, alors il s’assit sur le rebord du lit puis, doucement il passa son bras gauche sous les épaules d’Hécate, la souleva lentement, passa son bras droit dans son dos et en l’appuyant contre lui, se redressa. La léthargie qui avait atrophié ses muscles quelques instants plus tôt disparaissait complètement, sa gorge qui s’était serrée jusqu’à l’empêcher de respirer se dénoua brusquement. Ses bras se serrèrent encore plus autour de la petit silhouette d’Hécate. Est-ce que tu trembles ? Il la serrait encore plus fort, sans doute pour masquer ses tremblements, il tournait le dos aux guérisseurs, ils ne pouvaient pas le voir. Respire et détends-toi, tu vas l’étouffer. Qu’est-ce qui lui arrivait ? Le contre-coup. Ça fait combien de temps que tu n’as pas été aussi soulagé ? Il ferma les yeux, et inspira. Sous ses paupières, ses yeux le brûlaient. Pourquoi est-ce que tu… Chut ! Il ne voulait pas réfléchir. Il ne voulait surtout pas réfléchir. Hécate était vivante. Vivante. Vivante ! « Monsieur Lestrange, peut-être lui parler serait… » c’était la voix de la femme. Obéis leur un peu, pour une fois… Qu’est-ce qu’elle voulait qu’il lui dise ? Il n’avait rien à lui dire… Ah tiens… Rien à lui dire devant une armée de Médicomages en tout cas. « Shacklebolt ?... » C’est déjà ça. Il la maintenait par les épaules mais l’écarta légèrement de lui, sa main droite alla se poser sur celle d’Hécate qui s’agrippait toujours à sa chemise : « Tout va bien… Tu es là maintenant. C’est terminé. » Il murmurait bas, très bas, sur le ton qu’il prenait quand il rassurait ses enfants après un cauchemar. « Tu peux me lâcher. » Il serra la main de la jeune sorcière dans la sienne : « Tu peux lâcher. » Il inspira : « Ne t’inquiète pas, tu as fait ce qu’il fallait. Tu es là. Tu peux lâcher. Moi je ne lâcherai pas. »
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Il la tenait.
Il la tenait.
Hécate se sentit soulevée doucement, son corps trop faible ne résista pas, pas plus qu'il ne se rebiffa lorsque deux bras puissants l'enveloppèrent et que son visage se posa contre une surface chaude. La musique d'un coeur continuait de résonner contre son oreille et la jeune femme se sentit étreinte de plus en plus fort. Elle inspira difficilement, expira, mais ne fit aucun bruit qui puisse indiquer qu'elle subissait le moindre inconfort. Elle se sentait en sécurité, les bruits des machines s'étaient tues, tout comme les voix des médicomages.
Il n'y avait que la sienne, à peine un souffle, qui créait un petit courant d'air contre son oreille.

« Tout va bien… Tu es là maintenant. C’est terminé.Tu peux me lâcher.Ne t’inquiète pas, tu as fait ce qu’il fallait. Tu es là. Tu peux lâcher. Moi je ne lâcherai pas»

Moi je ne lâcherai pas.

Moi je ne lâcherai pas.

Une main se posa sur la sienne et elle fut parcourue d'un tremblement.

-Ra...ba...

Le nom ne voulait pas sortir alors elle fronça les sourcils et ressaya:

-Rab-..astan...m-...merci...

sa voix mourut dans un soupir de fatigue et de douleur. Elle lâcha doucement sa chemise mais demeura contre lui. Elle avait peur qu'il la remette dans le lit et qu'elle s'endorme pour ne plus se réveiller. Et elle ne faisait aucune confiance aux médicomages. Ils n'aurait jamais réussi à la sauver si elle ne s'était pas sauvée elle même preuve par A+B que cette profession était en Angleterre largement surestimée quant à ses capacités. Une infirmière s'approcha bien d'elle avec une lueur d'espoir dans les yeux mais Hécate ouvrit les siens pour la première fois depuis qu'elle avait repris conscience et la foudroya du regard. Il y avait un défi mortel dans ses prunelles qui lui disait presque "touches moi et je t'envoies ad patres en t'étranglant avec mes propres perfusions."

Ils n'avaient pas aidés. Aucun d'entre eux. Il n'y avait eu que Rabastan à venir la voir, que Rabastan à lui parler, que Rabastan à avoir un geste un tant soit peu affectueux à son égard en deux...putains...de semaines.... Il avait été le seul à avoir montré le désir réel de la voir revenir. Son père n'avait pas montré sa sale face, son frère n'avait pas pu quitter Poudlard, aucune connaissance, aucun collègue ne s'était déplacé. Elle avait été seule à en crever et maintenant, ces incapables de charlatans voulaient l'arracher à la seule personne qu'elle avait envie de voir près d'elle.
Hécate se crispa et émit un long sifflement chuintant, plus une respiration reptilienne qu'autre chose, et l'infirmière battit en retraite. Il y avait pour cette dernière quelque chose de profondément intimidant et étrange dans la vision qu'elle avait sous les yeux. Cette scène n'aurait du être que celle d'un réveil parmi tant d'autres, mais la jeune patiente et son...ami, à défaut d'un autre terme, se serraient l'un contre l'autre en jetant des regards brûlants dans sa direction. Ils transpiraient la peur, la panique et désormais, la méfiance. Farouches, ils ne voulaient visiblement pas être approchés. Ni l'un. Ni l'autre. Sinon par l'autre.

-...nous...allons vous laisser un peu d'intimité. Nous reviendrons d'ici une petite heure pour une série d'examens et...

Le médicomage se contenta de finir sa phrase par un hochement de tête et invita ses collègues à le suivre hors de la chambre, avant de fermer la porte, entraînant une crispation presque invisible, mais immédiate de Rabastan. Hécate fronça de nouveau les sourcils, contrariée. Laisser les portes ouvertes ce n'était tout de même pas si dur,si?

-La...P-porte! s'exclama-t-elle faiblement.

Il y eut un bruit de talons précipité et la porte fut entrouverte par une infirmière qui la seconde d'après, se pressa afin de mettre le plus de distance possible entre elle et la chambre 64. Satisfaite, Hécate toussa légèrement et murmura très bas:

-V-Vous m'avez...sauvée...étais..p-perdue..et votre voix...m-m'a...guidée...merci...merci...

Pour être tout à fait honnête, il faut bien avouer que la pauvre jeune femme n'avait plus vraiment de filtre à cet instant précis. Elle était trop épuisée et la chaleur du corps contre le sien menaçait de la replonger en pleine sieste incessamment sous peu. Mais il fallait qu'il sache pas vrai? Qu'il sache que..eh bien que...qu'il l'avait sauvée. Il fallait qu'il sache qu'elle l'avait entendu. Et que c'était son bureau le passage, son bureau à lui, il fallait qu'elle lui dise! Il avait pourtant l'air mal à l'aise et elle souffla:

-V-vous...voy-ez...v-vous...sauvez les gens...p-parfois...v-vous...faites ça bien...

Un maigre sourire naquit sur ses lèvres. Hécate n'avait plus envie de penser au nécromancien, à Léda, ou même aux ombres, à ce moment. Elle ne voulait plus réfléchir, plus penser à ce qui s'était produit, se produirait, ou au pilonnage psychologique qu'elle avait subit. Elle ne voulait pas se poser de questions, juste apprécier l'inhabituel sentiment de sécurité qu'il y  avait à se retrouver dans les bras de quelqu'un, elle qui n'avait jamais été protégée, elle qui avait toujours été un petit soldat au garde à vous, baguette en main.
Lors de sa première blessure, on l'avait félicitée. Lors de sa première blessure grave, on l'avait montée en grade. Mais personne ne l'avais étreinte. Personne ne l'avait serrée ainsi parce qu'elle était vivante, parce qu'elle avait eu mal, parce qu'elle s'en était sortie. On avait toujours récompensé la guerrière en se moquant de la fille derrière le masque. La même fille qui à ce moment avait les cheveux en bataille, bouclés après quinze jours sans un lissage, la fille aux cernes creusés qui se lovaient dans les bras d'un homme comme un chaton après une douche glacée.

