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sujet; le secret de broke-your-back mountain - bagflint |
| Marcus “fais pas genre t’as une belle gueule” Flint I’ll chew you up and I’ll spit you out 'Cause that’s what young love is all about. So pull me closer, and kiss me hard I’m gonna pop your bubblegum heart I’m gonna be your bubblegum bitch Il suffit que tu fermes les yeux pour qu’aussitôt, la notion du temps qui passe se mette à t’échapper. Tu ne sais pas si une éternité ou une fraction de seconde s’écoule avant que Flint vienne régler la température de l’eau ; mais décidément, trop de temps à ton goût, à t’entendre grelotter sans avoir la force de trembler. « Ahah, moi j’y tiens » laisses-tu échapper, un filet d’eau coulant sur ton nez et ta bouche en cœur. Tu ne sais même pas s’il a entendu ta petite blague et si c’est parce qu’il s’en est vexé qu’il est aussitôt ressorti. Tu ravales ton sourire qui n’est pas vraiment de mise, vu ton état, tu n’avais plus rien à sauver, niveau apparences.
Dans le délire ambiant de la fièvre, alimenté par la tiédeur de la douche, tu te mets soudainement à le haïr viscéralement. Plus que de t’avoir laissé te prendre l’haleine empoisonnée du Nundu, c’est parce qu’il te voyait dans ce non-état que tu le détestais. Personne jusqu’à présent n’avait eu l’occasion, puisque l’occasion, tu ne la laissais plus se présenter. Toujours, tu restais maître de tes agissements, allant jusqu’à refouler les débuts de fièvre ou de rhume, avec un dédain déroutant. Une histoire de mental, tout ça. Il n’y avait que contre tes terribles migraines dues à ta mémoire que tu ne pouvais rien faire. Les seules qui pouvaient t’interrompre dans ton emploi du temps de ministre, impromptues et te vissant au lit. Tu ne le laisserais jamais rire de ce qu’il avait pu voir. Tu ne sais pas encore si tu lui achèterais son silence, ou si tu le lui enfoncerais de force dans la caboche. Après tout, si on avait réussi à rendre ta mémoire malléable, avec un rustre dans son genre, ça ne devait pas être si compliqué que ça. … Mouais, ça resterait tout de même plus simple s’il te donnait son prix. Il ne te cafterait pas plus que de raison, puisque lui aussi avait été sous les feux des projecteurs, à ses dépens, fut un temps. Les simples d’esprit ont tendance à toujours s’encombrer de valeurs morales ou de principes pour se donner une profondeur. Mais sinon, à part ça, il t’avait sauvé la vie. Enfin, plus exactement, il t’avait sauvé d’une mort certaine. Contre ça, ta haine enfiévrée ne peut pas faire long feu, et se ré-éteint même tandis que tu fermes les yeux malgré toi.
Un nouveau pan de noir total. Puis au loin, enfin ! la voix sourde et caverneuse de Flint qui résonne. Beaucoup. Trop. Fort. Tu entends tout comme si ton ouïe s’était décuplée. Ça n’était pas la première fois que tu te plaignais du vacarme qu’il pouvait causer –essayez un peu de trouver le calme dans un pub rempli à ras-bord de rafleurs survoltés. Mais disons que c’était du jamais vu que ça te donne l’impression que ta cervelle gonflait autant. Tu n’aurais pas été étonné qu’il braille parce que tu avais des bouts de cerveau qui dégoulinaient par tes narines sur ses pompes. En vérité, tu n’arrives pas à savoir pourquoi il ricane, pourquoi il monte le volume, pourquoi il semble te crier dessus –une fois de plus. Peut-être qu’il se moque de toi parce que depuis la dernière fois, tu n’as pas bougé d’un pouce, gouttant sur ton maillot de corps. Peut-être qu’il s’affole, qu’il craint pour ta survie ; tu aimerais bien, peut-être, un peu. Qu’il souhaite peut-être ta mort, mais qu’il est aussi suffisamment con et fier pour vouloir te tuer de ses propres mains. Tu ressens juste le bruit, qui perce des trous dans ta tête déjà trop percée malgré ton jeune âge. Ça rentre, ça fout le boucan, ça fout le ramdam, et ça ressort aussitôt. Dans ce que tu crois être une ultime provocation –même si tu avais l’air trop déchiré pour être crédible-, tu lèves le menton, pour babiller une imbécillité. « Tu te décides enfin à me rejoindre ? »
Mais à ce stade-là, c’est tout à son honneur s’il ignore tes petites blagues. Tu lèves les bras, pour qu’il te sorte de là, serrant très fort le savon que tu étais parvenu à ramasser et à te passer seulement sur le bras, comme dans un sentiment intestin de te raccrocher très fort à quelque chose, même si la savonnette glissait entre tes doigts faibles. Ce n’était qu’une question de temps, avant de savoir qui allait être le prochain à lâcher l’autre. « Sors-moi de là, mon grand… » siffles-tu. Tes paupières s’écrasent de nouveau sur tes yeux trop bleus.
Tu ignores s’il t’a ramené en te traînant par la patte ou s’il avait eu la décence de te porter comme une princesse. Tu rouvres les yeux juste au moment où il te redépose sur le matelas froissé. Te laisses aller dans le maigre oreiller, les bras tendus de rester agrippé à lui d’une force dont on ne te croyait plus capable. Il s’est remis à faire si froid que tu ne serais pas étonné de voir un nuage de vapeur s’échapper d’entre tes dents claquant comme des petits pièges.
Dernière édition par Boris Bagshot le Dim 13 Nov 2016 - 17:22, édité 1 fois |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Marcus Flint | boris bagshot fin août 2003 • dans la merde En voyant qu’il n’a pas de réponse à ses appels, Marcus commence à se dire que Bagshot a réellement réussi l’exploit de se noyer dans un bac de douche. Si l’idée l’a fait rire un peu plus tôt, à présent elle l’inquiète probablement plus qu’il ne l’aurait imaginé – ce doit être un effet secondaire du Navitas, qui décuple un peu tout. Alors il pousse la porte avec un peu trop de violence et cette dernière claque brutalement. Quand il baisse les yeux, il voit qu’il est toujours assis là, l’air hagard, un savon dans la main qu’il a l’air d’avoir lamentablement frotté contre son bras. Bon, de toute évidence, il n’est pas en état de s’en sortir tout seul. « Tu te décides enfin à me rejoindre ? » Ah ça par contre, il en a toujours de l’énergie pour raconter des conneries. Marcus soupire en le voyant lever les bras vers lui, comme le ferait un gosse qui veut qu’on le porte. « Sors-moi de là, mon grand… » Il n’a pas tellement le choix, hein ? Enfin, il pourrait le laisser moisir là bien sûr, mais Marcus doit admettre qu’il ne trouverait pas grand plaisir à torturer ainsi Bagshot alors qu’il n’a même pas la force de se débattre un peu. Alors il retrousse ses manches et se penche, attrape la main de la crevette pour achever de lui faire lâcher la savonnette qu’il repose à sa place, puis glisse ses pattes sous les aisselles de Boris pour le soulever sans peine, grâce à la dose de Navitas qui a complètement anesthésié ses douleurs. Une fois qu’il le tient debout, il se dépêche de le débarrasser de ses dernières fringues complètement trempées et d’attraper une serviette pour emmitoufler Bagshot dedans. Une fois qu’il est satisfait du burrito humain qu’il vient de réaliser, il le soulève et grogne un peu quand il s’accroche à lui. C’est qu’il a encore de la poigne malgré tout. Marcus le ramène jusqu’au lit, bataille un peu pour le faire lâcher et le regarde un moment, perplexe. Il a les dents qui claquent d’être frigorifié, mais il sait que c’est la fièvre, alors ça ne lui rendrait pas tellement service de l’enterrer sous des dizaines de couvertures. Il ne peut pas dire qu’il sache vraiment comment s’occuper d’une personne malade. Enfin, il a déjà dû gérer un Greg complètement bourré et à deux doigts de s’étouffer dans son vomi, mais ce n’est pas comme s’occuper d’une personne réellement malade, avec des symptômes à identifier, un remède à trouver… Bon, il peut au moins faire ce qu’il faisait pour Greg, pas vrai ?
