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Lipstick and alcohol.



« I once heard someone say that the concept of moderation seems a little extreme, and tonight... I agree. » Koren Zailckas.

L’alcool. La saveur âpre sur ta langue. L’ennui, la mélancolie, la solitude peut-être. Ras le bol de tout. Foutue St Valentin qui s’approche. Foutue réalité qui te rattrape. Pour qui t’as envie de te battre, mh ? Pas pour ce cinglé qui passe de la fureur folle de la défaite à la menace, pas pour cette élite stupide qui vogue de la terreur à la fête, sans conséquences, vie sans lendemains. T’aurais bien été errer au Royals mais .. avouons, ils ont visé juste pour te gâcher la soirée, eux aussi. C’est pas comme si t’avais fréquenté les lieux plus d’une fois, cela dit. Ta robe noire près du corps, tes jambes nues, tes escarpins pourpres et tes longs cheveux blonds, pour ne rien faire, ne rien attendre, tourner en rond. Tu t’étais évaporée durant une semaine, voguant dans la nature, savourant la froideur de la nuit, le silence d’une nature si proche, si lointaine. Les champs, les espaces verts, le bois, pour revenir ici, case départ. Oui, tu t’étais familiarisée avec l’alcool, ce soir. Tu t’étais dis qu’à défaut.. qui pourrait te le reprocher, quoi qu’il en soit ? Un verre dans le bain, un sur le canapé. Pas de véritable plaisir à avaler cette sorte d’agression liquide, et pourtant, t’y revenais, comme au goût amer de ta culpabilité. Ni Daeva, ni Lucifer. Le mutisme de tes murs froids. Les couvertures des livres de ta bibliothèque qui te fixent, délaissés, comme toi.

..*..

Un long manteau couleur de sang qui suit tes mouvements. Tu ne sais pas vraiment pourquoi tu te diriges vers la résidence Carrow mais tu y vas. Harpo Creek, ça n’est pas très grand. Tu t’y repères aisément. L’obscurité baigne les rues, la lune te domine, douce et presque ronde. Tu n’es pas ivre, t’es juste pas très claire. Un petit sourire sur le coin de ta bouche. T’as décidé de jouer cartes sur tables ces derniers jours, pourquoi pas avec ce très cher monsieur Lazarus ? Séduisant, non ? Non, pas trop. Charismatique, dirais-tu. Il a pas le charme ténébreux d’Ypsös. Il a pas l’aura mystérieuse de Dolohov. Il a pas la classe du dandy Doherty. Un truc bien à lui, indéfinissable qui t’a tétanisée, fait fondre en larmes comme une adolescente prude, innocente, trop. C’est tout ce que voit le Mangemort en toi, une sorte de petite chose fragile, désormais. Oui mais.. tu n’es pas que ça. Et tu as terriblement envie de le lui montrer.

Tu as surtout terriblement envie de compagnie. Si la lignée Carrow était secouée par quelques impuretés et - à ton humble avis, carences intellectuelles - le père n’en était pas inintéressant, d’autant qu’il s’avérait bon vivant. On te l’avait affirmé fêtard, si tes souvenirs étaient exacts. Un peu pervers aussi, ce que tu avais constaté par toi-même. Quoi que ce que tu trouvais pervers n’était souvent qu’un élan normal auquel tu n’étais pas habituée. L’idée que tu puisses attirer quelqu’un .. non, toujours pas. Tes goûts vestimentaires et ton élégance ne reflétaient qu’une volonté de noyer le monstre que tu voyais dans le miroir.

Tu frappes à la porte, incertaine. Et si toute la ribambelle était là ? Si l’épouse, les filles, le fils, le rebut, tous se trouvaient entre les murs ? Tu faisais sans doute une erreur, en l’importunant à une heure si tardive. 22h, pour toute famille un tant soit peu unie.. t’étais là, autant tenter. Avec un peu de chance, il sera disposé à t’extraire de ta morosité. Ton regard bicolore, un peu brumeux, risquait de ne pas tromper, lui.

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« I see no point in what you're thinking
I'm going out I'm talking you drinking
I get the car, you're getting up
I'm standing tall, well fucking tough
It's just your way, you hear me wrong
I hear you say you're getting up, getting up... »


La période de la Saint-Valentin était toujours particulière pour Lazarus Carrow. Ce n'était pas qu'il y accordait une importance particulière, car il eut fallu pour cela qu'il eut quelqu'un dans sa vie, ce qui n'était pas le cas – il sortait avec des filles, ce qui ne signifiait rien pour lui, ou alors rarement. Elles n'étaient pas nombreuses à retenir son attention. Non, c'était plutôt que comme il n'avait personne, l'évenement devenait totalement licence pour tuer, ce qui lui permettait d'être encore plus débauché, pervers, excentrique, bourré, fêtard, que d'habitude. Il avait écrit une chanson qui s'appelait I'm a party-man, ce qui lui correspondait étrangement bien. Qu'est-ce que c'était les paroles, déjà ? Ah oui, quelque chose du genre : « What happened in our life ? Death is so close to me ! What happened in our life ? I'm feelin' so empty... »

