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sujet; i'm the maker of my own evil (hecate)
MessageSujet: i'm the maker of my own evil (hecate)   i'm the maker of my own evil (hecate) EmptyJeu 18 Juin 2015 - 17:31

PRISONERS • bloodstains on the carpet
Simon Rosier
Simon Rosier
‹ disponibilité : dispo (1/6)
‹ inscription : 07/09/2014
‹ messages : 1145
‹ crédits : tplrs (avatar), tumblr (gifs).
‹ dialogues : #669999.
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‹ liens utiles :
‹ âge : trente-huit ans (24/05/66).
‹ occupation : criminel, propriétaire déchu du Centuries.
‹ maison : Serpentard.
‹ scolarité : 1977 et 1984.
‹ baguette : brisée.
‹ gallions (ʛ) : 5330
‹ réputation : il n'est plus rien, l'héritier réprouvé d'une famille presque extincte, indigne de toute confiance et bon à moisir dans les geôles d'Azkaban.
‹ faits : toujours considéré comme une ordure remplaçable, dans le clan désuni de Voldemort, Rosier est désormais perçu comme un lâche ayant déserté avant la bataille finale. Un monstre qui a abusé de la confiance d'une sorcière honnête (Anna), et un père indigne par-dessus le marché. Nombreux sont ceux qui auraient aimé maintenir la peine de mort jusqu'à ce qu'il y passe.
‹ résidence : Azkaban.
‹ patronus : un vague filet argenté, sans forme ni consistance.
‹ épouvantard : un précipice.
‹ risèd : une plage, avec Anna et Charlotte.
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i'm the maker of my own evil


Fall on your knees, I hear the horrid voices of someone else’s angels



   
   
