‹ occupation : criminel, propriétaire déchu du Centuries.
‹ maison : Serpentard.
‹ scolarité : 1977 et 1984.
‹ baguette : brisée.
‹ gallions (ʛ) : 5331
‹ réputation : il n'est plus rien, l'héritier réprouvé d'une famille presque extincte, indigne de toute confiance et bon à moisir dans les geôles d'Azkaban.
‹ faits : toujours considéré comme une ordure remplaçable, dans le clan désuni de Voldemort, Rosier est désormais perçu comme un lâche ayant déserté avant la bataille finale. Un monstre qui a abusé de la confiance d'une sorcière honnête (Anna), et un père indigne par-dessus le marché. Nombreux sont ceux qui auraient aimé maintenir la peine de mort jusqu'à ce qu'il y passe.
‹ résidence : Azkaban.
‹ patronus : un vague filet argenté, sans forme ni consistance.
‹ épouvantard : un précipice.
‹ risèd : une plage, avec Anna et Charlotte.
bad blood
In the darkness I will meet my creators And they will all agree, that I’m a suffocator
Une fois n’étant pas coutume, le liesse populaire ne l’avait pas gagné. Et malgré les rires, les danses, ces hypocrites manifestations de joie opportune, il n’avait pas décroché un seul sourire de la soirée – ni à sa charmante suite, ni à ses acolytes – mais accordait en revanche une attention toute particulière à son fond de verre. Les autres lui marmonnaient de se dérider un peu, pointaient du menton de jolies sorcières se trémoussant près des bois et ne purent empêcher quelques remarques grivoises (sinon vulgaires), qu’il ne prit même pas la peine de relever. À force de rouler dans leur orbite, ses billes céruléennes finiraient par se bloquer. En dépit de vaillants efforts, il n’avait réussi à esquiver à la fête – bientôt, les médisants ne tarderaient pas à penser qu’il vivait reclus dans quelque palace abandonné ou, mieux encore, qu’il avait finalement passé la baguette à gauche. Droit à s’en péter la colonne vertébrale, le prince déchu tirait paresseusement sur sa cigarette, sans se résigner à disparaître. De Beltane, il ne gardait que quelques souvenirs fugaces, comme son frère et lui chapardant des couronnes de fleurs ou de la biéraubeurre, alors qu’ils n’avaient même pas l’âge d’y tremper les lèvres. Il se rappelait les couples bravant le feu, la ronde confuse autour des « portes », l’euphorie grisant les sens et emplissant les âmes d’une gaieté retrouvée ; mais l’époque était différente. Aujourd’hui, il ne restait que l’alcool, et Merlin savait que tous les breuvages du monde ne suffiraient pas à tromper son ennui, encore moins sa lucidité. Ces réjouissances le désarçonnaient ; s’étaient-ils tous crevés les yeux ? Ou était-il le seul à sentir les miasmes de misère qu’ils couvraient de fleurs, trop heureux de se vautrer dans le réconfort des traditions ? Le bien et le mal s’étaient confondus au nom d’une coutume millénaire, chacun dansait main dans la main avec son prochain, sans remarquer la marque sombre ornant l’avant-bras du voisin, ou peut-être un capuchon dissimulant trop lourdement un faciès. Rosier secoua la tête et termina sa clope, avant d’être interrompu (dans sa contemplation du néant) par une tape amicale sur son épaule ; un sursaut plus tard, il discutaillait avec… quelqu’un. Dont le nom lui échappait. La faute à une mémoire vacillante ou à une paresse désintéressée. Et il l’aperçut. Kseniya. À l’écart, flanquée de son frangin. Fucking finally, s’intima-t-il, avant d’avaler d’une traite le reste de son hydromel et d’enfoncer sa chope vide dans la cage thoracique de son interlocuteur, qui étouffa un gémissement de surprise. Il lissa inutilement l’impeccable chemise noire puis, sans mot dire, s’aventura parmi la foule en effervescence, mû par une soudaine montée d’adrénaline. Il n’allait certes pas causer un esclandre, mais une colère sourde grondait dans ses entrailles ; il n’avait pas apprécié être doublé de la sorte, surtout par une… gamine. La jolie brune l’avait élu père