« I'm longing to be free, I won't let you fade away»
feat. Alan R. Ancrath
Ses vœux peuvent être vaporeux par instant, enfouis en elle, prisonniers de sa culture, d'un idéal suranné, usé par la guerre. Ils n'ont cessé de s'imposer à elle depuis que le belliqueux est entré dans son champ de vision. C'est sa chance. Ils ont gonflé sa poitrine et gagné en intensité lorsqu'il l'a forcée à utiliser sa baguette, la mettant au pied du mur. Il l'a obligée à écarter la poussière et les débris. Et sous cette couche crasseuse, elle a découvert des cendres encore chaudes, vestiges d'une flamme déclinante qui ne s'est pas encore tout à fait éteinte. Il reste donc un espoir. Ginny s'accroche à ce constat, cligne légèrement des yeux, observe son vis à vis puis la forêt qui les entoure, comme si elle se réveillait d'un mauvais rêve.
«
Je vais t'apprendre tout ce que tu as besoin d'apprendre. » Ginny rive un regard clair vers Alan, et sa respiration s'accélère légèrement lorsqu'il se penche vers elle. Le sentiment de vivre un moment charnière de son existence la submerge, fait un instant papillonner son esprit, tandis que le sorcier adopte une attitude plus menaçante. «
Mais ne compte pas sur moi pour te ménager. Je ne montrerai aucune pitié envers toi et la faiblesse ne sera pas tolérée. De l'autre côté elle ne l'est pas non plus de toute façon. » Ginny soutient son regard et son timbre caverneux, sent ses paupières céder légèrement, mais s'acharne à les maintenir ouvertes, à l'instar de son esprit mutilé. L'insurgé remet à nouveau de la distance entre eux, se redressant tout en lâchant sa main. Ginny n'insiste pas, mais ne le quitte pas des yeux. Il range prudemment sa baguette. Lui qui a pourtant précisé qu'il ne fallait la lâcher sous aucun prétexte. Un soupçon d'ironie et d'amusement se fraye un chemin sur le visage de la rouquine, sans que le moindre sourire n'en vienne à étirer ses lèvres. En revanche, son sourcil droit s'arque de manière expressive alors qu'elle observe l'insurgé, qui déchire en deux le ruban rouge qui lui ceignait jusque là la taille. Il lui tend l'un des deux morceaux obtenus, mais Ginny peine à comprendre le geste. Elle l'interroge alors du regard, dubitative. «
Peut-être que tu n'aimes pas les histoires de clan, mais on a besoin de ça pour savoir que tu es une insurgée. Pour savoir que tu es avec moi. Ce n'est pas négociable. Peu importe sa couleur, ce morceau de tissu maintenant, c'est ta fierté. C'est ton symbole et ton idéal. » Il ne lui laisse pas le temps de réagir, d'accepter le présent. Ginny est trop interloquée et malhabile. Il attrape sa main et place le tissu rouge dans sa paume. Ses pupilles se figent alors dessus, se perdent dans les reliefs écarlates qu'il forme sur sa peau. Ses doigts se resserrent sur la prise, et elle relève le regard lorsque Alan termine d'attacher le morceau de tissu qui lui reste à sa ceinture. «
Je ne suis pas un planqué. Ce que tu vas vivre avec moi, ça ne ressemblera pas à ce que tu as déjà connu. Je vais te mettre en danger et tu devras réagir vite et sans aucune hésitation. Compris ? Sinon t'es morte. » Les choses ont le mérite d'être claires. Son poing se referme complètement sur le morceau de ruban rouge, et elle acquiesce fermement de la tête.
«
Ce n'est pas le bon endroit pour parler de ça. Attrape mon bras et accroche toi, on va transplaner ensemble. » Il s'agite, a repris sa baguette, le regard à l’affût. Ginny ne songe pas à considérer cette attitude à la légère. Elle a compris qu'à défaut de s'offrir le luxe de lui faire confiance, elle peut au moins se fier à lui pour jauger le danger, et déterminer s'il est utile ou non de s'y exposer. Pourtant, elle ne s’exécute pas immédiatement. Docile par habitude, la méfiance reste le premier de ses réflexes. Elle fronce les sourcils, et observe plus attentivement l'insurgé. Ginny a l'allure du chat échaudé. Comme lui, elle craint de tomber dans un nouveau piège, la mémoire longue, la suspicion tenace, et le pardon revêche. «
Pour aller où ? » Les mots découpés, sombres, Ginny a sorti les griffes, et elles en lacèrent presque le ruban prisonnier de son poing.
«
Cet endroit vaut bien ceux où tu voudras m'emmener. » Elle ne réalise qu'alors son passage du vouvoiement au tutoiement, presque naturellement. «
Il n'y a pas âme qui vive à des miles et des miles à la ronde. » Son regard électrise et sa voix est piquante et âpre. Ginny en a fini de se laisser faire. Elle n'a pas fui pour être réduite en esclavage à nouveau. «
J'ai connu suffisamment de prisons, je suis prête à apprendre, mais pas à te suivre aveuglément n'importe où. » Elle tient à mettre les points sur les i. Si Alan pense avoir trouvé l'élève modèle, il se trompe. Scar n'est pas Ginny, cette gryffondor brillante à qui tout réussi. «
Je porterai ça. » Elle lève la main droite, et laisse son ruban balancer dans le vide. «
Si c'est une condition, je veux bien jouer le jeu, et laisser croire que je tiens à ce ruban plus qu'à la vie. » Sceptique, Scar plisse les yeux, puis noue le ruban autour de son poignet gauche. Elle relève un regard soudain téméraire vers Alan, laisse le silence s'installer quelques secondes, ses oreilles à l’affût du moindre bruit. «
Mais je veux pas être au service de qui que ... » Elle s'interrompt brusquement, son ouïe ayant perçu un frémissement dans les feuillages. Elle extirpe sans un mot supplémentaire sa baguette de sa veste, puis fait volte face, tournant le dos à Alan, se focalisant sur l'origine du bruit. Des pas lui parviennent distinctement aux oreilles, et elle s'accroupit juste à temps pour éviter un sort qui lui serait arrivé droit au visage. Elle se tourne vers l'insurgé, s'inquiète visuellement de son état mais surtout se redresse légèrement pour lui attraper le bras. «
Ok, allons-y ! » L'empressement dans la voix et sur le visage, les yeux de Ginny supplient Alan de les sortir de cette embuscade.