   
Il y avait des choses qui ne changeaient jamais.
Comme lui et son rachis écrasé contre ce container rongé par la rouille, en train de tirer sur la clope de minuit, alors que Julian était trop occupé à se plaindre pour s’apercevoir que personne ne l’écoutait. Comme le silence nerveux de ceux qui attendent, dévorés par l’impatience et rongés par l’ennui, à mesure que les minutes s’égrenaient. Comme l’écho de la symphonie urbaine, de l’autre coté de la frontière magique. Des cernes noirs soulignaient ses globes azurs, à l’instar de deux cocards guérissant péniblement ; des épis épars se dressaient sur le sommet de son crâne, et donnaient l’impression qu’il avait vainement tenté de les discipliner avant de transplaner. Il n’avait pas prononcé un mot depuis qu’ils étaient arrivés aux docks, mais Julian, loin de s’en offusquer, se lamentait de l’état actuel de la ligue de Quidditch, des équipes spoliées de leurs joueurs (« on devrait faire une exception pour les nés-moldus qui savent frapper un cognard »), des matchs décevants de ces derniers temps (« l’Angleterre est boycottée, Merlin sait quand je pourrais de nouveau voir une coupe d’Europe »), ou, dans une moindre mesure, de l’heure actuelle (« avant, c’était moins illégal, I fucking hate this country »). Imperturbable, Rosier se fendait parfois d’une réplique monosyllabique qui ne suffisait pas à calmer les ardeurs de son bras droit, et se contentait de hausser les épaules quand il ne décidait pas d’ignorer ses doléances. L’autre n’avait pourtant pas tort, de fustiger le gouvernement : les récentes législations avaient provoqué un embargo inattendu autour de l’Albion et avaient sonné le glas de la « libre » importation ; à supposer que le transport de marchandise frauduleuse (sinon illicite) puisse être considéré comme un droit quelconque. Ce n’était pas de l’alcool, cette fois-ci, ou des psychotropes, qu’il cherchait. À cet instant, le Centuries n’était qu’un vague détail dont il ne se préoccupait guère, son esprit étant accaparé par l’arrivée clandestine de trésors bien plus incroyables que l’ivresse et la débauche.
Il nourrissait un intérêt peu commun – une passion, plus exactement – pour les artéfacts magiques. Peut-être était-ce cela, sa véritable addiction ; ces reliques abandonnées, dont l’existence relevait davantage du mythe que de la réalité, et cette soif de transgresser l’interdit en partant à leur recherche. Le danger était son premier vice, et l’adrénaline sa plus sournoise maîtresse. Simon couvrait l’horizon d’un œil torve, et battait mollement du talon les planches du quai, avant de recentrer son attention sur Julian et ses cigarettes moldues, qu’il allumait avec ce petit objet en métal – un zippo, lui avait-il expliqué. Son pouce roulait sur une molette, plusieurs fois si la flamme était capricieuse, pour actionner le mécanisme. « On est de l’autre coté, » se justifia-t-il en fourrant le paquet dans sa poche. Indeed, songea Rosier, ils étaient de l’autre coté. Comme des hors-la-loi obligés d’outrepasser une frontière afin de récupérer leur dû, ce qui était en soi assez ridicule. Désormais, les transactions s’effectuaient à l’insu de tous, parfois aux docks de Londres – les entrepôts permettaient aux connaisseurs de se rassembler autour de tables de fortune où s’amoncelaient milles et une merveilles –, parfois à Camden, sous le nez des moldus. Au moins, le marché noir n’avait pas à craindre la récession. Machinalement, il baissa les yeux vers son poignet, où, sous la manche de son cuir, la tête d’un serpent se profilait imperceptiblement sur la peau diaphane. S’il redoublait de prudence pour mener à bien ses affaires personnelles, Rosier commençait à croire que cette ère toucherait bientôt à sa fin et que la Marque, qui inspirait autrefois l’effroi, l’enfermerait à son tour dans une angoisse paranoïaque.
Ses omoplates se décollèrent de la paroi métallique quand une légère onde se répercuta dans l’air ambiant, amenant avec elle l’apparition lointaine d’un cargo d’envergure. La silhouette de l’imposant bâtiment s’imposa dans l’obscurité percée par les lampadaires, avant d’accoster. À une autre époque, ils n’avaient pas besoin de tant d’artifices pour couvrir leurs traces, ni de prendre d’assaut les zones portuaires moldues. Et le bateau repeint aux sortilèges de protection n’était qu’une solution parmi tant d’autres, dont ils s’accommodaient tant bien que mal. Après tout, les pistes se brouillaient plus facilement lorsqu’elles se disséminaient dans un autre monde que le leur. « ¡Te he echado de menos cabrón! * » La voix chaude avait éclaté dans le brouhaha du déchargement. Un courant d’air méditerranéen. Un homme s’approcha alors, suivi de plusieurs acolytes, et arborait le plus éclatant des sourires – de ceux que l’on réserve uniquement aux vieux amis. Les commissures du Rosier frémirent à leur tour, brisant son faciès impassible, et il accueillit à bras ouverts son ancien compagnon de route. « Cut the bullshit already, » rétorqua-t-il dans un ricanement succinct. Mateo et lui avaient sillonné quelques pays ensemble, mais à ce jour, seul le premier continuait de voyager, contrairement au second qui avait renoncé à cette vie trépidante, le cœur agrippé de remords. Leurs entrevues s’étaient raréfiées depuis que la guerre grondait en Grande-Bretagne, et leurs quelques rencontres fugaces dans de lugubres tavernes ne suffisaient guère à entretenir une amitié. Le groupe de sorciers, suivis de quelques caisses, s’aventura à l’intérieur d’un entrepôt délabré, où d’autres avaient déjà installé leur marchandise. Simon appréciait cette ambiance. Personne ne prêtait attention à son voisin, les conversations n’étaient que de vagues murmures, et chacun se montrait méticuleux face à l’objet ou au parchemin qu’on lui présentait : il y avait ici un respect tacite pour toutes les magies, et qui allait bien au-delà des idées manichéennes déchirant actuellement l’Angleterre. Les sorciers avaient tendance à oublier que les formules latines n’englobaient qu’un quart de ce que la communauté sorcière était capable de faire. « J’ai ce que tu cherchais, » reprit Mateo, avant d’ouvrir le caisson. Il dégagea un compartiment factice rempli de chocogrenouilles – un détail que Rosier ne put s’empêcher de remarquer. « Sérieusement ? » Mateo haussa les épaules. « C’est plus facile à sortir du pays. J’ai aussi des plumes. » Et ils ne savaient même pas s’il fallait en rire ou en pleurer. Le mangemort se pencha et attrapa avec précaution deux pages jaunies, recouvertes de caractères chinois. « Tu peux toujours te rétracter, » marmonna-t-il en approchant les parchemins de ses globes azurs. « Au contraire, je suis content de m’en débarrasser, » confia l’espagnol en jetant une œillade derrière son épaule. « T’as jamais peur d’être attrapé ici ? » Occupé à observer Julian s’occuper de la caisse, Rosier enfonça une main dans sa poche. Ses doigts trituraient les coutures. Silencieux, il gratta distraitement sa mandibule fraîchement rasée, et hocha la tête. « Un peu. » I guess. Sans ajouter un mot, il se détacha du groupe, prétextant aller saluer d’autres connaissances – et trouver de quoi compléter ses diverses collections.
Il mâchouillait distraitement un cure-dent, faute de pouvoir allumer une cigarette. L’endroit ne grouillait certes pas de monde, mais l’on retrouvait dans cette « clientèle » des visages familiers. En voulant éviter une énième caisse (ces conneries se déplaçaient d'un bout à l'autre de l'entrepôt, obéissant seulement aux baguettes de leurs propriétaires), Rosier se déporta sur le coté, bousculant par la même occasion une jeune femme, vers qui il tourna à peine la tête. « My bad, » laissa-t-il échapper avant de poursuivre son chemin.