de son chiard, et s’il avait d’abord pensé que l’ignominieuse paternité lui revenait bel et bien, il refusait cependant d’y croire. Pas lui. Il n’aurait jamais pris le risque d’enfanter un héritier au sang souillé. Il n’était pas con à ce point-là. L’histoire avait eu le temps de s’ébruiter, mais l’écho avait été moindre grâce à quelques habiles faveurs demandées ici et là, pour le salut de sa seule réputation. Witch Weekly avait, paraît-il, tenté de sortir une exclusivité sur la rumeur infondée, sans succès. Pareil à un prédateur guettant sa proie, il parvint à rester hors de son champ de vision grâce à la plèbe surexcitée, et bifurqua au dernier moment, afin de ne pas lui laisser le luxe de s’échapper si jamais ses prunelles croisaient les siennes. Désormais en retrait, Rosier gomina les quelques mèches brunes qui encadraient son visage d’une main désinvolte. Le pas assuré, il avala rapidement la distance qui le séparait de la mère de son enfant (l’ironie même lui filait des sueurs froides) et se planta derrière elle. « Tu comptais te dérober éternellement ? » Lâcha-t-il d’un ton abrupt. Sa bouche s’était tordue en un rictus goguenard. Quand bien même avait-il une vue imprenable sur l’adorable couronne de fleurs qu’elle avait hissée sur le sommet de son crâne, son regard s’évertuait à parcourir les alentours. Moins les badauds leur prêteraient attention (il songeait en particulier aux vipères de l’élite), plus vite il règlerait cette histoire. « Je veux juste parler, » ajouta Rosier, « tu me dois bien ça. » Il recula de deux pas et fouilla ses poches, à la recherche d’une cigarette. « Comment va mon bâtard ? » Mort in utero, j’espère. Ses pupilles dilatées tombèrent sur le ventre de la jeune femme, tandis qu’il approchait sa baguette du cylindre coincé entre ses dents.
Il n'y avait rien à faire, Kseniya ne pouvait s'empêcher de sourire. Malgré toutes ces histoires, malgré ses problèmes, malgré tout, elle rayonnait littéralement de joie de se retrouver ici. Enfin, elle sortait. Enfin, elle voyait du monde. Enfin, elle avait la sensation d'être une femme ordinaire. Parce que, effectivement, sa situation particulière l'obligeait à demeurer à domicile, entre quatre murs. Et cela la rendait vraiment, dingue. Elle savait que c'était le prix à payer mais bon sang. L'image d'un animal prisonnier dans une cage lui revenait sans cesse. Elle était prisonnière, entravée dans tous ses secrets, ses mensonges. Et le plus gros de ses mensonges, sautait aux yeux de tous. Heureusement pour elle, personne ne cherchait plus loin. Personne ne voyait ce qui était dissimulé. Pour le moment, tout marchait comme elle l'avait souhaité. L'issue se rapprochait, toujours un peu plus. Kseniya savait ce qui lui restait à faire. Encore un peu de patience.
Cela faisait cinq mois, déjà. Enfin « déjà » n'était pas vraiment le bon mot... En toute franchise, elle le voyait, le temps qui passait. Les journées se ressemblaient dramatiquement. Elle avait à la fois l'impression que le temps s'écoulait à une lenteur impossible, et d'une rapidité étonnante. C'était plutôt déconcertant. Elle avait eu le temps de se faire à cette idée, qu'elle allait devenir mère. Mais rien à faire, ses doutes ne disparaissaient pas -et c'était plutôt légitime. Comme si le fait d'être enceinte à 21 ans n'était pas suffisamment préoccupant, il fallait prendre en compte le contexte, et tout ce qui s'en rapprochait de près ou de loin. Ce qui formait un tableau plutôt... angoissant, dans l'ensemble. Tout était combiné, entremêlé. Cela la déconcertait toujours, à l'idée que dans quelques mois, un... petit être la considérerait comme sa maman. C'était extrêmement déconcertant en soi. On aurait pu croire qu'elle s'était faite à cette idée, mais non. Tout ce dont elle était sûre, c'était qu'elle ferait tout, pour les protéger, elle et lui. Et Tim, accessoirement, mais ça allait ensemble.