Soudainement déprimé par le constat affligeant que ce constat tenait moins de l'oeuvre musicale que de la réalité, Lazarus reposa brutalement son verre sur le bois de la table. Une silhouette bougea dans le lit. « Tu t'en vas ? » Il sourit. La question se poserait éternellement, et la réponse serait toujours « bien sur. », avec lui, mais il ne pouvait pas dire ça. La fille ne l'intéressait pas et Lazarus ne comptait pas rester dans cet hôtel pour le reste de la journée. « Tu pourrais rester. C'est la Saint-Valentin demain. » Il éclata de rire ; la blonde anonyme parut vexée. Lazarus sourit encore, amusé : elle se vexait pour un rien. « Je ne vois pas le rapport, chérie. Tu ne t'appelles pas Valentin et moi non plus. Tu n'as quand même pas besoin de toutes ces conneries romantiques, si ? »

Elle ne lui adressa plus la parole jusqu'au moment où elle partit, avant lui. Il termina une cigarette, et remit sa veste ; pas froissée, c'était déjà ça. Il allait replonger une nouvelle fois dans cet univers bien plus rude qui était le monde politique. Lazarus Carrow faisait le job, imperturbable. Il se battait, il résistait. Tous les jours il y retournait, expliquait pourquoi ils allaient vaincre, pourquoi ils continuaient à gagner, pourquoi, toujours pourquoi, en mentant éperdument, mais il s'en foutait. Il appliquait les ordres. Tous les observateurs politiques pensaient qu'il aurait du craquer depuis longtemps. Un type aussi inconséquent n'aurait pas du tenir le choc, il aurait du jarter depuis longtemps. Mais Carrow restait là. Tous les jours il remettait son costume de sous-secrétaire et tous les jours il se battait pour retrouver ceux qui avaient fait sauter le Royals et la RITM. Carrow était un homme tenace. On venait de mettre en cause l'autorité de l'Etat, et si l'Etat tombait, sa famille tombait, donc il chuterait avec. Il était le premier à servir loyalement la cause, parce qu'il y avait un intérêt purement personnel. Jamais il ne trahirait : c'eut été se trahir lui-même. Il n'était pas de ce genre là.

L'ordre devait revenir, que ce soit par la force ou pas. Ils devraient tous comprendre. Au ministère, on le laissait peinard : le niveau un faisait peur. Il y résidait un homme qui n'avait pas hésité à envoyer au peuple qu'il dirigeait une armée de détraqueur – si tant est que le Lord fut encore un homme. Ca faisait peur. On devait moins craindre Lazarus...quoique. Il ne passait pas non plus pour un enfant de choeur. Il travailla toute la journée sur les projets de reconstruction de la RITM. Il faudrait encore mettre en place une taxe : il se demanda si ça passerait encore une fois. A tout prendre, il fallait espérer que oui, car ils n'avaient pas réellement le choix. Les biens des terroristes avaient déjà été saisis, il ne pouvait plus faire autrement. Il connaissait par avance les conséquences, mais bon, les solutions miracles, Lazarus Carrow n'y croyait plus, si tant est qu'il y aie jamais adhéré un jour.

Lorsqu'il rentra, tard, vers vingt heure, la maison d'Herpo Creek était vide. Tibérius était en mission et il avait expédié Liam à la recherche d'une pièce d’orfèvrerie rare : il en aurait pour la nuit. Il ignorait totalement où était Beatrix et Susanna et sa mère avaient encore une fois disparu du coté de chez les Slughorn. Il ferma les yeux un instant. Un instant, il se tint dans l'entrée qui était jadis leur maison à tous, une maison remplie de vie, dont les pièces débordaient de rires, de discussions, de larmes, de poussière et d'odeurs de nourriture, de souffrance, de désirs, de colère et de silence aussi, le silence compact de gens serrés les uns contre les autres dans ce qu'on appelle une famille. Il regrettait la grande maison de Londres où il était né, il regrettait sa mère et son père. Il passa dans le bureau et salua le portrait de celui-ci. « Salut, p'pa. » Il se demanda si tout ça lui manquait, mais ce qui était sur, c'est que se souvenir faisait mal. Il se versa un verre. « Voila ce qui arrive quand on vieillit : le temps vous abandonne et les souvenirs deviennent involontaires. » Il avait quarante-six ans, presque quarante-sept, et il s'en souvenait d'un coup. Oui, Lazarus devait avoir changé...ou pas. On disait à tort que la puissance émotive de la jeunesse s'atténuait avec le temps. Faux. On apprenait à la contrôler et à l'étouffer. Mais elle ne s'affaiblissait pas.Elle se cachait et se concentrait simplement en des endroits plus discrets. Lorsqu'il tombait par accident dans un de ces gouffres, la douleur était ahurissante.