Marcus soupire à nouveau et laisse tomber l’idée d’aller chercher les vêtements de rechange de Bagshot, c’est pas avec une chemise et un de ses pantalons de grand couturier qu’il sera à l’aise. Il se redresse et part fouiller dans son propre sac, pour en tirer un pull et un pantalon ample qui devraient faire l’affaire, il ne sait pas trop ce que la diva a apporté d’autre dans ses affaires et il n’a pas tellement envie de perdre son temps en farfouillant dans des tonnes de fringues. Une fois auprès de Bagshot, il le défait de son écrin d’éponge et attrape le pull pour lui enfiler. Son regard s’attarde un moment sur la cicatrice qui orne le cou du plus jeune. Il comprend mieux les cols serrés et les foulards, maintenant. Marcus s’ébroue et lui passe la tête dans le col du pull, avant de faire de même avec chacun de ses bras. Il a du mal, parce que ses mains tremblent à cause de la dose qu’il vient de prendre, alors il est un peu brusque, il râle un peu et doit s’y reprendre à plusieurs fois. Il ne peut retenir une grimace en voyant la Marque sur sa peau pâle. Il a la même, et il la déteste tout autant. Il le redresse pour finir de lui enfiler le pull, puis le débarrasse du reste de la serviette et lui passe le pantalon. Bien, il a l’air parfaitement ridicule, dans des fringues dix fois trop grandes pour lui, mais au moins, il porte quelque chose de sec et de plus chaud que ses chemises à la con. Marcus attrape la serviette et frotte les cheveux trempés de Bagshot avec. Il pourrait probablement être un peu plus délicat, mais ce n’est pas vraiment son genre alors… la crevette devra faire avec. « Ok, t’es au sec, » qu’il lance plus pour lui-même que pour lui. Sa paume revient trouver le front de Boris, qui est encore trop chaud. Un peu moins qu’avant, plus ? Il ne sait même pas lancer le sort qui permet de vérifier la température de quelqu’un alors… il ne peut pas faire mieux qu’y aller au feeling.
Pour le moment, il ne semble avoir que de la fièvre. S’il prend en compte la vitesse à laquelle il a été atteint, il devrait déjà montrer d’autres symptômes, s’il avait quelque chose de très grave, non ? Marcus est incapable de déterminer si cette fièvre est bon signe ou pas. Il attrape la couverture coincée en-dessous de Bagshot et tire pour la rabattre sur lui, avant de retourner dans la salle de bain. A côté du lavabo, il trouve une petite serviette qu’il imbibe d’eau froide, quand son regard s’arrête sur la petite armoire fixée au-dessus. Dans le doute, il l’ouvre et il envisage presque de remercier les gars du Ministère qui s’occupent d’équiper ces tentes. Sous ses yeux, quelques bandages, des potions et des baumes. Il suppose que la plupart sont pour traiter des plaies, après tout, ils ont plus de chances de finir avec de sales blessures que de tomber malade dans ce boulot de merde. Il attrape les fioles et observe les étiquettes, les sourcils froncés sous la concentration. Essence de Dictame, non. Potion de… régénération sanguine, non plus. Pour ressouder les os, non. Il les fait une par une et commence un peu à désespérer, quand il tombe sur un nom qui lui dit quelque chose. Pimentine. Merde, ça pourrait être utile ça non ? C’est ce que sa mère lui faisait prendre, à chaque fois qu’il avait un sale rhume. Pas certain qu’un rhume soit ce dont Bagshot est atteint mais… c’est probablement mieux que rien, pas vrai ? Marcus remet les autres fioles en place, récupère la serviette humide et retourne auprès de Boris. « Hé, j’ai peut-être trouvé un truc, » fait-il en pliant la serviette pour la déposer sur son front, avant d’agiter la fiole devant ses yeux. « Pimentine, ça peut pas être pire, pas vrai ? » Il la débouche, a un petit moment d’hésitation. « Si tu crèves, interdiction de revenir me hanter Bagshot, j’ai déjà assez d’fantômes à gérer. » Encore que, il serait curieux de voir le vieux et la crevette débattre, juste pour rire un bon coup. Il redresse la tête de Boris et approche la fiole de ses lèvres. « Allez, avale, et oui, je sais, t’es un champion pour ça, pas la peine de la faire, » lui épargne-t-il la mauvaise blague. |
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| Marcus “fais pas genre t’as une belle gueule” Flint I’ll chew you up and I’ll spit you out 'Cause that’s what young love is all about. So pull me closer, and kiss me hard I’m gonna pop your bubblegum heart I’m gonna be your bubblegum bitch Tu finis par décoller un à un tes doigts engourdis enroulés dans son tee-shirt. Alors qu’il te déballe, d’instinct, tu portes ta main à ta gorge pour lui cacher ta cicatrice que la toux que tu ravales donne l’impression de gonfler. Parce que si la fièvre continue de te faire délirer, tu finirais par avoir le sentiment que ta plaie se rouvre pour parler à ta place. Tu sens que ça tire un peu, juste là. Il te remballe mais cette fois-ci, dans des vêtements, visiblement pas les tiens à en juger par la taille et l’odeur. Etrangement, c’est une odeur qui te réconforte, parce qu’elle est vraie, et pas travaillée et retravaillée comme toi et tes milles onguents. C’est son odeur à lui, certes, et même s’il n’était pas ton être humain préféré sur terre, c’était toujours quelque chose de familier de retrouvé.
Malgré la brusquerie avec laquelle il t’habille, tu te sentirais presque à ton aise. Se laisser ainsi faire, se laisser aller complètement entre les mains de quelqu’un. Et ce quelqu’un, alors qu’il aurait l’occasion de te faire du mal, prend simplement soin de toi avec un déconcertant naturel et sans aucune ambigüité que celle que tu fantasmes dans ton coin, sans même essayer d’y mettre des formes qui n’auraient pas lieu d’être. Jusqu’à présent, il n’y avait eu qu’Astoria pour prendre soin de toi. Du temps de ton opération d’infiltration, elle t’avait même sauvé la vie. Cependant, avec elle, c’était différent, puisque vous nourrissiez le sentiment de ne former qu’un seul et même corps. C’était vous contre le reste du monde. Flint ne te devait rien. Tu t’arrangeais souvent pour qu’on te doive quelque chose, mais tu faisais également en sorte que l’inverse ne se produise jamais. Tu refusais qu’on s’occupe de toi, simplement parce que cela signifiait que tu n’avais pas le contrôle de la situation. Tu ne devais laisser personne t’approcher plus que nécessaire. Et pour ceux qui pouvaient te toucher toute une nuit durant, tu étais certain que de toutes manières, ils n’iraient jamais plus loin, qu’ils ne te toucheraient pas, à l’intérieur. D’un autre côté, tu te dis qu’il fait ça uniquement parce que ça n’était pas bien vu de rentrer avec un membre de l’équipe en moins. Et que, par les temps qui courent, le Magister avait tout intérêt à passer en revue régulièrement le nombre de ses Mangemorts. En tout cas, toi, c’est ce que tu ferais. Il fut un temps où personne n’aimait Flint. Mais toi, de toute façon, t’aimes personne.
« Je dois avoir l’air ridicule dans cette tenue » ris-tu faiblement, en triturant les mailles du pull. Tu faisais déjà difficilement tes vingt-trois ans et de fait, portais constamment des costards, afin qu’on te prenne au sérieux. Alors attifé de cette manière, tu venais de perdre dix années d’un coup. D’autant plus avec ta mèche sans dessus dessous qu’il a, te semble-t-il, pris un soin particulier à ébouriffer. Tu serais presque méconnaissable, si tu n’arborais pas ce petit air pincé jusque dans la fièvre. Quand il revient tu ne sais d’où, tu es en train de tirer mollement sur l’élastique du pantalon, pour évaluer la place qu’il restait, tellement vous étiez taillés différemment. Tu fais même gonfler ton ventre pour essayer de combler l’espace. Il t’interrompt en te posant une compresse tiède sur la figure. Tu en soulèves un pan pour jeter un œil à la potion qu’il a déniché. De la pimentine ; « ça ne peut pas être mauvais en effet », même si tu allais écoper des absurdes effets secondaires. « Je vais me gêner ; ce serait l’occasion pour mater à travers les portes » ricanes-tu en te redressant un peu sur tes coudes.
Tu phases un temps, ne réalisant pas ce que tu venais d’entendre, avant de biter enfin, dans un sourire un peu plus net. Tu cherches à accrocher son regard de tes yeux flous. « C’est que tu apprends vite~ » ton rire se perd dans une toux sèche. « Attends un peu de voir ce que je peux faire avant d’avaler » Bah ouais, si on pouvait te faire taire aussi facilement, ça se saurait –elle a bon dos, la fièvre.
De fait, bien décidé à l’ennuyer alors qu’il s’efforçait de te maintenir en vie –pas besoin d’être un fantôme pour hanter les autres, à ton humble avis-, tu illustres ton propos en te mettant à suçoter le goulot de la petite bouteille avant même de boire, avec un air aguicheur et un peu fatigué. Tu lui montres ainsi tout l’étendue de ton talent sur ce pauvre flacon qui n’a rien demandé. Cependant, il te fait vite passer l’envie de le racoler en te fichant le goulot de la fiole dans le bec pour te couper le sifflet.