Tandis que ses pensées filaient au loin, elle ne prit pas conscience tout de suite du nouveau venu. Son frère s'était éloigné quelques secondes plus tôt, repérant quelqu'un dans la foule. Le nouvel arrivant devait en avoir profiter, ou peut-être que non. En tout cas, il était là. « Tu comptais te dérober éternellement ? » fit-il. Cette voix. Instantanément, le sang de Kseniya se glaça dans ses veines. Son visage, jusqu'ici enchanté, pâlit brusquement. Kseniya tourna brusquement la tête dans sa direction, et dévisagea Simon, qui lui, affichait une mine goguenard. Du genre, j'ai réussi à te coincer, ma petite. Évidemment, les ennuis se prévoyaient à l'horizon. Comme quoi, cette soirée n'allait pas se dérouler sans embûche... « Simon », fit-elle, pour seule salutation, de sa voix horriblement froide, comme à son habitude. Tout chez elle le démontrait. On lui avait dit, à quelques reprises. Cela ne l'avait pas déconcerté, à l'époque où ils travaillaient encore ensemble au Ministère. Lorsqu'ils se croissaient, parfois, il n'avait jamais pu s'empêcher de la draguer. Il n'avait jamais réussi à l'avoir. Mais ça, il l'ignorait. Et c'était bien mieux comme ça. C'était peut-être petit de l'admettre, mais Simon assurait pleinement le rôle qu'il jouait. Bien qu'il ne soit au courant de rien. Il agissait de manière totalement satisfaisante, aux yeux de Kseniya. Elle avait anticipé sa réaction à l'avance, et c'était ce qui l'avait décidé. Du haut de ses trente et quelques années -soit au moins dix ans de plus qu'elle, Simon s'avérait toujours officiellement célibataire. Cela avait facilité les choses. Kseniya n'aurait pas agi, si cela avait été ainsi. Il voulait juste parler. Soit. Kseniya détourna la tête, alors qu'il arguait qu'elle lui devait bien ça. Elle ne lui devait rien du tout, oui. Mais elle ne pouvait se permettre d'émettre de telles paroles. Les apparences, toujours, et encore. Elle pouvait comprendre sa réaction. Mais cela l'exaspérait. Cela aurait été tellement plus facile s'il en avait réellement rien à faire, et laissé filer. Mais non. La question fusa et Kseniya se raidit. Sa main droite, qu'elle avait posé presque par instinct sur son ventre à son arrivée, se crispa. Un bâtard, c'était ce qu'il était. Un enfant né hors mariage, autant officieusement qu'officiellement. Seulement, elle n'appréciait pas ce mot. « Parfaitement bien, si tu veux savoir » se contenta-t-elle de répondre, d'un air indéchiffrable. Il ne fallait pas qu'on sache qu'elle y était attachée. Cela faisait partie du jeu. Elle masquait ce fait, même aux yeux de ses amis, comme Astoria. C'était ainsi. « Je ne te savais pas si inquiet à son égard » osa-t-elle dire, en le regardant cette fois dans les yeux. L'ironie était clairement perceptible, Kseniya n'étant pas dupe, Simon n'en n'avait strictement rien à faire. Et cela l'arrangeait. Le sais-tu, Simon ? Non. Il l'ignorait. Et cela allait continuer ainsi.
‹ occupation : criminel, propriétaire déchu du Centuries.
‹ maison : Serpentard.
‹ scolarité : 1977 et 1984.
‹ baguette : brisée.
‹ gallions (ʛ) : 5331
‹ réputation : il n'est plus rien, l'héritier réprouvé d'une famille presque extincte, indigne de toute confiance et bon à moisir dans les geôles d'Azkaban.
‹ faits : toujours considéré comme une ordure remplaçable, dans le clan désuni de Voldemort, Rosier est désormais perçu comme un lâche ayant déserté avant la bataille finale. Un monstre qui a abusé de la confiance d'une sorcière honnête (Anna), et un père indigne par-dessus le marché. Nombreux sont ceux qui auraient aimé maintenir la peine de mort jusqu'à ce qu'il y passe.
‹ résidence : Azkaban.
‹ patronus : un vague filet argenté, sans forme ni consistance.
‹ épouvantard : un précipice.
‹ risèd : une plage, avec Anna et Charlotte.
