Le jour J était arrivé. J’avais fait tous les papiers pour que Severus soit tranquille et puisse faire ses cours à Poudlard sans être inquiété de la paperasse d’un décès. Ce n’était pas mon rôle mais, a force de passer du temps avec Eileen, j’avais l’impression de faire un peu partie de cette famille malgré tout. Cette famille déchirée que j’avais étrangement l’impression de connaitre… La veille de la crémation j’avais apporté des affaires qu’Eileen aimait particulièrement pour qu’elle puisse être habillée correctement pour son dernier face à face avec son fils et j’avais donné les consignes au personnel des pompes funèbres pour s’occuper de son corps : simple. Surtout un maquillage simple. Cela me faisait étrange de parler du maquillage d’un mort mais c’était ainsi, même dans la mort on avait le droit d’avoir sa dignité et je savais que c’était très important pour cette femme qui, malgré sa déchéance, avait toujours essayé de rester une femme digne et qui l’avait été avant de sombrer face à un mari non aimant et un fils ayant choisi une voie qu’elle ne pouvait pas comprendre.
Simple mais digne.
Simple mais fière.
Simple mais maternelle.
Simplement Eileen quoi.

Elle m’avait parlé de son amour pour les jonquilles aussi je pris le temps d’en trouver de magnifiques pour que, le jour J, elle puisse en avoir avec elle. Cela me prit une partie de la matinée puis je fis mes consultations que je terminais fort tard comme j’avais pris du retard. A peine rentrée à la maison ma fille me sauta dans les bras suivant de son père qui m’embrassa avec douceur. ▪▪▪ Tu en fais trop chérie. ▪▪▪ J’aimais beaucoup cette femme. ▪▪▪ Plus les années passent et mieux je comprends pourquoi tu as voulu partir de Ste Mangouste. Tu es trop... ▪▪▪ empathique je sais ▪▪▪ Et c’est pour ça que je t’aime. ▪▪▪ Je l’embrassais avec douceur avant de partir jouer avec ma fille avant de la coucher. Pour quelques heures j’oubliais tout et je pris le temps de profiter des deux amours de ma vie : Dora et Ted. Plus tard, appuyée contre le chambranle de la porte, je regardais Ted raconter l’histoire du soir à ma fille en me disant que j’avais fait le bon choix. Quand je voyais la vie d’Eileen qui s’était mariée a un homme qui ne la comprenait pas et qui avait entrainé la chute de son fils je me disais que j’avais eu raison de partir de ma famille. J’avais pu choisir un homme qui me comprenait sans que j’ai besoin de parler et je pouvais élever ma fille dans un univers sain et plein d’amour. J’espérais bien que cela la sauve du chagrin…

Le lendemain j’étais là avant que Severus arrive et je vérifiais que toutes mes demandes avaient été respectées. Tout était parfait et quand le fils d’Eileen arriva il trouva sa mère reposant sur une jolie couche, habillée de sa tenue préférée, des jonquilles dans les mains et l’air apaisé. Je posais ma main sur son épaule en signe de réconfort avant de partir car je voulais qu’il puisse rester un moment avec sa mère pour ce dernier moment. Nous avions convenu de notre rendez vous à Whitstable dans une demi heure aussi j’allais vérifier que tous les papiers étaient en règle avant de sortir de l’endroit et de transplaner directement dans le quartier sorcier de cette petite ville. Je regardais autour de moi comme pour m’imprégner de l’ambiance. C’était doux et chaleureux. Je comprenais que l’endroit ait plu à Eileen car on se sentait tout de suite bien, un sourire sur les lèvres. Je pris le chemin de la plage puisque c’était ce qu’elle désirait et fit le tour pour repérer un endroit parfait pour pouvoir éparpiller les cendres sans gêner et être gêné. La petite ville côtière regorgeait de criques aussi j’en repérais une très bien et revins vers notre point de rendez vous. Je m’étais habillée simplement mais tout en noir pour cette journée bien particulière et respirais profondément l’air iodé. Je fermais quelques instants les yeux. ▪▪▪ Vous aviez raison vous serez bien là Eileen… ▪▪▪ murmurais-je sans me rendre compte que Severus était arrivé. Sa présence me fit sursauter. ▪▪▪ Oh je ne vous avais pas entendu arriver ! ▪▪▪ Je lui adressais un doux sourire avant de lui montrer de la main une petite crique un peu plus loin. ▪▪▪ Je pense qu’on sera bien là bas, si ça vous convient. ▪▪▪ Je n’osais demander comment cela s’était passé, ne voulant pas être indiscrète.

