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erin & nathan
we've come a long way from where we began


15 juillet 2002
On le disait trop froid, trop impassible. Pas assez chaleureux, pas assez impliqué. Trop méprisant et, par conséquent, trop méprisable. Oh certes, il n’allait pas les contredire ; son but n’était pas de faire copain-copain avec tous les Insurgés – il laissait ça aux Pacifistes – mais plutôt de faire bouger les choses, avec l’aide des Insurgés. Et bien qu’à l’heure actuelle, les Silencieux constituaient sa famille, ou ce qui s’en rapprochait le plus, Nathaníel préférait garder ses distances avec la majorité d’entre eux, et de les apprécier de loin. Un leader ne pouvait pas trop s’attacher, mais cela ne voulait pas dire qu’il fallait carrément ignorer tout le monde ; Nathan savait se faire obligeant et politiquement correct quand les temps le demandaient. Et puis, mine de rien, il n’était pas si impassible que ça, enfin… pas vraiment.
Le problème en fait, c’était que, parfois, il fallait bien faire des efforts. Parfois, le passé, il resurgissait du jour au lendemain, souvent sous la forme d’une personne. Un ancien ami, à tout hasard. Quelqu’un que vous aviez presque lâchement abandonné, partant faire votre vie de votre côté sans daigner une seule fois donner des nouvelles. Disparaître, couper les ponts ; à une époque, à sa sortie de Poudlard, entre autres, il avait été le Roi en la matière, même si la personne comptait énormément.
Avec l’arrivée massive de nouveaux Insurgés – les Métamorphes et les Nocturnes, puis les Pacifistes – il avait reconnu plusieurs têtes, et pas uniquement des gens qu’il avait un jour apprécié un tant soit peu. Mais il n’avait pas fait d’efforts pour eux, c’était trop lointain, cette époque et, en plus, il avait d’autres chats à fouetter que de reprendre contact avec tout le monde. Mais ça le faisait réfléchir. Autant avoir des alliés de taille constituait une menace pour soi-même, parce que tout le monde pouvait tomber entre les mains du Gouvernement et tout le monde pouvait plier sous la torture et qu’un nom était si simple à balancer, autant cela représentait finalement une protection supplémentaire, une aide, un soutien, des gens sur qui compter.
Cela faisait un an et demi qu’il avait succédé à Henry Wilkes, l’ancien chef des Silencieux. Il avait fallu un moment pour que ces derniers l’acceptent lui, notamment parce qu’ils n’oubliaient pas qu’il avait été Belliqueux, juste avant, qu’il avait fait des erreurs. Finalement, à coups d’arguments, à coups d’ambition, à coups de belles paroles, il y avait accédé, à ce grade. Aujourd’hui, il ne voyait pas les choses être autrement, et il prenait son rôle très à cœur.
Mais voilà, le fameux problème était arrivé. Enfin, ce n’était pas très glorieux comme titre pour la personne en question, je vous l’accorde. Le problème, c’était qu’au sein même des Silencieux, il y avait cette fille, Erin, et qu’Erin, eh bien, elle faisait partie de ceux qu’il avait laissé tomber dix ans auparavant. Alors que l’ex-Poufsouffle l’avait aidé, avait été comme un souffle de fraicheur dans sa dernière année scolaire, alors qu’il passait ses mois à chercher un moyen de se détruire, magie noire et compagnie. Et Erin, avec sa passion pour l’animagie, oui, elle l’avait éloigné inconsciemment de tout ça, le temps de quelques heures à discuter de tout et de rien, à raconter leur vie, à sourire même, à rire.
Et lui, il l’avait laissée tomber.
Même en la revoyant dans les rangs des Silencieux, il l’avait ignorée. Oh, il avait été poli, mais il avait aussi été lâche, et l’était toujours d’ailleurs, incapable d’aborder la demoiselle. Alors que, il devait se le dire, il lui devait une fière chandelle et ne pas rembourser une dette était quelque chose qui avait tendance à le mettre mal à l’aise.
Ca, et puis prendre son courage à deux mains. Et tout seul, sans l’aide de personne, tiens, pas même d’Iliana. Quelle ironie, leader d’un groupe rebelle, avec du sang sur les mains, et même pas fichu d’aller dire bonjour à une amie de son passé. Vive le courage, fiston, bravo. Après, ce genre de situations sociales, ce n’était pas du tout sa came, encore moins aujourd’hui.
Alors, après un an et demi, il avait finalement décidé de briser la glace, effacer ce fichu malaise qui, au final, ne devait provenir que de lui, lui et ses remords à la con, lui et son incapacité à prononcer le mot « Pardon ». Bon, il lui fallut quand même un bon moment, devant la tente aménagée d’Erin, avant de se lancer en ayant pourtant prié les dieux pour qu’elle ne soit pas à l’intérieur. Mais raté. Parce qu’elle était bien là, et maintenant, il ne pouvait plus faire marche arrière. Quel courage de pacotille. Et un fin sourire au coin pour cacher ça, allez. « Salut. » Ridicule. Pathétique. À mourir de rire. Oh, il était bien beau, le Nathan, avec ses discours de motivation, son drapeau rouge, ses tags anti-Mangemorts, son envie de brûler vif chaque Mangemort et plus particulièrement la Face-de-Serpent, son air à la fois de glace et de feu, ses ambitions, sa détermination, peser le pour et le contre à chaque fois afin de ne pas se laisser bouffer par sa haine et sa rage… mais dès qu’il fallait un peu y aller avec le courage, c’était fini. D’ailleurs, il ne sut même plus pourquoi il avait décidé de venir voir Erin, et songea grandement à repartir comme si de rien n’était, mais sa fierté l’en empêcha tout de même.