Il n’était pas assez ivre pour cette conversation. Pas assez ivre tout court. Instinctivement, sa main frôla son flanc gauche, où il aurait dû trouver sa flasque s’il portait… s’il portait une veste. Une vague magique, d’une amplitude telle qu’il n’avait jamais connue auparavant, paralysa brièvement ses songes. Il ne portait pas de veste. Il secoua la tête. La sensation fut si fugace qu’il crut l’avoir rêvée. L’orviétan. Une ridule creusa furtivement sa glabelle, tandis que sa dextre revenait se loger dans sa poche de pantalon. Après tout, peut-être n’était-ce pas plus mal qu’il soit armé d’un peu de lucidité pour éviter une scène ; les manifestations publiques comme celles-ci représentaient une publicité dont son alcoolémie se serait volontiers passée. Il reporta son attention sur Kseniya, et sur son regard sombre, qu’en dépit de tous ses efforts, il n’était pas parvenu à éviter, avant de s’humecter les lèvres. Dès lors que la rumeur s’était engouffrée dans les couloirs du Ministère pour finalement lui éclater à la figure, Rosier n’avait cessé de poursuivre la jeune femme, jusqu’à frôler les limites du harcèlement et de l’intimidation (à moins de les avoir allégrement outrepassées). Il voulait savoir – non, il voulait arracher l’embryon de ses entrailles à mains nues afin de s’assurer que cette mauvaise graine n’aille pas salir son nom et sa famille. Elle avait démissionné du jour au lendemain, sans rien démentir, et il avait perdu ses moyens de pression. Pour un peu qu'une organisation féministe lui colle au cul et lui lance des soutiens-gorges à la gueule pour ne pas assumer la responsabilité d'un enfant, il avait préféré faire profil bas, lui aussi. Ignorer la rumeur. Ignorer les murmures. « Cache ta joie, rétorqua-t-il sèchement. Tu avais l’air plus contente de me voir quand j’étais à moitié inconscient. » Quoique. Ce n’était que passablement éméché qu’il était supportable. La pique n’était pas innocente, voilant à peine ce qu’il comptait lui révéler. Il avait beau être solitaire, l’énigme qu’il avait bâtie autour de sa personne était trop entachée par ses frasques pour être sincère. Maintenant que sa vanité avait étouffé les derniers élans d’humilité qui avaient pu le traverser quelques années auparavant, il avait développé un intérêt presque malsain à l’attention que l’on pouvait lui porter, à la publicité que son nom suscitait. Si elle avait jeté son dévolu sur lui, elle n’avait sans doute pas agi par hasard. Insondable, Kseniya arborait une moue agacée qui lui était insupportable. Merlin, aurait-il osé la déranger ? Et le fœtus se portait bien, apparemment. Ses billes azures vagabondaient dans le vide, tandis que ses narines expulsaient de vagues filets grisâtres. Entre ses doigts, le cylindre toxique tremblotait. Sa soudaine nervosité était moins due à cette confrontation qu’au manque qui l’empêchait d’ordonner correctement ses pensées. La sobriété lui allait si mal. « Je suis un futur père excité, que veux-tu. » La plaisanterie était infâme, tant son dégoût était palpable, mais la pointe de sarcasme était étonnamment faible, pour un type qui ne prenait rien au sérieux. Décidé à cesser de tourner autour du pot, il planta ses billes azures dans celles de Kseniya. « Tu me prends vraiment pour le dernier des imbéciles. » Mais il l’avait été, imbécile. Imbécile de s’être laissé submerger par la panique plutôt qu’affronter froidement la situation. Imbécile de ne pas avoir réagi plus tôt. Balayant cette pensée de son esprit, car ce n’était plus son problème désormais, il reformula lentement. « Je sais. » Les syllabes tombèrent sèchement de ses lèvres, qui retrouvèrent rapidement le contact de sa clope – en espérant que la nicotine apaiserait l’adrénaline provoquée par la vérité. « Je sais qu’il n’est pas de moi. » Et cette vérité n’a que le goût âcre de cette cigarette. Rien de plus. Le triomphe ne vint pas déranger ses traits étrangement figés ; non, il recracha un peu de fumée, quelques ronds difformes. Son rictus sardonique avait disparu, et ne restait plus que son regard vague. « Tu aurais dû être plus rigoureuse, » lâcha-t-il dans un marmonnent sibyllin. Il avait fouillé sa pensine de fond en comble pour retrouver le souvenir qui les liait, et il était si intoxiqué cette nuit-là que chasser les relents d’alcool altérant la scène n’avait pas été une mince affaire. Rosier vrilla ses iris électriques vers Kseniya, « tu t’es prise pour qui ? » Il s’était rapproché, alors qu’on ne fumait pas devant une femme enceinte, alors que son langage corporel s’était fait plus menaçant. Tu t’es prise pour qui. Ses doigts s’étaient emparés du poignet de la jeune femme, « tu as cru que tu pourrais foutre en l’air ma vie sans être inquiétée ? » siffla-t-il entre ses dents.