Quelqu'un frappa à la porte vers vingt-deux heures, alors qu'il jouait encore au piano. L'elfe alla ouvrir et ramena avec lui une Lucrezia Rowle dans un état que Lazarus aurait qualifié d'un peu second. Ce n'était ni habituel ni courant de la voir débarquer à ce genre d'heure – ni de la voir débarquer tout court, à la réflexion. Parfois elle semblait le fuir un peu, souvent même. Il n'avait pas été des plus fins avec elle, le mangemort voulait bien l'admettre. Le second portrait de son père lui adressa un regard inquisiteur. Lazarus l'ignora imperturbablement. « Tiens, mademoiselle Rowle. Ca faisait longtemps. » Il claqua des doigts à l'intention de l'elfe : « Amène une chaise pour mademoiselle Rowle. » Il n'y en avait pas dans la gallerie. Lui resta assis au piano. « Alors, qu'est-ce qui t'amènes chez moi ? » Pas une crise de larmes, pitié, il ne savait pas gérer ça. « Ou alors tu en veux à mon corps et tu es nue sous ce manteau rouge. » Bon, ce n'était pas forcément de très bon goût connaissant son interlocutrice, alors il ajouta en tirant sur sa cigarette. « C'est une blague, bien sur. » Mais ça ne répondait pas à sa question, alors il insista : « Alors ? » Et sa curiosité était sincère.
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« I once heard someone say that the concept of moderation seems a little extreme, and tonight... I agree. » Koren Zailckas.

« Tiens, mademoiselle Rowle. Ca faisait longtemps. » Les lieux ne sont pas à ton goût, pas plus que l’Elfe, d’ailleurs. La touche est forcément une marque féminin, sans élégance selon toi, ou peut-être trop chargée pour l’adepte de l’épuré que tu es. « Amène une chaise pour mademoiselle Rowle. » La créature s’exécutait sans rechigner, apportant de quoi s’asseoir, tandis que le maître des lieux ne décrochait pas de son piano. « Merci.. » soufflas-tu à l’attention du petit serviteur, avec douceur. Tu n’en possédais pas, parce que tu n’avais pas été élevée dans cette tradition d’assistanat, de soumission. Au fond, tu préférais te débrouiller, ton rebut faisant office de soi-disant preuve d’approbation du système alors qu’il n’en était rien. « Alors, qu'est-ce qui t'amènes chez moi ? » Une question pertinente. Tu penches légèrement la tête, tes longs cheveux blonds glissant légèrement sur ton épaule. Non, vraiment, tu ne sais pas ce que tu fais ici. « Ou alors tu en veux à mon corps et tu es nue sous ce manteau rouge. » Oh.

En temps normal, tu aurais été choquée, tendue ou stoïque face à de telles paroles. Avec Carrow, la relation était complexe, faite de hiérarchie, de peur, de rejet et d’un passé dont tu ignores beaucoup de traits. Ton père ne t’a jamais parlé de ses amitiés d’autrefois, pas plus que tu ne sais combien son ambition fut grande, combien son humour fut vrai. Lazarus a assumé sa famille. William a caché le don prestigieux de son héritière. Un fossé, un monde de liens que ton esprit compartimenté n’était absolument pas capable d’intégrer. Pourtant.. un sourire au coin de ta bouche, mutin, l’oeil pétillant. « Monsieur Carrow, que dirait père à vous entendre ? » Oui, que dirait-il s’il savait qu’un Mangemort de son âge te tournait autour ? Tu ne serais pas vraiment capable de répondre, parce que ni toi, ni ton géniteur n’étiez vraiment aptes à considérer que tu sois attirante. A tes yeux, il joue un rôle. Il se joue de ton inaptitude. Alors, quand il souligne que c’est une blague en tirant sur sa cigarette, quand il insiste pour savoir ce que tu viens faire entre les murs de sa demeure à une heure si tardive, tu restes silencieuse.

Tes doigts détachent lentement les boutons du fameux manteau rouge, dont tu te défais, le posant sur le dossier de la chaise, dévoilant le tissu noir de la robe, courant le long de tes courbes jusqu’au dessus de tes genoux ; les épaules dénudées par un col élégant et pourtant des manches venant cacher la Marque mal assumée. « J’ai cru comprendre qu’il était encore plus amusant de dénuder soi-même les demoiselles.. livrées trop facilement, ça gâche la saveur, non ? » Le bruit régulier des escarpins sur le sol, jusqu’au piano. Tu as toujours aimé cet instrument, raffiné, doux à l’oreille, beau à l’oeil, trop imposant pour le manoir Rowle.. surtout parce que personne ne sait en jouer, du moins tu le penses. Ta mère avait les bases mais pas la passion, elle n’en parlait pas, comme la plupart des choses, en fait. « Je me sentais seule. » avoues-tu enfin, en réponse à sa question. Tu observes, autour de toi, intriguée par le silence qui semblait régner, ou l’absence plutôt. « Susanna n’est pas là ? » Pas Beatrix, évidemment. Tu n’appréciais guère la vélane que tu avais extirpé de la foule des journalistes attirés par sa beauté surnaturelle, lors de l’attaque au ministère. Elle ne te plaisait pas. Le charme flamboyant de ces créatures te dérangeait, symbole même de la manipulation des esprits. Ton amie, c’était Sue. Si tu ne la voyais plus depuis un certain temps, tu te souviens avoir passé de longues soirées de réceptions en sa compagnie, à écarter les hommes, à revendiquer une certaine indépendance par un duo terrible de froideur et de rejet des avances. Les indomptables des soirées mondaines.