Tu es alors bien obligé d’avaler quelques gorgées, un peu de traviole à cause des ricanements que sa réaction a provoqué chez toi, retenant une grimace à cause du goût extrêmement relevé, tandis que de la fumée s’échappe par à-coups de tes oreilles. Le piment te monte jusqu’au nez en te dégageant les sinus, et se propage même jusqu’à ton front brûlant, provoquant une bouffée de chaleur qui t’embue l’esprit. Bon, ça te soignera pas tout de suite, mais c’était une bonne initiative de sa part. Le coup de chaud t’a provisoirement dégagé l’esprit, comme dans un sauna. « Si tu croyais pouvoir me voler mes blagues aussi facilement » te sens-tu obligé de commenter, pensif, laissant pour le coup le vouvoiement au placard. Ta respiration siffle un peu plus calmement, tandis que tu te ramasses sous la couverture, délicieusement noyé dans son pull trop grand. « Ça a l’air d’aller un peu mieux, toi ; n’oublie pas de manger. » fais-tu remarquer d’une petite voix. Tu ne préfères pas te préoccuper pour le moment de ce qui avait pu le remettre sur pied. De ce point de vue, tu étais plutôt mal placé pour lui faire la morale, avec tes filtres d’amour rien que pour supporter de passer la nuit dans les bras d’Astoria. |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Marcus Flint | boris bagshot fin août 2003 • dans la merde « Ça ne peut pas être mauvais en effet. » Il est un peu surpris de voir que Bagshot approuve son idée. La fièvre le fait délirer, ou le coup de la Pimentine est vraiment bien trouvé ? Enfin, il ne va pas se plaindre alors qu’il coopère sans râler. « Je vais me gêner ; ce serait l’occasion pour mater à travers les portes. » Marcus grimace, parce que l’image qui s’impose dans son esprit aux paroles du plus jeune est loin d’être ragoûtante. Il n’a aucune envie de penser à des fantômes voyeurs alors qu’il y a un vieux con qui habite son manoir. L’idée qu’Ignatus puisse… ugh. Non. Vraiment, il ne veut pas y penser. Alors il lance un regard sombre à Bagshot pour avoir mis ça sur le tapis, pour le trouver en train de sourire comme un nigaud. C’est sa remarque graveleuse sur ses grandes capacités de déglutition qui l’éclate comme ça ? Il n’est pas vraiment étonné, mais ça lui tire quand même un petit sourire amusé. « C’est que tu apprends vite~ » Marcus lève les yeux au ciel. « J’veux pas jouer au vieux con, mais j’maîtrisais déjà les bases de la blague de cul que tu t’étais encore jamais tripoté, Bagshot, » se moque-t-il gentiment. Bon, il avait alors probablement moins d’expérience que lui au même âge mais ça, personne n’est obligé de le savoir hein. « Attends un peu de voir ce que je peux faire avant d’avaler, » lance alors la crevette et c’est au tour de Marcus de manquer de s’étouffer. Oui non vraiment, il n’a pas envie de voir ce dont Bagshot est capable. Sauf qu’il a quand même l’air bien décidé à lui montrer d’une manière ou d’une autre sur la fiole que Marcus est encore en train de tenir et tout à coup, la situation devient à la fois embarrassante et ridicule. Bagshot a les joues un peu rougies à cause de la fièvre et ces traits fatigués qui lui donnent presque un air lascif et en même temps, il a les yeux brillants de fièvre et il porte un pull de Marcus dix fois trop grand pour lui qui lui donne l’air d’avoir douze ans et demi. Alors ça devient vite plus gênant que ça lui donne envie de se moquer.
Il lui care le goulot dans la bouche et penche la fiole pour lui faire boire quelques gorgées – il manque encore de s’étouffer en ricanant ce con – puis la repose un peu plus loin, il n’ose pas trop la reboucher après le traitement que Bagshot lui a fait subir. Aussitôt, la potion fait effet et de la fumée commence à s’échapper des oreilles de la crevette. Il ne sait pas à quel point ça va l’aider, mais au moins il aura tenté. « Si tu croyais pouvoir me voler mes blagues aussi facilement. » Marcus ricane. « Me cherche pas, crevette, » qu’il réplique aussitôt. Il le regarde se rouler en boule sous sa couverture, les sourcils froncés. Il a l’habitude de le voir dans ses costumes, toujours bien mis, toujours impeccablement coiffé, droit, fier, la tête haute. C’est assez déstabilisant de le voir couché là, dans un de ses pulls, la tignasse en bataille et encore un peu humide. Il fait plus jeune, c’est indéniable. Mais il fait… moins sur ses gardes, aussi ? Pas dans le mauvais sens, pas dans le sens faible - bien sûr qu’il est affaibli, il est malade, c’est normal – mais il a moins l’air d’un perroquet qui répète ce qu’on lui dit de dire. C’est probablement ça qui le dérange le plus, chez Bagshot. Il est très agaçant, très suffisant et il a même tendance à être blessant mais ça… Marcus a l’habitude, il a appris à s’en foutre. Ce qui le dérange, c’est que rien de ce que Boris dit ou fait ne semble naturel.
Flint n’est pas très bon à ça, il l’a prouvé suffisamment. Masquer ses émotions, être doux et mielleux avec les gens qu’il déteste, il ne sait pas faire tout ça. Il s’énerve et déteste aussi vite qu’il peut décider d’apprécier quelqu’un, il ne connaît pas les demi-mesures. Alors passer sa vie à jouer la comédie comme Bagshot, il ne sait vraiment pas faire. Son père répète souvent qu’il est trop émotif, que c’est une faiblesse, toutes ces conneries. Sa mère dit qu’il est entier et que c’est une qualité. Marcus a depuis longtemps cessé d’essayer de savoir qui a raison. Le fait est que Bagshot a un peu l’air d’un être humain, comme ça, et pas d’un produit fabriqué pour correspondre aux attentes de la société. Ou alors, c’est sa dose de Navitas qui le fait délirer, il ne sait pas trop. Mais c’est la première fois qu’ils passent plus de dix minutes ensemble sans s’insulter alors il décide que Boris malade n’est pas si mal que ça. « Ça a l’air d’aller un peu mieux, toi ; n’oublie pas de manger. » Ok, il a vraiment pris une trop grande dose. « T’en fais pas, c’est pas mon genre, » qu’il ricane avant d’aller fouiller dans ses affaires pour se sortir des vêtements propres. Il va manger ouais, mais d’abord, il va prendre une douche parce que ses fringues lui collent un peu à la peau et il déteste cette sensation. Il ne traîne pas, une fois des vêtements propres trouvés, il va dans la salle de bain et se débarrasse de ceux qu’il porte pour prendre une douche rapide.
Bon, ils sont toujours dans cette forêt minable et Bagshot est malade mais au moins, ça n’a pas l’air d’être mortel. Il se demande ce que faisait cette bestiole ici. C’était quoi, le nom de ce débile qui avait ramené un Nundu d’Afrique pour protéger sa maison et avait fini par se faire bouffer ? Fricklefrac ? Peut-être qu’un autre génie a décidé de faire la même et que la bestiole a grandi ici. Ça expliquerait probablement son apparence, les Nundus ne sont pas faits pour vivre en Angleterre. Ou alors, un autre taré qui a fait des expériences bizarres, ça ne le surprendrait pas tellement non plus. Quoi qu’il en soit, ils devront le mentionner dans leur rapport et il entend déjà les autres gars se foutre d’eux. Marcus sort de la douche, se sèche rapidement et enfile caleçon, pantalon et débardeur avant de quitter la pièce. Il a vraiment les crocs, maintenant. Il ne tarde pas à trouver de quoi se préparer un sandwich copieux qu’il commence à dévorer en allant s’asseoir sur un fauteuil du salon improvisé près du poêle. De là, il a de quoi garder un œil sur Bagshot qui est toujours roulé en boule sous sa couverture. « Tu sais ce que tu devrais mettre, dans ton rapport ? Que ce pain est vraiment dégueulasse, » grogne-t-il la bouche à moitié pleine. Il sent déjà l’excitation qu’engendre la prise de Navitas retomber, pour le laisser détendu, relax. C’est le moment qu’il préfère, quand toute la pression retombe et qu’il a juste l’impression que tout va bien. Il finit d’engloutir son sandwich et se laisse aller dans le fauteuil plutôt confortable. « Au fait, » commence-t-il d’une voix un peu rauque alors que son cerveau s’embrume un peu. « C’était stupide, mais tu m’as probablement sauvé la vie là-bas, alors merci. » Voilà, c’est dit. Fortement encouragé par le bien-être dans lequel la drogue le plonge, mais ça, ce n’est pas très important, pas vrai ? |
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| Marcus “fais pas genre t’as une belle gueule” Flint I’ll chew you up and I’ll spit you out 'Cause that’s what young love is all about. So pull me closer, and kiss me hard I’m gonna pop your bubblegum heart I’m gonna be your bubblegum bitch Flint s’éclipse de nouveau dans la salle de bain. Tu te laisses vaguement bercer par le ronronnement familier du bois et le clapotis de la douche. Tu rentres tes bras à l’intérieur du pull pour les replier contre toi, tes mains se glissant sur ta gorge à découvert que tu masses nerveusement. Il n’aurait pas dû la voir. Personne n’avait le droit de la voir, hormis Astoria. Pas même ta mère. Les autres, ils avaient seulement droit aux jolis foulards et aux cravates hors de prix. Eh, Bagshot, la semaine prochaine, tu vas faire les gros titres de la Gazette : une séance de bondage qui tourne mal chez BB ! Eh, Bagshot, t’as serré ton nœud pap’ trop fort ? Ça, c’était trop laid. C’était trop… toi.
