| we were like strangers
who knew each other very well 20 SEPTEMBRE 2003 ; Dalair
(music)En retard. Elle est affreusement en retard. Elle leur avait bien dit qu'elle n'avait pas le temps d'aller chercher ces racines stupides dans les highlands, ça leur a pris plusieurs jours à crapahuter dans le froid et maintenant, elle est en retard. A nouveau, l’œil s'égare sur la vieille montre moldue qui s'accroche de son plastique fatigué autour son poignet. Puis, un juron, le même que Finn (elle a toujours dit qu'il avait une mauvaise influence sur elle de toute façon), et le pied impatient s'enfonce plus fort sur l'accélérateur. Dans sa tête, les mots mécontents de Finn résonnent encore et les promesses qu'elle a faites. Elle sera toujours toujours prudente, promis juré (hum hum). Il n'y a rien de prudent à accélérer comme elle le fait, même si la route est vide de circulation. Sous le capot, le moteur crachote, il gémit qu'il frôle la tachycardie, vieille mécanique fatiguée par les kilomètres (elle aurait dû voler l'autre, celle qui avait l'air plus neuve).
A bien y réfléchir, ce n'est pas prudent non plus de venir aujourd'hui, alors qu'elle sait que ce n'est pas son jour d'aller à l'arbre creux, que Redbird va s'y pointer à n'importe quel moment pour récupérer le colis. Mais peut-être qu'il n'est pas trop tard. Peut-être que l'autre n'est pas encore passé. Peut-être qu'il est encore temps d'aller y déposer la demie tablette de Crunch qu'elle a promis de lui laisser. (Bien sûr, ils n'ont pas explicitement dit sur MSN que c'était du chocolat moldu, mais il sait qu'elle a accès à ce genre de choses et il avait l'air impatient d'y goûter) (Tout comme elle était impatiente de lire la suite des manhwa de Damian qu'ils s'échangeaient sous le manteau, alors elle ne tient pas à le décevoir).
Elle ne perd pas de temps à se garer (elle est de toute façon affreusement mauvaise pour ça) et abandonne la voiture sur le bas côté d'une route de campagne au milieu de nulle part avant de tirer les clés hors du contact et de les jeter dans sa poche. Le vent qui mord ses joues est froid, humide, on sent que l'automne s'installe, alors qu'elle enfile son sweater wizrock fatigué et tire la capuche sur sa tête avant d'avaler au pas de course la cambrousse qui la sépare encore du square abandonné de Loutry.
Le petit portail grince un peu quand, pressée elle saute par-dessus, et elle ne doit qu'aux réflexes de la louve de ne pas glisser sur les feuilles humides. Elle ne doit aussi qu'à la louve de sentir une odeur humaine qu'elle reconnait vaguement, pas totalement mais suffisamment pour ne pas détaler quand elle voit quelqu'un fouiller le tronc. Prenant soin de rester silencieuse, elle s'approche, désireuse de savoir qui est l'intrus qui fouille dans leur arbre. It's the scent of this human you keep giving stupid human stuff, the one with a name of food. C'est pourtant un tout autre nom que Redbird qui échappe à Blair quand elle croit reconnaître cette coupe : « Da-Damian ? » Prudemment, elle s'approche ; dans son coeur, bat une peur qu'elle ne veut pas avouer, et ses muscles sont déjà prêts à amorcer une fuite s'il se montre hostile. Ca la tue un peu de se dire qu'il est peut-être devenu son ennemi, elle préfèrerait les retrouvailles entre amis qu'elle fantasme depuis des années pour l'Abécédaire. Mais elle a été chassée trop longtemps, et, après tout, il était là-bas, à cet endroit où elle n'était qu'une jolie boîte à musique qu'on usait et usait encore et encore. « Qu'est-ce que tu fais ici ? » Il y a comme un reproche latent dans la voix. C'est devenu l'arbre de Redbird et de moi, ce n'est plus le nôtre. Entre les racines, elle sait qu'il y a encore des manhwas traduits qui l'attendent dans une boîte métallique, mais peu importe le nombre de fois où elle est revenue, elle ne l'a jamais récupérée, ni pour la garder, ni pour la jeter au feu, refusant de prendre une décision. Damian était avec eux, est-ce qu'il était l'un d'eux aussi ?
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