* Tu m'as manqué, connard.
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Comme Janus a deux visages, Hécate avait deux facettes.
La première se nommait Shacklebolt et arpentait les couloirs du ministère en robe noire et serrée, perchée sur des talons qui cliquetaient sur le parquet et lui donnaient un air d'indifférence glacée. Cette face avait le verbe acéré, le regard perçant, le caractère hautain et le coup de baguette facile. Une fille de l'Angleterre et une membre de l'élite sorcière.
La seconde marchait dans l'ombre des ruelles la nuit tombée, petite et rapide, d'un pas déterminé. Celle là ne s’embarrassait pas de robes ou de chaussures ouvragée, elle rabattait sa capuche sur ses cheveux noirs et mettait les mains dans les poches de sa veste, ses bottes solidement lacées autour de ses jambes. Celle là regardait autour d'elle et n'avait pas besoin de baguette pour frapper.

La jeune femme savait qu'elle n'avait aucun droit de vagabonder à la nuit tombée à la frontière du monde magique, qui plus est pour ce qu'elle s'apprêtait à faire. Son père en aurait fait une syncope, quant à Rabastan, inutile d'imaginer ce qu'il lui ferait subir s'il venait à être au courant de ses petits passe temps.

Chacun possède ses passe-temps, ses habitudes, ses passions. Pour la plupart de l'élite, les bals et les réceptions constituaient les bouffées d'air et occasions de sociabilité nécéssaires à leur équilibre de vie. Des paillettes et des étincelles, jaillissant sous des lustres de cristal et entretenant l'illusion d'un monde fait de ce que la magie produisait de plus fabuleux. Hécate haïssait ces fêtes. Elle détestait ce brouhaha, ces minauderies, ces flatteries basses dont raffolait son père et même son frère, désormais. Elle s'y ennuyait à mourir et avait le sentiment constant d'y perdre son temps. La nuit offrait des opportunités infiniment plus intéressantes.

Et parmi celles çi, les marchés clandestins. Hécate s'y sentait comme chez elle: on y parlait sans mâcher ses mots, on négociait, on en venait même parfois aux mains. S'y mélangeaient les manuscrits asiatiques porteurs de malédictions, les jarres à démons japonaises, emplies de yokai, les dents d'Aswang venues des Philippines, et surtout, surtout...les marchandises venues des amériques.

La jeune sorcière était une collectionneuse de curiosités mais par dessus tout, elle était une vaudou, et force était de constater que l'Angleterre ne lui offrait pas le quart des artefacts et ingrédients qui en Louisiane, se vendaient chez n'importe quel bon marchand. Les poudres d'os, le sang de serpent ou de Pyrée de nuit, ce grand piranha carnivore d'Amérique du Sud, les crânes, étaient des choses qui ne couraient pas les rues de Londres. Quant aux véritables raretés, les véritables armes...elle ne rechignait pas à en acquérir lorsque d'aventure, elle en trouvait une valable parmi les étalages des vendeurs. Les pauvres ne savaient pas ce qu'ils manipulaient vraiment les trois quarts du temps et c'était fort malheureux.Leur espérance de vie devait être bien courte.

