WIZARD • always the first casuality Anna Grimaldi | (JULY 20TH, 2003) Assise en tailleur au milieu du salon, Anna fixait les deux pierres qu’elle avait réussi à se procurer au marché noir. Elle n’était pas très fière de ce qu’elle avait fait mais ces dernières semaines avaient été difficiles et elle avait dû s’adapter à ce qu’il se préparait. Elle savait pertinemment que déambuler sans peur dans les couloirs du ministère n’était plus une affaire possible pour elle, trop de doutes et de rumeurs circulaient à son propos. Sans oublier l’obstination grandissante que le directeur du département de justice magique portait à son égard. Ces regards sombres et ces passages forcés dans sa tête la fatiguaient et la fragilisaient chaque jour un peu plus. Elle ne l’admettrait jamais à voix haute, mais elle avait peur. Pour chaque pas qu’elle faisait, pour chaque regard qu’elle lançait, elle était fébrile. Mais une certitude trainait dans sa tête : le temps de la fuite ne serait pas très loin … Posant la plus grosse pierre sur le parquet, elle sortit sa baguette et la pointa sur l’objet. Le vendeur lui avait garanti que ces précieux cristaux étaient d’excellents absorbeurs de magie et qu’elle pourrait en faire de très bons boucliers pour le combat. Avant de les acheter, elle avait vérifié leur résistance, leur qualité, et l’homme ne semblait pas lui avoir menti. Elle n’était pas une grande connaisseuse, mais elle avait confiance en ces pierres. Parce qu’elles constitueraient sa seule chance de protéger sa fille si elle venait à partir, si elle devait fuir. Ses yeux se refermèrent sur deux grosses larmes qui dévalèrent ses joues et s’écrasèrent sur le sol. L’idée même d’abandonner sa fille la brisait, mais l’emmener avec elle dans l’état où elle était, constituait un plus grand danger. Elle prit une profonde inspiration, balaya ses larmes d’un revers de la main et commença à réciter un certain nombre d’incantations basiques. Elle en fit de même avec la petite pierre, puis les posa toutes les deux, côte à côte. Elle attrapa un vieux grimoire qu’elle avait emprunté à son père et le posa sur le sol. Tournant sa baguette autour des pierres, elle suivit toutes les indications du livre. Ligne après ligne, les deux cristaux se rapprochèrent l’une de l’autre et commencèrent à vibrer au même rythme comme un cœur qui battrait. Anna se sentait défaillir, son manque de sommeil ne lui permettait pas de se lancer dans ce genre de sortilèges complexes, mais elle était obstinée, avait peu de temps. Sa tête commença à tourner, ses membres se raidirent, une goutte de sang coula de son nez et un goût ferreux apparut dans sa bouche. Lorsque les deux objets arrêtèrent de bouger et qu’elles brillèrent d’une petite lueur verte, Anna sut que c’était terminé. Ses paupières tombèrent sur ses yeux et elle se laissa aller sur le sol, éreintée.
(JULY 24TH, 2003) Sa malle de guérisseuse grande ouverte au milieu du salon, elle aligna les unes à côtés des autres les fioles de potion qu’elle possédait. Dans une grande boîte, elle mit tout ce qui lui permettrait de réaliser ses propres remèdes. A sa droite une petite pile de livres attendait d’être rangée, à sa gauche, des vêtements étaient soigneusement pliés et alignés. Quiconque entrerait dans son appartement à ce moment-là se rendrait compte qu’elle trafiquait quelque chose. Mais ces derniers temps la paranoïa l’avait suffisamment gagnée pour qu’elle protège son propre appartement avec des sortilèges et qu’elle mette en place un système d’alarmes si quelqu’un venait à s’approcher de chez elle. Attrapant son sac, elle passa la main à l’intérieur pour vérifier que tout ce qu’elle avait déjà mis dedans était toujours à sa place. Puis, lentement, elle rangea chacun des objets qu’elle avait préparés pour sa grande fuite. Les jours se rapprochaient, des souvenirs lui échappaient, Rabastan gagnait du terrain, elle n’aurait bientôt plus le choix.