Fou. Imprégné d'une aberration fort désagréable, le temps s'était comme arrêté. Et pourtant les jours s’enchaînaient. Rien n'aurait pu justifier le comportement de Severus aux yeux du Lord. Rien n'aurait jamais laissé croire au sorcier lui même qu'il aurait été affecté de la sorte. Troublé. Il revoyait sans cesse sa mère, terriblement jeune, terriblement malheureuse et lui, si épanoui. Snape n'avait pas eu une enfance joyeuse mais Poudlard, son échappatoire, lui avait permis de relativiser. De s'éloigner de l'enfer et par la même occasion de ne pas se soucier de l'état de sa génitrice. Après tout n'était-ce pas aux parents de s'occuper de leurs enfants et non l'inverse? Le professeur de potions avait réalisé, bien trop tard, qu'Eileen avait tout donné pour lui. Ses rares bons souvenirs émanant d'avant ses dix ans le liait à Lily et à sa mère. Rien de moins, rien de plus.

L'homme avait divagué des heures durant, découvrant mal à l'aise le petit carnet recelant de trésors. Il n'était pas curieux de nature et n'avait pas forcément envie de réaliser à côté de quoi il était passé. Il aurait pu passer un temps infini à se délecter de l'écriture caractéristique d'Eileen. Et il ne pouvait se permettre d'avoir l'esprit ailleurs aussi longtemps. Severus ne voulait tout simplement plus en entendre parler. Cet événement l'avait atteint bien malgré lui et il détestait cela. Il était temps que cette histoire en finisse. Et au plus grand des hasards professionnalisme d'Andromeda le grand jour approchait.

Snape salua la sorcière à son arrivée et celle-ci déposa une main réconfortante sur son épaule. Ça ne le dérangeait pas, ça ne le marquait pas plus particulièrement. C'était un geste attentionné de sa part et il n'avait pas envie de l'éloigner ou de la repousser. La sorcière finit par entreprendre de le laisser seul dans ces derniers instants avec sa génitrice. Il détesta cet instant, ce lieu, ce moment. Il ne voulait plus être confronté à ce qu'il se refusait d'admettre. Perdre quelqu'un ça fait mal, point. Le fils sous le coup de l'émotion avait laissé place au sorcier froid et plongé dans un déni profond. Après tout il ne l'avait plus vue depuis des mois, il ne l'avait jamais vraiment connue, c'était une étrangère. Une protectrice face à la violence. Une étrangère sympathique de qui Severus s'était détaché dés son entrée à Poudlard. Le mangemort finit par déposer le petit carnet entre les mains d'Eileen puis la confia aux sorciers chargés de l'incinérer. L'opération fut rapide et Severus s'empressa de transplaner au point de rendez-vous convenu avec Andromeda. « « Vous aviez raison vous serez bien là Eileen…  » » Sans doute n'aurait-il pas dû entendre... Car des deux ce fut bien lui le plus gêné. Déterminé à en finir il en avait presque oublié qu'il avait embarqué la Tonks dans son périple. L'incroyable, la gentille, l'irréprochable Andromeda. L'oreille qui avait été à son écoute. La femme qui avait accompagné Eileen dans son dernier souffle pendant des mois entiers. Le sorcier refusait de se considérer comme antipathique. Autant il s'agissait du comportement à employer en tant que membre du Cercle, autant auprès de n'importe quel sorcier la situation lui semblait inconfortable. « Oh je ne vous avais pas entendu arriver ! » S'excusa la sorcière. La gorge de Snape était serrée et encore indécise sur la manière de gérer la situation. Il préféra donc se taire faisant comprendre à la Tonks d'un regard qu'elle n'avait pas à se sentir gênée ou encore maladroite. En vérité c'était la situation qui s'y prêtait, il n'y avait rien de normal ou conventionnel à côtoyer la mort de la sorte. Chacun rencontre cette situation mais aucun ne veut en faire son quotidien. « Je pense qu’on sera bien là bas, si ça vous convient. » « Aucun doute. » Répondit-il dans un souffle suivant du regard l'endroit désigné par la femme. Il s'agissait d'une crique dissimulée et à l'écart de la plage. Le vent fouettait violemment le visage de Snape, comme pour le remettre à sa place. Lui ouvrir les yeux pour ne pas regretter plus tard.