Alors qu'elle arrivait aux docs, Hécate croisa le regard du guetteur habituel, Louis, un français à la stature frêle et aux yeux alertes, dont la baguette lui tournait toujours entre les doigts. Elle le salua dans sa langue maternelle, qui était après tout aussi la sienne.

-Salut Louis. Le bateau est arrivé?
-Tout juste princesse. Si j'étais toi j'magnerais mes fesses, les habitués sont déjà là, et quand je dis habitués, j'veux dire "compulsifs".
-Reçu. Garde l'oeil ouvert et le bon.
-T'inquiètes, crevette, c'est mon job.

Hécate lui sourit et abaissa sa capuche avant de rentrer dans l'entrepôt. Ca sentait le métal, le bois, le vieux papier et la paille, ainsi que la vase. Des odeurs authentiques pour des marchandises qui parfois ne l'était pas autant qu'elle l'aurait voulu. Apercevant son fournisseur habituel, un italien nommé Antonicus, elle lui signifia sa présence d'un signe de la tête et s'avança.

-Ciao bella, come vai?
-J'ai été mieux, mais j'ai le navire sous contrôle, si tu suis ma pensée.
-...j'ai appris pour ta soeur. Poverina. Tu vas chopper les bâtards qui ont fait ça, si?
-Ils sont déjà morts, ils ne le savent juste pas encore.

Ils échangèrent un bref regard et Hécate désigna sa marchandise d'un signe de tête.

-Tu as ce que je t'avais commandé?
-En trois ans, carina mia, est ce que j'ai une seule fois oublié de te livrer?
-Autant pour moi.
-Ah ah ah! tu es impayable, comme ils disent ces anglais! alors laisse moi voir un peu...un attimo... j'ai un crâne de crocodile, deux fioles de sang de...comment tu appelles ça?
-Wendigo.
-C'est ça. Wen-di-go. Sale bestiole qu'ils m'ont dit là bas. Enfin elles sont là. Et j'ai ton couteau.

Hécate écarquilla les yeux avec un sourire.

-montres le moi, dit-elle d'une voix pressante.
-Aaah, je vois que c'est ça que tu veux le plus hein? j'ai du batailler pour l'avoir, j'ai cru qu'ils ne le vendraient jamais.
-Mais tu l'as eu!
-J'ai toujours ce que je veux.

Et sur ces mots, il sortit un chiffon, lui même emballé dans du papier kraft, avant de déballer le tout, dévoilant la marchandise. Hécate sentit son sourire s'élargir. Le couteau que lui montrait Antonicus avait une garde large et solide, faîte de bois et gravé de signes cabalistiques étranges, tout en spirales et en courbes. La lame était courte, pointue, faîte pour frapper de tranchant comme d'estoc et avait un couleur inhabituelle, celle que l'on obtenait en forgeant ensembles grâce à la magie l'or rose, l'or blanc et l'or jaune. Hécate la soupesa, inspecta les gravures et murmura:

-C'est parfait.
-Tu comptes couper quel genre de légume avec ça? plaisanta Antonicus en s'accoudant à une caisse.
Hécate se permit de lui sourire et lui montra la lame.
-C'est un couteau vaudou. On l'utilise pour les sortilèges de sang et le contrôle à distance....les malédictions...les empoisonnements...Tu vois la rainure acérée, sur le milieu de la lame? elle retient le sang, elle  arrache les chairs. Elle nous offre les trophées dont nous avons besoin.
-Tout ça avec un couteau? s'étonna le vendeur.
-Tout le monde n'a pas toujours eu de baguette. Combien?
-...900 gallions.
-J'imagines que c'est un prix d'ami, pas vrai? fit-elle ironiquement.
-Certo.
-1000 pour le tout.
-1300.
-1100. C'est mon dernier mot. Personne ne t'achèteras ce fatras à part moi et pour tes autres clients ce couteau n'est qu'un vulgaire épluche-patates.

Antonicus la foudroya du regard mais un sourire dansait sur ses lèvres alors que ses yeux étincelaient de malice. Il était un des rares vendeurs à avoir conservé une sorte de joie inexplicable, d'enthousiasme non contenu à propos de la vie et ce malgré l'embargo. Il était un aimable truand. Une crevure de bonne foi.

-Tu me tues, carina...va pour 1100. Tu utiliseras ce truc pour découper de l'insurgé.
-Tu n'as même pas idée de ta propre clairvoyance parfois, Toni.