Eut-elle été dans son état normal, Hécate n'aurait pas accepté ce contact. Trop fière. Trop sauvage. Et trop inquiete quant aux qu'en dira-t-on. Ce n'était pas sensé se produire, pas comme ça et pas ici, pas entre eux. On ne se lovait pas contre son patron, on ne serrait pas si fort sa disciple. Mais ils avaient eu peur, non? ils étaient des êtres humains...non? Pourquoi aller chercher plus loin? Pourquoi compliquer les choses? A cet instant elle lui devait tout et tout comme elle avait sauvé sa vie dans la montagne, il venait de sauver la sienne. Dans le cerveau encore embrûmé d'Hécate, ces arguments étaient d'une logique absolument imparable et elle n'avait pas envie d'approfondir les raisons pour lesquelles elle avait suivi sa voix et pas celle d'un autre. Pourquoi elle n'avait pas peur à cet instant présent alors que le moindre contact masculin déclenchait généralement chez elle une réaction de rejet presque épidermique tant elle avait peu l'habitude de cotoyer le sexe opposé en dehors des champs de bataille.

Elle respirait mieux désormais et se laissa aller, un peu, pas trop, mais un peu quand même.

-D-dites...moi...la vérité...j'ai...b-beaucoup de dossiers...à r-rattraper? O-ou est ce que je peux...juste m'en débarrasser en...ar-arnaquant...un nouveau? après t-tout...j'ai..simulé...pour ça alors...je ne v-vais pas trop travailler...
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Rabastan faisait partie de ce type de personne qui avait fondamentalement besoin de contact : petit il avait toujours été à traîner dans les jambes de sa mère pour quémander un câlin, en vieillissant il avait souffert de cette image qu’il devait absolument donner face aux autres : RabastanGarçonFortLestrange. Les "vrais" garçons ne faisaient pas de câlins, alors comme le disait très bien son père : « ne va pas me faire honte en embarassant tes camarades avec tes manières de petite moldue. » En bon fiston, il avait fait honneur à son nom, son père n’aurait pas été déçu. Ensuite il y avait eu ses enfants qu’il ne se lassait jamais de prendre dans les bras… Puis le vide. Qui n’a pas une seule fois été rompu depuis. Personne ne touchait Rabastan, personne ne se laissait toucher par Rabastan encore moins. Et de ses trois enfants qu’il avait auparavant gardé dans ses bras plus que de raison, un ne lui adressait même pas la parole, l’autre se glaçait au moindre contact et la dernière ne montrait pas non plus une ouverture particulièrement flagrante non plus. Il faisait avec. En vingt ans on apprenait à s’y faire. Peut-être (sans doute) n’en avait-il pas vraiment besoin. En vingt ans… on apprenait à y croire. À croire à une belle idée qui se fit une joie de voler en éclat alors qu’il sentait la chaleur du corps d’Hécate contre lui. Je ne lâcherai pas. En effet, il n’avait pas la moindre envie de la lâcher. « Rab-...astan...m-… merci... » Était-ce conseillé de parler quand on sortait de coma ? Il n’en avait aucune idée, il n’était pas un putain de guérisseur ! Mais alors qu’elle peinait à articuler des mots qui lui parvenait comme un maigre souffle à son oreille, il sentait étonamment rassurée. Elle respirait, elle parlait : elle était vivante. Il ne put voir ce qui se passait dans son dos mais il imaginait très bien, à entendre la voix de la petite femme, l’expression faciale qu’Hécate avait pu avoir. Et bien assez tôt tout le personnel décampa sans demander son reste. Dans une précipitation tant et si bien organisée qu’ils en refermèrent consciencieusement la porte dans leur dos. Il n’avait pas besoin de tourner le regard pour le savoir, le claquement sec et la brusque sensation de malaise qui le prit à la gorge était amplement suffisant pour qu’il puisse déjà imaginer les murs se refermer lentement sur lui. Ses ongles se serrèrent contre la peau d’Hécate, il pourrait simplement se lever pour aller refermer cette putain de porte mais pendant ce bref instant, il ne voulait effectivement pas la lâcher. Il avait l’impression que s’il cessait de la tenir, elle risquait de retomber sur ce lit, de retomber dans les draps, de retomber dans le coma. Resp- « La… p-porte ! » Derrière lui des pas pressés firent un bref aller-retour dans l’unique but d’éxécuter la commande implicite de leur patiente. C’était impressionnant qu’on ai pu l’entendre depuis le couloir, Rabastan avait l’impression que la voix d’Hécate n’était plus qu’un bref filet, ou bien peut-être était-ce juste du au bourdonnement dans ses oreilles qui l’assourdissait à moitié. Sans la lâcher, il s’écartait légèrement, pour pouvoir la regarder. Par Merlin, ce qu’elle lui paraissait petite ! Il ne comptait plus le nombre de fois où cette pensée l’avait déjà traversée, mais ce jour là, dans cette situation là… elle lui paraissait plus petite, plus fragile que jamais. Elle n’était pas habillée, pas apprêtée comme elle pouvait l’être au Ministère. Elle était étonnamment jolie. Hein ? Quoi ? Tu dis ? Il ne disait rien !...  À ta guise. C’est tout ? Tu n’en as jamais besoin de plus. Par Merlin… est-ce qu’il était en train de la tenir dans ses bras ? Ce n’était certainement le genre d’attitude que se devait d’avoir un supé… « V-vous m'avez... sauvée... étais… p-perdue ... et votre voix... m-m'a... guidée.. .merci... merci... » Pour être tout à fait honnête, Rabastan ne put saisir un mot sur trois tellement l’élocution de la jeune sorcière était difficile, mais étrangement il n’eut aucun mal à combler les blancs… Ben tiens… Après entendre les mots et les comprendre… cela relevait d’un tout autre domaine, et le Mangemort ne comprenait pas trop où elle désirait en venir avec cette histoire de voix et de guide. Après elle se réveillait d’un coma de plusieurs semaines, c’était certainement normal que ses discours soient complètement farfelus. Face aux remerciement cependant il ne sut comment réagir et allait fort galamment protester (après tout il n’avait strictement rien fait, il fallait rendre à Morgane ce qui était à Morgane et admettre les faits, il était resté debout sans rien faire d’autres que de regarder sans comprendre) quand il fut coupé dans son élan par Hécate qui, décidément, avait plusieurs jours de silence à rattraper : « V-vous... voy-ez... v-vous... sauvez les gens... p-parfois... v-vous... faites ça bien... » Il dut se raidir un peu plus. C’est pas très bon ça… Elle ne devait vraiment pas avoir conscience de ce qu’elle disait, ou une semi-conscience uniquement. Le malaise qu’il ressentait se propagea : qu’est-ce qu’il était en train de foutre là ? Ce n’était pas du tout approprié, c’était juste une employée, combien de subalterne étaient mort sous sa direction depuis le début de cette guerre ? Question stupide, il ne tenait pas les comptes, il y en avait trop. S’était-il déplacé ne serait-ce que pour jeter un coup d’œil aux cadavres (si d’aventure on en retrouvait) ? Non. Pourquoi l’aurait-il fait ? Il s’en moquait. Alors aller les voir à l’hopital ? Tu passais par là par hasard, n’est-ce pas ? C’était tout à fait ça. Et maintenant tu la serres dans tes bras, parfaitement par hasard également. C’était elle qui s’était accrochée à lui ! Il n’allait pas lui retourner une gifle et la recoucher de force contre l’oreiller non plus ? Pour un autre tu te serais gêné tiens… Oui mais…

