Elle devrait tourbillonner sur la piste. Ses talons devraient s’abimer sur le parquet impeccable, une paire de chaussures qu’elle ne remettra jamais, de toute façon. Elle devrait sourire aux invités qui s’étaient empressés aux portes de la demeure des Greengrass pour célébrer son retour. Des invités qui n’étaient que curieux de voir de plus près celle qui faisaient les couvertures des magazines et journaux. Celle qui avait passé quatre ans en enfer, entre les mains de ces « terroristes », cette « vermine » qui ne méritait que « d’être réduit à néant ». Les critiques, Astoria n’en avaient que faire. Elle avait eu le temps de protester et de les traiter verbalement pendant toutes ces années. Elle avait eu le loisir – un des rares – de pouvoir les descendre plus bas que terre comme eux faisaient avec elle. Toutes ces personnes s’agglutinant autour d’elle lui donnaient le tournis, la pressaient de questions auxquelles elle ne voulait pas répondre. Et pourtant, elle devait garder toute sa superbe, toute cette élégance qu’elle avait pourtant abandonné pendant quatre ans. Retrouvée les robes de bal, les lustres scintillants et les buffets somptueux, voilà qui devrait la combler, elle qui n’avait rêvé que de cela durant son emprisonnement. Être le centre de l’attention l’épuisait plus que cela la réjouissait. La semaine avait été longue et les nuits, courtes. Coupées de cauchemars, la belle se réveillait souvent en panique, sa main agrippant sa baguette, le regard en alerte, le souffle saccadé. Elle avait peur, elle était terrifiée de retrouver ces cages de malheur. Un sentiment de claustrophobie avait naquis dans son for intérieur et c’était précisément ce qu’elle ressentait en ce moment précis. La sensation d’étouffer, d’être submergée, qu’on la privait de nouveau de sa liberté. Pauvre enfant, ses yeux mûris s’attardaient sur le visage de personnes qu’elle ne reconnaissait pas, qu’elle ne connaissait plus. Bien sûr, certaines figures lui étaient familières mais ce n’était pas celles qui se pressaient pour venir la voir, pour venir montrer leur soutien, pour compatir. La compassion, la pitié, voilà deux notions dont la jolie fleur acceptait mais portait lourd dans son cœur. Cette soirée n’était qu’un moyen pour elle de se remémorer de ses années de calvaire, alors que pour eux, ce n’était qu’une réception parmi tant d’autres, des conversations anodines, comme s’ils ne remuaient pas le couteau dans la plaie un peu plus. Mais chaque dialogue, chaque main sur son épaule, chaque regard bienveillant n’était qu’un coup de plus dans ses nerfs déjà fragiles. Et pourtant, la gamine ne perdait pas son sourire, ni ses mots doux face à ceux qui faisaient preuve de délicatesse vis-à-vis de sa situation. Situation chaotique pour une jeune fille qui n’avait même pas encore vingt ans, à peine dans la fleur de l’âge, coupée alors qu’elle n’avait pas encore éclos. Mais les traits fins de la demoiselle se montraient résistants face aux regards insistants, inquisiteurs de ceux qui pensaient et voulaient la voir craquer. Que cela serait réjouissant de voir un membre de cette famille lisse de l’extérieur craquer en plein bal. Mais ce n’était certainement pas Astoria Greengrass qui allait craquer, qui allait laisser ce plaisir malsain se concrétiser. Son cœur et son âme s’étaient durcis et ce n’était pas la curiosité morbide de quelques têtes hautes placées qui allaient la déstabiliser. Elle avait vécu pire, pouvait-elle se vanter de dire.