Le professeur se dirigea sans se faire prier vers le lieu désigné, tenant avec précaution dans sa main gauche l'urne funéraire. C'était bizarre, étrange presque inconvenant et maladroit à ses yeux. Sans doute n'était-il ni le premier ni le dernier dans cette drôle de posture. Se rapprochant des rochers, Severus réalisa ce qu'il était prêt à faire. Ou plutôt ce qu'il était incapable d'effectuer. Le vent s'engouffrait sous sa large cape noire et, replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille il détailla du coin de l’œil Andromeda. Qu'avait-il fait pour mériter autant d'attention et de bonté de la part de la jeune femme? Après quoi il se souvint que si elle faisait tout ça c'était avant tout pour Eileen et non pour lui. Comment allait-il lui demander ce qu'il avait en tête. Cette fois-ci un regard ne suffirait pas et il était hors de question de tendre d'un geste maladroit l'urne où reposaient les cendres de sa mère en direction de la Tonks; celle qui avait dévoué un temps infini aussi bien à la mère que finalement au fils. « Je suis désolé mais je n'ai jamais fait ça. Et... vous comprenez je ne voudrai pas mal faire. »

▪▪▪ Aucun doute. ▪▪▪ Comme toujours le fils d’Eileen ne cherchait pas à me contredire et se contentait de me suivre dans cette petite crique que je venais de repérer. Il semblait voguer entre plusieurs sentiments sans que je puisse réellement savoir ce qu’il ressentait et j’avais rarement eu une personne aussi difficile à cerner que Severus mais j’étais pourtant persuadée qu’il était triste de la mort de sa mère mais peut être me trompais je… En attendant je faisais comme si c’était un membre de ma propre famille et étais heureuse d’être là. J’avais noué de profonds liens avec cette femme meurtrie dans sa chair et lui rendre un dernier hommage me convenait. Et pourtant ce n’était pas la première personne à qui je fermais les yeux pour la dernière fois mais je ne savais pourquoi…  Cette femme m’avait touché. Certainement parce que j’étais mère moi aussi et que tout ce qu’elle m’avait raconté sur son fils, sur son mari m’avait permis de réaliser la chance que j’avais. Jamais le fait que Ted soit issu de moldu m’avait posé un soucis comme il n’avait rien eu a faire de la toute puissance de la famille Black et je l’en remerciais tous les jours car je ne regrettais pas de m’être faire reniée de ma famille pour pouvoir construire une famille. J’espérais pouvoir les protéger toute ma vie et étais bien loin de penser que j’étais dans l’erreur car je perdrais une partie de mon cœur quelques années plus tard. Les trois quarts même… Mais jamais je ne regretterais mon choix pour autant car, que serais-je devenue sans Ted ? Certainement pas la femme que j’étais aujourd’hui et que je serais vingt ans plus tard. Jamais je ne regretterais et je repenserais à cette femme pendant des années encore…

Une fois descendus dans la petite crique je me retournais vers Severus qui semblait perdu face à l’immensité de la tâche qui lui revenait. ▪▪▪ Je suis désolé mais je n'ai jamais fait ça. Et... vous comprenez je ne voudrai pas mal faire. ▪▪▪ Vous permettez ? ▪▪▪ fis je avec douceur en tendant la main vers l’urne. Demander « désirez vous que je le fasse » me paraissait déplacé et je ne désirais pas le gêner plus qu’il ne l’était déjà. Je récupérais l’urne contre moi et attendis quelques instants de voir comment le vent tournait pour le faire correctement. Il n’était pas utile de se retrouver couvert de cendres alors que, justement, le but était de pouvoir lui dire au revoir. Comme si le vent avait justement compris ce que nous allions faire il tourna en direction de la mer et j’invitais Severus par un geste à s’approcher. Je montais avec lui sur un rocher qui nous permettrait de surplomber un peu l’immense étendue d’eau et j’ouvrais l’urne. Je laissais de la place pour sa main s’il désirait quand même en poser une sur l’urne pendant que je la vidais et ne me lançais pas dans un grand discours. ▪▪▪ Bon Voyage Eileen, soyez en paix… ▪▪▪ Les cendres commencèrent à se mêler au vent et a tournoyer devant nous. Elles restèrent un moment comme suspendues devant nous avant de s’éloigner et de disparaitre. Dans ma tête tous les souvenirs de cette dernière année avec cette femme revinrent et je clignais rapidement des yeux pour chasser les larmes qui montaient. Trop sensible comme disait mon mari…