Kseniya gardait son masque, encore, et toujours. Mine de rien, cela s'avérait sacrément utile. Surtout dans ce genre de situations... délicates, dirons-nous. Oui, la situation avait tout de ce qui avait délicat. Mais bon, Kseniya ne pouvait guère s'en étonner. Ce serait le comble. Hypocrite, surtout. C'était elle qui l'avait cherché, c'était elle qui avait orchestré cette mascarade, c'était elle qui l'avait choisi pour cible. Bon, il ne fallait pas croire qu'elle avait fait exprès de tomber enceinte. Franchement, elle s'en serait volontiers passer. Il y avait quelques temps de cela, elle se demandait encore si les personnes qui avaient des enfants à l'heure actuelle n'étaient pas dénuées de bon sens. En vérité, les sangs-purs et les personnes appartenant à la haute société ne risquaient pas grand chose. Ils étaient les préviligiés du système. Pourquoi se dispenser de continuer leur vie comme s'il ne rien était ? Non, c'était les autres, qui étaient concernés. Et Kseniya n'aurait jamais, jamais imaginé faire partie de cette catégorie. Jusqu'ici, elle avait tendance à croire que c'était tout bonnement impossible. Personne n'oserait se mettre dans une situation pareille. Et pourtant. Voici qu'elle se retrouvait confrontée à cela. Comme si sa vie n'était pas suffisamment compliquée. Elle n'avait pas à se plaindre, pourtant. Après tout, depuis toujours, dès sa naissance, même, Kseniya avait été ce qu'on pourrait appeler une privilégiée. A défaut d'être née sang-pur, elle avait le nom d'une famille influente et puissante, bien qu'étrangère. La jeune femme n'avait jamais manqué de rien, se nourrissait à sa faim, avait ce qu'elle souhaitait et avait un toit au-dessus de sa tête. Pendant longtemps, elle avait vécu une vie d’insouciance, noyée dans des mœurs et préceptes qui lui paraissaient aujourd'hui comme absurdes et inadéquats. C'était ça, l'âge adulte. Elle avait suffisamment de moyens pour entrevoir ce qui se cachait derrière tout ça. Elle était grande, dorénavant. Une adulte. Il était plus que temps qu'elle prenne conscience de la réalité du monde dans lequel elle vivait depuis toujours. Même si, en réalité, elle s'était rendue compte de la situation bien avant ses dix-sept ans. Et voilà où cela l'avait amenée : enceinte d'un homme jugé comme étant « impur », autrement dit, indigne de vivre, en restant entourée de personnes qui n'avaient aucun problème à persécuter ce genre de personne. Et qui, risqueraient probablement de mal prendre tous les secrets que leur cachaient la petite cadette. En toute honnêteté, elle ignorait comment ils réagiraient. C'était ça, qui faisait le plus mal. Elle ignorait tout bonnement quelle serait leur réaction. Elle ne pouvait s'imaginer qu'ils le prendraient bien, cela restait inconcevable. Pour autant, elle avait entendu toutes sortes de choses. Qui ne la rassuraient nullement. Par moment, elle croyait connaître sa famille. Niya avait toujours été la petite fille parfaite, qui, tout comme son frère, correspondait aux exigences de leurs aînés. Contrairement à certaines personnes, elle n'avait jamais été battue, ni malmenée, mais choyée. Ses parents l'aimaient. Elle le savait. Tout comme son frère, à sa manière. Cependant... Trop de choses avaient changé, depuis l'avènement du Seigneur des Ténèbres. Au point qu'elle ne reconnaissait plus son frère, au point qu'elle venait à douter de son paternel. C'est pourquoi, elle avait soigneusement caché la vérité, afin d'éviter tous les risques possibles et les multiples hypothèses qu'elle avait eu le temps de se faire. Évidemment, ils n'avaient pas pour autant bien pris la nouvelle. Pendant un certain temps, son père l'avait tout simplement ignoré. Pour finalement s'adoucir plus ou moins. Parce que le « père », que Kseniya prétendait, était un sang-pur, appartenant à la noble famille Rosier. Et, concernant son frère... Elle avait encaissé ses remarques, ses reproches, ses discours moraliseurs, ses regards, son attitude. Et cela continuait encore, mais moins. Encore une fois, il le tolérait. Mais pour la même raison que son père. Combien de fois l'avait-elle entendu promulguer des paroles choquantes à ses yeux ? Elle ne comptait plus. Et la jeune femme était consciente qu'il le pensait. Alexei ne parlait jamais inutilement. Il pensait chaque mot qu'il prononçait, lorsque ce n'était pas ironique. Alors, comment réagirait-il en apprenant la terrible vérité ? Mal, sans aucun doute.