Mais… merde ! Juste de tenir quelqu’un comme ça… Il avait l’impression de ne plus être seul. Et alors qu’une part de lui (la bureaucrate qui avait des relents paternels) voulait plus que tout repousser Hécate loin de lui, une autre suppliait presque pour que le contact dure, dure, dure le plus longtemps qu’il était possible. Elle parlait encore, sous le choc toujours. Elle parlait du travail, des dossiers. À contre cœur il se sépara un peu plus d’elle, continuant de la tenir mais par les épaules cette fois. Même s’il savait qu’il devrait certainement le faire, il n’osait pas la reposer tout simplement sur le matelas. Même s’il savait qu’il devait le faire, il ne parvenait pas à la lâcher. Juste encore une petite minute, un petit moment… Qu’est-ce que ça peut bien faire ? Ça fait que… En fait il ne voulait pas savoir. Il n’y avait personne dans cette chambre maintenant, rien que eux deux. Il se moquait de savoir si cette attitude était adaptée ou non. Mmmh, tu t’en moques vraiment ? Oui, il ne voyait pas le problème. Pourquoi elle Rabastan ? Pourquoi est-ce que tu viens la voir elle ? Il y avait tellement de réponses rationnelles à cette question que ça le soulagea : c’était lui qui l’avait emmenée ici, il était normal qu’il vienne comment elle se portait quelques jours plus tard. C’était sa disciple et il était son mentor, c’était donc la moindre des choses de s’inquiéter un minimum de sa santé. Elle rangeait son bureau, c’était fort pratique. C’était une sorcière douée. Il n’aurait pas envie que… Sa voix était légèrement enrouée quand il prit la parole et il se l’éclaircit brièvement avant de reprendre : « Comme tu admets si rapidement que tout ça n’était qu’une grossière manœuvre pour échapper au travail, je vais me faire un plaisir de m’assurer moi-même que tu rattraperas toutes ces paperasses et tous les dossiers des renseignements jusqu’au bout. » T’assurer toi-même oooh… Mais quoi enfin ? Qu’est-ce qui se passait là ? Il ne voulait pas du tout dire ça ! Il raffermit son ton en rajoutant : « Mais avant ça il va falloir s’assurer que tout va bien. Je suis sûr que tu es prête à sortir de ce lit mais il va falloir écouter les guérisseurs… » Ouais, ce serait peut-être pas bête n’est-ce pas ? Il ne voulait pas faire la moindre erreur qui entraînerait peut être un nouveau coma ou quelque chose du genre. Il n’était pas Médicomage, loin de là, était même plutôt tout le contraire, tuer était mille fois plus aisé que de guérir. Il ne voulait pas tuer Hécate. Déjà que tu n’es pas passé loin… Déjà en effet… Alors que son regard parcourait son visage et sa silhouette presque sans jamais se poser, comme s’il craignait de la voir se casser ou bien comme s’il avait peur du malaise qui suivrait un regard trop appuyé il finit par dévisager très franchement Hécate de ses yeux clairs, il se plongeait dans ses iris sombres comme s’il s’apprêtait à entrer dans son esprit mais au lieu de ça ses mains ressèrèrent leur emprise sur ses épaules : « Quelque impressionnante que fut cette simulation Shacklebolt, je te prie de ne jamais recommencer. Jamais. Entendu ? » Il ne pourrait jamais dire à haute voix qu’il avait eu peur, bien sûr que non, et sans doute méritait-elle mieux que ça. Certainement. Mais c’était le mieux qu’il puisse faire. Le mieux.
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Sa respiration s'était complètement calmée à présent. Elle était étrangement calme, étrangement bien. Et même si elle sentait une douleur sourde au niveau de son front et de sa cheville, ce sensations n'égalaient pas ce sentiment incroyable d'être revenue à la vie, et d'être protégée.
Rabastan la décolla de lui, doucement, comme pour ne pas la casser en deux -il avait presque l'air...maladroit?- et la dévisagea longuement. Elle pouvait presque voir les rouages s'activer à l'intérieur de son cerveau mais pourquoi et dans quel but? mystère. Il semblait vraiment pensif et quand il reprit la parole, elle s'attendait à ce qu'il la cloue au pilori avec pertes et fracas.

« Comme tu admets si rapidement que tout ça n’était qu’une grossière manœuvre pour échapper au travail, je vais me faire un plaisir de m’assurer moi-même que tu rattraperas toutes ces paperasses et tous les dossiers des renseignements jusqu’au bout. »

Ah, pas de clouage mais une belle menace en l'air. Rabastan ne gérait déjà pas ses propres dossiers alors ceux des autres...il neigerait en Juillet avant qu'il ne vienne fourrer son nez dans l'armoire parfaitement organisée d'Hécate pour s'assurer qu'elle rattrapait bien son retard. Retard. La photo de Rabastan devait orner la définition du mot dans le dictionnaire. Un sourire commença à naître sur les lèvres de la jeune femme mais elle le cacha presque aussitôt pour ne pas le mettre de mauvais poil. Il était relativement soupe au lait, et bien que cela l'amusât au plus haut point, elle n'avait pas envie de le taquiner ce jour là. Elle était trop fatiguée et pour une étrange raison...elle sentait qu'il n'avait pas besoin de ça.

« Mais avant ça il va falloir s’assurer que tout va bien. Je suis sûr que tu es prête à sortir de ce lit mais il va falloir écouter les guérisseurs… »

Cette fois ce fut la moue. Pas les guérisseurs. Pas l'hôpital. Elle voulait sortir de là aussi rapidement que possible et par Merlin s'il pensait la forcer à rester là elle...

« Quelque impressionnante que fut cette simulation Shacklebolt, je te prie de ne jamais recommencer. Jamais. Entendu ? »

-...Entendu.

Ils continuaient à se fixer. Il la regardait droit dans les yeux et elle ne baissait pas le regard, il serrait ses épaules plus fortement et la jeune femme déglutit lentement. Elle n'avait pas peur de lui, elle n'avait jamais eu peur de lui. Il avait après tout une réputation mais qu'est ce qu'une réputation? des bruits de couloir, des histoires racontées. Elle n'y faisait pas attention. Et Rabastan Lestrange ne lui faisait pas peur. Mais alors qu'il la sondait du regard, elle sentit sa poitrine se contracter...ce n'était pas de la crainte, c'était de la culpabilité. Parce qu'il était plus pâle qu'à l'ordinaire, sans qu'elle comprenne bien pourquoi. Parce qu'il avait les traits tirés, à cet instant précis et parce qu'il avait dans les yeux une lueur de...quelque chose. Ce n'était pas un ordre, qu'il venait de lui énoncer. C'était...une demande?
"je te prie de ne jamais recommencer"
Etonnant le sens que l'on peut trouver derrière des formules de politesse d'ordinaires utilisées pour imposer sa volonté sous couvert d'amabilité. Il la priait de ne pas recommencer.
Cette fois Hécate sentit son estomac faire des noeuds. Est ce qu'il avait eu...peur pour elle?

"C'est sa voix que tu suis
Pourtant c'est pas le premier
A avoir du soucis
A vouloir te ramener

J'sais pas comment tu le sens
Mais nous ça nous étonne
Toute ta rage de vivre
C'est pour lui que tu la donnes!"


Le souvenir de la voix des ombres la fit trembler violemment. Ca n'allait pas. Il y avait quelque chose qui n'allait pas du tout, là, maintenant. Elle avait le ventre en vrac, le coeur compressé, la respiration de plus en plus rapide et elle voulait plus que tout échapper à ce moment dont les secondes s'égrenaient à une lenteur catastrophique.
Il avait les mains brûlantes.
Et les yeux trop bleus, trop expressifs.
Pourquoi avait-il eu peur?
Pourquoi y accordait-elle de l'importance?
Pourquoi sa voix?
Pourquoi son bureau avait il été le passage?
Pourquoi était-il là?
Pourquoi il la tenait comme ça?
Pourquoi elle ne se dégageait pas?
Pourquoi lui?
Pourquoi pas un autre?
Pourquoi se sentait-elle presque malade? ce n'était pas de la peur, ce n'était pas de la crainte, ce n'était pas de la colère, ce n'était pas de la tristesse, pas de l'angoisse, pas du regret, pas du dégout, pas de la méfiance, ce n'était rien de ce qu'elle avait l'habitude d'analyser.

-Je...veux p-pas rester à l'hôpital...dois y aller. Maintenant. P-pas demain...p-pas ce soir...maintenant.

Elle quitta son contact et tenta de se mettre sur ses jambes, se retenant de justesse au rebord du lit. Bien: jambes hors service.

Ca va aller.
Allez, un pas devant l'autre.


Voyant qu'il amorçait un geste, elle leva l'index et le regarda de nouveau droit dans les yeux.

-Uh uh. Ne p-pensez même pas...à me r-recoller dans ce lit ou à me forcer à r-rester ici! Ca a p-peut-être marché lors de la d-dernière mission de survie mais p-pas aujourd'hui! Je suis réveillée, je sors m-maintenant.Je me remettrai...chez moi. Où est ma b-baguette?