« Quel dommage.. » On ne saurait dire s’il y a de la malice volontaire dans le miel de ta voix ou s’il s’agit simplement d’un constat un peu moqueur. La guerre changeait les gens et tu trouvais, sans le dire, qu’elle n’avait pas arrangé la fille Carrow, peut-être devenue excessive sans que tu n’en comprennes la raison. Le monde évoluait et tu restais immuable, seule et distante, le temps ne paraissant ni changer tes traits ni ton esprit brillant quoique socialement inadapté. « C’est un bel instrument. » soulignes-tu en désignant le piano. Oui, tout à fait. Pour le coup, le double-sens potentiel t’échappe complètement. Funambule sur la pente glissante du charme, en équilibre entre le respect et le jeu, toujours un peu trop toi-même, un peu trop franche ou directe, plus accessible cependant. Non, tu n’étais pas d’humeur à pleurer, n’en déplaise au monde entier.

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Fantasmes : toutes les filles dont il avait rêvé mais qu'il n'avait pas pu avoir. Autant dire que pour Lazarus Carrow, cela ne concernait pas tant de filles que ça. Il s'arrangeait toujours pour obtenir ce qu'il voulait, quand il le voulait, et ça marchait bien, généralement. Lazarus Carrow n'avait jamais été beau et il ne le serait sans doute jamais. Il avait une figure taillée à la serpe, faite pour gueuler sur le monde, un visage anguleux et dur. Carrow se trouvait dans son élément dans les bars, lorsqu'il piquait une colère ou qu'on le provoquait, lorsqu'il frappait le crâne de quelqu'un contre le trottoir jusqu'à la personne devienne molle et inerte comme une poupée de chiffon. Sa vie, c'était le sang, dans tous les sens du terme, et il possédait la carrure pour vivre comme ça. Il se forgeait jour après jour une armure pour affronter le monde. Et le monde était composé d'imbéciles sournois et rampants. Il fallait s'en méfier. Il fallait être plus intelligent. Et Lazarus était un type intelligent : il savait qu'il pouvait avoir le pouvoir. Tout ça était une boucle. Il se protégeait des débiles et il les gouvernait, il voulait plus de pouvoir pour s'en protéger mais pour les gouverner, et de toute façon, plus il avait de pouvoir, plus il pensait être le meilleur et sa mégalomanie, parfaitement assumée, augmentait au fur et à mesure qu'il obtenait tout ce qu'il voulait d'un simple claquement de doigt.

Carrow avait de nombreux atouts pour lui. Oui, il n'était pas beau, pas comme ces types que toutes les filles de bonne famille voulaient avoir. Mais il était intelligent, brillant à certains égards. Il avait du charisme. On écoutait sa voix grondante et il attirait, de ce regard lumineux, ceux qui étaient prêts à se laisser prendre au piège de cet homme à la personnalité magnétique. Le pouvoir l'avait aidé. Les filles ne résistaient pas au pouvoir. Et la plupart ne demandaient, de toute façon, qu'à se laisser embobiner par ce sourire un peu pervers qu'il leur offrait. Les filles voulaient des bad boys. Elles étaient toujours servie avec cet homme là. De mauvais genre, vicieux, provocateur, rusé...Lazarus Carrow n'était pas un personnage recommandable, mais il était fascinant. Il le savait et il en jouait.

Mais il y avait des personnes sur qui cela ne fonctionnait pas. Comme Lucrezia Rowle. Elle était toujours restée de marbre face à toutes ses insinuations, sauf lorsqu'elle s'était écroulée. Et après, malgré une certaine entente entre eux, malgré le fait qu'il se soit toujours senti un peu coupable envers elle et qu'il eut tenté d'être gentil, de se rattraper, ça restait la même chose. Elle résistait.

C'était perturbant.

Fantasmes : ce qui résistait à la toute puissance du sous-secrétaire d'Etat.