Les heures avancèrent et ses chevilles lui faisaient mal. Elle n’avait plus l’habitude de porter des talons aussi longtemps. Sa poitrine se soulevait à chaque lampée de champagne qu’elle prenait de façon délicate. A vrai dire, la belle plante noyait son mal être dans ces flutes enchanteresses, au liquide d’or qui n’appelait qu’à être bu. Cela lui permettait d’oublier – un peu – le récit qu’elle se mettait à dire à chaque fois qu’on venait l’aborder. Oui, cela avait été dur. Non, sa sœur n’était pas coupable, elle avait juste été manipulée. Oui, elle avait vécu un véritable supplice. Oui, ses parents lui avaient manqué énormément. Non, elle n’avait pas vu Potter et sa clique (à vrai dire, elle avait bien vu Granger et Lovegood mais ça, il était mieux de le garder pour soi afin d’éviter davantage de questions). Astra n’était qu’une marionnette qui répétait docilement ce qu’on lui avait dit – ce que son père lui avait ordonné de dire. Son regard regardait la sortie d’un air envieux, la musique lui donnant plus mal aux tempes que l’envie de danser. Les étoffes des robes n’attiraient pas son œil pourtant avide de couture. Ses lèvres ne décoinçaient pas de curiosité quant à ses invités – après tout, ils étaient là pour elle et non l’inverse. Mais son sourire resta là, placardé sur le visage que sa mère avait pris soin d’apprêter pour ce soir. Ses doigts fins tenaient une flute à peine entamée qu’elle abandonna sur la nappe blanche de la table de réception. Elle voulait sortir d’ici et tout le monde semblait maintenant assez enivré de musique et de danse, de liqueur et de nourriture, pour ne plus faire attention à elle. Astoria glissa silencieusement hors de la salle, priant pour que personne – ses parents, par exemple – ne l’intercepte – ne lui ordonnent de retourner à l’intérieur.
Une fois à l’extérieur, la soigneuse jeune fille eut un soupir de contentement tout en se dirigeant vers l’escalier. Ses pas résonnaient agréablement dans le lieu silencieux. Elle devrait pourtant avoir en horreur le silence. Cette solitude qui fut sa seule compagne pendant quatre ans, riant sur son épaule des larmes de l’enfant qui voulait retrouver son cercle d’amis, ses connaissances, sa famille. La solitude n’avait jamais été quelque chose qu’Astoria affectionnait. Sauf quand elle dessinait ou qu’elle peignait. Mais depuis toute petite, elle avait toujours apprécié être entourée, avoir des gens avec qui parler, plaisanter, critiquer. Malgré ses airs de capricieuse, elle n’était pas une amie compliquée. La cadette Greengrass compensait son mal d’amour familial par celui de ses amis, quitte à se montrer naïve et à s’en brûler les doigts.
« Il est un peu tôt pour quitter la réception, non ? » La belle s’arrêta nette au milieu des marches et se retourna pour voir si on s’adressait bien à elle. Mais considérant qu’elle était la seule à quitter la réception dans ces lieux mêmes, il semblait évident que la voix s’adressait à elle. « Felix Meir Hvedrung, à qui ai-je l’honneur mademoiselle ? » Cette dernière pencha la tête quand elle vit un jeune homme s’extraire de sa cachette et s’approcher d’elle. Il avait un sourire éclatant, presque contagieux. Et son regard, taquin et amusé, lui changeait profondément de ceux qu’elle a pu croiser durant la soirée. « Astoria Greengrass, répondit-elle presque automatiquement. » Elle ne se rappelait pas d’avoir vu ce Felix dans la salle. Il faut dire que bien d’autres personnes ont monopolisé son attention, assez pour la démotiver d’aller à la rencontre de ceux qu’elle n’avait pas encore vu. « Dver. Drong. Je sais, c’est difficile à