(AUGUST 1ST, 2003) « Anna ! » Elle se retourna tellement rapidement que les premières longueurs de sa chevelure flottèrent dans les airs comme une vague de feu. La peur l’avait gagnée à un point tel qu’elle se méfiait de tout et de tout le monde. Elle relâcha la pression sur sa baguette et la laissa glisser dans sa poche. « Bonjour Tally, comment allez-vous ? Que faites-vous là ? » Elle observa son ancienne guérisseuse avec une certaine méfiance. « Et bien j’ai entendu dire que Charlotte avait rejoint le service pédiatrique, et vu que j’ai été l’une des premières personnes à l’avoir vue, je m’y suis attachée, je voulais voir comment elle allait. » Un sourire souleva ses lèvres face à la grande considération que la stagiaire lui avait porté à elle et à son bébé durant ces derniers mois. « Comment vont vos jambes ? » Elle baissa les yeux, incertaine et sourit. « C’est encore un peu bancal mais ça va. » Elle rejoignit la droite de Tally et ensemble, elles se dirigèrent vers la chambre de Charlotte. Derrière la grande vitre, elle ne put s’empêcher d’observer béatement le petit enfant qui gigotait dans son berceau. C’était elle. « Hey baby girl ! » Tally posa dans ses bras le petit nourrisson et subitement elle ne put plus détacher ses yeux d’elle. Comme un trou noir, comme une aspiration puissante, elle était comme attirée, accrochée à ce premier contact, ces premières sensations. « Charlotte. » Un murmure. Ses yeux s’emplirent de larmes et son corps tout entier frissonnait de bonheur. Enfin. Enfin, après tous ces mois à la sentir, à la désirer, après toutes ces semaines à l’observer, à veiller sur elle, elle pouvait enfin la toucher. Ce contact, cette douceur, cette tendresse, tout ce qu’elle avait refoulé pour ne pas souffrir revenait à la charge. Cinq minutes seulement, avait dit la médicomage. Elle voulait profiter pleinement de ces quelques minutes qui s’étiolaient déjà en secondes. Elle détaillait méticuleusement chaque parcelle de son enfant. Ses petits cheveux fins et clairs. Ses grands yeux bleus, brillant aux mêmes lueurs que ceux de son père. Son petit nez rond. Ses fines lèvres laissant déjà échapper de petits sons. Ses joues roses et son joli menton. Chaque partie de ce visage qu’elle voulait les graver dans sa mémoire. Et puis les paupières de son enfant se refermèrent. Elle la berça doucement, la blottissant contre elle, la protégeant de ses bras tremblants. « Nous allons la rebrancher. » Elle leva les yeux vers l’infirmière, implorante, désespérée. Déjà cinq minutes ? Mais elles avaient été si courtes, ce ne pouvait pas être vrai. Reposant délicatement l’enfant dans son lit, elle l’observa avec tristesse. La soignante s’affairait déjà autour d’elle. Elle sortit de son sac un petit écrin de velours. Elle l’ouvrit et en sortit un petit bracelet d’or rose surmonté d’une pierre argentée aux lueurs mouvantes. Portant l’objet vers sa bouche, elle y posa un baiser et s’approcha de Charlotte, à nouveau câblée de quelques appareils de surveillance magique. Elle ouvrit le petit fermoir, prit délicatement entre ses doigts le poignet de la petite et y attacha l’objet. Sans la lâcher, elle murmura. « Charlie … Charlotte Eleanor Grimaldi-Rosier. Je t’aime, je t’aime plus que tout et quoi qu’il arrive, je serai toujours là pour toi. Tu es ma fille, et ça rien ne le changera. » Elle renifla. « Mamma ti vuole tanto tanto bene. Ti amo, tesoro. Je t’aime mon bébé. Papa prendra soin de toi. Tu ne seras jamais seule. » Ses pupilles glissèrent sur le bracelet. « Pour toujours. A jamais. » Elle se racla la gorge pour rejeter les sanglots qui montaient à sa gorge. Elle resta quelques instants ainsi, sans dire un mot, puis la fatigue la rappelant à l’ordre, elle comprit qu’il était temps de partir, de rentrer se reposer. Elle voulait tant rester encore un peu. Lui caressant tendrement la joue, elle lui posa un baiser sur le front et quitta l’hôpital, le cœur lourd.