Au départ, tout ça n'était qu'une basse vengeance. Il voulait faire payer à William le fait de l'avoir laisser tomber. Carrow pouvait être des plus mesquins lorsqu'il le voulait, et si en plus sa revanche passait par le fait de sauter une jolie petite blonde deux fois moins âgée que lui, ça lui allait parfaitement. Il ne s’embarrassait pas de scrupules ni de bonnes manières. « Ton père est un crétin qui ne sait pas ce qu'il dit, la plupart du temps. » Il se foutait de faire rougir Lucrezia. Enfin non. C'était compliqué. D'un coté, le fait qu'elle résiste le poussait à insister, c'était devenu une vraie obsession chez lui, qu'elle finisse par céder. D'un autre coté, il ne voulait pas qu'elle le fuie ni qu'elle lui en veuille. Parce qu'au fond, peut-être que finalement, il ne voulait pas que se la faire. Il lui lança un regard à moitié amusé, à moitié sévère. « Tu as tout pour toi. Tout aurait du être facile.  Moi ça ne l'a pas été, parce que je n'ai rien pour moi sauf l'intelligence. Mais toi, c'est différent. Tu pourrais faire de grandes choses. Ca me rend malade de voir que personne ne comprend ça à part moi. »

Il devenait un peu véhément. Peut-être qu'il avait un peu trop bu. Ou pas assez. Il n'en savait rien. Il se demanda si tout était tout à fait normal dans cette soirée. Ce manteau qui tombait et le sourire qu'elle lui adressa eux, ne l'étaient certainement pas. Il se demanda si elle était dans son état normal elle aussi. Mais il ne pouvait pas résister à ce sourire légèrement aguicheur, cette fois. Oh non. Il en avait, de toute façon, toujours été incapable, c'était sa faiblesse. Mais il était lucide, alors il se mit à rire : « Tu pourrais avoir le monde à tes pieds. A commencer par moi. Parfois je me dis que tu ne t'en rends absolument pas compte. » Il sourit, fumant toujours sa cigarette. « Et parfois je me demande si tu ne le sais pas parfaitement et que tu ne te fous pas complètement de ma gueule parce que ça t'amuse. »

Il le prenait sur le ton de l'humour, mais il écoutait tout de même, attentif à ce qu'elle disait. Aux aveux derrière les paroles banales qu'ils échangeaient, presque en badinant. Le jeu de séduction étaient le quotidien de Lazarus Carrow. Il en méprisait le moindre contour. « Non. Personne n'est là. Je suis seul aussi, il semble. » Pourquoi est-ce qu'il n'était pas sorti se taper une fille ? La réponse était triviale. Il était trop tôt. Et il n'avait pas bu assez. Il se versa un autre verre. « Tu sais bien ce que pense de moi ma famille. » Il pouvait bien crever ici tout seul, tout le monde s'en foutait.

Il sourit encore. Oui, ils étaient seuls et oui, il aurait pu en profiter, mais il était aussi curieux qu'il était ouvert à toute proposition – comme d'habitude en somme. « Tu te moques toujours de moi. » Il précisa devant son regard interrogateur : « Tu me rends marteau pour mieux t'enfuir après. » Même si en fait, pas sur qu'elle aie compris elle même les sous-entendu qu'elle pouvait faire. Quoique. Se jouait-elle de lui ou non ? Ce soir, Carrow n'était sur de rien. « Restes si tu veux. On sera seuls ensemble, comme ça. »
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« Ton père est un crétin qui ne sait pas ce qu'il dit, la plupart du temps. » Un crétin. Tu ne sais pas vraiment si ton père est un crétin. A bien y réfléchir, tu ne sais pas grand chose de ton père tout court, si peu bavard, renfermé. Tu crois te souvenir de ses bras, la première fois où tu as manifesté ton don si inattendu. Ta tare comme avait finit par dire ta mère. Tu ne savais même pas exactement en quoi consistait le job de William Rowle, un bureaucrate mystérieux qui ne parlait jamais de ses affaires. Ta famille n’en avait, de toute manière, jamais été une. Réputés pour suivre le vent qui tourne, pour vous déchirer, vous scinder sans cesse, vous étiez le genre de lignée en laquelle nul n’avait confiance et la réciproque était vraie. Les réunions de famille ressemblaient à des batailles digne du plus primaire des moldus. Les assiettes volantes en plus. C’est ce qu’on t’en avait dit, n’ayant jamais réellement pris la peine d’y participer. « Vous ne l’appréciez pas beaucoup. » Remarque fort pertinente. « Tu as tout pour toi. Tout aurait du être facile. »

