| « Je resterai avec toi en tant qu’esclave Marcus ! ». Ici les marées pourfendeuses s’éteignent rapidement dans la déclinaison des fins, les hymnes psalmodient les louanges aux nymphes qui s’étirent sur un rayon de soleil brumeux ; ici c’est l’absence, l’absence de frayeur, l’absence de gens, l’absence de sorciers qui condamnent les innocents. Elle repose sa tête sur la roche humide où règne des gouttelettes affinées, des pousses fluorescentes, pures, inconscientes du monde là-bas, en ville, qui avarie les damnés entraînant les anges à leur côté. Il est tombé avec elle, lui tient toujours son visage entre ses mains fermées, angoissées ; le tableau d’un joyeux couple retrouvé dans les méandres d’un combat disputé. « Tu ne regardes pas les gens autour de toi n’est-ce pas Marcus ? J’avais une vie avant d’être attrapée, pas très glorieuse ni joyeuse ni rien du tout, mais je survivais sur les pas des forêts, des champs, des plaines et des déserts d’Ecosse. J’avais même un compagnon que j’adorais. ». L’ironie percutante, sa voix monte à l’au-delà des trémolos, des bémols, d’un aiguë espiègle, elle se remémore des articles enfumés pour partager avec son être de cœur. Sa main est venue dans les cheveux du minotaure, rassurante avec ses doigts de lins où les mèches bénissent l’intrusion éparse de ses araignées de moire. Elle se fige sous la vision paradisiaque, miroir fracassant de son âme décalquée, fragmentée, en bouts de terres arides, respire comme si c’était son dernier moment. « Ici nous sommes libres. Ne trouves-tu pas que c’est l’endroit idéal pour se marier ? Avec Beatrix… Mais je ne suis pas prête à partager quoi que ce soit avec elle. ». Ses yeux se froncent dans la lueur d’or qui s’éparpille sur les matériaux minéraux, peignant de firmament la surface de l’Eden spectateur à ces martiens abusés peut-être par la folie naissante d’une adoption hennissante. « J’ai accepté d’être ton esclave… tout du moins l’esclave d’un sorcier lorsque je me suis rendue au raffleur qui attendait sa bave dégoutante et ses yeux luisant d’envie de ramasser les sous comme un canard frémissant. Je l’ai accepté. Pourtant je me demande si ça n’aurait pas été mieux que ça soit quelqu’un d’autre, quelqu’un que j’aurai détesté pour l’éternité. ». Oui elle s’était imaginée être accueillie par un vieux croûton, un méchant homme qui l’aurait soumise d’une force ravivée, elle aurait été l’ombre, le double décédé d’une remplaçante aggravée. Elle aurait été obéissante, silencieuses, répondant aux appels de cette incarnation terrible de la peur. « J’ai de la chance de t’avoir pour maître. A vrai dire je n’aurai pas trouvé mieux comme situation. ». Elle en a presque oublié les tortures ordonnées la veille, par ce paysage mirobolant plus rien n’existe que l’instant présent. Elle voudrait en faire une esquisse, un semblant de copie pour pouvoir garder la nuit une rubéole de conte de fée ; ses pinceaux glissant sur la toile, aplatissant de ses couleurs blafardes, aspirant par la base les ouvrages de la fée créatrice. « Si tu le veux ce sera notre lieu. Celui où personne ne pourra venir troubler notre quiétude, comme deux pénitents cherchant la paix. ». Un rire se rate sur les pics immobiles de la mort partie, de la tragédie antique disparue par les incantations passagères de ces deux ermites engrangées, réunies, lovés sur la falaise malicieuse d’observer le théâtre d’ombre, la débandade de ces marionnettes perdues dans l’océan des sentiments gouverneurs. |
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