Leurs regards convergèrent vers la table de nuit où reposait la baguette en bois de cyprès, juste à côté de Rabastan, trop loin pour Hécate, à portée de main pour lui. Ils se regardèrent et Hécate articula:

-..........donnez moi...ma baguette. S'il vous plaît.

Le ton indiquait exactement qu'elle serait capable de faire usage de ses cordes vocales s'il "ne lui plaisait pas" de lui rendre son arme sur le champ. Supérieur ou pas, il restait un homme, et elle restait une femme à bout de nerfs. Mieux valait ne pas trop jouer avec une femme au bout du rouleau.
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« Entendu. » Demander ce genre de promesse à quelqu’un, en ces temps pour le moins dangereux, était presqu’injuste. Ce n’était pas de sa faute si elle s’était retrouvée dans cet état, elle n’avait pas voulu ça. Mais comment pouvait-il le dire autrement ? Il n’avait pas l’esprit prêt à imaginer mille et une formulation délicates ou subtiles pour exprimer ce qu’il ressentait, et il était déjà satisfait de ne pas avoir sorti un très abrupt : « Meurs une nouvelle fois et par Merlin je te tue. » Sa respiration s’apaisait avec le passage des minutes. Il lui semblait incroyable qu’il puisse la tenir la, entre ses mains, vivante alors qu’il avait bel et bien cru quelques minutes auparavant qu’elle était morte. Encore une fois ça ne serait pas la première. On pouvait dire ce qu’on voulait, Mangemort ou bien Enfant de chœur, personne ne pouvait s’habituer vraiment à la mort. Et on ne parle pas des morts "annexes", qu’est-ce qu’on pouvait s’en foutre que le voisin se soit fait piétiner lors d’une émeute ! Ça c’était clairement les décès qui rentrait dans la case accessoire de l’esprit du cadet Lestrange. On parle de vraies morts. Celles des personnes que l’on connaît. Des personnes qui nous manquerait, au sens premier du terme. La question demeurait : pourquoi avait-il l’impression qu’Hécate pourrait faire partie de cette catégorie ? Hein ? Hein ? Non rien… Rien. « Je...veux p-pas rester à l'hôpital...dois y aller. Maintenant. P-pas demain...p-pas ce soir...maintenant. » Ah ! Voilà ! Il l’aurait parié ! La voilà qui voulait partir presto presto alors que les guérisseurs avaient clairement laissé entendre qu’ils repasseraient bientôt pour faire un point sur son état et du lui-même venait juste de lui faire remarquer qu’il allait falloir patienter un petit peu. Si c’était un signe qu’elle ne devait pas aller si mal, c’était également une attitude qui inquiétait Rabastan : oui bien sûr et elle croyait quoi ? Qu’elle allait pouvoir sautiller allègrement jusqu’à la sortie et gambader dans les rues comme si de rien n’était ? Comme si elle n’avait pas passé les dernières semaines clouée dans un lit ? Elle n’en n’avait peut être pas de souvenir mais son corps lui devait s’en rappeler. Et il était très bien placé pour savoir quelle pouvait être la réaction physique des muscles lorsqu’on leur demandait même le plus petit effort après un long moment passé dans l’inaction. Il n’avait pas vraiment envie de prendre le risque que ça lui arrive. D’ailleurs lorsqu’elle se dégagea et tenta de se mettre debout ce fut l’échec le plus catégorique. Il dut d’ailleurs avoir une expression qui s’approchait du je-te-l’avais-bien-dit mais lorsqu’il voulut la retenir, par instinct et par crainte de la voir tomber par terre elle l’arrêta immédiatement en levant un doigt autoritaire ce qui la fit beaucoup ressembler à sa mère ou même (il grinça des dents) à Elena lorsqu’elle soutenait une argument qu’elle savait particulièrement dur à avaler pour lui. Lorsqu’elle parla sa voix tentait de retranscrire cette autorité mais sa voix était trop hâchée pour ça. Mais elle n’avait pas besoin de ça pour qu’il sente sa détermination… Tu serais exactement pareil… Lui n’avait jamais fait de coma, et n’avait jamais eu besoin de vrais soin, ce n’était pas du tout pareil ! Tu détalerais aussi sec au réveil, tu n’aimerais pas ça. En vérité… oui. Il était quasi-certain qu’il aurait l’exact même réaction que celle qu’avait Hécate s’il devait reprendre conscience après plusieurs jours d’absence. D’accord, d’accord… Mais ce n’était pas la même chose quand même ! Comment ça pas la… « Où est ma b-baguette? » Ses yeux suivirent ceux d’Hécate pour s’arrêter sur la petite baguette qui reposait bien tranquillement sur la table de chevet, insensible au débat dont elle n’allait pas tarder à être l’enjeu. Il n’avait qu’à tendre la main pour la prendre, elle n’avait qu’à tendre la main, s’étirer sur le matelas, faire une galipette et chanter le dernier tube des Rotten Apple pour pouvoir l’atteindre (bon il exagérait mais quoi qu’il en soit guère besoin d’être un attrapeur de renom pour attraper sa baguette avant elle). Hécate parut remarquer ce petit détail et lorsque leurs regards convergèrent de nouveau, elle donnait l’impression qu’elle était prête à se battre en duel avec lui (un duel sans baguette du coup, ce qui était nettement moins impressionnant… quoi que… elle n’aurait pas de couteau cacher sur elle tout de même ?) « …donnez moi... ma baguette. S'il vous plaît. » Au moins la formule de politesse y était, mais le ton qui le prononçait ne transpirait en rien l’amabilité. Lentement il tendit la main vers l’objet tant désiré, sans se presser, et la saisit dans sa main droite.

Ce n’était pas la première fois qu’il la tenait cette baguette là, elle lui était presque familière. Plus par mauvaise habitude que par désir de faire enrager Hécate (qui pouvait ressentir ce désir ?) il la fit tourner entre ses doigts. Il hésitait. Elle n’était peut être pas morte mais il faudrait un moment avant que la culpabilité qui l’avait saisi lorsqu’il avait vu son petit corps presque se briser en deux à cause des convulsions ne s’efface. Il ne voulait absolument pas courir de risques. Il voulait la prendre par les épaules et bien sagement la remettre dans son lit… Stupéfie-là tant que tu y es. Peut être pas à ce point là, non… Mais c’était l’idée générale. Pourtant d’un autre coté, si on tentait de se mettre à sa place… Rabastan ne supporterait déjà pas qu’on l’oblige à rester quelque part, il ne supporterait pas non plus que quelqu’un d’autre tienne sa baguette par ailleurs… Laisse la partir et elle va s’écrouler dans les couloirs, se péter le cou et après tu te sentiras bien. De toute évidence s’il l’obligeait à rester là, et il avait parfaitement les moyens autoritaires et physique de le faire (même si vaincre une petite femme qui sortait d’un coma n’avait rien de très glorieux), elle allait le détester. Tout comme lui détesterait quiconque le forcerait à se coltiner un lit d’hôpital. Tu t’en fous qu’elle te déteste, tu veux juste qu’elle aille mieux. Pourquoi est-ce que tout devait être si compliqué ? Tout était tellement plus simple avant, il réussissait mieux à gérer ces choses là, avant. C’était comme si on lui avait retiré quelque chose et maintenant il ne comprenait plus, il ne savait plus comment faire avec les autres. Cela faisait plus de quatre ans qu’il faisait mine de s’en moquer (il n’avait pas besoin des autres) mais les erreurs qu’il accumulaient par rapport à ses enfants, par rapport aux peu de personnes un tant soit peu proches qu’il pouvait avoir le fatiguait. Il voulait juste bien faire. Mais il n’y arrivait pas. Il n’avait pas d’instinct, il ne l’avait plus.

