I thought I saw the devil This morning Looking in the mirror, drop of rum on my tongue With the warning To help me see myself clearer I never meant to start a fire I never meant to make you bleed I'll be a better man today I'll be good, I'll be good And I'll love the world, like I should Yeah, I'll be good, I'll be good For all of the time That I never could
- i'll be good, Jaymes Young

« T’es prêt ? »

Il claironne sa phrase penché au dessus d’un chaudron bouillonnant, les yeux rivés sur le petit garçon assis à l’autre bout du laboratoire derrière une paire de lunettes de protections rondes qu’il devait tenir de ses petits doigts pour qu’elles restent en place. C’était celles de George.
Cette phrase était d’habitude pour George. Mais en retour, pas de “Prêt Fred”, un joyeux “oui”, étiré dans le temps par l’excitation d’un gamin qui sautillait pour voir un peu plus ce qu’il se passait à l’intérieur du chaudron fumant malgré le sortilège de protection en forme de bulle l’entourant. La mixture violette émettait une lumière vive, donnant à Fred, dissimulé sous ses lunettes lui aussi, un certain côté savant fou qu’il avait fini par apprécier. C’était un savant fou, un inventeur de babioles enchantées qui avaient pour but de faire exactement ce qu’il était entrain de faire: émerveiller, faire rire. Soigner.

La cuillère en bois battait le mélange avec frénésie pendant que Fred ajouta le dernier ingrédient: de la poudre de raifort. Aussitôt la mixture se mit à épaissir dangereusement et à bouillonner. A chaque bulle qui explosait se créait un oeuf violet aux reflets argentés. Un, deux… Vingt..Trente. Le bruit semblable à du pop-corn n’en finissait pas et le contenu du chaudron commençait dangereusement à remonter en dehors de celui-ci, projetant à l'occasion un oeuf en dehors de celui-ci qui se retrouvait à rouler sur le parquet du laboratoire. C’est à ce moment là qu’un petit éclair bleu frappa la surface en étain qui commença à s’étendre sur la table comme un sac de pomme de terre. Un sortilège anti-débordement régla vite le soucis, alors que le chaudron continuait de tressauter à chaque oeuf qui se créait à l’intérieur.   Teddy, invité par Fred à l’aider, commença à ramasser sur le sol les produits perdus qui avaient roulés un peu partout sous les meubles. Lorsque tous furent récupérés et un dernier accio lancé pour s’en assurer: il était l’heure de tester.

Le garçonnet de cinq ans n’avait pas la moindre idée de ce qu’il avait aidé à préparer comme bêtise aujourd’hui. C’est lui qui, comme un grand, avait choisi quel parfum allait avoir les confiseries. Des myrtilles, qu’il avait ajouté au chaudron non sans en manger une poignée, ce qui lui laissait un halo violacé sur la bouche et les joues. C’était ajouté à cela des prunes dirigeables qu’il avait aidé Fred à couper et des ailes de billiwig qu’il avait également lancé dans le récipient en métal.  Bien entendu il n’allait pas être le premier cobaye de cette expérience, c’est Fred qui s’y colle. Plongeant la main dans le caudron il en sort un des bonbons et le met dans sa bouche. C’était des chewing-gum. Le genre de chewing-gum que l’on peut acheter à honeyduke ou à la boutique juste derrière la sienne, sugarplum, qu'il avait racheté. Sauf que les siens, ils étaient beaucoup plus intéressant. Le best-seller depuis des années dans le milieu c’est les bulles baveuses, il était temps que cela change d’après le rouquin qui mâchait avec entrain la gomme sans réel effet secondaire pour le moment sous le regard interrogateur de Teddy.
Lorsqu’il fut capable de faire une première bulle, celle-ci se transforma en un lapin qui se détacha bien vite de son propriétaire pour gambader autour d’eux. Très vite Teddy voulu essayer à son tour et se mit à mâcher et mâcher, jusqu'à créer poisson-ballon ( qui avait plus ou moins l’air d’une bulle classique d’ailleurs ). Une réussite cette expérience, tout comme les autres bulles  formées par la suite, un dragon. Enfin, tout ça, c’était sans compter sur l’imprévisible. A savoir, la bulle en forme de poisson qui malheureusement avait fini sa course entre les mains du gamin qui appuyait déjà dessus.

« Non non non ne la fait pas explo-»
Pouf..

Ce qui était un poisson il  y a un instant c’était transformé en une épaisse couche de pâte à mâcher violette sur le visage, les mains et les cheveux de Teddy, dont les yeux derrière les verres se relevèrent pour observer Fred. Il aurait pu en rire, le rouquin, face à la situation. Même un protego n’avait pas réussi à sauver le garçonnet de ses bêtises. Il aurait pu rire, il en avait envie, porté par la légèreté de ces journées-là. Où garder Ted lui donnait l’impression de revenir dans un lointain passé à s’occuper de ses cadets. A une époque où il serait resté hilare durant des heures, à se moquer gentiment et en jurant qu’il ne lui ferait jamais oublié cet instant. C’était la meilleure chose qu’Andromeda pouvait lui demander, le garder. Il lui rendait ces parts d’enfances que la guerre avait brûlé sur son passage. Imprégnait ces murs de nouveaux rires, de nouveaux souvenirs heureux dont ils avaient manqués pendant leur absence. Sans savoir à quel point il pouvait être d’un grand secours, même à un adulte. Le visage parsemé de taches de rousseurs se tord sous les larmes qui commencent à couler. Elles sont teintées de peine comme de joie, accompagnant un sourire tremblant et d’un seul éclat de rire qui ressemblait plus à un soubresaut qu’autre chose. Ça va aller.
« Fred ? » dit le gamin, en décollant les lunettes malgré ses doigts englués.
Il réveillait la boutique sans le comprendre, du haut de ses trois pommes et avec sa bonté naturelle chez les enfants. A tel point que la cloche de la porte d’entrée résonna jusqu’en haut du bâtiment, interrompant ses larmes immédiatement. Ses yeux s’écarquillèrent. Il était l’heure, cela devait être Meda.  