prononcer en anglais. Pas d’inquiétude, vous n’avez pas même à le répéter, pas vous. Felix, me suffira amplement. Vous comptiez fuir la fête ? Vraiment ? » Astoria ne put empêcher le fin sourire qui s’échappa de ses lèvres face à cet étrange personnage. Il était amusant. Etrange mais amusant. Et il avait cet accent appuyé qu’elle ne connaissait pas. Mais qui ne manquait pas de charme. La cadette Greengrass tendit la main pour attraper la flute qu’il lui tendait et y but une gorgée avant de répondre. « Je préfère voir cela comme un gain de place pour ceux qui veulent vraiment s’amuser. » Après tout, elle n’avait pas la tête à ça, ce soir, elle qui était pourtant une fêtarde inavouable à Poudlard. « Mais vous ne pouvez pas, pas avant d’avoir au moins dansé avec moi. Ce serait là une terrible erreur, juré. » Il gravit les quelques marches qui les séparaient et arriva à sa hauteur. Il était véritablement séduisant mais la jeune fille, malgré son air poli et enjoué, gardait ce recul certain face à cet étranger qui avait déjà sa main la sienne, les lèvres effleurant sa peau avant de l’embrasser sans aucune pudeur. La jolie demoiselle fut surprise mais Felix n’en perdit pas de sa superbe pour autant. « Acceptez de danser avec un pauvre étranger, mademoiselle. Sinon j’en aurais le cœur brisé. Montrons à ces anglais quelle erreur terrible ils ont osé commettre en ne daignant pas vous faire danser. Et puis… ils n’ont assurément pas le swing des danois. » Voilà la raison de l’accent, se dit-elle. Le Danemark, un pays assez abstrait dans l’esprit d’Astoria. Et pourtant, le jeune homme qui se présentait à elle avait le prestige même d’un pur anglais. Quoiqu’un peu déjanté quand même.
« Est-ce que c’est mon père qui vous envoie ? » La fille savait que le père recherchait avidement à marier ses deux progénitures le plus rapidement possibles. Sa voix était donc suspicieuse, ne cachant pas les points d’interrogation dans ses iris. Cependant, la belle enfant ôta doucement sa main de l’emprise – pourtant agréable – du jeune homme et eut un sourire désolé. « Ne prenez pas ça comme un refus mais je suis vraiment fatiguée et je… » Elle s’interrompit, comme si elle cherchait ses mots, avant de relâcher ses traits d’un air dépité. « En faites, c’est un refus, dit-elle dans un rire sans humour malgré elle. » Elle passa la main sur son visage puis caressa une de ses sourcils tout en se mordillant la lèvre supérieure avant de rire nerveuse. « La soirée a été… Longue et éprouvante. Et je– Je ne suis plus– Plus habituée à tout ça, voyez-vous. » Elle s’embarrassait toute seule en bredouillant et cela était humiliant. « Et je suis en train de me conduire comme la reine des cruches, comme si c’était mon premier bal. » Evidemment que ça ne l’était pas. Mais ça l’était en quatre ans et c’était déjà assez énorme en soi. « Je suis vraiment désolée, ce n’est pas dans mes habitudes d’être comme ça. » Ses nerfs, retenus depuis quelques heures déjà, lâchaient. Voilà pourquoi elle voulait s’enfuir. Voilà pourquoi elle voulait s’isoler. Ses yeux papillonnaient furieusement, car elle était agacée de son propre comportant, de cette réaction qu’elle ne maîtrisait pas. Astoria Greengrass faisait toujours preuve de contrôle de sa personne et là voilà qui s’affalait émotionnellement devant un parfait inconnu à l’accent charmant. « Vous… Vous feriez mieux de vous trouver une cavalière plus agréable que moi, lança-t-elle dans un sourire triste avant de tenter de s’échapper de nouveau. » Quelle triste honte, heureusement que ses géniteurs n’avaient pas été là pour voir ce spectacle affligeant.