Après un long moment où il la scrutait du regard il finit par tendre sa main en avant, lui présentant la poignée de sa baguette pour qu’elle puisse la prendre, mais alors qu’elle entamait un geste il la recula légèrement : « Une chose Shaklebolt. Une-toute-petite-chose. Je te rends ta baguette bien entendu mais… » Ce n’était pas une condition, il n’avait pas de condition à poser, il lui rendrait sa baguette évidemment et ensuite elle ferait ce qu’elle voudrait. Paie ton supérieur ! Il n’était pas ici en tant que supérieur, il était ici simple visiteur. Tu as juste peur qu’elle te déteste. C’est de la lâcheté… Qui sait ce que la peur de perdre quelqu’un, ce que cette lâcheté là, aurait pu lui faire faire il y a quelques années ? « Tu ne vas pas aller bien loin dans l’état où tu te trouves. Je conçois que tu veuilles rentrer chez toi mais… » Trop de mais. « … laisse-moi t’accompagner. Juste… t’aider. » Oula, aider, elle n’allait pas apprécier le concept. Dis lui que tu as eu peur et que tu ne veux pas avoir à t’inquiéter comme ça de nouveau. Mais bien sûr ! « De toute manière si tu tentes de sortir quelqu’un va bien finir par te rattraper. Si je te raccompagne… » Sans vouloir se vanter, Rabastan avait assez de moyens pour faire pressions sur quelques médicomages, même les plus zélés « … tu n’auras pas ce genre de problème. » Il fronça les sourcils : « Et je voudrais que tu reviennes, ici. Juste pour… vérifier que tout vas bien. L’affaire d’une ou deux heures. » C’est laborieux. « Evidemment je ne vais t’obliger à rien, c’est simplement une proposition. Et s’il te plaît, ne me foudroie pas dès que tu auras récupéré ta baguette… »
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« Une chose Shaklebolt. Une-toute-petite-chose. Je te rends ta baguette bien entendu mais… »


Merlin mais c'est qu'il hésitait à la lui rendre, ce vaurien! S'il y avait bien une chose qu'Hécate et Rabastan avaient en commun c'était le refus de laisser qui que ce soit les dépouiller de leurs armes et s'il ne la lui rendait pas, Hécate se sentait capable d'aller lui tirer les cheveux jusqu'à ce qu'il change d'avis prontissimo. Elle attendit, curieuse de voir jusqu'où il serait capable d'aller. Une partie d'elle voulait croire qu'il n'était pas comme ces hommes attendant une faille pour abuser des gens, des femmes, lorsqu'elles étaient en position de faiblesse, qu'il ne faisait pas partie de ce genre de porcs attendant juste une ouverture pour exiger, commander, décider à  la place des autres et les faire plier sous la menace.

« Tu ne vas pas aller bien loin dans l’état où tu te trouves. Je conçois que tu veuilles rentrer chez toi mais … laisse-moi t’accompagner. Juste… t’aider. »

Plait-il? Comment ça l'aider? comment ça l'accompagner?. Est ce qu'il était en train de...lui proposer de la raccompagner?! chez elle?! là où elle vivait?! la proposition laissa Hécate pantoise un petit moment. C'était tellement...différent de ce à quoi elle s'était attendue qu'elle ne parvint pas à parler dans un premier temps. Est ce qu'il voulait la fliquer? s'assurer pour de bon qu'elle ne simulait pas en la traquant ? trouver son adresse en prévision d'une vendetta consécutive à un mauvais travail?
What was his plan? TALK, MAN.

« De toute manière si tu tentes de sortir quelqu’un va bien finir par te rattraper. Si je te raccompagne…tu n’auras pas ce genre de problème. Et je voudrais que tu reviennes, ici. Juste pour… vérifier que tout vas bien. L’affaire d’une ou deux heures.Evidemment je ne vais t’obliger à rien, c’est simplement une proposition. Et s’il te plaît, ne me foudroie pas dès que tu auras récupéré ta baguette… »

Trop de silences, trop de formules de politesse, trop de libertés et trop de choix en une seule phrase. Hécate sonda Rabastan du regard, cherchant le piège dans ses iris claires, et finalement, déglutit lentement. Elle qui avait la langue toujours trop bien pendue, elle ne savait pas quoi dire. Alors elle se contenta de hocher la tête et de tendre la main vers sa baguette.

-D'accord.

Sa main rencontra le bois de l'arme et elle la récupéra avant de garder les yeux fixés dessus pour éviter d'avoir à les lever vers son mentor. Elle ne supportait pas qu'il la voie comme ça, qu'il se sente même obligé d'être...aimable avec elle. Etait-elle donc si pitoyable? si pathétique? L'esprit de la jeune femme était totalement clair désormais et elle regrettait à présent de s'être serrée contre lui, de l'avoir forcé à la supporter en plein moment de faiblesse et de s'être elle même présentée ainsi. Rabastan Lestrange se sentait obligé de la raccompagner: une véritable pitié. Hécate en aurait hurlé de rage si elle n'avait pas eu la profonde conviction que sa voix se briserait illico. Elle ne voulait pas qu'il ait pitié d'elle, elle voulait qu'il...
Qu'il quoi?
qu'il soit fier d'elle? elle n'avait plus cinq ans.
Peut être avait-elle envie qu'il l'admire, qu'il la reconnaisse comme une égale. Elle recherchait son approbation, son regard, elle aimait se sentir estimée de lui, elle aimait qu'il l'observe comme si elle était...vaillante. Valable. Elle n'attendait pas de lui un rôle paternel, non, c'était quelque chose de plus...
Elle ne parvenait pas à le décrire précisément. Mais son avis importait et c'était un fait important. Qu'elle soit là, vulnérable, lui donnait l'impression d'avoir échoué quelque part, dans son rôle d'apprentie, de paraître puérile, enfantine...c'était un sentiment on ne peut plus désagréable.
Mais il avait raison...elle ne pourrait pas sortir seule. Elle ne passerait même pas le seul du couloir et n'était pas en état de s'échapper par la fenêtre. Vaincue, elle se résigna et releva les yeux vers lui, ses iris noires rencontrant celles de Rabastan, toujours aussi bleues et ce jour là légèrement...confuses?
Confuse, Hécate l'était également, car quelque chose dans un recoin de son esprit venait de s'allumer, de clignoter brièvement, une sorte d'alarme presque inaudible, de satisfaction, de reconnaissance. Il voulait la raccompagner chez elle. Cette pensée bataillait avec la honte que la jeune femme ressentait, tentant de se faire entendre: s'il la raccompagnait c'était qu'il voulait qu'elle reste en vie. Elle n'était définitivement pas seule. Elle n'était pas seule, tant qu'il était là. Et cette constatation lui réchauffa le coeur, un peu plus qu'elle ne l'aurait du.
Alors elle parla, presque contre son gré:

-...Merci.

Ils avaient un historique chargé de remerciements en demi-teinte, murmurés et jamais réellement assumés. Parfois, Hécate avait l'impression qu'ils tentaient de se prouver des choses, à eux mêmes, et à l'autre. Qu'ils étaient forts, même seuls, qu'ils n'avaient besoin de personne et qu'une baguette suffisait à leur puissance. Bien entendu, elle n'accordait que peu de crédit à cette théorie: Rabastan Lestrange n'avait rien à prouver à personne, ce n'était pas le genre du bonhomme.

Toute à ses reflexions, elle ne remarqua pas que son mentor avait ouvert la porte et appelé une infirmière pour l'informer -poliment mais très fermement- qu'Hécate Shacklebolt allait quitter les lieux, et reviendrait pour une visite de contrôle, merci, au revoir.
La jeune soignante balbutia un début de protestation, puis se ravisa et marmotta qu'elle allait en informer le médicomage en chef. Pendant ce temps, Hécate avait localisé des vêtements sur une chaise, proprement pliés, ceux qu'elle portait lors de l'assaut. Ils avaient été lavés, recousus aussi visiblement. Elle les prit et s'isola derrière le paravent placé près de la fenêtre de la chambre, avant de batailler avec le tissus.
Son corps était tellement....faible.
Lorsqu'elle eut enfin réussit à mettre son pantalon et le haut dans lequel elle flottait désormais légèrement -un résultat de sa perte de poids hospitalière-, elle sortit et s'avança vers Rabastan, tout en tentant de discipliner ses boucles sauvages.
Pas de lisseur, malheur. Un vieux proverbe anglais probablement.

-On peut...y...aller?

La porte était ouverte, alors probablement. Elle enfila sa veste avec peine et rangea sa baguette à sa ceinture puis se mit à marcher. Elle avait du mal. Mettre un pied devant l'autre n'avait jamais semblé aussi ardu. Se tenant au mur, elle tenta un très léger sourire à l'adresse de Rabastan:

-Je g-gère, dit elle doucement.