Cette sombre réflexion te renvoie à ce toi que tu étais, en temps normal. A ce toi qui était censé être en mission. Vous prenez un retard monstre, par ta faute –mais en même temps, tu te sentirais presque bien ici- et ça aussi, comme il dit –où est-il ? tu ne l’as pas entendu revenir ; il s’est déjà rhabillé ? oh dommage- ça aussi, il faudra le signaler dans le rapport. Une chance que tu repasses derrière Marcus avant d’envoyer vos rapports, auquel cas, tu sais qu’il ne serait pas tendre avec toi. « Ah, ça fait des mois que je me bats pour qu’on puisse avoir droit à d’autres repas que leurs sandwichs synthétiques » minaudes-tu en faisant de discrets allers-retours du regard entre lui et le poêle à bois. Tu te dis qu’il manque quelque chose, avant d’observer qu’aucun de vous deux n’avait levé la voix plus que de raison, depuis que vous étiez dans cette tente. D’habitude, tu en arrivais si vite à un point de non-retour que tu aurais presque le sentiment d’avoir franchi le seuil d’une réalité alternative –vrai que le pain a une sale tronche, même de là où tu te trouves. Les réflexions se bousculent ; tout porte à croire que la fièvre a fait enfler le chaudron de tes pensées. Cela dit, l’autre rafleur a tôt fait de tirer dans le tas.
T’es un abruti, Marcus Flint. Pourquoi tu me remercies alors que tu n’es clairement pas dans ton état normal ? Je ne sais pas ce que tu as pris, je m’en moque, je ne te dénoncerai pas, mais tout de même, je ne te pensais pas comme ça. Je te pensais beaucoup plus courageux que moi qui ne suis pas capable de reconnaître quand j’ai eu tort ou que j’ai eu besoin des autres. T’as pas le droit de me dire merci de cette manière-là, quand je ne suis même pas sûr que demain, tu t’en souviennes. On récolte ce que l’on sème, pas vrai ? A être superficiel avec les gens, on finissait par n’attirer que des comportements hypocrites et faux. Vous ne pensez tout de même pas que je pense tout ce que je dis ? Si ? J’aurais bien aimé que ce merci là ne sonne pas faux. Tu es censé être quelqu’un de si vrai, Flint ; je te croyais si imbécile car authentique ; à te vendre aux autres tel que tu étais vraiment, encourant le risque de te faire bouffer pour qui tu étais. Ça sert à se défendre, une carapace. Comment as-tu fait tout ce temps pour t’aventurer au-dehors sans l’ombre d’une coquille que celle qu’on vous fiche sur les épaules et le dos pour vous protéger des cognards ?
Si tu avais été en forme, tu aurais trouvé mille et une manières, toutes plus altières les unes que les autres, d’envoyer sa politesse bouler dans un coin. Seulement, on va dire que c’est à cause de la fièvre que, malgré l’amertume qu’il a provoquée, tu te contentes de répondre timidement un « C’est naturel, Flint ; tu aurais fait… la même chose pour moi… ? » tu n’as pas pu réprimer le haussement de ton timbre de voix sur la fin, donnant à ta remarque un air de question. Bah, après tout, tu connaissais sa réponse ; tout le monde dans la Ruche savait à quel point il était rébarbatif de remplir les papiers quand on souffrait d’une perte humaine lors d’une mission. Et au vu du mal que rencontrait Flint à rédiger ne serait-ce que la moindre ligne de rapport, tu te doutes bien qu’il valait mieux pour lui qu’il veille un peu sur toi. Parce que ce qu’on fait pour les autres, c’est jamais désintéressé, pas vrai ?
Lorsque ton corps malade s’accoutume de la chaleur de la potion et de la couverture, le froid commence de nouveau à s’immiscer, comme s’il traversait les grosses mailles du pull. Les mains que tu avais portées à ta gorge ne tardent pas à devenir glacées de nouveau, si bien que tu n’aurais pas été étonné de sentir des gerçures sur ta cicatrice. Tu coinces ta langue entre les deux rangées de tes dents pour en étouffer le claquement. « Je voulais te montrer que ça n’était pas qu’à la portée des intellos que tu cognais au collège d’enchaîner les sortilèges réussis. » Moi aussi je peux être sympathique sous le coup de la fièvre, Flint. Tu vas voir, c’est comme cette couverture ; ça fait du bien, au début, et puis soudain, elle se refroidit jusqu’à devenir aussi glacé qu’un doute. Mais malgré tout, ça ne veut pas dire qu’on ne le pense pas, hein ? C’est juste… plus facile comme ça. |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Marcus Flint | boris bagshot
fin août 2003 • dans la merde Il ricane un peu bêtement, affalé sur son fauteuil. Ça ne l’étonne pas tellement d’entendre que Bagshot s’est déjà plaint des tas de fois de la nourriture qu’ils refilent aux Rafleurs. C’est probablement la première chose qu’il a faite en arrivant dans l’service. Il peut presque l’entendre s’écrier C’est une honte ! Un scandale ! et ça le fait rire encore plus. C’est pas si mal. Bien sûr ils sont toujours au milieu de nulle part et peut-être que la maladie de la crevette est en train de le tuer à petit feu et ils ne s’en rendent même pas compte, mais il fait bon sous la tente, il a le ventre plein et il n’a plus mal nulle part. Bagshot lui fait même l’honneur d’une conversation presque… civilisée depuis qu’ils sont arrivés là. C’est assez étrange de rire d’une chose qu’il a dite, et non de se moquer de lui pour l’avoir dit. C’est probablement ça, autant que le Navitas, qui le pousse à formuler des remerciements clairs. Dans son état normal, il aurait plutôt grogné un truc un peu plus obscur, juste histoire de ne pas réellement dire merci tout en disant merci. Mais après une dose, il a tout sauf envie de compliquer quoi que ce soit. Et puis, ce n’est pas bien grave, de profiter de ne pas être tout à fait lui-même pour le remercier, si ? Il le pense, c’est le principal. Sa vie n’est peut-être pas grandiose en ce moment, mais il y tient quand même et sans l’intervention stupido-héroïque de Bagshot, la créature l’aurait bouffé, c’est certain. Alors le nabot peut être sûr d’une chose, s’il a eu besoin d’un coup de pouce pour dire merci, il ne le pense pas moins. Marcus a l’habitude des gens qui s’ouvrent plus quand ils sont pas vraiment eux-mêmes, Greg le fait sans arrêt quand il a vraiment trop bu. Il lui dit des trucs comme C’plus pareil sans toi, bah ouais que c’est plus pareil sans lui, il était putain d’bon. C’est ce qu’il lui répond, mais au fond il a juste envie d’chialer. Ça arrive aussi ça, quand il est en redescente complète, quand il a du mal de savoir comment il s’appelle, mais qu’il se souvient qu’il a tout perdu. C’est pour ça qu’il fait attention où et en présence de qui il prend une dose d’habitude.
Mais il doute que Bagshot parvienne à le faire chialer. De rire, peut-être. « C’est naturel, Flint ; tu aurais fait… la même chose pour moi… ? » Parce qu’à ces mots, Marcus éclate d’un rire franc qu’il met un moment à calmer. Quand il parvient à reprendre son souffle, il tourne la tête vers lui, et sans cesser de sourire, répond tout simplement : « Nan. » Il passe une main sur son visage pour tenter de mettre un peu d’ordre dans ses idées. « Si la bestiole avait été à deux doigts d’te croquer plutôt qu’moi, j’l’aurais laissée faire, » admet-il honnêtement. « Probablement qu’j’aurais regretté en m’retrouvant obligé d’écrire le rapport tout seul, mais j’aurais pas risqué ma vie pour toi. » Il y a une différence entre le sortir de la douche, lui enfiler des fringues sèches, et se dresser face à un monstre pour sauver la vie d’un type qu’il n’aime pas. Et même s’il a peut-être un peu revu son jugement sur Bagshot à présent, il n’est toujours pas certain qu’il le ferait. En fait, s’il y pense un peu, y a pas grand-monde pour qui il ferait un truc pareil. Ça doit se limiter à sa mère et Pansy. « Ce qui fait de toi, » commence-t-il en s’étirant longuement avec un grognement. « Un meilleur être humain que moi. Hé, qui l’eût cru, » se moque-t-il avec un sourire en coin. Marcus reporte son attention sur Bagshot, pour constater qu’il a l’air d’avoir de nouveau froid, même noyé dans son gros pull et blotti sous la couverture. Alors il soupire et fait l’effort de se relever, même s’il était vachement bien dans ce fauteuil, pour s’approcher de lui. « Je voulais te montrer que ça n’était pas qu’à la portée des intellos que tu cognais au collège d’enchaîner les sortilèges réussis. » Il ne cognait pas tant d’intellos que ça, si ? Seulement ceux qui ouvraient trop leur grande gueule et lui donnaient l’impression d’être un demeuré. Donc, seulement ceux qui le méritaient, finalement. Et puis, sortilèges réussis… Il en a foiré un et il a dû recommencer plusieurs fois avant d’enterrer la bestiole alors pas tellement, non.