(AUGUST 2ND, 2003) Le regard sombre du prédateur, les picotements dans la nuque et sur le front, l’envie de partir de courant et de tout abandonner, le besoin de résister, la nécessité de construire un mur de protection encore plus haut, encore plus résistant. Il atteignait son but, il la détruirait … La sonnette de l’appartement retentit. Elle sursauta et manqua de tomber de sa chaise. Elle se frotta les yeux avec insistance et se leva. Légèrement vacillante, elle dut se retenir aux meubles et aux murs pour arriver dans l’entrée. Sans vérifier l’identité de la personne, elle ouvrit la porte et se recula. « Rentre Eirene. Merci d’être venue. » Elle referma tous les verrous et guida son invitée jusqu’au salon. « Je suis désolée de te faire venir aussi tard, après une grosse journée de travail, mais … Je ne sais pas vers qui me tourner. » Sa voix suintait de désespoir et la solitude l’enveloppa subitement. « Je … Tu me disais que je ne pourrai pas m’en sortir seule. » Elle battit rapidement des cils. « Tu me disais qu’on devait se serrer les coudes. » Elle dévisagea Eirene. « Tu voulais faire partie de sa vie et avoir le droit de t’inquiéter … » Elle alla chercher un écrin un peu plus grand que celui de Charlotte dans une armoire vitrée et le posa sur la table basse. « … Je t’en donne la possibilité aujourd’hui. Parce que j’ai besoin d’aide, parce que j’ai besoin de quelqu’un pour veiller sur ma fille … lorsque je ne serais plus là … Simon n’y arrivera pas tout seul. Tu dois l’aider, tu dois veiller sur elle, tu dois la protéger. » Elle la dévisagea de ses yeux brillants. « Je … Il faut que tu comprennes que … » Elle hésitait trop, ne trouvait pas les mots. La profonde inspiration qu’elle prit ne l’aida même pas. « Je voudrais tellement réussir à te faire confiance à nouveau, mais je n’y arrive pas … Cependant, je ne peux pas m’en sortir sans toi. Alors je te le demande, je t’implore d’accepter de protéger ma fille et de te soumettre à un Serment Inviolable pour garantir ton honnêteté. Pour me prouver que tu veux vraiment le faire. » Elle réfléchit, fit un pas vers Eirene et lui attrapa la main. « Je sais que je prends des risques à te demander ça … Si tu refuses, je ne sais même pas ce que je ferais … Te lancer un sortilège d’amnésie, te laisser partir en me disant que tu ne diras peut-être rien, croire en toi ? » Elle sentait son cœur battre dans sa poitrine avec ardeur. « Anna. » La voix d’Eirene était implorante, elle semblait honnête, prête à tout. « S’il te plait. » Sa main se serra dans celle de sa belle-sœur. « J’ai besoin que tu deviennes sa marraine. Que tu t’occupes d’elle. Que tu la fasses passer avant tout, au péril de ta vie. Et surtout que tu lui dises que sa maman l’aime. Parce que je n’ai pas le choix. Tu le sais toi-même. Je n’ai pas le choix … » Elle avait les yeux plantés dans ceux d’Eirene. Elle s’accrochait à cette possibilité, à cette chance. « Je le ferai. » Un poids glissa de ses épaules. « Vraiment ? » On ne pouvait pas lui en vouloir de douter. « Oui, je le ferai, Anna. » Elle resta silencieuse quelques instants, l’observa, la testa, lui laissa une chance de reculer, mais elle ne le fit pas. « Alors allons-y ! » Elle tendit son bras et celui d’Eirene se mêla au sien. « Julia ? Pouvez-vous être notre Enchaîneur ? » La servante s’avança et acquiesça. Le sortilège prit plusieurs minutes à être réalisé mais lorsqu’il fut terminé, elle ne lâcha pas le bras d’Eirene. Elle voulait lui montrer toute sa reconnaissance, tout ce qu’elle ressentait en cet instant. Elle finit par se reculer pour prendre la boîte à bijoux sur la table. Elle l’ouvrit et le tendit à la nouvelle