Ils descendirent dans le hall par le biais des vieux ascenceurs à la mécanique branlante et avisèrent les cheminées qui vomissaient ou avalaient les visiteurs. Le personnel de l'accueil jeta un regard hébété au duo qui progressait désormais dans le hall, mais hécate ne leur prêta aucune attention et entra dans une cheminée libre avant de toucher légèrement le bras de Rabastan. Il eut un petit mouvement de recul mais elle lâcha doucement:

-Je ne vais pas vous c-casser le bras.

Puis, elle attrapa une poignée de poudre de cheminette et murmura:

-Bran Tower, Londres.

Le feu s'embrasa sous eux, vert, criard et en un instant, ils furent transportés dans le hall de la Bran Tower, dans le petit hall des cheminées qui jouxtait le hall principal, celui qui était gardé jour et nuit. Hécate fit un pas en dehors de l'âtre, avisa le gardien qui la regarda d'un air peiné.

-Bonjour Mademoiselle Shacklebolt.
-Bonjour Argus. Comment allez v-vous?
-Bien, je vous remercie. J'ai appris ce qui vous étais arrivé. Ravi de vous revoir. Le ménage a été fait dans votre...

Il s'interrompit en voyant la haute silhouette de Rabastan apparaître à son tour. De rougeaud, le gardien devint blême et en lâcha son journal fort peu élégamment.

-Calmez vous A-Argus, il est avec m-moi. Il me r-raccompagne.

L'idée même de la chose eut l'air de rendre le gardien encore plus incrédule et effrayé, aussi se contenta-t-il d'hocher vigoureusement la tête et de proférer des salutations confuses. Hécate lui sourit un peu difficilement et emprunta un nouvel ascenseur, cette fois luxueux.
La musique se déclencha alors qu'ils montaient et elle fut rapidement gênée par le silence entre eux. Ca aussi, c'était devenu une habitude. Ils étaient pourtant du genre bavard en présence de l'autre, Hécate avait toujours une remarque bien sentie et Rabastan une réponse appropriée. Leurs échanges ressemblaient à une partie de Quidditch: le souaffle allait d'un camp à l'autre et de temps en temps, un cognard bien senti était envoyé. Plus souvent par Hécate que par lui, cela dit. Le silence n'était pas quelque chose de plaisant. Elle préférait qu'il râle et qu'elle le pousse à tempêter, c'était infiniment plus familier.

Lorsque la petite musique indiqua qu'ils avaient atteint le bon étage, Hécate sortit doucement et vit qu'il hésitait à la suivre. Elle cligna des yeux et se retourna brièvement le temps de déverouiller sa porte grâce à l'empreinte de sa baguette. La porte s'ouvrit sur les murs bleus de l'appartement et un parfum de cannelle et d'épices se déversa dans le hall.

-Vous...est ce que v-vous voudriez entrer?