« Pour ça, belle Astoria, il faudrait que je sache quel visage à votre père. Or, tous les vieux anglais se ressemblent pour moi. Coincé, l’œil sévère, la bouche dédaigneuse ? Voilà, vous voyez, tous pareils ! » Voilà qui eut l’effet de soutirer un sourire sur les lèvres de la belle, une démonstration amusée qu’elle s’empressa de cacher en baisser les yeux vers le sol, comme si ledit père pouvait apparaître et la punir de laisser un étranger se moquer de lui – et pire, d’y prendre plaisir. Jamais le patriarche Greengrass n’aimait qu’on le traite sans le respect qu’on lui devait. Y compris ses filles et sa femme. Ce Felix aurait risqué de gros ennuis si jamais Wyatt, ou un de ses sbires, avait eu les oreilles qui traînaient dans les environs. « Mmn, donc pas de danse. D’accord. » La sorcière ne rêvassait que d’un bon bain pour relaxer ses jambes, meurtries par les talons, lourdes d’avoir été debout toute la journée. Et aussi pour apaiser son âme, pour détendre son cœur, pour relâcher ses nerfs. Cette réception était trop rapide, sa mère s’était précipitée dans l’organisation. Astoria était prête à parier qu’Hortense, malgré sa poigne de fer et une organisation impeccable, de cette élégance si française qui parfois en agaçait plus un – même sa famille, notamment quand elle perdait patience, aurait été capable de monter cette même réception le lendemain même de la libération de sa fille. Heureusement pour sa cadette, elle avait eu la délicatesse d’attendre un peu, mais pas assez. « Voyons, ma chérie, il faut que l’on montre publiquement que tu es de retour à la maison, auprès des tiens, et toujours fidèle au Magister. » Alors elle s’était frottée à des mangemorts aux regards lugubres, aux traits soupçonneux, à la démarche fluide, prêts à dégainer leur baguette au moindre faux pas. « Charmante ou cruche ? » Les yeux de velours de la princesse de la soirée se posèrent sur le jeune homme de façon à lui dire « Cessez donc de vous moquer de moi. Vous m’avez très bien comprise. » Astoria était de la sorte ; elle communiquait ses pensées et ses émotions, ses envies et ses peurs par le regard, par des moues qui pouvaient parfois trahir ses paroles, par des actions allant à l’encontre de ses propos. C’était une jeune fille bourrée de contradiction, de complexité, que même elle n’arrivait parfois pas à suivre ; elle jouait sur tellement de tableaux qu’elle en perdait souvent le fil. « Malheureusement pour vous, je n’ai pas envie d’une autre cavalière. En fait… que ça reste entre nous hein ? » Une emprise sur son bras la stoppa dans sa montée, la fit même reculer de quelques pas pour se retrouver finalement plus proche que précédemment de son interlocuteur. Ce danois n’avait aucun scrupule, aucune pitié pour sa personne, visiblement. Heureusement qu’il était plutôt charmant sinon, la belle rose n’aurait pas hésité à le refouler de façon un peu plus directe. Elle n’était vraiment pas d’humeur à se laisser attendrir par de belles paroles et un regard céruléen qui semblait presque la déshabiller entièrement. Et pourtant, dans sa folie personnelle, le jeune homme l’entraînait bien malgré elle dans un des salons de la demeure – salons que sa mère entretenait avec soin car il était courant que des invités s’y isolent pour y être plus tranquille (Astoria n’osait imaginer ce qu’il s’y passait). « J’adore les femmes désagréables, fatiguées et un peu cruches. Même si je pense que ce dernier fait est à revoir en ce qui vous concerne. Les cruches ont normalement déjà retroussées leurs jupes. Ce qui n’est pas votre cas. » La jeune Greengrass lui lança un regard à la fois surpris et courroucé ; pour qui l’avait-il prit ? Elle était une enfant de bonne famille, jamais elle n’aurait l’idée de… retrousser sa jupe au premier venu. Même si celui-ci était séduisant et avec un accent qui, soufflé à l’oreille, ramollissait littéralement ses pauvres membres déjà bien fragiles.