marraine de Charlotte. « Ce pendentif, c’est une pierre que j’ai ensorcelée pour être liée à une autre pierre. Celle qui se trouve au poignet de Charlotte … » Lui avait-elle déjà dit comment s’appelait la petite ? Elle n’en était pas sûre. « Elle s’appelle Charlotte ? » Elle acquiesça et se frotta le nez, gênée d’avoir omis cette information. « Elle est protégée par cette pierre, mais si elle est en danger, tu pourras le sentir à travers ta propre pierre. Tu le sauras s’il lui arrive quelque chose. » Elle tira sur la manche de sa veste et dévoila un fin bracelet argenté. « Je le saurai aussi. Dans ces instants-là, Simon et toi seront les seules personnes qui pourront la protéger. Je le saurai si vous ne le faites pas, si vous ne l’aidez pas … Je déteste avoir à dire ça … Mais s’il lui arrivait quelque chose, je vous en rendrai coupable et je pourrai vous faire très mal. » Elle posa le collier dans la paume d’Eirene. « Prouve-moi que je n’ai pas eu tort de te laisser ta chance. »
(AUGUST 16TH, 2003) Elle devait récupérer quelques grimoires dans la bibliothèque de son père. Juste ça et elle rentrerait se coucher. La journée avait encore été rude, réunion après réunion, elle tentait d’éviter au maximum le département de justice magique, mais les employés du département semblaient soudainement avoir constamment besoin des expertises du personnel de la coopération magique internationale. Lorsqu’elle regarda l’heure, elle remarqua qu’il était minuit passé et un sentiment profond de frustration l’envahit. Voilà plus de trois jours qu’elle n’avait pas trouvé le temps de passer voir sa fille à l’hôpital, et une fois de plus, cela serait impossible. Elle maudissait son travail autant que les personnes qui trainaient constamment autour d’elle pour la surveiller. Dans un soupir, elle rangea les dossiers qui traînaient sur son bureau et rassembla ses affaires. Elle rejoignit ensuite l’atrium et transplana jusqu’à la demeure des Grimaldi. En passant le portail de la demeure, elle salua avec sympathie les Mangemorts qui traînaient dans les parages et rejoignit sa maison d’enfance. En franchissant la porte, elle sentit que l’atmosphère avait changée, que quelque chose était différent. Ne voyant personne, n’entendant que quelques chuchotements, elle se dirigea vers le salon où elle trouva la plupart de leurs serviteurs assis et totalement désemparés. « Que se passe-t-il ? » Aucun d’eux ne voulut répondre. Ils se regardaient, se dévisageaient, réfléchissaient mais ne lui répondaient pas. Elle fit un tour de la pièce, remarqua que quelques objets de valeur manquaient à l’appel et se posta à nouveau au milieu du groupe de domestique. « Que quelqu’un me dise ce qu’il se passe ! Nous avons été cambriolés ? » Naïve, comme toujours, elle espérait du plus profond d’elle-même que ce qu’elle pensait était faux, qu’ils étaient toujours là, quelque part, simplement choqués par ce qu’il s’était passé dans la maison. « Nous sommes désolés miss Annabella. – Nous ne pouvons rien dire, ils nous ont fait promettre. » Une main se referma sur son épaule. Elle baissa les yeux et trouva sa très fidèle Julia à ses côtés. « Venez miss, je vais vous faire un thé. » Elle savait que son ancienne gouvernante lui dirait tout. Elle la suivit donc jusqu’à la cuisine et s’assit sur une chaise. « Julia, dites-moi ce qu’il s’est passé ! » La domestique posa devant elle une tasse de thé chaud. « Monsieur Giustino et madame Gaya sont partis. Il y a quelques heures. Plusieurs mois qu’ils préparaient leur fuite vers l’Italie avec des passeurs. Ils disaient que nous devions rester ici un moment, puis qu’ils trouveraient un moyen de nous