Il allait dire non, bien sur qu'il allait dire non. Mais elle n'avait pas pu s'empêcher de proposer. Même si le voir là face à sa porte, en dehors du travail, était on ne peut plus étrange. Elle aurait...apprécié, qu'il entre. Pour une tasse de thé.
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Elle tendit la main et Rabastan laissa la petite baguette de cyprès glisser de ses doigts alors qu’elle la récupérait. « D’accord. » Il soupira. Il venait d’arracher un Entendu à Shacklebolt suivi d’un D’accord. Peut-être devrait-il en profiter pour régler quelques affaires en suspens puisqu’elle paraissait d’être d’une humeur particulièrement propre à la concession… Toutefois aussi étonnant que cela puisse sembler, le Mangemort avait quelques notions concernant la décence et profiter de la faiblesse d’une personne était une stratégie à utiliser jusqu’à plus soif contre des raclûres mais certainement pas contre une protégée. Contre sa protégée. Alors qu’elle retrouvait sa baguette, il remarqua qu’elle prenait grand soin à éviter son regard, ce qui n’était pas quelque chose de très courant pour elle. La jeune sorcière était plus du style à planter ses yeux dans les siens et à lui assener sans vraiment cogiter plus avant ce qu’elle pouvait bien penser. Il avait souvent pensé qu’il serait très heureux si elle pouvait un jour, rien qu’un seul jour, baisser les yeux. Heureux, satisfait, fier… Qu’en savait-il en réalité ? Il aurait juste aimé qu’elle lui montre un minimum de respect. Malade… C’était fou qu’il ne puisse l’envisager que de cette façon. Quoique… il avait toujours estimé qu’elle restait dans les clous sinon il ne se serait pas gêné pour l’y remettre presto. N’est-ce pas ? Rabastan voulait croire qu’il ne faisait pas favoritisme mais il savait que c’était faux, le simple fait qu’il se tienne là, dans un hôpital juste pour lui rendre visite lui démontrait le contraire. Alors ? Alors ? Maintenant que son visage restait penché et ses yeux définitivement rivés sur sa baguette, est-ce qu’il était satisfait ? Peut-être… peut-être qu’il préférait finalement quand elle ne cillait pas. Ce qui n’était pas chez elle un signe d’irrespect mais plutôt de volonté. Il aimait sa volonté. Tu… quoi ? Appréciait. Oh par Merlin, sincèrement ? Je ne fais que relever. Il passe sa main dans ses cheveux, très vaguement, toujours ce geste rituel pour se redonner contenance, pour reprendre confiance. Le geste pour se décoiffer. Pour se donner une allure, quand on était à l’école. Les gens la perdaient avec l’âge, cette habitude. Rabastan l’avait conservé. Presqu’à la manière d’une drogue, il en avait besoin quand il devait reprendre les rênes. C’était si simple, cinq doigts qui glissaient dans les mèches lisses, qui les ébouriffaient légèrement et son dos se raidissait, ses épaules se carraient. C’était un processus. C’était son processus. Elle relevait les yeux vers lui : « … Merci. » Douce Vivianne ! Entendu, d’accord, merci. Quel serait le prochain sur la liste ? Allait-elle l’appeler Maître ? À la reflexion, il ne préférait pas… Il haussa doucement les épaules, ce qui était le dernier geste sensé à faire mais le seul qui lui vint à l’esprit pour répondre au remerciement de la sorcière. « Je t’en prie. » finit-il par dire, plutôt par marmonner avant de se lever et de se diriger vers la porte. S’ils voulaient mettre les bouts en étant certain de ne pas avoir une troupe de médicomages zélés collés aux basques, mieux valait faire les choses avec rigueur. Et même si certains pouvaient en douter, Rabastan était un homme qui pouvait faire preuve d’une très grande rigueur : « Hey… » l’aide aux guérisseur qui passait à ce moment là dans le couloir lui lança un regard à mi chemin entre la suspicion profonde et une légère crainte. « Oui monsieur Lestrange ?... » « La patiente de cette chambre, Mademoiselle Hecate Shacklebolt va partir immédiatement. Elle reviendra, dans un jour ou deux. Ou trois. Pour des vérifications. Vous avertirez vos supérieurs. » Ce n’était pas une demande, mais un ordre. Il n’était certainement pas habileté à jeter des commandes à tout va ici, mais tant qu’on y était n’est-ce pas ? Mieux valait ne pas se priver, surtout que les gens avaient tendance à lui obéir facilement. Charisme ravageur. Ou très mauvaise réputation. Il savait où penchait la balance. Tant que le résultat était le même… Peut importait le chemin tant que le lieu d’arrivée était le même. Alors qu’il s’occupait à suivre intensément du regard la silhouette de l’aide qui filait prévenir ses sus-mentionnés responsables, Hécate se changeait derrière le paravent. C’était d’ailleurs cette raison qui le poussait à s’intéresser au dos de la fonctionnaire de St Mangouste, sachant très bien que s’il lançait un regard dans la pièce, il serait atrocement gêné à n’en pas savoir où poser son regard. Encore une fois quelque chose qui pouvait être si simple avec des prisonniers était mille fois plus difficile quand il s’agissait de… quelqu’un d’autre. « On peut… y aller ? » Il se tourna vers elle. Fine. Un peu trop fine. Elle n’avait pas perdu tant que ça de poids mais… Rabastan avait un mauvais passif avec les brusques pertes de poids qui creusaient les joues, agrandissaient les yeux et affaiblissaient les muscles. Elle aussi passait sa main dans sa tignasse bouclée, et guère besoin d’user de legilimancie pour voir qu’elle regrettait ses mèches lisses et correctement disciplinées qu’elle arborait au Ministère. Rabastan ne regrettait pas. Ça lui allait bien. Oh, tu pourras bientôt avoir ta rubrique dans Weekly Witch… Ça lui donnait un air moins sévère, voilà tout. Et ça adoucissait un visage troublé par plusieurs jours de coma. « On peut y aller. » répondit-il alors qu’elle enfilait sa veste. Visiblement elle peinait à avancer. Il voulut l’aider, machinalement, parce que ce genre d’état de lui évoquait rien de bon et si elle venait à s’écraser par terre, cela ne servirait en rien à apaiser son malaise. Pourtant quand il allait lui proposer de la soutenir elle se tourna vers lui pour étirer ses lèvres en un sourire difficile : « Je g-gère. » Il n’allait pas la forcer à accepter son aide non plus… Alors il la suivit jusque dans le hall et ils parvinrent aux cheminées qui leur permettraient de partir sans aucune chute. Elle reprenait vite l’habitude de marcher. Ses jambes n’avaient pas eu trop le temps de s’affaiblir apparemment. Il la regarda entrer dans une cheminée, fit un pas en arrière quand elle voulut lui attraper son bras. « Je ne vais pas vous c-casser le bras. » « Je le sais bien… » marmonna-t-il en la rejoignant dans l’âtre. Toujours un peu mal à l’aise quand on touchait son avant bras gauche, il n’eut toutefois guère le temps de laisser le contact traîner puisqu’ils furent presqu’instantanément emmené à la Bran Tower. Il entendit Hécate échanger quelques mots avec le gardien qui évidemment tira une tronche quand il l’aperçut sortir de la cheminée en époussetant sa veste. « Il me r-raccompagne. » Plutôt effarouché le bonhomme, c’était bien pour ça qu’il n’aurait jamais pu vivre ici… C’était ce qu’il se disait à chaque fois qu’il venait rendre visite à Adele. Trop de monde regroupés au même endroit, trop de braves personnes qui vous dévisageaient plutôt que de vous dire bonjour. Il fallait dire que de toute manière Rabastan n’était pas le genre à aller aux soirées barbecue spéciales voisins même si on se risquait à lui envoyer une invitation. Fallait pas pousser non plus. Il était très bien seul, dans sa maison. Seul. Très bien. Il la suivit dans… un putain d’ascenseur. Voilà pourquoi il ne vivait pas ici aussi. Ces saloperies d’ascenseurs… Il prenait les escaliers quand il venait voir Adele, et il se tapait l’ascension complète puisqu’elle a eut l’excellente idée de réquisitionner le dernier étage. Mais il préférait et de loin passer dix minutes à souffrir sur les volées de marches plutôt que dix secondes dans ces boîtes. Boîtes qui étaient ici encore plus étroites qu’au Ministère même si elles étaient plus jolies ici. Alors qu’elle posait un pied dedans il eut un bref moment d’hésitation : il pourrait toujours la laisser ici… elle ne risquait plus de claquer avant d’arriver chez elle non ? Sauf si l’ascenseur se bloquait. Mais là il ne lui serait d’aucune utilité, ce serait lui qui claquerait. Non, mieux valait la raccompagner jusqu’à sa putain de porte et même jusqu’à son sacré bon sang de canapé s’il le fallait. Après il pouvait prendre les escaliers… Il mettrait plus de temps mais au moins… C’est idiot. Oui, c’était idiot. Il s’était habitué aux boîtes du Ministère mais cela ne suffisait pas. Pourtant il n’allait pas briller par le ridicule une nouvelle fois… Alors bon. Cet ascenseur ne va pas se bloquer. Certes. Il fit un pas pour rejoindre Hécate. Il ne pas se rétrécir. Correct. Un deuxième pas. Personne ne va te laisser dedans. Tu en sortiras au bout de dix secondes… Bien, il se plaça à coté de la jeune sorcière, plein de courage qui s’évapora à l’instant même où les portes se refermèrent. Les jambes bien droites, les mains serrées dans son dos et le regard qui regardait droit devant lui Rabastan ne desserrait pas les lèvres, comptait mentalement, ne prenait pas garde au long blanc qui s’installait, bien plus préoccupé par le moment où les portes se réouvriront enfin. Ce qui arrive une poignée de secondes plus tard. Elle s’approcha de la porte de son appartement et l’ouvrit. Bien, et maintenant ? Il filait ? Et par les escaliers s’il vous plaît. C’était toujours plus simple à descendre qu’à monter. « Vous… est-ce que v-vous voudriez entrer ? » Hum ? Pardon ? Il haussa les sourcils, est-ce qu’elle lui proposait d’entrer dans son appartement ? Franchement, ça ne lui arrivait pas souvent. En fait si on retirait Adele de l’équation… ça ne lui était jamais arrivé. Et on devait répondre quoi à ce genre de chose ? Oui ou non. C’est une putain de question simple. S’il répondait non ? Que se passait-il ? Tu pars. Certes, mais encore ? Comment allait-elle le prendre ? Qu’est-ce que ça voulait dire ? Ce qu’elle pense t’intéresse ? Ce n’était pas si nouveau que ça… Il ne voulait pas lui donner une raison de… partir ? Il ne savait pas. Et oui ? Tu entres. Rabastan inspira profondément. Adieu le cadre professionnel. Adieu douces barrières derrière lesquels il aimait se planquer. Adieu, adieu… Rabastan n’était pas si prêt que ça à se séparer de ses bouées de secours qui était d’une part sa capacité à pouvoir lancer du : « Je suis votre putain de supérieur ! » quand il voulait mettre fin à une discussion sans avoir recours à l’affect, d’autre part sa possibilité de muter les gens dans un autre service. Ce qui était un excellent moyen, quoique certes radical (moins radical qu’un AK dans les dents toutefois) d’abréger une conversation. En dehors du travail, ces deux choses étaient innaccessibles. « Je… » Bon soit oui, soit non mais pas de tergiversation. Ce qui te plaît. Il était trop vieux pour vraiment faire comme il lui plaisait. Même s’il aimait croire à cette foutue liberté, il savait qu’il ne pouvait se risquer à faire un pas de travers. Mais Hécate n’était pas lui. Et là peut-être qu’en effet il pouvait faire ce qui lui plaisait. « Pourquoi pas. » Rhétorique infaillible… tant de verve et de… Il s’approcha de la porte et la suivit à l’intérieur. « Mais tu es certainement fatiguée, ce serait mieux que tu puisses te reposer un peu. » Une vague odeur qu’il ne parvenait pas à reconnaître vint l’envelopper alors qu’il pénétrait le salon. Automatiquement son regard glissa de la première à la deuxième fenêtre, s’assurant machinalement de leur emplacement. Il ne faisait même plus attention à cette manie, il avait cessé de lutter. Sa baguette à la main, il serrait ses bras contre sa poitrine. Il avisa les fauteuils : « Tu… tu devrais t’asseoir. Marcher jusque là ça peut être… épuisant.  Enfin pas en temps normal mais… » Non, il n’allait pas recommencer à hâcher ses phrases tout de même ! Inspire, réfléchit et déroule ta pensée lentement, sans à coups. « Plusieurs jours sans marcher, même si ça n’a pas été long… il te faudra un petit temps de réadaptation. Ne force pas trop d’accord. Après je suis pas guérisseur. » Il lui avait fallu… plusieurs mois. Il lui faudrait à peine une poignée de jours. Elle était du type costaud. Il fit quelques pas dans le salon, son regard volait d’objet en objet, satisfait de voir que l’espace n’était pas complètement vide et sans vie : ça réduisait considérablement son malaise. « C’est très… bien ici. C’est bien que tu puisses vivre à la Tower. C’est bien protégé. » Même s’il n’avait pas estimé ça assez protégé pour lui mais il se savait cas à part. Il eut soudain comme une brusque prise de conscience : « Et tu as… de quoi manger ? » Le fait que Rabastan pense à cela en disait long… La nourriture était le sujet qui lui passait le plus au dessus dans le quotidien et il pouvait se rappeler qu’il devait manger 24h après son dernier repas de manière complètement hasardeuse. Mais il savait que ce n’était pas le cas de tout le monde, Hécate avait été absente un moment. Visiblement elle n’avait pas d’elfe de maison pour faire ses courses (ou alors il était très bien caché) alors peut être que les placard étaient vides. Il n’était pas du style à fire des courses, pas du tout même, mais il pourrait toujours avertir quelqu’un pour aider Hécate. Ou bien un restau- Pardon ? Rien. Rien. Il posait simplement une question.