Elle sortit l'argent et l'échange se fit comme d'habitude, rapidement, sans une remarque. Hécate fourra ses achats dans sa besace et décida de partir en quête de ce qu'elle nommait son "petit caprice". Elle revenait toujours du marché noir avec un artefact de plus que prévu, parfois une gemme ensorcelée, parfois un parchemin. Tout dépendait de ce qui attirait son oeil.

Et ce qui provoqua son intérêt ce soir là fut une magnifique cordelette d'ambre rouge, posé sur une table de bois. De l'ambre pourpre. Les perles une fois assemblées en fouet ou en corde pouvaient servir d'entrave contre les esprits invisibles, les poltergeist voire pire. On appelait cette pierre la "chaîne des maudits". Chère, rare, diablement efficace. Il n'y avait en Angleterre que peu de créatures néfastes et surnaturelles à l'état sauvage, contrairement à ce que l'on observait en Louisiane, où pullulaient les wendigos, les arrache-peau, les banshees, les goules, et d'autres esprits dont elle avait appris à ne pas prononcer le nom sous peine d'attirer leur regard.Le vendeur se montra têtu. Elle lui tint tête une bonne demi heure avant de repartir avec l'objet et lorsqu'elle l'eut entre les mains, le contempla avec satisfaction.

Une excellente soirée vraiment. Une exce....

Elle fut coupée dans ses pensées par un choc contre son épaule. Quelqu'un venait de la bousculer et elle fit un pas de côté avant de se heurter à un autre client.

"My bad" lâcha une voix laconique tandis que l'inconnu poursuivait son chemin.

Hécate ne sut pas ce qui la poussa à le regarder.
Peut-être le ton de la voix.
Peut-être la démarche, légèrement traînante mais toutefois élégante.
Peut-être les cheveux clairs en épis indisciplinés, qui donnaient à leur possesseur un air de jeunesse mal approprié à l'endroit.

Le fait est qu'elle le regarda.
Et c'est à ce moment qu'elle vit ce qui le suivait de près.
Hécate retint un cri mais resta pétrifiée, incapable de bouger alors que l'homme dont elle avait à peine vu le visage s'éloignait lentement, comme au ralenti.

A peine quelques centimètres derrière lui se tenait une femme nue, aux cheveux blonds, qui le suivait où qu'il aille et marchait sur ses traces plus fidèlement encore que son ombre. Elle ne parlait pas. Elle ne cillait pas. Elle se contentait de le regarder, et de le suivre, à ses côtés comme une maîtresse fidèle.

Personne ne semblait la voir, pas même celui qu'elle suivait pourtant de si près. Et pour cause. On pouvait voir les humains.

Mais on ne pouvait pas voir un Void.

Hécate ne la percevait que grâce à la formation dispensée par sa grand mère au cours des ans. Les auras, l'invisible, étaient les spécialités de son aïeule, et bien qu'Hécate ait toujours été plus que médiocre en ce domaine, elle avait tout de même appris les bases, celles qui lui permettraient de sauver sa vie. Elle avait appris à sentir les esprits frappeurs, à sonder les lieux...et à voir les Voids.

Plus loin devant elle, l'homme continuait ses emplettes, inconscient -comme tous les autres- de la chose qui se déplaçait à côté de lui. Hécate attendit qu'il se tourne vers elle et observa son visage alors qu'il parlait avec un marchand. Jeune...mais si marqué. Les cernes, les jours émaciées, les gestes dépourvus d'envie, de vie...et toujours le regard perçant de la jeune femme invisible derrière son épaule qui semblait vouloir percer un trou dans son crâne par la seule force de sa présence. Il avait l'air épuisé. A bout de nerfs, malgré ses efforts pour se tenir à peu près droit. Il clignait trop des yeux, avait trop de tics nerveux. Probablement des effets secondaires d'une drogue quelconque. Tout concordait.

Hécate se retint de courir à sa rencontre. Pourquoi irait-elle aider un parfait inconnu, qui ne croirait certainement pas un traître mot de ce qu'elle dirait, pour ses plus ou moins beaux yeux? Elle n'avait qu'à partir et le laisser lui et sa chose.

Partir. Juste partir.