Rire amer. Il y avait quelque chose de sensuel dans ta façon de t’avancer vers le piano, glissant tes doigts sur la surface, ta main suivant la courbe de l’instrument jusqu’à te trouver proche de lui. Assez pour voir les touches. Il dit que lui n’avait rien, sauf l’intelligence. Il dit que ça le rend malade qu’on ne voit pas ton potentiel. Tu as envie de lui dire qu’il se leurre, que ça n’est rien d’autre qu’une illusion. Tu as envie de protester, bien plus que tu ne le fais en réalité. Certes, Lazarus Carrow n’est pas un homme extrêmement beau mais toi.. tes yeux vairons, tes sifflements. Tu crois vraiment qu’il y a de quoi dégoûter n’importe quel parti. D’autant que tu n’es pas aussi filiforme que sa merveilleuse Beatrix. « Tu pourrais avoir le monde à tes pieds. A commencer par moi. Parfois je me dis que tu ne t'en rends absolument pas compte. » affirme-t-il. L’odeur de cette cigarette est dérangeante. Sa remarque au sujet du jeu que tu pourrais jouer fait naître un sourire au coin de ta bouche tandis que tu t’appuies dos au piano, une main venant caresser l’ivoire, ton attention pourtant portée sur l’homme, trop âgé pour un tel numéro. Un numéro dont tu ne sembles pas réaliser l’impact. « Si j’avais tout pour moi, monsieur Carrow, je serais l’une des héritières les mieux fiancées d’Angleterre. » Autant dire qu’on ne pouvait pas nier la véracité de la remarque : on ne te connaissait aucun accord de fiançailles, aucun projet d’avenir marital, jamais, pas même enfant, pas même interrompu. Tu avais fini par en conclure que tu ne valais pas la peine de passer un quelconque marché. « D’autant que je ne crois pas une seconde vous faire tant d’effets que ça. » C’est lui, qui se foutait de ta gueule, pas d’autre explication plausible.

« Non. Personne n'est là. Je suis seul aussi, il semble. » Sa famille. Aussi tordue que la tienne. Pire encore, entre bâtardise et tromperies, entre coups en douce et relations perverses. Une lignée dérangée. Il est seul, lui aussi. Et vous êtes deux abandonnés sur le rivage des conventions. « Tu te moques toujours de moi. » Un verre. Toi, t’en avais bu deux de trop. Tu sais pas si tu dois rire ou pleurer. Disons que pleurer n’était pas à l’ordre du jour alors autant en sourire. Sourire pour oublier. « Parce que vous, vous ne vous moquez pas de moi ? » Tu es trop jeune pour lui. Trop vieille pour d’autres. Tu es la fille d’un ancien camarade de Poudlard. Qu’est-ce qu’il cherche ? Tester tes limites ? Il y était déjà parvenu. Pauvre enfant incapable de gérer le flux émotionnel. Croyait-il te connaître ou, justement, était-ce le mystère que tu pouvais parfois représenter qui l’attirait ? Do, ré, mi. Tes doigts sur les touches. « J’ai toujours voulu apprendre à en jouer mais je n’ai pas la patience. » Ou, tout simplement, on ne te l’avait pas permis. C’était bruyant, comme activité. Ta mère t’avait affirmé que petite, tu as essayé, sans succès. Mensonge. Un de plus. Tout ce qui te sortait des livres était compliqué, ça demandait du contact social et ça, il en était hors de question.

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Il n'y avait pas beaucoup de choses que Lazarus aimait dans le monde. Il était un sale type, il le savait, mais il s'en foutait. Il n'était pas pas honnête, mais loin d'être con. Plus réalistes que la plupart des gens qui l'entouraient et qui se piquaient d'avoir le pouvoir.  Il jouait au  maître du monde, on lui donnait du «  monsieur le sous-secrétaire d'Etat » mais personne, bon sang, personne ne réalisait qui il était, en fait. Il avait quarante-six ans mais ne se sentait pas vieux, ou quoi que si, mais c'était quelque chose de bizarre, il ne réalisait pas quel âge il avait, parce qu'il vivait pour le futur, l'instant présent, ou à venir, sans jamais embellir sa mémoire. S'il n'avait guère la nostalgie du passé, c’était sans doute parce que sa mémoire était si fidèle et précise que Lazarus n'était pas enclin à attribuer une valeur ajoutée aux souvenirs. Carrow, sourit, amusé par la remarque de Lucrezia. En effet, il n'aimait pas trop William Rowle. Il aurait pu passé des heures à expliquer pourquoi, quelles obscures histoires les liaient tous les deux. Mais ce n'était pas bien glorieux, comme toujours...Les hommes n'étaient pas des êtres de lumière. Ils écrivaient leur vie dans les ténèbres. Trop de passions les animaient. De l'amour à la haine, tout leur était prétexte à souffrance et chez le mangemort, toute souffrance était un bon prétexte à vengeance. « Il y a des gens qui vous écoutent et qui oublient, d’autres qui n’écoutent pas du tout, ce qui revient au même. Et il y a ceux dont je suis, hélas, qui écoutent et n’oublient pas... Je n'aime pas qu'on ne tienne pas ses promesses. Ce qui fait que je n'apprécie pas grand monde, de manière générale. La trahison n'est pas grand chose, par exemple. Souvent je m'y attends. Mais les gens sont décevants et stupides. Ils trahissent ce que j'attends d'eux, et que sont les gens sinon les espoirs que nous plaçons en eux, après tout, hm ? »

