❝ When it all falls down ❞Fleur & LinaIl était tôt dans la matinée quand Bill et Fleur reçurent le hibou. Tous deux étaient attablés autour du petit déjeuner, et Fleur tentait tant bien que mal de mettre la cuillère de purée dans la bouche d'une Espérance plus que réticente. Les cheveux en arrières, les traits tirés, fatigués, la jeune femme n'avait rien d'un fantasme mais Bill ne semblait pas s'en apercevoir et déposait parfois des baisers sur son épaule et dans son cou pour la faire rire. C'était en somme un charmant tableau qui fut troublé par l'arrivée du rapace perturbateur. Ce dernier, qui était arrivé en grande pompe, les toisait d'un air supérieur à travers la vitre, ses yeux jaunâtres cernés de noirs. Bill soupira, reposa son journal et se pressa d'ouvrir la fenêtre rapidement, de peur qu'il ne vienne à l'idée de leur visiteur imprévu de la briser d'impatience. Évitant habilement un coup de bec, il attrapa la lettre et donna une friandise à l'oiseau avant qu'il ne reparte. «
C'est pour toi » dit-il à sa femme qui leva un sourcil «
Pour moi ? Est-ce que c'est de Gabrielle ? » répondit-elle, un brin d'espoir dans la voix. Cependant, son nom tracé hâtivement sur le papier jauni ne laissait aucun doute. Gabrielle avait une écriture ronde et soignée, et donc rien en commun avec les caractères en pattes de mouche de cette missive. La déception lui noua la gorge - elle dont les journées tournaient entre sa fille en bas âge et une meilleure amie psychologiquement détruite ; et qui avait plus que jamais besoin de bonnes nouvelles auxquelles se raccrocher. Un peu appréhensive, elle brisa le sceau de cire rouge qui fermait l'enveloppe et en sortit un parchemin à l'allure officielle.
Swan, Teddy,
On m'informe de la mort de Mr. Johnson, estimée dans le courant de la semaine dernière. Son cadavre a été retrouvé hier en état de décomposition avancée. Bien qu'aucune autopsie n'ait été pratiquée, l'absence de séquelles visibles sur le corps de la victime nous laisse suspecter l'utilisation de l'Avada Kedavra. Le Cruciatus aurait également été employé, quoi que brièvement.
Ayant eu vent de la présence de la jeune Angelina Johnson chez vous, il m'a semblé juste de vous transmettre la nouvelle.
Mes condoléances. Prenez garde.
A.HamApercevant la mine déconfite de sa femme, Bill lui lança d'un air inquiet «
Que se passe-t'il ? Quelqu'un que nous connaissons ? ». Ne trouvant les mots pour répondre, elle hocha simplement la tête, tentant au mieux de retenir des larmes qu'elle savait abondantes. C'était la guerre, la mort était commune, presque trop triviale. Ils vivaient avec au quotidien, avait appris tant bien que mal à faire le deuil d'Arthur et George, écoutaient avec absence l'énumération morbide de ces noms inconnus prononcés presque froidement par les animateurs de Potterveille. Mais le père d'Angelina … À bien des égards, Angelina lui avait toujours rappelé Nora. Toutes deux étaient exubérantes, charismatiques, sûres d'elles et toujours promptes à donner leur avis même quand ce dernier n'était pas bienvenu. C'était avec difficulté que les deux jeunes femmes s'étaient tolérées, au début, ne se connaissant que trop peu, méfiantes, orgueilleuses aussi. Mais leurs points communs avaient eu raison de leurs différences, le besoin de se sentir proche de quelqu'un, d'avoir une alliée infaillible, les avait réuni pour le meilleur. Et récemment, pour le pire. Bien entendu, Fleur n'avait pas été ignorante de la capture d'Angelina. Elle en avait eu le cœur brisé, avait supplié Bill de la laisser secourir son amie. Mais Espérance venait à peine de naître, Fleur était encore faible de son accouchement et de ses nombreuses nuits sans sommeil, en conséquent il avait rechigné à approuver une idée qui lui semblait aussi risquée. «
Je sais qu'elle t'est chère » avait-il dit, plein de bon sens «
Mais il y a aider quelqu'un intelligemment, et marcher tout droit dans un piège. Elle est encore trop surveillée, ils n'attendent que ça, tu te ferais prendre. ». Fleur avait été obligée d'admettre la vérité de ses propos et s'était résignée à attendre. Charlie, de son côté, ne lui avait pas été d'une grande aide. En fait, il évitait de parler de Lina, comme si elle n'existait plus, comme s'ils n'avaient pas été complices et – comme la vélane le suspectait – amoureux. Cette indifférence feinte l'agaçait au plus au point, et elle avait refusé de parler à son beau frère plusieurs semaines avant de réaliser qu'un tel comportement n'était qu'une piètre tentative de se préserver d'une peine de cœur. Faire taire l'espoir, c'était se protéger de la déception. Et puis finalement, après plusieurs mois à tourner comme dans un lion en cage dans la chaumière aux coquillages, elle y était enfin allée. La tâche n'avait pas été aisée ; Angelina « Jelly » s'était défendue comme une tigresse, mais la spécialité de son amie avait toujours été le Quidditch, et elle ne faisait pas le poids face à une semi-vélane déterminée à la sauver d'elle-même.
Ce fut la voix de Bill qui la tira de ses réminiscences douloureuses. Il avait attrapé la lettre pour la lire, et lui jetait un regard compatissant «
Ça va aller ? Tu veux que je vienne avec toi ? ». Elle refusa, quoi que touchée par sa proposition «
Occupe toi d'Espérance. Je dois le faire moi-même ». Au nom de son amitié pour Angelina, si celle-ci existait encore. Fleur dépose un baiser sur le front de sa fille – qui bave abondamment – et sur les lèvres de son époux – qui lui ne bave pas, et gravit les marches de la chaumière aux coquillages presque à contrecoeur, le ventre anesthésié par l'appréhension. Elle toque à la porte trois fois, exactement, un rituel qu'elle leur a imposé. «
Vous devez établir des habitudes » leur avait expliqué le médicomage «
Elle vous sera moins hostile si vous faites partie de son quotidien, et si vous installez une routine ». Une technique qui n'avait jusqu'alors pas fonctionné. Elle déverrouille la porte sans attendre une réponse qui ne viendra pas, rentre, et referme derrière elle. Comme d'habitude, c'est à peine si Angelina ne gronde pas son nom «
Fleur ». Angelina est une jolie fille, et même la colère ne saurait la rendre laide, se dit Fleur en l'observant. «
Que me vaut le plaisir ? » s'enquit son amie slash prisonnière. La blonde se trémousse devant elle, ne sachant par où commencer. Enlever le pansement d'un coup, moins douloureux, sans doute. Mais il ne s'agit pas de n'importe qui, et pas de n'importe quelle nouvelle. Elle s'assoit sur le lit, faisant fît des protestations d'Angelina qui ne voit pas d'un bon œil sa présence ici. «
Angelina » commence-t'elle, sa voix étranglée d'un sanglot.
Elle va me détester songe-t'elle, à regret. «
Angelina, je sais que tu penses que je suis ton ennemie. Mais s'il te plaît, s'il te plaît écoute moi. La nouvelle que j'ai à t'annoncer n'a rien de plaisant. ». Sans un mot, elle lui tend la lettre. Elle sait que les informations y sont crues, insensibles, devine le mal que cette nouvelle va faire à son amie. Mais Angelina avait maintenant plus que jamais besoin d'un électrochoc.