Il est un peu tenté d’être vexé, au fond. Mais ça demande de l’énergie et la drogue dans son système l’encourage à prendre ça avec beaucoup plus de légèreté. « Boris, mon héros, » qu’il se décide finalement à grogner en levant les yeux au ciel, avant d’attraper le linge sur son front qui n’est plus assez frais. Sa main s’attarde sur la peau toujours brûlante de Bagshot et il va faire un tour rapide dans la salle de bain, pour humidifier à nouveau la serviette d’eau froide et la remettre sur son front. « J’sais que tu t’les pèles, mais j’peux pas faire grand-chose de plus. Faut que ta fièvre baisse. » Il se frotte la mâchoire, faisant crisser sa barbe sous ses doigts, d’un air un peu perplexe. « Tu devrais peut-être tenter de dormir ? J’en sais rien. T’as envie d’dormir ? Ça te ferait sûrement du bien. » Ou alors, il ne se réveillera jamais. Non, ce n’est pas tellement le moment de se dire ce genre de choses. Bagshot va s’en sortir et il n’aura pas à expliquer à ses supérieurs que son collègue est mort parce qu’ils ont été attaqués par un Nundu qui a réussi à lui postillonner au visage. Parce qu’il n’a vraiment pas envie de leur expliquer ça, là-bas. Ils vont encore le prendre pour un débile et lui dire que les Nundus en Angleterre, ça n’existe pas et peut-être même l’accuser du meurtre parce qu’ils savent tous très bien qu’il ne peut pas saquer la crevette. |
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| Marcus “fais pas genre t’as une belle gueule” Flint I love my ugly boy So rough and tough Don't care about anything but me I just love him cause he's so crazy Just crazy about me Tu devais avouer que, jusqu’à un certain moment, tu redoutais un peu sa réponse. Tu avais effectivement peur qu’il te réponde que, non, il n’aurait pas fait la même chose pour toi. C’est pour cette raison que tu lui avais présenté comme quelque chose de naturel, venant de ta part. Lorsqu’il éclate de rire, tu es même franchement vexé ; il était donc impossible de maintenir une conversation un tant soit peu sérieuse avec ce rustre ?? Surtout pour te répondre ça ??? Au fond, sa réponse te coupe tellement le souffle que tu ne parviens même pas à en être choqué. Cette honnêteté, presque maladive à ce stade, était pour toi du jamais vu. Et c’était cette sincérité que tu lui enviais. Ce cran de mettre les autres devant leur mouise. Comme si tout le monde était aussi résistant que toi, Flint. Heureusement que je sais à qui j’ai à faire, hein. T’en as fait fondre combien en larmes, avec des révélations de ce genre ? Les yeux ronds que tu as ouverts sous le coup de la surprise se plissent malgré toi et, si des larmes coulent, c’est uniquement parce que tu te mets à rire un peu bizarrement à cause de la toux.
Bien que ce fût cette réponse-là que tu craignais, maintenant qu’elle était tombée comme sonne le glas, tu ne parviens pas à t’en offusquer. Au contraire, la situation en est devenue tellement absurde ; il venait tellement de tirer à bout portant dans ton petit effet héroïque que ça en devenait… comique. Ce con a réussi, non seulement à rire à tes dépens, mais aussi à te faire rire. Tu découvrais, sur le tard, l’autodérision. Et quand en face, la personne n’était pas pétrie de mauvaises intentions -du moins, pas cette fois- c’en était presque… plaisant. Il fallait toutefois relativiser ; tu avais froid, étais malade comme un chien, cet homme t’en avait fait baver pendant tout ton stage au sein de la Ruche et vous étiez loin de rentrer avant d’avoir fini la mission, donc il allait devoir enchaîner les blagues, s’il espérait compenser avec ton état. Mais tout de même… c’est pas souvent que tu le vois rire comme ça, avec toi.
You got me there, Flint. Bien joué. « Ne me la fait pas à l’envers, Flint, je t’en prie ; je sais très bien ce que les rafleurs pensent des types comme moi… s’ils me considèrent seulement comme un type d’ailleurs. » Etrangement, tu n’as pas l’air blessé par ce que tu lui confies. Tu voulais tellement garder le contrôle sur ton environnement que tu en arrivais à accepter ce qui se disait sur ton dos tant que tu pouvais en être au courant, quand ça n’en était pas à l’origine ; pour ne pas dire que, de temps en temps, tu allais jusqu’à nourrir ce genre de propos –en glissant une insinuation vaseuse à Flint par-dessus un rapport, par exemple. Tu ne crois tout de même pas que je pense tout ce que je dis, pas vrai ? Même si toi, tu n’en es pas capable ; tu comprends bien que je fais ça uniquement pour me défendre.
« Mon héros »... T’es censé être en train de mourir de froid, alors les joues qui s’enflamment, ça jure un peu. Tu forces une quinte de toux pour justifier ton teint de peau soudain. Quelle idée de te sortir un titre pareil ? A tous les coups, il s’agissait d’une moquerie sous-jacente, en référence à l’époque médiatisée où tu avais ramené Astoria de chez les rebelles, saine et sauve. Tu ne sais pas ; tu as tellement l’habitude de rester sur tes gardes. Mais après tout, s’il avait voulu t’écraser, il aurait eu mille autres occasions de le faire. Tu ne sais pas comment agir avec des gens comme lui ; avec des gens un peu moins monstre que toi.
Il te raplatit la serviette sur la figure, s’excusant de ne rien pouvoir faire de plus. D’un raclement sec de la gorge, tu t’éclaircis la voix. Tu réintroduis tes bras dans les manches pour avoir un minimum de sérieux. Il s’agissait à présent de ne pas l’énerver. « Il y a quelque chose que tu pourrais faire de plus » débutes-tu le plus posément possible avec ton front pris et ta respiration sifflante que tu essaies d’atténuer. « Je sais que ça ne va pas v-te plaire » tu ne ménages pas de silence trop long, au risque de lui faire peur « Et crois bien que si je formule cette demande à haute voix, c’est précisément parce que je veux en ôter toute l’ambigüité » Voilà, dès que ça recommence à être tendu, tu te remets à parler de manière alambiquée. Tu t’efforces donc de préserver un ton détaché, bien que la précipitation te fasse lâcher cette dernière ligne d’une traite « Je pense que je vais avoir besoin que tu dormes avec moi cette nuit. » Tu prends une inspiration, ne lui laisses pas le temps de protester que tu t’expliques. « C’est uniquement à but curatif que je demande ça, Flint ; ta température à toi restera toujours plus élevée que celle des couvertures. » Tu te sens malin à lui demander une chose pareille, après tous les sous-entendus que vous aviez pu faire en vous cherchant des noises. Comme pour lui prouver que tu étais conscient de la délicatesse de ce que tu lui demandais, tu ajoutes le sourire en coin. « Promis, je touche pas » et de laisser retomber ta tête sur l’oreiller, l’œil un peu inquiet. Sois franc avec moi, Flint ; je ne te dégoûte quand même pas à ce point ? Au mieux, il éclaterait de nouveau de rire et tu pourrais faire passer ça pour une énième blague sous le coup de la fièvre… Oui, voilà, c’était la fièvre, même si ton regard s’était voulu tout ce qu'il y a de plus sérieux… |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Marcus Flint | boris bagshot
fin août 2003 • dans la merde Quand Marcus avoue à Boris qu’il n’aurait pas fait la même chose pour lui, ce n’est pas pour être méchant. Il est juste purement et simplement honnête, parce qu’il ne voit pas l’intérêt de lui mentir. Pour quoi faire ? Le préserver, lui donner l’impression qu’il a fait un truc parfaitement normal ? Comme si Bagshot avait envie que Marcus le préserve. Et son geste n’était pas normal, Flint connaît peu de personnes qui auraient fait la même chose pour lui. Il se sent un peu coupable, là-bas au fond. D’avoir traité la crevette comme une merde durant tout son stage alors qu’il vient de se montrer beaucoup plus courageux qu’il ne le sera jamais. Il se sent même plus con que coupable, finalement. Quand il y pense, Bagshot a plus de couilles que la plupart des Rafleurs, c’est assez déprimant, comme constat. Certes, il aurait pu lui dire Ouais, bien sûr que j’aurais fait pareil, mais il aurait tout de suite su qu’il mentait et ça, ça aurait été plus blessant finalement, pas vrai ? Marcus a toujours préféré qu’on lui parle franchement, même si c’était pour dire des saloperies. Bien évidemment, quand ça ne lui plaît pas, il répond avec ses poings ou une sale remarque, mais il préfère quand même qu’on le traite d’abruti en face, plutôt qu’on lui serve un sourire mielleux en pensant qu’il est trop con pour comprendre. Il n’est peut-être pas brillant, mais il n’est pas stupide au point de ne pas réaliser quand on le méprise. Quand on se fiche de lui. Quand on préfèrerait qu’il soit ailleurs. Il a l’habitude, avec son père après tout. Il ne détestait rien de plus que les sourires et les grands discours que son père faisait quand on venait le questionner sur la carrière de son fils alors qu’au fond, pour lui, ce n’était pas un vrai travail. Alors qu’il estimait que Marcus était une perte de temps et une honte. Au final, les mensonges blessent plus que la vérité, c’est ce qu’il a toujours pensé.