Mais elle ne pouvait pas détourner les yeux. La femme blonde demeurait immobile sans ciller et soudain, Hécate se sentit bouillir de colère. Détestable saleté. Immonde pourriture de l'ombre. Ils avaient tous oeuvrés à l'éradication de son espèce et voilà qu'elle se retrouvait face à cet immondice en plein coeur de Londres. Les sorciers et les Voids étaient des ennemis de longue date. aussi loin que remonte la mémoire des peuples. Mais certains avaient oublié et d'autres non. L'instinct d'Hécate lui hurla de s'enfuir de cet entrepôt, mais une autre voix lui murmura qu'elle ne fermerait plus jamais l'oeil en sachant que cette chose arpentait les ruelles de la ville, en silence, toujours en silence. Elle avait peur des voids. Elle en était terrifiée. Ils étaient tout ce qui nourrissait les cauchemars des hommes et plus encore. Il lui fallait en avoir le coeur net. Espérer que la créature soit encore assez faible et assez seule pour reconnaître le danger et fuir vers un lieu plus éloigné, plus sécurisant.

Alors elle fronça les sourcils et ouvrit la bouche. Quand elle parla ce fut dans une langue qu'elle n'avait pas utilisée depuis des années, celle qui présidait aux rituels et aux conciles. La langue noire des sorciers vaudous. Un mélange d'anglais, de français, d'espagnol et d'arabe, le tout mêlé en un charabia guttural et presque incompréhensible. Une langue interdite aux étrangers mais que de nombreuses créatures en ce monde avaient appris à comprendre et à redouter.

-A sihou, Vohid. Torna ta e lokamé. (je te vois Void. Tournes toi, et regardes moi.)

Au début la femme blonde ne bougea pas d'un cheveux. Puis, lentement, elle détacha son regard de l'homme qu'elle suivait et tourna la tête, avec une paresse terrifiante...avant de regarder Hécate dans les yeux. Celle ci sentit aussitôt son estomac se tordre et sa tête devenir douloureuse alors que son coeur accélérait la cadence. Une sueur froide lui coula dans la nuque et elle siffla.

-Kesto homan nonatoha. Saafi no. (cet homme ne t'appartient pas. Cesses immédiatement)


La chose la regarda sans broncher et comme pour la narguer, posa sa main sur l'épaule de l'homme aux cheveux en bataille, lequel cilla un moment et dut interrompre la discussion.
Hécate eut alors toutes les preuves dont elle avait besoin.

-Saafi.

le Void ne broncha pas. Mais il la regarda intensément. Et Hécate comprit exactement quel était le message.

"Tu es la suivante".

La jeune femme déglutit et s'approcha de l'inconnu qui quelques minutes plus tôt venait de la bousculer, avant de s'immobiliser à moins d'un mètre de lui. Le Void ne bougea pas, resta aussi fixe qu'une statue et se contenta de reporter son attention sur sa proie de prédilection.

Hécate regarda l'objet qu'il s'apprêtait à acheter, cherchant un moyen d'engager la conversation sans récolter une tornade verbale en pleine figure. Son coeur était lancé au galop. Elle n'avait pas ressenti une telle peur depuis ses 15 ans, face aux inferis du clan des Putréfiés. Pas même lors de sa séance d'endoloris avec Rabastan.