Ironiquement, elle devait sa situation « améliorée » grâce à cet individu qu'elle méprisait ouvertement. Mais, elle-même devait reconnaître qu'il lui avait rendu un grand service, même s'il l'ignorait et qu'elle s'était royalement passé de lui demander la permission. Et pour le moment, il se comportait parfaitement comme elle l'avait souhaité : il se contentait d'ignorer. C'était sans compter ses multiples efforts pour entrer en contact avec elle et avoir des explications, ce que Kseniya avait toujours plus ou moins refusé et l'avait évité. Il n'avait pas abandonné. Normal, après tout. Elle n'en n'attendait pas moins de lui. Patience, ce sera bientôt fini pour toi, et tu pourras retourner à ta petite vie. Il suffisait d'attendre encore quelques mois. Ensuite, si tout marchait comme prévu, tout le monde serait convaincu que l'enfant n'avait pas survécu. Simon ne serait plus inquiété et elle, serait libérée. C'était simple, non ? En attendant, rien ne devait gâcher ses plans. C'est pourquoi, Kseniya ne répliqua pas comme elle l'aurait voulu. A la place, elle se contenta de l'ignorer royalement. Elle observait les passants d'un air presque ennuyé. Les bras croisés en position défensive, elle ne s'attendait pas à voir ça. Tim. Main dans la main avec... Lola ? Un instant, ses yeux s'écarquillèrent. La seconde suivante, ils avaient disparu, à travers la foule. Elle crut que son cœur avait raté un battement. Voire plusieurs, tant la surprise était énorme. Elle ne comprenait rien. Comment cela pouvait-il être possible ? Bien entendu, elle était au courant qu'il avait été racheté. Cela l'avait inquiété, d'ailleurs. La jeune femme n'avait pas entendu beaucoup de précisions de la part de son propriétaire. Après tout, ce n'était qu'un rebut, aux yeux des autres. Pour elle, il s'agissait de tout autre chose. Mais il valait bien mieux qu'ils l'ignorent. De ce fait, elle avait dû gardé le silence et sa curiosité sous muselière. Cela signifiait que Loletina s'avérait le nouveau propriétaire ? Sans aucun doute. Un rebut ne pouvait pas se rendre dans de tels événements sans son « maître », comme on l'appelait. Un frisson la parcourut, en prenant conscience qu'ils n'avaient pas l'air d'entretenir le genre de relation qu'on attendait, entre un maître et son esclave. Ils en venaient même à se prendre la main en public. Passé la surprise, la colère menaçait de l'engloutir. Non, ce n'était pas le moment. Bordel, pourquoi fallait-il qu'elle assiste à ça, à ce moment précis ? Elle ne pouvait pas se permettre d'y penser maintenant. Ni même trop longuement. Sinon, si elle se laissait influencée par ses émotions, ça ne donnerait absolument rien de bon. Kseniya devait y réfléchir plus tard, bien plus tard. Une fois seule et à l'abri des regards. Pour le moment, elle devait garder l'esprit clair. Alors, elle fit de son mieux pour se calmer et, la seconde d'après, son visage retrouva son impassibilité habituelle. Sauf, que son regard se faisait nettement plus dur, acéré. On lui avait souvent fait la remarque que son regard pouvait intimider les gens. Tant mieux. On évitait de lui chercher des noises, au moins.