Je n’avais pas amené de fleurs pour jeter dans l’eau car je ne savais pas si cela conviendrait à Severus mais j’avais prévu quand même de saluer la mémoire de sa mère. Je m’installais donc sur le rocher, les jambes dans le vide et invitais mon compagnon à faire de même. ▪▪▪ Si vous avez encore quelques instants j’ai pensé qu’on pourrait rester encore un peu. ▪▪▪ Je sortis de mon sac deux tasses de thé encore fumantes, protégées d’un sort pour rester chaudes et ne pas se renverser dans mon sac. Puis je sortis une boite que Severus connaissait bien puisque c’était dans cette boite qu’Eileen mettait les gâteaux maisons qu’elle lui préparait. Elle m’avait donné la recette et m’avait demandé de lui en faire quand elle serait partie et l’idée m’avait plu, surtout après lui avoir rendu sa liberté. J’ouvris la boite  et la posais entre nous. ▪▪▪ Ils ne sont certainement pas parfaits car je suis loin d’être une grande cuisinière… ▪▪▪ Peu de le dire. Heureusement j’étais meilleure en pâtisserie que cuisinière Uu ▪▪▪ Mais Eileen m’avait dit ô combien vous les aimiez donc je me suis dit qu’en souvenir, ce serait parfait. ▪▪▪ J’espérais que ça lui convienne et en pris un en soufflant sur mon thé. Ce petit coin était vraiment parfait. ▪▪▪ Je comprends pourquoi votre mère aimait ce coin, c’est une petite ville très agréable. ▪▪▪ confiais je à Severus. ▪▪▪ Vous comptez garder la maison du coup ou vous vivez à Poudlard ?. ▪▪▪ Demandais je par curiosité car il semblait plutôt pressé de faire un trait sur le passé mais je ne savais pas si on pouvait vivre à Poudlard tout le temps non plus. Ou une petite maison ici… Moi j’aimerais beaucoup.

Les vagues frappaient l'une après l'autre contre la paroi rocheuse. « Vous permettez ? » Et comment! Severus était incapable d'aller plus loin, d'aller jusqu'au bout de sa tâche. Meda récupéra précieusement l'urne, le libérant d'un poids énorme qui lui pesait depuis trop longtemps à son goût. Le sorcier feint de fixer l'horizon mais observait en réalité du coin de l’œil les agissements de la femme. Elle semblait attendre quelque chose et finit par s'avancer sur un rocher surplombant la crique. Snape fut invité à en faire de même et la rejoignit donc sur le perchoir, déterminé à en finir rapidement. La Tonks ouvrit alors l'urne, l'inclina en direction de la mer et laissa le vent effectuer sa part du travail, le laissa emporter Eileen avec lui. Dans un premier temps le mangemort se retint d’apposer sa main là où Meda avait veillé à lui laisser une place. « Bon Voyage Eileen, soyez en paix… » Les cendres commencèrent à virevolter dans les airs et Severus finit par tenir l'urne tout naturellement, le regard toujours fixé sur le tourbillon leur faisant face. La part d'enfant qui était en lui imaginait les cendres prendre la forme de sa mère après quoi elles se jetèrent dans la mer. Ses pouvoirs mêlés à son émotion exerçaient une pression phénoménale rendant l'environnement sujet à des courants de magie. Il fixa les restes d'Eileen dérivant lentement à la surface de l'eau, détourna le regard et lorsqu'il voulut le replacer ne réussit pas à retrouver les cendres. Elle était partie, pour de bon.

C'était chose faîte, Andromeda s'installa sur le bord du rocher, laissant pendre ses jambes dans le vide. Le jeune professeur s'en retrouva avec la gorge nouée. « Si vous avez encore quelques instants j’ai pensé qu’on pourrait rester encore un peu » Tout d'un coup il voulait partir, fuir au plus vite de cet endroit. Retourner auprès du Lord, là où on ne donnait que peu d'importance à la dignité humaine, là où les Hommes n'étaient que des animaux suivants leurs instincts. Un lieu où il n'était pas nécessaire de se poser trop de questions. Que le Seigneur des Ténèbres lui donne une mission particulièrement longue et difficile à accomplir. Qu'il aille s'occuper l'esprit. Malheureusement la sorcière sortait déjà de son sac deux tasses de thé fumantes et une boîte métallique bien trop familière aux yeux de Severus. Celle qu'il avait tant de fois tenté de récupérer en haut de l'étagère dans la cuisine quand il était jeune. Celle renfermant l'un des plus beaux trésors qu'il pouvait espérer avoir.