faire rentrer nous aussi. » Elle cligna des yeux avec insistance, trop choquée par ce qu’elle venait d’apprendre. « Qui ? Quoi ? Tu veux dire que … Mais comment ? Les Mangemorts sont partout autour, pourquoi ils ne l’ont pas remarqué ? » Elle fixait son interlocutrice et n’arrivait pas à admettre qu’elle avait été aussi dupée que les autres. « Vos parents étaient discrets depuis quelques temps, ils ne sortaient plus et les Mangemorts n’avaient aucune raison de douter de leur présence au manoir parce qu’ils surveillaient toutes les entrées. Nous, nous faisions nos habituels labeurs sans faillir à notre tâche alors ils avaient appris à s’ennuyer de nous, à ne pas vraiment nous surveiller. Et puis, comme vous le savez, nous avons quelques passages secrets ici, que les Mangemorts ne connaissent pas. Vos parents sont passés par là sous Polynectar pour rejoindre d’abord le Londres moldu, puis pour partir en Italie. » Elle vit Julia baisser les yeux et comprit qu’elle se sentait coupable, alors elle glissa sa main vers elle pour la rassurer. « Ce n'est pas de votre faute s’ils sont partis. » Les yeux de la domestique brillaient de larmes. « Oui, mais ils vous ont mis en danger ! » Elle hocha la tête, décidée à ne pas se laisser abattre. « Mais non, parce que c’est vous qui allez me protéger. On doit absolument cacher ça le plus longtemps possible. Gardez vos habitudes, continuez à faire comme s’ils sont là et vous serez en sécurité aussi. Je vais faire ce que je peux pour vous aider. » Elle se leva et posa une main douce sur l’épaule de sa servante. « Je vais devoir y aller. Mais prenez soin de vous, je vais essayer de repasser demain. » Elle repassa par le salon, leur donna les mêmes directives qu’à Julia et quitta la maison avec nervosité.
(AUGUST 20TH, 2003 – 9 pm) « Grimaldi, on nous dit qu’un italien se trouve actuellement au département de justice magique. Nous avons besoin d’un traducteur, il feint de ne pas comprendre notre langue. » Elle poussa un soupir un peu trop mécontent car on la rappela à l’ordre. « On doit répondre aux ordres c’est tout ! Ne réfléchissez pas et allez-y ! » En trois secondes, elle avait l’impression d’être redevenue la petite secrétaire que tout le monde prenait de haut. Elle haussa les épaules et alla à l’endroit où on la demandait. Arrivée devant le bureau qu’on lui avait indiqué, elle traduisit deux ou trois phrases dans sa langue natale et l’affaire fut réglée. Elle se demandait bien pourquoi ils avaient eu besoin d’elle pour une si petite affaire. Enervée d’avoir été dérangée pour ça, elle se mit à maudire la terre entière. Ses pensées dérivèrent bien rapidement vers ses parents qui l’avaient lâchement abandonnée ici et qui n’avaient même pas daigné la prévenir de ce qu’il prévoyait. Ce ne fut qu’au moment où elle sentit des picotements sur ses tempes qu’elle comprit que des informations lui avaient échappé. Une image des serviteurs rassemblés dans le salon. « Still there Grimaldi ? » Elle sursauta et ne put s’empêcher s’agripper sa baguette sous sa cape. De quoi parlait-il ? Voulait-il parler de l’heure tardive à laquelle elle rentrait chez elle tous les soirs ou du fait qu’il n’ait toujours pas réussi à la faire virer ? Quelque chose dans sa voix, son regard, sa posture semblait crier victoire. Elle ne devait pas flancher, pas maintenant, mais elle savait aussi qu’il savait, qu’il ferait en sorte de la détruire … Elle n’avait plus le choix. « Oui, longue journée. Je ne vais pas tarder. Vous devriez en faire de même ! » Elle esquissa un petit sourire en essayant d’avoir l’air le plus détaché possible et se glissa dans l’ascenseur avant qu’il ne se referme.