Il voit bien que Bagshot a d’abord l’air choqué par sa réponse et il commence un peu à s’inquiéter qu’il se vexe terriblement et se remette à lui parler comme… et bien comme ils se parlent d’habitude. Mais quand il l’entend rire à son tour, il se dit que tout n’est peut-être pas perdu pour la crevette. S’il arrive à faire preuve d’un peu d’auto-dérision, c’est qu’il y a encore de l’espoir pour lui, pas vrai ? « Ne me la fait pas à l’envers, Flint, je t’en prie ; je sais très bien ce que les rafleurs pensent des types comme moi… s’ils me considèrent seulement comme un type d’ailleurs. » A ça par contre, Marcus fronce un peu les sourcils. « Qui en a quelque chose à foutre, de ce que pensent ces bouffons ? » rétorque-t-il immédiatement. Quoi, c’est vrai non ? Ils ont toujours un truc à dire, sur tout le monde, de vraies gonzesses. Passée l’excitation d’avoir une ancienne star de Quidditch dans leurs rangs, ils se sont vite mis à raconter des saloperies sur lui aussi, quand ils ont réalisé qu’il n’avait absolument aucun talent pour la Rafle. Est-ce qu’il les écoute ? Est-ce qu’il en a quelque chose à foutre ? Ces types étaient des minables avant et continueraient d’être des minables après, courir après des rebelles c’est tout ce qu’ils savent faire, Marcus a pitié d’eux plus qu’autre chose. Sa vie est peut-être pas très marrante en ce moment, mais lui au moins, il a été quelqu’un avant de n’être plus rien. Il se console en se répétant ça et il évite pas mal de bagarres aussi. Sauf quand ça commence à faire trop mais hé, personne n’est parfait, pas vrai ? Lui aussi il tacle Bagshot dès qu’il en a l’occasion, mais c’est parce qu’il ne sait pas comment gérer autrement les personnes qui le prennent de haut. Quand il est déstabilisé, Marcus attaque, c’est comme ça. Et puis, il déteste déjà suffisamment son job, lui mettre un stagiaire dans les pattes, c’était stupide. « Tant qu’tu sais c’que tu vaux, les autres peuvent bien aller s’faire foutre, » confie-t-il. C’est ce qu’il a passé des années à se répéter. Inlassablement. Qu’il avait de la valeur, qu’il n’était peut-être pas brillant là où on voulait précisément qu’il le soit, mais qu’il était bon à quelque chose, non, excellent et que ça comptait, qu’il comptait. A présent, il n’en est plus aussi sûr, mais à une époque, ça lui a bien servi.
C’est assez marrant, de voir Bagshot rougir à sa petite plaisanterie. Il croit pas l’avoir déjà vu aussi déstabilisé et c’est pas qu’il aime ça parce qu’il se sent plus fort ou quoi, c’est juste qu’il aime bien découvrir que la crevette est pas juste une vitrine. Il ne déteste rien de plus que ça, les vitrines. Comme Greg, Daphne, Katie, tous ces gens dont ils ont retourné le cerveau et volé l’âme pour en faire des pantins. Marcus les hait pour ça. Il déteste qu’on puisse vouloir changer quelqu’un, pour le faire correspondre à ses attentes. Il n’a jamais correspondu aux attentes de qui que ce soit lui et c’est douloureux, d’accord ? C’est douloureux, mais il ne changerait pour rien au monde, encore moins si c’est pour finir comme eux. « Il y a quelque chose que tu pourrais faire de plus. » Il relève la tête vers Bagshot, attentif. « Je sais que ça ne va pas v-te plaire. Et crois bien que si je formule cette demande à haute voix, c’est précisément parce que je veux en ôter toute l’ambigüité » Ok, il recommence à tout compliquer en mettant trop de mots dans ses phrases alors qu’il suffirait juste qu’il formule sa demande. Marcus fronce les sourcils. « Je pense que je vais avoir besoin que tu dormes avec moi cette nuit. » Il ouvre la bouche, prêt à lui demander si Boris se fout de sa gueule, mais il enchaîne. « C’est uniquement à but curatif que je demande ça, Flint ; ta température à toi restera toujours plus élevée que celle des couvertures. » Pourquoi il se justifie autant ? Il croit quoi, que Marcus est terrifié à l'idée d'être approché de l'incroyablement pédé Boris Bagshot ? Il sait faire la différence entre de mauvaises blagues et une réelle demande. « Promis, je touche pas, » ajoute-t-il avec son stupide sourire en coin et Flint lève les yeux au ciel. Il ne doute pas suffisamment de sa propre masculinité pour se sentir menacé de dormir dans le même lit qu’un autre mec. Il sait qu’il y en a que ça gêne, lui s’en fiche complètement. Il s’est déjà écroulé avec Greg dans le même pieu après une soirée trop arrosée et il s’est jamais demandé le lendemain si ça les avait rendus pédés. Ensuite, il se doute bien que dans son état, la crevette ne risque pas de s’amuser à le tripoter et qu’il sait très bien que s’il venait à le faire, Marcus lui collerait probablement son poing sur la gueule, par réflexe. C’est pas qu’être touché par un gars qui aime sucer d’autres types le dégoûte, c’est juste qu’il aime pas trop qu’on le touche tout court.
Il n’aime pas trop dormir avec quelqu’un d’autre non plus. Enfin, plus depuis quelques temps. Marcus préfère avoir son lit, pour lui tout seul. Il préfère aussi n’avoir personne à ses côtés quand le sommeil le rend vulnérable. Enfin là, c’est Bagshot le plus vulnérable, pas vrai ? Bon. Ok, il va le faire, histoire d’avoir la conscience tranquille, pas vrai ? « Fais pas c’te tronche Bagshot, j’vais pas t’bouffer, » qu’il soupire avec un peu de lassitude. Il se redresse et remet quelques buches dans le poêle histoire d’être sûr que ça chauffe encore un moment, puis retourne auprès des lits superposés. Il se débarrasse de son pantalon – mais garde sa baguette - qu’il accroche à l’échelle et attrape la couverture du haut avant de baisser les yeux sur Boris. « Hop, pousse-toi, » qu’il grogne avec un geste de la main. Ouais. Bon. Il a connu plus spacieux. Mais il commence à être vraiment crevé et il préfèrerait s’endormir avant que sa dose de Navitas ne fasse plus effet et que la douleur revienne. Il se glisse donc à côté de Bagshot et d’un coup de baguette, éteint les lumières avant de la déposer au sol, à portée de main. Il rabat la couverture sur lui avant de se chercher une position pas trop inconfortable. Il a l’habitude de dormir sur le ventre, étalé de tout son long alors autant dire que ce n’est pas l’idéal. Il finit par se mettre sur le côté, le dos tourné à Bagshot. Paraît qu’il est une véritable fournaise, Boris sera peut-être le premier à pas s’en plaindre. « Et je sais que je suis irrésistible et que les types comme toi n'ont aucune morale, » commence-t-il avant de bâiller bruyamment, en reprenant sa formulation d'un peu plus tôt. « Mais rappelle-toi que j'ai qu'à rouler un peu pour te régler ton compte, » prétend-il le menacer avec un sourire en coin. |
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| Marcus “fais pas genre t’as une belle gueule” Flint I love my ugly boy So rough and tough Don't care about anything but me I just love him cause he's so crazy Just crazy about me La violence avec laquelle Flint rejette l’avis des autres rafleurs ne devrait même pas te surprendre. Tu avais observé qu’il avait toujours fait bande à part ; un peu dans le genre de Murdock –que l’on voyait d’ailleurs de plus en plus rarement. Tous deux faisaient partie de cette catégorie minoritaire de rafleurs qui étaient conscients qu’ils ne brillaient pas par leur intelligence ; cela les rendait plus humbles que l’autre majorité qui se croyait plus futée que tout le monde. Etrangement, ces derniers évoluaient toujours en bandes, comme des petits charognards qui auraient peur des véritables prédateurs lâchés dans leur enclos.