Il s'assit aux côtés de Meda. Après tout c'était la dernière fois, le dernier instant consacré à autre chose que la cause du Lord.« Ils ne sont certainement pas parfaits car je suis loin d’être une grande cuisinière… » N'avait-elle pas une famille? Un mari? N'était-elle pas mère? Alors pourquoi se dévouait-elle avec tant d'application envers lui? D'autant plus que si elle avait une leçon à retenir de la situation c'était qu'il fallait chérir les moments avec ses proches, surtout lorsque l'amour règne dans son foyer. « Mais Eileen m’avait dit ô combien vous les aimiez donc je me suis dit qu’en souvenir, ce serait parfait. » Il ne se fit pas prier pour en goûter un et se retrouva à faire plus que simplement en prendre une bouchée. Une fois le premier biscuit avalé il but une gorgée de thé et s'en resservit un. « Vous êtes trop humble. Ils sont délicieux. » Vraiment délicieux. Cela faisait une éternité qu'il avait mangé des gâteaux de sa mère, il lui semblait pourtant que la Tonks n'aurait pu mieux les réussir. Il croqua une nouvelle fois, fixa la sorcière et se perdit dans son regard, oubliant même de mâcher sa bouchée. La nature le rappela à l'ordre et évitant de peu l'étouffement il dévia son regard en direction de la mer, gêné. En ce jour Severus n'avait plus rien ni personne. Seulement des fantômes à combattre, des causes et des valeurs à défendre. Quelques années auront suffit à emporter ses parents - sa seule famille - et à détruire l'unique amitié qu'il partageait. Alors, se retrouver face à une personne pleine d'humanité, c'était comme une parenthèse. Une parenthèse bien agréable qui plus est. « Je comprends pourquoi votre mère aimait ce coin, c’est une petite ville très agréable. » Sa voix était douce, avenante, comme si elle se parlait à elle-même comme si Severus lisait simplement dans ses pensées. Sans pour autant le faire car il aurait été malvenu de sonder Meda en cet instant et il n'avait d'ailleurs aucune raison de le faire. « A vrai dire, je n'y étais jamais venu. Je ne sais pas comment elle a connu cette ville. » Je ne sais rien d'elle. Ni de son histoire ou de sa famille. Était-ce à ce point une étrangère pour moi? Au moins s'il y avait eu des secrets de famille ils étaient bien gardés - enterrés à jamais - « Vous comptez garder la maison du coup ou vous vivez à Poudlard ? » Le sorcier pensa immédiatement aux manoirs que pouvaient bien avoir les autres membres du Cercle. Aux fortunes qui se transmettaient de générations en générations. « Je n'ai pas vraiment de quoi me payer autre chose alors faute de mieux elle fera l'affaire. » S'il avait tant de difficulté à admettre qu'il conserverait la maison c'était bien à cause de réminiscences. Il la détestait. Il la détestait car elle représentait bien trop de mauvais souvenirs. Cette maison était associée à la violence qu'exerçait son père année après année. Cependant depuis que ce dernier était mort misérablement sur le perron, passer la porte d'entrée lui redonnait le sourire. Il n'aurait pu rêver mieux comme mort pour un homme qu'il méprisait autant. Et le tout sans se salir une seule fois les mains. Il avait suffit de cette plaque de verglas... « Et j'ai toujours mes appartements à Poudlard durant l'année. » Tout du moins tant qu'il enseignerait dans l'école de magie. « Je ne comprends pas vraiment ce qui vous anime. Ce qui vous pousse à faire tout ça, pour moi, pour elle surtout. Mais merci. » dit-il à la Tonks. Et puis il se tût, ne sachant quoi ajouter. Il n'avait jamais été bon pour mener une conversation et avoir une discussion dans des circonstances pareilles ne relevait pas de l'évident ou du facile. Pourtant c'est l'esprit léger qu'il s'apprêtait à retourner à la réalité et au quotidien. Maintenant qu'il était débarrassé de la dernière personne qui aurait pu trouver un moyen de contrer son dévouement pour le Lord.