(AUGUST 20TH, 2003 – 10 pm) Elle ne repassa pas par son bureau. Elle ne repassa pas par Ste Mangouste. Elle ne repassa pas par le manoir. Trop risqué. Elle transplana jusqu’à chez elle, attrapa le sac qu’elle avait préparé durant le mois dernier et disparut dans la nuit noire. Elle devait partir fuir, quitter cet endroit, ce danger … Elle n’avait plus aucune chance, n’était plus en sécurité … Ses pieds la guidèrent jusqu’au Chaudron Baveur. Elle baissa la tête devant les clients suspects du bar et passa du côté moldu. Que faire ? Elle n’arrivait pas à partir, pas sans lui dire, pas sans le revoir. Quelque chose la retenait. Il la retenait, inconsciemment. Elle ne lui avait pas encore donné sa pierre, avait retardé l’échéance pour garder espoir, pour se dire qu’elle n’aurait peut-être pas à abandonner sa fille. Ses yeux brûlaient, son estomac était tout retourné. Elle avait peu de temps. Si elle voulait le voir, c’était maintenant. Elle tourna dans une ruelle et transplana jusqu’à chez lui. « Faites qu’il soit chez lui, faites qu’il soit chez lui … » répétait-elle avec obstination. Elle était angoissée, regardait partout de peur qu’on ne la suive. Les Mangemorts et les employés du ministère avaient sûrement déjà découvert le manoir délaissé des Grimaldi et devaient être en train de se diriger vers son appartement à la Bran Tower. Elle ne devait pas traîner, avait encore la clé. Sa main tremblait lorsqu’elle essaya de la faire entrer dans la serrure. Elle n’y arrivait pas. La clé tomba par terre. Elle se baissa pour la ramasser et sursauta lorsque la porte s’ouvrit. Elle poussa peut-être même un cri, elle ne savait pas vraiment mais son cœur se mit à battre tellement vite que ses pensées se brouillèrent. Que faisait-elle là déjà ? Une, deux, trois, trente secondes. « Simon ! — Anna ? Qu’est-ce que tu fais i— » Elle se releva et le poussa à l’intérieur en jetant un dernier coup d’œil derrière elle. Ses mains se refermèrent sur ses bras et elle l’agita comme si elle souhaitait le réveiller. Sa voix tressauta lorsqu’elle commença à parler. « Je … je n’ai pas le temps de t’expliquer, je … » Ses yeux étaient désespérément plongés dans ceux de son âme-sœur. Son cœur palpita mais elle n’avait pas le temps pour lui dire ce qu’elle ressentait. Pourquoi ? Pourquoi ne pouvait-elle pas rester ? Elle sortit la dernière boîte de velours de sa poche et attrapa la main de Simon. Ses doigts effleurèrent sa peau comme si c’était la dernière fois qu’elle le toucherait et déposèrent l’objet dans sa paume. « Je dois partir. Ils … Ils me veulent ! Au mieux ils m’emprisonneront, au pire ils me tueront … En vérité, je ne sais pas ce que je préfère … Mais je dois fuir, je dois partir. » Elle parlait tellement vite que son esprit n’était même pas sûr de donner les bonnes informations. « Qu’est-ce que tu racontes ? » Elle ne l'écoutait pas, elle poursuivait. « Il faut que tu veilles sur elle. » Les larmes menaçaient de couler, mais si elle se laissait gagner par les émotions maintenant, elle n’arriverait plus à partir. « Cette pierre, elle te permettra de savoir quand elle est danger, si tu ne peux pas être près d’elle. » Elle prit le visage de Simon entre ses mains et caressa ses pommettes du pouce. « Je suis désolée, je suis tellement désolée. » Une larme s’échappa. « Promets-moi de lui dire tous les jours que je l’aime, promets-moi de l’aimer pour moi. — Anna… » Elle colla son front contre le sien et s’imprégna de son odeur. « Tu dois la protéger. Tu dois la protéger. » Elle posa un baiser à la commissure de ses lèvres et recula. « Je dois y aller. Ils ne doivent pas savoir que je suis passée ici … » Elle fit quelques pas en arrière, ouvrit la porte et regarda à l’extérieur. Rien, personne, pour l’instant. « Anna ! » Son cœur ne voulait pas partir de cet endroit, il résistait, mais sa peur gagna la partie. Elle prit une profonde inspiration, le dévisagea une dernière fois et souffla « Je t’aime. » avant de disparaître au milieu d’un vieil entrepôt du Londres moldu. Elle murmura rapidement un certain nombre de sortilèges de protection puis se laissant tomber au sol, elle se recroquevilla, referma ses bras autour de ses jambes et fondit en larmes. Elle les avait abandonnés. Charlotte, Simon … et même Eirene.
- Spoiler:
ouioui, j'ai osé mettre la chanson de titanic en titre
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