Bras croisées, Astoria se trouvait bien gourde au milieu d’une piste qui n’était même pas de danse. S’il n’avait pas compris qu’elle pouvait être entêtée, il allait très vite y goûter. Felix était joueur, il avait ce regard qui pétillait d’une lueur nouvelle, qu’elle-même n’avait guère vu dans sa courte vie. Être traitée de la sorte lui changeait complètement de ce qu’elle avait pu vivre au rez-de-chaussée ou durant cette dernière semaine quand elle sortait (parfois) dans la rue. L’entêtée demoiselle avait l’impression de se retrouver face à un enfant qui lui tournait autour pour recevoir une sucrerie. Puis, ce dernier eut un soupir de dépit, faussement orchestré puisque suivi d’un rire certain. « Allons Astoria, une petite danse, juste une ! Vous en avez assez d’eux tous, en bas. Mais ici, seule avec moi, c’est autre chose. » Il eut l’indécence d’ôter sa veste et de remonter les manches de sa chemise, éclatant ainsi la marque noire de son avant-bras aux yeux de la courtisée. Elle pâlit légèrement, même si elle savait qu’elle ne risquait rien. Elle était une Greengrass, son père était un mangemort réputé et loyal, jamais Felix n’oserait quoique ce soit. Mais la marque du Seigneur des Ténèbres n’était jamais chose plaisante à voir et elle se força à détacher son regard de cette vision qui lui rappelait d’assez mauvais souvenirs. « Ooooh, mais j’y suis ! En fait, ce n’est pas tant par fatigue que vous ne voulez pas danser. Vous avez oublié les pas ! » Il lui prit les mains sous les yeux inquiétants de la demoiselle ; allait-il véritablement la forcer ? Car elle n’hésiterait pas à lui marcher sur les pieds et lui donner de furieux coups de coude s’il persistait dans sa propre folie. Mais non ; il la dirigea vers un fauteuil et Astoria ne put s’empêcher d’émettre un soupir à la fois de soulagement et de contentement. Comme c’était fort agréable de se laisser mouvoir dans le tissu mou d’un siège confortable. Voilà ce qui lui avait manqué pendant quatre ans. Le plaisir simple, celui-là même de pouvoir se ratatiner jusqu'au fond d’un fauteuil et s’y laisser se reposer. « Ne bougez pas ! » Où allait-il maintenant ? Ou était donc le bouton off ? Y avait-il un moyen d’arrêter cet homme qui revenait déjà, essoufflé, les deux flûtes en main, mais toujours avec cet air amusé qui ne le quittait pas une minute. La vie serait-il un jeu, pour lui ? Quoiqu’il en soit, la jeune sorcière ne savait plus trop à quoi s’attendre alors qu’il lui tendit son verre tout en s’inclinant. « Dans une autre vie, j’étais un prestigieux domestique. » Quand même un brin agacé, Astoria sentit ses lèvres se tordre d’un nouveau sourire amusé tout en le remerciant d’un hochement de la tête. Parce qu’il n’était pas un domestique. Il était un mangemort, un étranger de surcroît, il devait donc forcément avoir une bonne réputation. « Si vous avez été un domestique, vous saurez qu’il n’est pas de bonne augure d’agacer sa maîtresse de la sorte. » Sa voix était un brin rouée mais sa moue taquine ; grand dieu, la voilà qui entrait dans son jeu malgré son apparente aversion. Mais après, est-ce qu’une femme ne pouvait pas se laisser attendrir par un sourire charmeur de temps en temps, surtout quand la séduction et la flatterie furent absentes pendant quatre longues années ? Contre sa volonté, la jeune Greengrass se pouvait s’empêcher de ne pas fondre, de ne pas être en émoi face à ce danois excentrique. Il la divertissait sans vraiment qu’elle s’en rende compte en tout juste cinq minutes de conversation.