Le vent qui jusqu'alors était dans leur dos - en direction de la mer - changea brutalement de sens. Comme si Eileen venait gifler son fils pour avoir eu une pensée pareille. « Vous n'avez pas froid? Le vent se lève. » N'avait-il vraiment rien de mieux pour remercier Andromeda?« Désolé, je suis pitoyable. Je devrai vous laisser retourner à vos occupations... »

Assise, les pieds battants dans le vide et le regard toujours posé sur la mer où Eileen venait de prendre son envol je laissais Severus s’installer s’il le désirait à mes côtés, ouvrant la vieille boite à gâteaux où se trouvaient ceux qu’il préférait même s’ils n’auraient pas exactement la même saveur. L’endroit était magnifique, le vent vivifiant et réconfortant en même temps et j’étais heureuse d’être présente pour ce moment d’adieu. ▪▪▪ Vous êtes trop humble. Ils sont délicieux. ▪▪▪ Merci. ▪▪▪ Je soutins son regard alors qu’il me regardait intensément, se demandant certainement pourquoi je faisais tout ça pour lui et pris le temps d’observer son regard qui semblait si déterminé et en même temps si perdu. J’espérais que je n’aurais jamais un jour à découvrir un regard comme celui-ci dans les yeux de ma fille, qu’elle saurait toujours ce qu’elle voudrait faire, qu’elle le ferait et surtout qu’elle suivrait une conduite droite et digne. J’espérais ne jamais avoir à fermer les yeux sur ses choix comme Eileen l’avait fait mais je ne pensais pas que je serais capable de fermer les yeux, ce n’était pas dans mon caractère. J’étais une Black quand même et, même si je n’avais pas décidé d’avoir l’esprit aussi fermé que ma famille, j’avais un caractère fort et je me disais que je ne me tairais pas. Mais il était facile de dire ce qu’on ferait tant qu’on n’avait pas été confronté à la situation réellement. Et je ne jugeais pas Eileen, elle avait eu trop de chagrin, elle avait préféré fermer les yeux pour ne pas perdre son fils. Etait-ce le bon choix ? Je n’étais pas capable de le dire. Il y avait toujours des tonnes de solutions mais quelles étaient les bonnes ?

Ce vent, cette ville. Tout était apaisant et j’appréciais de voir Severus se poser quelques instants. Soufflant sur mon thé je me permis une réflexion à voix haute… Pour lui comme pour moi… ▪▪▪ A vrai dire, je n'y étais jamais venu. Je ne sais pas comment elle a connu cette ville. ▪▪▪ Il ignorait certainement beaucoup de choses sur sa mère et je préférais ne pas répondre car moi je savais pourquoi elle aimait cette ville mais il était trop tôt pour faire ce genre de confidences. Un jour peut-être ou jamais. Mais aujourd’hui n’était pas le bon moment pour lui faire remarquer que même moi j’en savais plus. ▪▪▪ Je n'ai pas vraiment de quoi me payer autre chose alors faute de mieux elle fera l'affaire. Et j'ai toujours mes appartements à Poudlard durant l'année. ▪▪▪ Ça lui laisserait le temps de voir s’il désirait vraiment l’oublier ou bien apprendre à vivre avec tous les souvenirs qu’elle contenait. Je me demandais ce que je ferais à sa place mais, à vrai dire, la question ne se posait pas puisque je n’avais pas le droit de mettre les pieds chez moi. ▪▪▪ Je ne comprends pas vraiment ce qui vous anime. Ce qui vous pousse à faire tout ça, pour moi, pour elle surtout. Mais merci. ▪▪▪ Il n’y a pas besoin de raison Severus. J’ai apprécié cette année en compagnie de votre mère et je vous remercie de me permettre d’être là aujourd’hui. Je suis heureuse de pouvoir lui dire au revoir une dernière fois tout simplement. ▪▪▪ Ce n’était pas de la pitié mal placée parce qu’il était tout seul ou d’autres raisons, juste l’envie d’être là aujourd’hui pour une dame que j’avais apprécié. Elle m’avait beaucoup appris sans le savoir et j’avais approuvé beaucoup de tendresse envers cette vieille femme meurtrie.