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Ils les avaient regardé entrer.
A la seconde où la porte s'était ouverte, ils s'étaient cachés et avaient commencé à regarder.
Il y avait Hécate d'abord, qui venait de s'asseoir dans son fauteuil préféré, puis un homme.
Ca c'était nouveau, tiens.
Il y eut des murmures dans les ombres de l'appartement. C'était un grand homme ça, il faisait au moin une trentaine de pommes de hauteur! la peau était blanche, les cheveux clairs un peu comme le blé ou certains bois qu'on utilise pour faire des baguettes...quant à ses yeux ils étaient d'un bleu...un drôle de spécimen. Est ce qu'il avait le sang bleu? Il aurait fallu vérifier. Mais Hécate ne semblait pas s'inquiéter de sa présence alors pourquoi intervenir? Elle n'avait pourtant pas l'air en forme. Est ce que c'était ce grand type qui lui avait fait mal?

«Tu..tu devrais t’asseoir. Marcher jusque là ça peut être… épuisant.  Enfin pas en temps normal mais… »

Houla on ne tapait pas dans de l'orateur de compétition là. Peut être était-ce un collègue de travail? un ami?mais Hécate n'avait que très peu d'amis en Angleterre et les hommes lui fichaient la frousse donc autant écarter cette hypothèse. C'était vraiment à n'y rien comprendre.

« Plusieurs jours sans marcher, même si ça n’a pas été long… il te faudra un petit temps de réadaptation. Ne force pas trop d’accord. Après je suis pas guérisseur. C’est très… bien ici. C’est bien que tu puisses vivre à la Tower. C’est bien protégé.Et tu as… de quoi manger ?  »

Non mais de quoi je me mêle? il en avait du culot ce grand cheveux pâles de poser toutes ces questions et de jouer les prescripteurs! on ne parlait pas comme ça à une princesse! et pourquoi d'abord ne la nommait-il pas "majesté"?! Qu'Anna Grimaldi ne le fasse pas, passe encore, Hécate la reconnaissait comme une amie, mais celui là, il avait intérêt à se mettre au pas, et prontissimo! C'était la princesse Caïman, l'enfant-soleil, qu'il avait sous les yeux, pas une gueuse de bas étage.
Il fallait intervenir. Ne serait-ce que pour lui apprendre les bonnes manières.

Pendant ce temps, Hécate avait trouvé le moyen de s'affaler dans son fauteuil et regardait Rabastan évoluer dans l'appartement de l'air d'un chat placé dans un environnement inconnu. La comparaison la fit sourire et elle hocha doucement la tête lorsqu'il lui parla:

-La Braun Tower a ses avantages...j'aurais p-préféré loger ailleurs que dans cet empilement de personnes, mais à ce qu'il paraît, ce n'était pas admissible de la part d'une représentante d'une famille déjà p-peu en vogue...cela aurait paru s-suspect.

Elle se débarassa difficilement de son manteau et parut soudain inquiète lorsqu'il lui demanda si elle avait à manger.

-....je pense que les placards sont vides. Je ne suis déjà pas une as des courses mais après un coma...

Elle allait se lever pour aller voir par elle même, lorsqu'elle remarqua le mouvement discret qui se produisait dans le dos de rabastan. Elle aurait certainement du le voir avant, mais elle était bien trop épuisée pour repérer ce qui d'ordinaire aurait sauté même aux yeux d'un enfant. De petites formes au crane hérissé couraient et sautaient d'un meuble à l'autre, glissaient le long de la cheminée. Hécate cligna des yeux, juste à temps pour percevoir une touffe de cheveux de rafia et un éclat métallique, alors qu'un petit être d'une quinzaine de centimètres bondissait vers Rabastan.

-Non!

Trop tard. La petite chose lui avait déjà piqué la main avec une aiguille qu'elle brandissait telle une saguaie et d'autres minuscules poupées vaudous aux yeux colorés et aux cheveux ébouriffés arrivaient avec des cordages et des armes de fortune pour maitriser l'intrus. Les chevelus. De charmantes petites créatures de compagnies mais de terribles systèmes de sécurité. On racontait qu'une seule de ces poupées pouvait cacher au moins 15 aiguilles à l'intérieur de son propre corps et s'en servir à la première occasion.

-Arrêtez! s'écria Hécate.

L'une avait sauté du chandelier et s'apprétait à passer du fil de fer autour du cou de Rabastan, d'autres brandissaient des couteaux de cuisine.

"Hécate! on te sauve! oui oui!"
"C'est évident que c'est pas un ami!!"
"Il t'appelle même pas majesté! oh hé!"
"C'est un manant, faut le faire prisonnier!"


Une poupée plus petite que les autres vint sauter sur les genoux d'Hécate.

"Tu veux qu'on lui arrache les dents, pour t'en faire de beaux ornements?"

-Mais vous avez perdu la tête ma parole! lâchez le avant de vous faire calciner sur place! lâchez le tout de suite! c'est un ami!"

"oooooooh....." firent les poupées en coeur.


Aussitôt, la petite troupe se dispersa et rangea ses armes d'assaut avant de tourner autour du nouveau venu.

"Il est grand, han..."
"Il a de droles de cheveux, heu!"
"Moi je le trouve joli, hi hi"
"Il a un joli visage, le genre tout sage!"
"Ses yeux sont beaux, vous pensez qu'ils sont pleins d'eau?"
"Hécate c'est un ami? pourquoi lui? il est gentil?"
"Il a pas l'air, il fait la tête, ça lui donne l'air un peu bête"


Hécate était mortifiée. Elle se décomposa et commença à balbutier tant bien que mal:

-Laissez le tranquille il...c'est lui qui m'a ramené et c'est mon patron vous ne pouvez pas juste...

"Ton patron? ooooooh, bon."
"Désolés alors, d'être venus en renfort."
"Je maintiens qu'il est mignon. Il peut rester à la maison?"


-Non!

La petite poupée qui était toujours perchée sur les genoux d'Hécate l'enlaça maladroitement de ses petits bras.

"On a eu peur, il t'es arrivé malheur..."
"On a vu que tu revenais pas, on a paniqué, c'est comme ça"
"On pensait qu'ils t'avaient tués ceux avec les masques de fer"
"Ils tuent même les innocents, même ceux qui devraient pas s'en faire!"
"Alors on a attendu et on a volé des choses! pour que quand tu reviennes, tu ne sois pas morose!"
"Du pain, des fruits, des pates, du gateau! tout ce qui est bond et rend le coeur tout chaud!"


Et aussitôt, les chevelus commençèrent à sortir de dessous les meubles et de derrière les tableaux des victuailles qu'ils avaient du dérober dans les appartements voisins. Il y avait de tout, du plat le plus basique au plus cher, et les tranches de cheddar cotoyaient les truffes et le caviar.

Une petite poupée se laissa tomber du plafond sur le bar, et observa Rabastan avant de murmurer:

"Tu restes manger? ça nous ferait plaisir! bon évidemment, c'est selon ton désir...elle aimerait bien tu sais, mais elle demandera jamais...elle est timide elle fait semblant...il faut être un peu patient, mais si t'es là c'est que tu es important! personne n'a le droit de rentrer normalement..."


La petite poupée hocha lentement la tête.

"désolés pour tout ça hein...on t'as pris pour un vilain...il faut qu'on la protège un peu elle est une princesse...mais mêmes les princesses ont des faiblesses...elle est la grande royauté d'un pays un peu trop oublié...elle aurait du régner, et maintenant elle doit plier...le poids de la couronne est très lourd pour elle, parfois ses ailes sont trop frêles...il faut l'aider, la protéger si elle pleure...pour éviter qu'elle ne meurt."
"tu parles trop, Tiriti! viens plutôt nous aider à ranger ici!"


La poupée sauta au bas du bar et foncea dans la cuisine, alors qu'Hécate en revenait, lentement, penaude.

-je suis désolée je ne voulais pas qu'ils vous agressent...c'est...je comprendrais que vous vouliez partir, mais...j'espère que vous voudrez bien accepter de..enfin de passer outre. Ils ne recommenceront plus.

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