De fait, c’était tout à son honneur de n’en avoir rien à battre de ce qu’on pouvait penser de lui. Seulement, tu trouves que c’est plus facile à dire qu’à faire : tu ne sais absolument pas ce que tu vaux parce que tu ne te fies qu’aux jugements des autres : pour certains, tu étais un héros, pour d’autres, un traître. Un parvenu ou un petit génie. Un sale gamin pourri gâté ou un mangemort prometteur. Un canon de beauté ou de la chair à canon. Marcus pourrait continuer sa vie même si le monde entier était contre lui, parce que c’était quelque chose qu’il avait sensiblement déjà vécu à l’école. Toi, ça ne t’était encore jamais arrivé et poltron que tu étais, tu faisais tout pour que ça n’arrive jamais, quitte à chercher à te faire aimer de tous. Après tout, lécher une botte ou deux, ça ne mangeait pas tant de pain que ça, quand on savait mettre sa dignité au placard de temps en temps –et les placards, ça te connaissait. Ainsi, tu n’enverrais jamais les autres se faire foutre, sait-on jamais si un jour tu avais besoin d’eux… Tu te crois malin à avoir toujours deux coups d’avance sur tout le monde ; mais au final, devant tout le monde avec tes deux coups d’avance, tu te retrouvais bien seul.
À la bonne heure qu’il ne va pas te bouffer ; c’est bien dommage d’ailleurs. Tu abandonnes ta mine sérieuse pour avoir l’air visiblement déçu. D’apparence, seulement, parce qu’en réalité, tu n’en reviens pas qu’il ait si simplement accepté. Tu préfères te dire que c’est grâce à ton discours échevelé qui l’a rassuré. A ce stade, ton état se rapproche sensiblement de celui d’une groupie qui aurait le droit de passer la nuit avec son idole. Sensiblement. Qu’est-ce qu’il pouvait bien en avoir à faire que tu t’imagines déjà te lovant dans ses bras forts, sous prétexte de chercher un peu de chaleur ; ou même, soyons fous, les mains fourrées sous son tee-shirt. Peut-être même qu’il s’étalerait sur toi, comme une couverture humaine, ou l’inverse, toi perché sur son torse musclé~~ Pour le coup, c’est que la fièvre stimulerait presque ton imagination, tandis que tu suis attentivement des yeux le futal qui glisse de ses pattes.
Mais c’est sans compter le Marcus qui, une fois de plus, casse tout le délice de la situation en s’installant dos à toi. Ah d’accord, il voulait la jouer comme ça ? Non mais d’accord, tu avais saisi le message ; pas toucher, d’accord. C’est ce que tu avais promis, après tout. Tu es bon joueur, tu te contenterais de son dos –et quel dos. On devinait tous les muscles sous la mince couche de coton, tu aurais voulu qu’il n’éteigne jamais les lumières. « Tu n’aurais pas peur que je reste collé ? » La pénombre envahit la tente sur fond de ton petit rire satisfait. Tu restes un moment appuyé sur ton coude, ne sachant quelle manière serait la plus convenable pour t’installer. Au vu de la place que tu as dû lui laisser, tu vas devoir opter pour te rabattre également sur un côté. Et, afin de ne pas faire d’histoire –malgré la structure parfaite de ses muscles dorsaux- tu te résous à lui tourner le dos aussi. Toutefois, il s’agirait de ne pas cracher sur la chaleur que son immense corps allait te procurer tout au long de la nuit. De fait, doucement, tu cales ton dos contre le sien. Tu sens un court instant tous ses muscles qui se crispent. Sachant que s’il se décalait il se casserait la goule par terre, il semble se résigner à te laisser ainsi.
Tu dors rarement avec quelqu’un sans qu’il ne se soit passé quelque chose entre vous. C’est un peu étrange, cette absence de tension hormis celle dans le dos fatigué de ton collègue. Ça te renvoie à ta mission insurgée, où les couchettes se faisaient si rares qu’on apprenait à dormir un peu n’importe où, un peu n’importe comment. Avant Astoria, tu avais tendance à t’isoler, à multiplier les tours de garde. Cependant, quand la fatigue devenait trop pesante, tu t’enroulais dans une cape de fortune et quelqu’un finissait toujours pas te rejoindre. Parce qu’on ne peut allumer de feu quand on se cache. Et qu’à plusieurs reprises justement, la chaleur corporelle dégagée par les uns et les autres vous avait très certainement sauvé la vie. Ça te fait un peu bizarre de repenser à ça, d’en revenir à ces réflexes de survie ; surtout que dans le cas présent, il n’en allait que de la tienne. Ça te fait un peu bizarre, et peut-être même un peu mal au front. Mais là, sous les grosses mailles du gros pull, ça fait aussi un peu tiède.
Et, comme le noir est propice aux confidences, tu romps le silence d’un murmure « Tu sais, Flint, j’ai menti. » tu ne comptes pas lui faire la conversation toute la nuit durant, sentant d’ores et déjà les vapeurs du sommeil t’alourdir les paupières. « Ce que j’ai fait face au nundu, je ne l’aurais pas tenté avec quelqu’un d’autre. » Parce que tu es responsable de moi, Flint. Que tu n’avais pas intérêt à ce que je meurs, puisque tout à y gagner de me garder en vie. On peut tirer plein de choses de moi, tu sais. Je suis quelqu’un de très utile, je peux rédiger de très bonnes recommandations. Tu avais intérêt à me garder en vie. Parce que rien de ce qu’on fait n’est désintéressé. Mais qu’est-ce qu’il en a à faire de tes services pour monter en grade, Flint ? Il en a rien à battre de sa carrière rafleuse.
Tu ne cherches pas forcément à ce qu’il réponde ; il l’avait déjà fait. C’était ta manière bien à toi de le remercier. Et de lui prouver que tu lui faisais conf-. Le sommeil te tombe dessus. Il pèse lourd, t’enfonce dans le matelas comme si Flint te roulait effectivement dessus. Il te fige, t’assomme, comme on abrègerait les souffrances d’un animal. Cependant, la fièvre ne tarde pas à refaire surface, profitant que tu passes le nez hors des couvertures. Et elle t’agrippe, te prend au visage et à la tête. Elle sème des délires un peu étranges dans ta cervelle. Tu te revois chez les rebelles, à lutter contre un sommeil qui te serait mortel, tant l’air est glacial. Tu te vois, de l’extérieur de toi, mort de froid, à planer à quelques mètres au-dessus de ton corps. A cette époque où tu ne t’appelais pas Boris, ni Bagshot, ni Fagshot –mais qui donc t’appelait comme ça ?- mais Casper. « Laisse-moi tranquille, Casper » Casper le fantôme. « C’en est fini de toi » Casper-quasi-sans-tête. Et ta cicatrice se rouvre, béante comme une deuxième gueule –gueule d’ange, sourire de l’ange, et tout le décor autour de toi est sans dessus dessous, à cause de ta tête qui penche dangereusement en arrière.
Tu gémis ce nom que tu aimerais oublier pour de bon –pourquoi Mère n’a-t-elle pas effacé ça ? Pour les interviews, il fallait que tu puisses en parler. Tu gesticules de plus en plus, te débattant dans ses draps qui te semblent être des lambeaux fantomatiques qui t’étouffent comme les foulards serrés trop fort. Et la fièvre remonte avec la panique, et Astoria, tu ne veux pas y retourner, maman, promis, je serais obéissant, me renvoyez pas là-bas, j’ai rien demandé –pourquoi c’est moi que vous devez envoyer ? Pourquoi c’est moi qui dois oublier S- |
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PRISONERS • bloodstains on the carpet Marcus Flint | boris bagshot
fin août 2003 • dans la merde Il n’y a qu’une seule personne dont l’avis compte aux yeux de Marcus et c’est Viviane Flint. Si elle dit qu’il s’est montré idiot, alors c’est probablement le cas et il fera mieux la prochaine fois. Si elle pense qu’il est allé trop loin, qu’il a été inutilement blessant ou cruel, alors il ira s’excuser. Si elle pense qu’il est capable de le faire, il le fera. Elle est la seule à toujours avoir été de son côté, quoi qu’il arrive. Son père ne se prive pas pour la dire trop laxiste, trop tendre, pour dire qu’elle lui passe tous ses caprices. A vrai dire, il justifie tous ses échecs par la trop grande douceur de sa mère. Mais Marcus a plutôt tendance à penser que s’il n’est pas un immense raté, c’est grâce à cette femme. Et il n’a peut-être plus le Quidditch pour faire ses preuves à présent, mais c’est en partie à elle qu’il doit sa carrière, parce qu’elle l’a toujours encouragé. Ça n’a jamais rendu les remarques acerbes de son père moins douloureuses, les moqueries des autres moins pénibles à entendre. Mais se répéter chaque jour que tant qu’elle est fière de lui il peut se regarder dans un miroir sans trop se dégoûter, ça l’a toujours aidé. Alors oui, c’est plutôt facile pour lui d’ignorer l’avis des autres rafleurs. Il pensait que Bagshot s’en fichait autant sinon plus encore que lui. Après tout, il semble balayer les remarques avec une facilité déconcertante, renvoyer la balle aussi rapidement que s’il avait anticipé le coup. Marcus se dit que c’est probablement le cas, d’ailleurs. Mais sa petite confession, même s’il l’a faite d’un air parfaitement détaché, prouve bien que ça le touche ne serait-ce qu’un peu. C’est normal, Bagshot a probablement moins d’entraînement que lui à tout ça. Il ne peut pas dire qu’il se souvienne de lui à Poudlard – trop d’années d’écart et pas la même maison – sinon qu’il avait probablement la même gueule d’ange qui devait bien tromper tout le monde. Marcus a longtemps souhaité être invisible, lui. Ne pas exister ça paraissait mieux que d’être remarqué pour sa bêtise et son physique loin d’être avantageux. Malheureusement, il n’a jamais réussi à passer dans la foule sans être vu alors il a appris à faire peur, pour qu’on lui foute la paix. On le traitait comme un monstre alors pourquoi pas en devenir un ? Forcément, il n’a pas compris quand on a commencé à le regarder différemment. Quand il est passé du demeuré à l’As. Ils se sont tous mis à vouloir connaître son avis sur tout, comme s’il était brusquement devenu un grand sage avec une réponse pour tout. Ils se sont mis à le décortiquer, à vouloir en savoir plus, toujours plus sur lui. Et en même temps, il y avait ceux qui pouvaient pas s’empêcher de vouloir le voir tomber, s’effondrer. C’est bizarre la célébrité, hein Bagshot ? Les gens se mettent à attendre tout et n’importe quoi de toi, sauf ce que t’es vraiment.