Le vent se leva soudainement, comme s’il désirait nous dire quelque chose et j’en fus surprise, regardant Severus qui lui-même semblait gêné de ce changement soudain. Que se passait-il ? Je frissonnais. ▪▪▪ Vous n'avez pas froid? Le vent se lève. Désolé, je suis pitoyable. Je devrai vous laisser retourner à vos occupations... ▪▪▪ Arrêtez donc de vous excuser, je suis là parce que je le désire et non par obligation, je suis sûr que vous en aurez marre avant moi. ▪▪▪ fis-je avec un petit sourire en le poussant de mon épaule très légèrement avant de me redresser car si le vent avait décidé de nous refroidir, il fallait marcher. Je tendis la boite à gâteaux à Severus pour qu’il puisse en prendre un autre avant de faire de même et de remettre la boite dans mon sac. Je pris ensuite ma tasse à thé et me redressais totalement en m’aidant de l’autre main. ▪▪▪ Allons marcher pour ne pas se refroidir ! ▪▪▪ Je descendais du rocher pour mettre les pieds dans le sable et me retrouva déséquilibrée un court instant, me retenant à Severus pour ne pas tomber. ▪▪▪ Merci ! ▪▪▪ Je me remis droite avant de commencer à marcher, le vent s’engouffrant dans mes cheveux et mon foulard noir noué largement autour de mon cou. ▪▪▪ Vous enseignez une des matières que je préférais à Poudlard. Potion et sortilèges mais je me suis plus orientée par les pathologies des sortilèges pendant mes études ensuite. J’en ai fait exploser des chaudrons ! ▪▪▪ fis-je en rigolant légèrement, décidant de parler d’un sujet commun histoire de ne pas rester dans cette gêne désagréable autour du raison de ma présence et du malaise du fils d’Eileen face aux sentiments contradictoires qui l’assaillaient.

« Il n’y a pas besoin de raison Severus. J’ai apprécié cette année en compagnie de votre mère et je vous remercie de me permettre d’être là aujourd’hui. Je suis heureuse de pouvoir lui dire au revoir une dernière fois tout simplement. » Tellement de bonté réunie en une seule femme. Sa nouvelle vie de mangemort ne lui avait permis que peu de rencontres de ce genre ces derniers temps. Cette parenthèse qui s'offrait à lui n'était finalement pas pour lui déplaire. « Arrêtez donc de vous excuser, je suis là parce que je le désire et non par obligation, je suis sûr que vous en aurez marre avant moi. » Le petit coup d'épaule donné comme on taquinerait un bon ami le déstabilisa, c'est qu'il n'avait jamais eu l'occasion d'être aussi proche d'une personne de la sorte excepté Lily. A la remarque de Meda, Snape lui rendit un petit air renfrogné tel un enfant voulant bien faire auquel on aurait fait un reproche. Cependant lorsque la sorcière se releva et lui tendit la fameuse boîte à biscuits il récupéra l'un de ses trésors et lui offrit même un léger sourire. « Allons marcher pour ne pas se refroidir ! » « Bonne idée. » Ce moment était paisible mais la réalité revenait progressivement à l'esprit de Severus. Personne n'était au courant de ces funérailles excepté la Tonks, il n'avait donc aucune excuse à rendre auprès d'un quelconque mangemort pour son absence. Et au fond de lui il savait que même cette excuse ne lui servirait à rien. Bien élevé et ne voulant froisser la sorcière, le mangemort cherchait une porte de sortie. C'est perdu dans ses pensées qu'il sentit une main s'agripper in extremis à sa manche. Il détourna alors le regard et découvrit Andromeda se relevant calmement, sûrement heureuse d'avoir évité le pire. « Merci !  » Snape resta silencieux se contentant de l'aider à se redresser. Ils commencèrent alors à marcher. Ce fut elle qui rompit le silence, Severus cherchant encore et toujours une échappatoire. « Vous enseignez une des matières que je préférais à Poudlard. Potion et sortilèges mais je me suis plus orientée par les pathologies des sortilèges pendant mes études ensuite. J’en ai fait exploser des chaudrons ! »  Il ne ria pas comme Meda mais sourit malgré tout. Elle faisant tant d'efforts pour le mettre à l'aise qu'il s'en sentait redevable. De toute façon ne l'était-il pas depuis qu'elle s'était occupée de A à Z d'Eileen? « Je n'en suis qu'à mes débuts vous savez... » Lui répondit-il ne sachant quoi ajouter à son propos. En un autre temps il aurait bien pris le temps d'en apprendre plus sur elle, à la questionner et lui retourner la pareille sauf que son Maître l'attendait... que Dumbledore l'attendait également un peu plus tard dans la journée. Et puis, libéré une fois pour toute du poids de sa famille, Severus voulait fêter sa nouvelle indépendance. C'est alors que son avant-bras l’irrita. Se grattant machinalement il finit par comprendre que sa marque le brûlait. Le Seigneur des Ténèbres l'appelait à ses côtés et il n'était jamais bon de faire attendre le Lord. Maintenant qu'il pouvait en terminer avec ces funérailles, le sorcier s'en retrouvait bien embêté. Nommer l'origine de son départ était des plus malvenus. Il se retourna précipitamment pour faire face à la Tonks. « Je suis désolé mais le travail m'appelle. Merci encore c'était très bien. » Encore des excuses, encore des remerciements... Son avant-bras se faisait de plus en plus douloureux. « J'ai été ravi de faire votre connaissance. Prenez soin de vous et de votre famille, au revoir. » Finit-il par lui dire en lui serrant la main, ne sachant s'il la recroiserait véritablement un jour mais déterminé à garder en mémoire la gentillesse dont elle avait fait preuve à son égard. Il s'écarta alors d'elle et transplana jusqu'au repère des mangemorts où son Maître furieux d'avoir attendu son disciple lui jeta un regard noir. « Alors Severus, on va se ressourcer au bord de la mer? » Snape n'avait aucune idée de comment il avait su où il était. Avait-il été suivi par un espion? Était-il surveillé? Il n'avait aucune certitude excepté qu'il avait peut-être mis en danger Meda. Ii chassa alors cette idée bien vite de son esprit au risque de se faire voler une fois de plus ses pensées.