« Vite, vite reste tranquille, grand-mère arrive. » D’un coup de baguette magique le mobilier repris sa place correctement. Les ingrédients reprirent leurs places rapidement et un mouchoir vint essuyer le visage de Fred malgré ses protestations. Le chewing-gum se décolla non sans difficulté du petit garçon, laissant à peine le temps à Fred de lui remette légèrement sa tignasse en place avant que la porte ne s’ouvre face aux garnements.  

« Bonsoir Meda… Tu as passé une bonne journée ? »  très crédible, Fred.

I thought I saw the devil This morning Looking in the mirror, drop of rum on my tongue With the warning To help me see myself clearer I never meant to start a fire I never meant to make you bleed I'll be a better man today I'll be good, I'll be good And I'll love the world, like I should Yeah, I'll be good, I'll be good For all of the time That I never could
- i'll be good, Jaymes Young

La rangée de dents blanches s’affiche dans son sourire forcé, trop large, au point où l’un pouvait voir sans réel difficulté qu’une de ses canines était de travers, comme celle de George. Si sourire allait toujours à Fred,  l'habitude de la chose rendait la chose totalement étrange ces temps-ci, un mensonge éhonté sous la forme d’une bonne humeur factice. A peine leur avait-elle dit bonjour que celui-ci se fana, tandis que Teddy faisait diversion en allant embrasser la joue de sa grand-mère et lui raconte sa journée. « Rien de dangereux c’est promis. » assura-t-il, avant de se corriger. « Enfin, rien d'irréparable en tout cas. »  Les sauts du gamin attirèrent le lapin, planqué sous son lit depuis l’arrivée de la sorcière. « Il va falloir régler quelques soucis encore.. Comme l'explosion potentielle  causée par les doigts d'enfants. » D’un coup de baguette la bulle disparu dans l’air dans un "pop" sonore, avant qu’elle ne vienne coller tout l’appartement de pâte à mâcher saveur myrtille. L’odeur envahissait assez la pièce comme ça.

Teddy revint se précipiter contre lui, ses doigts s’agrippant à son pull pour attirer l’attention du sorcier, ce qui fut efficace. « On fait goûter à Mamida dis ?! »  Avant même de donner sa réponse, Fred tente déjà de s’échapper en venant décoller les doigt du gamin de son vêtement. A la place, celui-ci, riant, se saisit des phalanges du Weasley pour mieux l’handicaper. C'était sans compter sur Fred et son esprit espiègle, qui au lieu de se détacher cette fois s'amusa à lever les bras, soulevant du sol à plusieurs reprises un Teddy hilare tandis qu’Andromeda décline l’offre poliment, provoquant l’arrêt du jeu et une moue bougonne sur le visage du gamin qu’il repose sur le sol.

« En fait, je me demandais si tu ne voulais pas rester pour le dîner. Ca changerait de moi venant squatter et c’est promis, ça reste comestible, même si je ne cuisine pas comme maman. »  Teddy lâche ses mains pour sautiller de nouveau  vers sa grand-mère, lui demandant sûrement de dire oui. Aux oreilles de Fred, tout cela sonne sourd l’espace d’un instant.

L'énonciation de sa mère est tout aussi agréable que triste, lui rappelant soudainement que Molly Weasley ne savait peut-être même plus cuisiner ces gâteaux aux fruits qui trainaient dans la cuisine. Bill, Charlie, George et lui se faisaient souvent réprimander d’en avoir volé quelques un pour les manger dans le jardin quand ils étaient tout jeunes et que Ron et Ginny avaient encore du mal à courir dans tous les sens.  Dans ces souvenirs il y avait bien évidemment Andromeda , assise près du guéridon sa tasse de thé posée sur le bois travaillé, entrain de discuté avec leur mère pendant que Nymphadora elle, participait à leurs bêtises pendant que Percy les regardait faire.  Des souvenirs d’un passé où la seule chose les retenant de rester à la maison, c’était Ted qui attendait leur retour et Arthur qui allait bientôt rentrer du ministère. Où au final, tout le monde était invité à rester dîner sur ordre de Molly, puisqu’il y avait toujours de la place pour du monde en plus autour de leur table aux chaises dépareillées.  Bien entendu les dîners il y en aurait d’autres, peut-être, mais la bonne humeur du passé était ternie par les chaises vides et les souvenirs embrumés.
« Alleeer s’il te plaîttt Mamida ! » Il était impossible de le voir et pourtant Fred pouvait juré que le petit garçon tentait d’utiliser ses yeux de chiots tristes sur sa grand-mère. Ceux dont il avait été la victime à plusieurs reprises déjà, c’est comme ça qu’il s’était retrouvé à acheter une glace à Teddy dans le Londres moldu en plein hiver, juste avant l’heure de manger. Il savait y faire, le gamin.

Sans trop lui demander son avis, la baguette d’aulne quitta sa manche pour s’agiter dans l’air. De l’égouttoir la vaisselles propre vint se poser sur la table suivi par les couverts et les verres.  
« Il est déjà tard et tu dois être fatiguée… » ajouta le rouquin, s’alliant au garnement pour piéger la pauvre Andromeda. C’était un bon prétexte pour passer la soirée accompagné, se renseigner sur comment allait les autres, comment tournait le monde auquel il ne participait plus trop, trop sombre. Mais la lumière revenait, doucement.