Il le sent qui remue derrière lui et qui vient coller son dos contre le sien. Il se crispe soudainement, pas tellement parce qu’il est en contact avec Bagshot, c’est juste qu’il aime pas trop qu’on le touche, là. Le Navitas a endormi toutes les douleurs et pourtant, sa mâchoire se crispe pour retenir un cri à chaque fois qu’on s’approche de cette partie de son corps. C’est un réflexe, il ne peut plus s’empêcher d’associer le moindre contact avec son dos à une douleur terrible. Mais elle ne vient pas, alors petit à petit, il laisse échapper le souffle qu’il retenait et se rappelle que tout va bien. Oui, tout va bien, Bagshot est juste venu chercher un peu de chaleur, il n’y aura pas de douleur tant que la dose continuera de faire effet et il n’est pas dans une chambre d’hôpital à se faire charcuter. « Tu sais, Flint, j’ai menti, » s’élève alors la voix de la crevette, le surprenant un peu. Lui, mentir ? Il n’est pas surpris, Bagshot ne semble être qu’un immense mensonge. Quel point décide-t-il brusquement d’éclaircir, alors ? « Ce que j’ai fait face au nundu, je ne l’aurais pas tenté avec quelqu’un d’autre. » Marcus fronce les sourcils. Ça veut dire quoi, ça ? Qu’il lui faisait confiance pour arrêter le monstre ? Il a tort, on ne peut pas lui faire confiance pour lancer correctement un sortilège. Il a eu de la chance, encore un peu et Boris se faisait bouffer. Il en a conscience, pas vrai ? C’est ce qu’il se dit et pourtant, il n’arrive pas à empêcher les paroles de Bagshot de le réchauffer un peu. C’est assez gênant et comme il ne voit vraiment pas ce qu’il peut répondre à ça, Marcus se contente de grogner. Le genre de son qui veut clairement dire Ok, j’ai entendu, mais euh… voilà. Le silence s’installe et alors qu’il fixe l’obscurité de ses yeux grands ouverts, il entend la respiration de la crevette qui se calme, se fait plus régulière, prouvant qu’il s’est endormi. Il reste un moment comme ça à écouter, à se laisser bercer par le rythme du dos de Bagshot qui se colle un peu plus contre lui, puis se décolle à chaque fois qu’il inspire et expire. Il finit par s’endormir à son tour, la fatigue l’emportant sur l’inconfort d’être dans une position dans laquelle il n’a pas l’habitude de dormir.
Il voit d’abord les yeux. Immenses, jaunes. Il n’y a qu’eux et la pénombre. Et il sait à quoi appartiennent ces deux orbes, aussi bien qu’il sait que s’il ne s’enfuit pas immédiatement, la créature va le dévorer. Alors il veut se lever, prendre ses jambes à son cou, mais il en est incapable. Il est cloué là et quand il réalise pourquoi, il a envie de pleurer. D’abord il est figé, paralysé et l’odeur infâme des potions et des nuages toxiques lui donnent envie de vomir. Puis vient la douleur et il a l’impression qu’on le déchire en deux au niveau de sa colonne vertébrale. Et le monstre s’approche et il sent son souffle fétide sur son visage. Marcus laisse échapper un hoquet de terreur et de douleur et ferme les yeux, de toutes ses forces il ferme les yeux pour ne pas voir ce qui va lui arriver. Mais rien ne se produit et quand il ouvre à nouveau les yeux, la douleur est toujours là mais il est seul. Entièrement seul, dans la pénombre la plus totale. Il a du mal de respirer, de plus en plus. Il a froid aussi, il sent ses extrémités qui s’engourdissent et il en vient à souhaiter que tout son corps ne ressente plus rien. Quand il entend du bruit au-dessus de sa tête. Et il voudrait crier pour dire qu’il est là et par pitié sortez-moi d’ici et j’vous en prie ne m’laissez pas là et je suis là, je suis vivant, aidez-moi. De la poussière lui tombe dessus, sur le visage, obstrue ses voies respiratoires, lui brule les yeux. Puis la lumière l’aveugle complètement et tout est blanc, si blanc, trop blanc. Des visages qu’il ne connaît pas passent au-dessus de lui. Ils parlent à une lenteur qui le rend fou, pour dire qu’ils sont désolés et ce simple mot semble leur prendre une éternité à prononcer. Ils sont désolés, ils ne peuvent rien lui donner contre la douleur. Ils sont désolés, ils ne peuvent pas l’endormir, ils sont désolés, désolés, désolés et lui il veut crever.
Quand il ouvre les yeux sur la même pénombre, Marcus se retient de faire quelque chose de pitoyable, comme laisser échapper un sanglot. Il se dit d’abord que ça recommence et il ne sait pas ce qui lui fait le plus peur. Revoir ces yeux, ou les visages tristes et navrés des médicomages et infirmières ? Il ne sait plus où il est, il sait à peine comment il s’appelle à vrai dire, seulement que son t-shirt lui colle à la peau et qu’il n’arrive pas à respirer. C’est Ste Mangouste all over again, c’est lui prisonnier sous les décombres, le corps en miettes, c’est lui seul et terrifié et incapable de reprendre son souffle, c’est lui qui va crever et— C’est bref, fugace, au début. Puis ça recommence, là, du coin de l’œil il aperçoit comme une lueur vacillante. Alors Marcus prend conscience qu’il y a quelqu’un à côté de lui. Son regard accroche la lueur qui est en réalité une poussière clignotante avec la silhouette de quelqu’un. Il ne réalise même pas que la surprise l’a détourné de sa panique et qu’il respire à grandes bouffées d’air à présent, il est juste hypnotisé. Il sait que ce qu’il a sous les yeux, c’est de la magie. Ou plutôt, le flux magique d’un sorcier. Ce n’est pas la première fois qu’il perçoit ça, les Flint ont toujours eu un talent particulier pour repérer les flux magiques après tout. Mais disons que comme dans bien d’autres domaines, Marcus a de grosses difficultés à les capter.
Il repère sans trop de problèmes la magie des sorciers qu’il côtoie beaucoup. Celle de sa mère a des airs de nuage gonflé de torrents d’eau et d’éclairs, de toutes ces choses trop contenues qui ne demandent qu’à exploser. Ce qu’il a sous les yeux, ça lui rappelle Daphne et Greg. C’est instable et confus et presque… malsain. Il y a un truc qui cloche. Quand il sent que ça s’agite à côté de lui et quand il entend Bagshot – parce qu’il se rappelle, maintenant – gémir, il se penche pour chercher sa baguette à tâtons et remettre de la lumière. Marcus se retourne vers lui et la poussière a disparue, mais Bagshot est bien là, à se débattre avec la couverture, ses mains refermées autour de sa propre gorge et il continue d’appeler ce—c’est qui, Casper ? Il est presque heureux de constater que Boris est au moins aussi endommagé que lui, ça lui permet d’oublier ses démons qui ont également décidé de venir le hanter. Sa main vient trouver l’épaule du jeune homme qu’il secoue un peu durement. « Hé, réveille-toi, » commence-t-il d’une voix rauque. Sa gorge est douloureuse, il se demande un moment s’il a pas crié, lui aussi. Heureusement que personne n’est là pour les voir, c’est pathétique. « Bagshot, réveille-toi, » répète-t-il en pressant un peu plus son épaule. Avec un grognement, il lui attrape les mains – elles sont brûlantes, il a autant de fièvre qu’avant – et les détache de sa gorge, avant de le manœuvrer jusqu’à ce qu’il soit étendu sur le dos. « Réveille-toi ou j’vais devoir t’en coller une, » qu’il grogne sans réelle animosité, il est plus dépassé et épuisé qu’autre chose. |
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