Kseniya lui jeta à peine un regard en entendant sa réplique. « Je veux bien te croire » répondit-elle, sur un ton blasé. Tu parles... Si cela avait été réellement fondé, il aurait fait un père excécrable. En même temps, on ne pouvait même pas parler d'amour. Pour Simon, il ne s'agissait que d'attirance physique, rien de plus. Si encore elle avait été de sang-pur, peut-être se serait-il comporté différemment. Elle l'ignorait et, honnêtement, s'en fichait. Ce n'était pas comme si elle rêvait de faire un enfant avec cet homme-là. Non, un faux père, pour quelques temps, oui. Mais cela s'arrêtait là. D'ailleurs, ce dernier se planta juste sous son nez, afin de braquer son regard dans le sien. « Tu me prends vraiment pour le dernier des imbéciles. » Kseniya se contenta d'arquer un sourcil, moyennement intéressée par ce qu'il racontait. Décidément, il avait décidé de l'ennuyer jusqu'au bout. Ma foi, elle lui devait bien ça. On allait dire ça. Il allait falloir qu'elle le supporte et l'affronte. Elle ne pouvait plus fuir. C'est là, qu'il reprit, nettement plus lentement, cette fois-ci : « Je sais ». Malgré elle, Kseniya se raidit. Ces deux mots, elle les avait longtemps rêvé. Ou plutôt cauchemardé. Prononcés par ses proches, qui apprenaient tous les secrets que Kseniya avait soigneusement enterré. Et aujourd'hui, c'était Simon qui les prononçait, rendant son cauchemar réalité. « Sois plus clair, ne parles pas à demi-mot. C'est agaçant. » On pouvait croire qu'elle adoptait un ton hautain, mais elle essayait juste de masquer sa panique, tant bien que mal. Fort heureusement, Kseniya excellait dans l'art de masquer ses émotions. Simon ne pouvait rien déceler. Absolument rien. Il amena la cigarette à ses lèvres, avant de poursuivre les mots fatidiques. Je sais qu'il n'est pas de moi. Non. Pitié, pas maintenant. Comment avait-il pu … ? Elle l'ignorait, mais peu importe. Ce n'était pas important le « comment ». Le résultat s'avérait bien là : Il savait. Ses mains tremblaient, elle serra plus fort ses bras autour d'elle. Ne rien montrer. « Tu aurais dû être plus rigoureuse » « Je ne vois pas de quoi tu parles » Elle alla même jusqu'à afficher un rictus moqueur « Cela ne m'étonne pas vraiment de toi, de te décharger de tes responsabilités. Tu es toujours le même ». Toutefois, la réaction qu'il eut la déconcerta légèrement. Maintenant, il se rapprochait, adoptant volontairement un air menaçant. Kseniya serra les dents « N'approches pas ». Ne rien montrer. Sans qu'elle puisse réagir, il s'était saisi de son poignet. « Tu as cru que tu pourrais foutre en l’air ma vie sans être inquiétée ? » siffla-t-il, instantanément. Elle réprima un haut le cœur de dégoût, à cause de la fumée de la cigarette. « Lâche-moi » fit-elle en essayant de se dégager, mais il ne lâchait pas prise. Elle le regarda dans les yeux et poursuivit : « Recules. Tu empestes » , d'une voix froide, et elle fit un geste brusque pour qu'il la lâche. Il ignorait donc tout, ce crétin ? On ne fume pas devant une femme enceinte. A croire qu'on ne lui avait rien appris. En même temps, il s'en fichait, et ça se comprenait. Il était en colère. Et il fallait absolument désamorcer cette bombe qui menaçait de lui éclater en pleine figure.
Kseniya garda son calme, malgré le risque qu'elle encourrait, en cet instant. Sans un mot de plus, elle lui prit le bras et l'emmena plus loin. Elle ne tenait pas vraiment à ce qu'on surprenne leur conversation. Quelques pas de plus, et ils se retrouvaient dans une ruelle adjacente. Ce n'était pas forcément la meilleure idée du siècle de s'isoler avec lui, mais il fallait qu'elle règle cette affaire rapidement. Niya le lâcha subitement, une fois qu'ils furent seuls, et continua sur sa lancée : « Ne joues pas les victimes, et n'essaye pas de fuir tes responsabilités. Ce n'est pas en prétendant le contraire que ça va changer grand chose, navrée pour toi » Les derniers mots sonnaient clairement comme étant ironiques. Le reste de ses paroles ne trahissait nullement sa panique, sa nervosité ou son angoisse. Elle parlait froidement, le dévisageait de même et son visage ne montrait rien. Kseniya le fixait, les yeux dans les yeux, attendant de connaître sa réaction. Que savait-il, au juste ? Elle avait besoin de le savoir, afin d'agir au mieux... et d'anéantir tout risque qui menaçait son plan soigneusement élaboré.
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