Il n'attendait pas de réponse. Lazarus n'était pas sur de grand chose ici bas, mais ça i
l le savait : Pour trouver une place en ce monde, il fallait fuir ou le prendre à la gorge. Beaucoup de gens fuyaient, mais pas lui. On ne devenait quelqu'un d'intéressant que lorsqu'on cessait de fuir. Carrow n'était pas un homme bon mais il ne manquait pas de courage, d'une certaine dose d'inconscience. Il regardait le monde en face. Il ne laissait personne lui dicter sa conduite. Il savait ce que tout ça valait.Le triomphe, une qu'illusion... Dans les larmes, la peur et les regrets, il était amer. Victoire : précieuse, douloureuse, glacée,  elle n'allait pas sans souffrance. Elle offrait maintes récompenses... Gloire, pouvoir et amitiés immuables forgées dans le sang. Mais elle prenait aussi. Les illusions, les rêves, l'innocence. Chaque combat gagnés avait son prix à payer. A chaque combat son sacrifice. C'est à cela qu'on mesurait la grandeur d'une victoire... A la valeur de ceux que l'on perdait pour elle.  

Les gens, même ceux qui l'intéressaient, ne comprenaient pas ça. Lazarus Carrow n'avait pas beaucoup de talent dans ce monde : il était intelligent et il voyait le potentiel des gens, c'était tout. Il sourit encore : « Les gens sont idiots, je te l'ai dit. » Il écrasa sa cigarette dans le cendrier et le repoussa plus loin sur le piano. « Je vais te dire un secret, Lucrezia Rowle. Les gens ne t'aiment qu'à partir du moment où tu commences à t'aimer toi-même. » En espérant que cette phrase trouve un sens quelconque, il continua : « C'est comme ça. Puis un jour, le monde est prêt pour t'aimer, et il ne comprend pas comment il ne l'a pas vu avant. » Il se mit à rire, fier de lui : l'éclat de joie dans ses yeux bleus éclaircissait son visage. Lazarus Carrow pouvait avoir l'air d'un gosse lorsqu'il se mettait un rire. Un sale gosse la plupart du temps. « Il y a un moment, il faut arrêter de prendre les cons pour des gens. Ils sont stupides, c'est tout, Lucrezia. Ca ne veut pas dire qu'ils ont raison. Ca veut seulement dire que tu es meilleure qu'eux et qu'ils te haissent pour ça. »

Se moquait-il ? Non, jamais, il ne se moquait pas. Il était d'un tempérament insolent, ce qui était quelque chose de tout à fait différent selon Lazarus. Il ne supportait pas ce non qui n'en était pas un, cette certaine indifférence, mais en même temps, c'était bien pour ça qu'il insistait, moins lourdement peut-être. Etait-ce simplement un instinct primaire ? Non, pas réellement. Il ne voulait pas simplement que Lucrezia Rowle soit à lui, ça aurait été trop simple, finalement. Non, Lazarus voulait qu'elle le croit – et si possible qu'elle arrête ce jeu de séduction désespérant qui ne menait nulle part sinon à une frustration grandissante au vu de ce qu'elle disait. Rien n'était jamais facile en fait, c'était chiant.  Il se demanda si les gens heureux avaient conscience de leur chance, de la facilité, de la simplicité de leur vie. Pourtant, il continua à faire bonne figure. « Tu as tort. Je ne m'intéresse qu'aux femmes exceptionnelles. » Exceptionnellement connes, exceptionnellement nymphomanes, exceptionnellement belles, ou quand il décidait de relever le niveau, exceptionnellement intelligentes. Ou les trois derniers adjectifs à la fois. Il avait besoin de ça, de toute façon, parce qu'il s'ennuyait. Parce qu'il fallait bien avoir un but dans la vie.

Lazarus Carrow était tordu, il fallait bien le dire, et généralement on pouvait qualifier ce type de pervers. Ca aurait pu être facile. Il pouvait l'allonger là, sur le piano, et la prendre comme ça. Mais à quoi bon ? Ca ne l'intéressait pas, en réalité. Non, lui ce qu'il voulait, c'était qu'elle craque, comme toutes les autres, qu'elle dise oui, parce qu'elles disaient toutes oui. C'était ça qui plaisait à Lazarus Carrow, ni plus ni moins. Il secoua la tête et lui offrit de nouveau son sourire de sale gosse. «  Je suis toujours sincère, quand je dis que je veux coucher avec une fille. Je le dis simplement de manière plus ou moins directe.. »

Que dire après ça ? Parler du piano. Oui. Bon. Il fallait s'attendre à ce genre de choses avec lui. Parce que c'était lui. Capable de la plus grande vulgarité et du plus grand raffinement et de passer de l'un à l'autre en moins d'une minute. « Je m'en sors à peu près ; ça me détend de temps en temps. Je dis pas que c'est très bon, mais j'essaye...tiens, écoute, celle-ci t'irait plutôt bien. »

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Lipstick and alcohol.