Alors que la délicate fleur portait à ses lèvres sa coupelle, le danois s’était mis visiblement plus à l’aise, en ôtant son nœud et déboutonnant son premier bouton. Astoria arqua un sourcil ; à quoi jouait-il à présent ? Presque par bonheur, elle fut rassurée qu’il n’en dévoila physiquement pas plus. Il suffisait que quelqu’un débarque dans le salon pour après colporter des rumeurs aussi absurdes et grotesques les unes que les autres. Et elle ne souhaitait vraiment pas avoir de problèmes avec son géniteur – et il en allait de même pour Felix. « Maintenant que vous êtes bien installée, Astoria, laissez-moi vous faire une petite démonstration. » Elle n’avait pas oublié les pas. Sa mère avait tout fait pour que sa mémoire revienne, que ses pieds reprennent ce ballet qu’elle lui avait enseigné toute sa vie. Comme un pot cassé que l’on répare, Hortense s’était empressée de remettre sa fille à niveau, de lui ôter toutes ses mauvaises manies de prises – comme le dos courbé ou le visage teigneux – et de lui rappeler comment une jeune fille de bonne famille devait se tenir. Et cela passait aussi par la danse. « Vous allez voir, les femmes invisibles m’adorent ! Je fais un excellent partenaire ! » Et il se mit à bouger les pieds en fonction de cette partenaire inexistante, son visage malgré tout devenu sérieux, comme s’il voulait lui montrer, lui prouver qu’il n’était pas qu’un gamin dans le corps d’un homme. Le visage rieur, Astoria ne pouvait le stopper ; cela faisait bien longtemps que quelqu’un ne l’avait diverti de la sorte – et encore plus ce soir, où tout lui semblait fade et sans saveur. Felix fit tournoyer sa partenaire, encore et encore jusqu’à finir par s’arrêter, faussement épuisé mais véritablement hilare de sa démonstration. « Elle est malade. Là, dans le coin. Ça leur arrive tout le temps ! Tsk ! » Les pupilles bleutées firent un allé/retour vers le coin pointé en question avant qu’elle secoua la tête, l’air moqueur face à ce jeu qu’elle trouvait drôle et puérile. « Venez Astoria, venez danser avec moi. Promis, je ne vous ferais pas tournoyer autant qu’elle. » La gamine courtisée trépignait dans son for intérieur, allez, vas-y, bouges toi les fesses, vas danser, regarde comment il serait presque prêt à se jeter à tes pieds pour te retenir ! Mais la jeune femme distinguée qu’elle devait être se mordilla la lèvre tout en observant la main tendue avec intérêt. « Il me semble que je n’ai guère le choix, de toute façon. J’ai comme la sensation que vous ne me laisseriez pas partir sans avoir obtenu gain de cause. » Elle eut un faible soupir faussement contrarié avant de finir d’une traite sa flute, grave erreur qu’elle remarqua alors qu’elle se relevait, la main glissée dans celle du jeune homme, et qu’un tournis la prit de court. « Je crois que je ne suis pas encore réhabituée aux simples plaisirs, dit-elle alors qu’elle porta sa main libre sur son front, un sourire mi désolé mi chaleureux à son interlocuteur. Vous promettez de ne pas me faire tourner autant ? Car il serait fâcheux qu’un incident vienne nuire à vos projets d’amusement. » Une fois n’est pas coutume, ce fut la demoiselle qui l’entraina sur le milieu de la piste, comme pour s’éventrer de dire plus vite nous commencerons plus vite nous finirons. « Sachez, mon bon ami, que je n’ai nullement oublié les pas. Certes, je suis peut-être un peu rouillée, bien que cela soit une des terribles conséquences d’une situation non souhaitée. » La belle glissa sa main sur l’épaule du jeune homme, se collant à lui, et lui offrit un regard des plus charmeurs de ses iris scintillants. « Mais si le cavalier se montre à la hauteur, je peux retrouver mon aisance en un instant. » Astoria baissa légèrement les yeux pour y noter leur proximité notoire. Elle n’avait pas été proche, aussi intime avec un homme depuis… Elle ne préférait ne pas y penser. Cela ramenait (une nouvelle fois) des souvenirs bien trop douloureux qu’elle souhaitait occulter de son esprit. Son attention fut de nouveau ramenée par l’odeur masculine de Felix, ainsi que son souffle chaud contre son visage qui lui firent relever la tête, plongeant une sollicitude toute nouvelle, comme si c’était la première fois qu’elle le voyait – ce qui n’était pas vraiment loin de la vérité, en somme. « Faites-moi donc danser, monsier Hedrong... Hevdrang..., elle posa son front sur l’épaule de son partenaire dans un petit rire nerveux. Je suis désolée, dit-elle en redressant le cou, une moue véritablement découragée placardée au visage. Je crois que je m'en tiendrai à Felix. »
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