▪▪▪ Je n'en suis qu'à mes débuts vous savez... ▪▪▪ Mais il ne devait certainement plus faire exploser les chaudrons pensais-je en rigolant. Je m’étais retournée vers lui et regrettais de ne pas l’avoir vu sourire souvent car cela lui allait bien. Au moins j’avais reussis à le faire sourire avant qu’il ne disparaisse car je sentais bien que son temps de présence ne serait pas long désormais. Et alors que j’allais continuer de badiner tranquillement, il me prit de vitesse. ▪▪▪ Je suis désolé mais le travail m'appelle. Merci encore c'était très bien. J'ai été ravi de faire votre connaissance. Prenez soin de vous et de votre famille, au revoir. ▪▪▪ Prenez soin de vous aussi Severus. Je sais que vous avez fait vos choix mais gardez votre mère dans un petit coin de votre esprit, elle n’a pas toujours été une faible femme et elle vous aimait énormément. ▪▪▪ Je posais mon autre main sur la sienne quand il me sera la main et lui adressais un petit sourire. Je ne savais pas le chemin qu’il avait pris et je ne voulais pas le savoir -ce n’était pas mes affaires- mais je ne voulais pas qu’il oublie ses liens familiaux même s’ils en étaient déchargés aujourd’hui car, un jour, il regretterait peut-être d’avoir tout laissé derrière lui et puis c’était ses liens qui nous façonnaient. Et j’étais bien placée pour savoir qu’on ne choisissait pas toujours sa famille et qu’on devait faire avec mais serais-je la femme que j’étais aujourd’hui si je n’avais pas été une Black ? Difficile à savoir… ▪▪▪ Ma porte vous sera toujours ouverte si un jour, vous en avez le besoin. ▪▪▪

Je le regardais partir alors que le vent s’engouffrait dans mes cheveux. Je me demandais si je reverrais le jeune homme à l’avenir mais je n’y croyais pas. C’était dommage car j’étais persuadée qu’on aurait pu être amis. Eileen était une femme qui m’avait beaucoup marqué et elle avait forcément donné un peu de sa force à son fils donc il ne pouvait pas être un homme mauvais. Je ne savais pas pourquoi mais je sentais que son cœur était réellement peiné de la mort de sa mère bien qu’il veuille laisser paraître le contraire. Même s’il ne l’avait pas soigné, s’il était parti comme un voleur aujourd’hui, il aurait pu faire beaucoup moins et j’en avais vu pas mal dans ce cas-là. C’était tellement dommage qu’ils n’aient pas pu se parler avant qu’elle disparaisse. J’espérais que ma fille et moi aurions le temps de tout nous dire avant que je disparaisse et que je la laisse seule, que j’ai le temps de lui dire ô combien j’étais fière d’elle, de ce qu’elle avait accompli, de ce qu’elle était devenue. Car j’étais persuadée que ma fille serait une femme exceptionnelle, ça ne pouvait en être autrement. Objectivité de maman. D’ailleurs il était temps que je rentre auprès des miens aussi je me dirigeais tranquillement vers l’endroit où j’avais transplané à l’aller et pris le chemin inverse pour me rendre à mon cabinet. J’avais prévu d’être absente plus longtemps mais ça me donnerait l’occasion de mettre à jour tous mes dossiers, ce que je détestais faire. Mais j’avais un dossier à classer et celui-ci méritait tout mon attention. Eileen Snape, je ne vous oublierais jamais et j’espère que ma route croisera celle de votre fils à nouveau…