« I once heard someone say that the concept of moderation seems a little extreme, and tonight... I agree. » Koren Zailckas.

« Je vais te dire un secret, Lucrezia Rowle. Les gens ne t'aiment qu'à partir du moment où tu commences à t'aimer toi-même. » Peut-être. Peut-être pas. Tu ne crois pas que les enfants soient aimés parce qu’ils s’aiment mais parce qu’ils sont, simplement, tous les espoirs de leurs parents. Tu ne crois pas que l’amitié soit basée sur l’amour propre mais sur un partage dont les ressorts t’échappaient en grande partie. « C'est comme ça. Puis un jour, le monde est prêt pour t'aimer, et il ne comprend pas comment il ne l'a pas vu avant. » Le monde ne te verrait jamais autrement. T’aimer ou non n’y changerait rien. Mais Lazarus Carrow semblait sûr de lui. Il avait de l’expérience avec les femmes, avec la société, avec l’ambition aussi. Qui étais-tu pour douter de sa parole ? Seul le silence observateur lui répond. Appuyée contre le piano, tout près, tu sembles plongée dans tes réflexions - ou peut-être est-ce l’effet des quelques gouttes d’alcool. « Ils sont stupides, c'est tout, Lucrezia. Ca ne veut pas dire qu'ils ont raison. Ca veut seulement dire que tu es meilleure qu'eux et qu'ils te haissent pour ça. » Meilleure qu’eux. Tu ne peux que laisser filtrer un sourire en coin, amusée. Flatteur. Est-ce qu’il se jouait de toi ? Est-ce qu’il jouait de ses charmes et de sa maîtrise des mots afin de te faire flancher ? Tu n’étais pas certaine de percevoir les nuances de sa voix. « Tu as tort. Je ne m'intéresse qu'aux femmes exceptionnelles. » Tu fronces les sourcils. Pourquoi ? Qu’est-ce qui, surtout, faisait de toi une femme digne d’intérêt ? Tu avais bien intégré que ton père n’avait pas été réglo, qu’un contentieux s’était glissé entre eux. Une trahison ? Une promesse non tenue ? Quelque chose dans ce goût là. Tu n’avais jamais considéré ton père comme un homme de fougue et d’audace, malheureusement, le cantonnant à l’image du silence froid.

«  Je suis toujours sincère, quand je dis que je veux coucher avec une fille. Je le dis simplement de manière plus ou moins directe.. » Il te déstabilise. Encore. Comment peut-il évoquer de tels faits avec cette décontraction ? Non pas que tu sois particulièrement inculte sur les relations avec les hommes, tu ne comprenais simplement pas que cela fasse tourner le monde. Les doigts d’Ypsös sur ta peau. Ta main se porte à tes tempes, semble masser, avec hésitation, une douleur finalement inexistante. Tu ne voulais juste pas te souvenir des doigts d’Ypsös contre ta gorge délicate, de ses lèvres sur ton épaule. « Je m'en sors à peu près ; ça me détend de temps en temps. Je dis pas que c'est très bon, mais j'essaye...tiens, écoute, celle-ci t'irait plutôt bien. » Oui, le piano, c’est une bonne idée. Quoi que ce soit un peu embarrassant. Pourquoi faire ça ? Il a une belle voix. Un atout étrange pour un homme que tu imaginais bien loin d’une passion artistique. Il était sous-secrétaire d’Etat, il était politicien. Tu n’étais qu’une employée du ministère, certes brillante, mais dont le potentiel était passé sous silence pour d’autres affaires. Que faisiez-vous autour d’un piano, en cette triste veille de St Valentin ? Trop silencieuse. Tu n’as rien dis, tu n’as presque pas donné d’avis. Ton attitude seule laisse filtrer le trouble. « Monsieur Carrow.. je ne tiens pas l’alcool. » Un murmure. Tu as légèrement baissé le visage, incapable de tout à fait contrôler ce que tu voulais, ce que tu espérais - si tant est qu’espérer soit le terme. Espérer la fin d’une solitude.

Tu étais lasse de la solitude. Lasse de cet enfant qui te hantait. Lasse de la guerre et des tensions. Lasse des cauchemars. Oui, tu avouais avoir un peu bu avant de venir, sachant pertinemment que tu perdais en contrôle, dans ces moments-là. Que tu n’étais plus tout à fait la distante fille Rowle. « .. Et je ne veux plus être seule. » Le bout de ton escarpin touche le sol, signe de ta gêne. C’est compliqué, à dire. Aidez-moi. Certes, tu ne le dis pas clairement mais il ne devait pas être novice dans la lecture entre les lignes. Il savait ta détresse psychique, il t’avait vu t’effondrer face à son insistance. Peut-être étais-tu venue pour qu’il t’apprenne, pour qu’il t’enseigne un peu de son art de la confiance. Accepter la proximité de l’autre.

Fourchelangue ; italique.
Souvenirs ; gris clair.
(c) AMIANTE

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