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Ces temps ne sont guère joyeux. Trop de morts, trop d'horreurs, trop de choses que ton esprit pacifique peinait à appréhender. Chaque matin depuis... - Oh, combien de temps déjà ? Tu ne sais plus... Beaucoup trop. Chaque matin depuis le début de cette maudite guerre, tu t'es levée avec l'espoir improbable que tout ça ne soit qu'une sombre plaisanterie, une vaste farce de mauvais goût touchant enfin à sa chute. Mais il n'en est rien. Chaque jour voit venir son lot de mauvaises nouvelles, d'actes violents et d'absurdités. Et vos vies semblent prises au piège des évènements qui se bousculent, toujours plus affreux, toujours plus difficiles à accepter.
Tu ne te souviens pas de la première guerre. Tu n'avais que six ans - peut-être sept - quand le Survivant a mis fin à tout cela bien involontairement. Tu te rappelles seulement de quelques murmures, des imprécations de colère de ta mère... De si peu. Tes connaissances de cette époque sombre, tu les tires des livres, de quelques témoignages et jusqu'au retour de Celui-Dont-Il-Ne-Faut-Pas-Prononcer-Le-Nom tu croyais en percevoir toute la noirceur. Tu avais tort. Rien ne te préparait à ce qui se joue réellement autour de vous. Et tu ne t'y accoutumeras sans doute jamais.

Aujourd'hui pourtant, tu t'es levée sourire aux lèvres. Sans raison particulière. Peut-être seulement le plaisir de voir les rayons du soleil percer le ciel estival. Peut-être le besoin de n'être pas accablée à tout moment. L'angoisse et le chagrin pèsent trop lourds pour être des compagnons de route enviables. Alors toute à savourer cette belle humeur inattendue, tu t'es occupée avec obstination pour ne pas laisser la place aux sombres pensées dont tu es devenue coutumière. Et comme premier objectif de la journée, tu as décidé de remettre en semblant d'ordre dans la tente que tu partages avec ta cousine et qui a tôt fait de ressembler à un champ de bataille quand vous n'y prenez pas garde. Mais il y a toujours tant à faire, tant à gérer qu'un brin de ménage peut sembler étrangement... normal.
Toute à ta tentative de séparer les chaussettes sales des propres, tu n'entends pas immédiatement l'arrivée d'un visiteur. Tes yeux se lèvent pour tomber sur le leader du groupe auquel tu réponds sobrement « Salut. ». Puis tu ajoutes - déjà revenue à tes chaussettes : « Adele n'est pas là. Une mission de ravitaillement je crois. » Ta cousine est bien plus efficace et investie que toi au sein du groupe et il si fréquent que l'on vienne te voir dans l'espoir que tu connaitras par cœur son emploi du temps - ce qui est le cas la plupart du temps - que pas une seconde, l'idée te vient qu'il puisse être là pour te voir. Lui moins que tout autre.
La défection de Nathaniel reste une plaie ouverte. Tu ne lui as jamais tenu rigueur de son silence après Poudlard. Il n'est ni le premier, ni le dernier que tu auras perdu de vue vos études achevées. C'est sa froideur, son indifférence qui te blesse, depuis que vos regards se sont de nouveau croisés au sein du camp. Au cours de tous ces mois, il ne t'a jamais adressé la parole sinon pour te confier une tâche - quand il ne se contentait pas simplement d'envoyer quelqu'un te prévenir. Un moment durant, tu as songé que peut-être tu étais fautive, responsable de cette attitude. Une idée refusée à grands cris par ta cousine qui a simplement conclut avec sa virulence coutumière : « Ne cherche pas, ce n'est qu'un abruti de Serpentard ! ». Alors tu n'as pas cherché. Pas essayé de lui parler. Tu t'es contentée de vivre à quelques mètres de lui en t'interrogeant. Encore et toujours
Tes chaussettes enfin triées, tu te retournes pour les ranger, constatant qu'il n'a pas bougé de l'entrée de la tente dans une attitude qui te laisse perplexe. « Tu cherches quelque chose ? »
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