-C'est de la camelote, lâcha-t-elle abruptement alors que le vendeur -un Irlandais que le marché connaissait sous le nom de Connor- tentait de vendre au jeune homme un squelette de lézard bicéphale, il manque les peintures sur la deuxième tête. Et c'est du pigment noir là. Il faut du rouge. Vous êtes en train de vous faire rouler dans la farine. Connor, je t'ai connu plus malin.
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Errant parmi ces groupes où chacun courbait l’échine pour mieux scruter la relique exposée, il s’attardait parfois, saluant du bout des lèvres faciès connus et anciens comparses, et certains auraient juré qu’un sourire tordait de temps à autre ses lèvres. Mais si d’ordinaire les obscures rencontres du marché noir faisaient grésiller en lui quelques étincelles d’excitation, il était particulièrement apathique ce soir-là, et à l’instar d’une âme déambulant dans la plaine des Asphodèles, il baladait sa carcasse d’un bout à l’autre du hangar sans manifester la moindre curiosité. On eut beau le héler, il n’avait pour ces trésors d’un autre âge qu’une expression placide, à peine bousculée par l’étonnement. Ses mains demeuraient enterrées dans les poches de son jean usé, hâtivement glissé à l’intérieur d’une vieille paire de boots dont les lacets étaient noués autour de sa cheville. L’allure d’un délinquant de bonne famille et la mine revêche d’un sale gosse insatisfait. Il avait pensé, à tort, que le marché noir le distrairait de ce qu’il peinait à affronter – l’enterrement de sa cousine approchait, et s’infliger une biture était la seule façon qu’il avait trouvée pour affronter sa disparition. Peut-être assisterait-il à l’oraison funèbre ivre mort, ou peut-être accepterait-il enfin que sa vie et celle de ses proches importaient peu, comme toutes celles qu’il avait brisées depuis que la baguette du Magister avait craché cette encre maudite sur son avant-bras. Instinctivement, il tira de nouveau sa manche, alors que sa Marque n’était plus un secret ; et qui plus est, un tel marché n’était pas fréquenté par des enfants de chœur. Criminels repentis, mercenaires, chasseurs de trésors, ils dissimulaient tous un autre visage et d’autres passions sous le masque bien-pensant exigé par la société.
Rosier s’attarda près d’un groupe, qui l’interrogea sur sa dernière acquisition, un rien babylonienne – le Centuries. Un quidam moqua avec amusement ces cernes et ces traits tirés, pour aussitôt insinuer que les nuits devaient être en effet être aussi festives que la rumeur le prétendait. Il préféra en ricaner, plutôt qu’admettre que le club n’était qu’un facteur, quand l’alcool et les insomnies régissaient déjà son style de vie dépravé.
Une sensation de malaise lui coupa brusquement la parole. Sa phrase avortée provoqua un silence que nul n’osa troubler, tout regard braqué sur la figure blême de Simon. Un voile grisâtre lui brouilla momentanément la vue – et si quelqu’un lui avait demandé son nom, il aurait été incapable de répondre. Cet égarement dura une seconde, peut-être deux. Sans doute… sans doute un effet secondaire de l’orviétan. Revenu à lui, il bafouilla une excuse et s’éclipsa, troublé. Une main tremblotante ébouriffa davantage sa crinière corbeau puis retomba lestement le long de son corps, agitée de légers tics ; il ne cessait de plier et déplier les doigts, sans tenir compte des craquements désagréables de ses phalanges. Son premier réflexe aurait été d’allumer une cigarette, mais il se contenta de ravaler ses appréhensions en flânant davantage, et atteignit une silhouette plus que familière.
Penché au-dessus d’une caisse, un homme, réputé pour être persona non grata car contrefacteur professionnel, remettait en place quelques unes de ses « pièces ». Quiconque avec un tant soit peu de jugeote connaissait Connor et ses produits bas de gamme, mais on le laissait arnaquer les amateurs par principe. « Je constate que le commerce de tes merdes se porte bien, » lâcha-t-il à l’escroc, pas peu fier de récolter de ses mensonges honteux une lourde bourse de gallions – mais il fallait au moins lui reconnaître ses qualités de commerçant. En guise de réponse, l’irlandais fit tintinnabuler quelques pièces dorées dans la paume de sa main. Rosier détailla son inventaire, avant de s’emparer d’une boîte contenant un squelette de lézard qui, à l’œil nu, paraissait authentique – à l’instar de tous les objets que Connor fabriquait ou falsifiait. Plus jeune, lorsque son ébahissement était le seul maître de ses dépenses, il s’était plusieurs fois retrouvé avec des reproductions dénuées de toute magie et payées trop cher pour oser s’en débarrasser ; le temps forgeant l’expérience, il repérait les imitations après un court examen visuel, quand bien même fussent-elles les plus fidèles reproductions au monde. Il admirait pourtant les faussaires tel que Connor, capable de berner un professionnel par pure mauvaise foi. « C’est de la camelote. » La voix féminine l’interpella avec une violence malvenue. Se retournant tout d’une pièce afin de braquer ses billes furibondes sur la nouvelle venue, il s’apprêta à la rembarrer quand celle-ci défendit son intervention avec une véhémence presque déplacée. « Il manque les peintures sur la deuxième tête. » Le prenait-elle pour un débutant ? Lippes pincées, il attendit sagement qu’elle termine son plaidoyer, ruminant quelque cinglante réplique. « Et c'est du pigment noir là. Il faut du rouge. » Sa langue caressa lentement son palais avant de s’attarder sur le contour de ses molaires, tandis qu’il jetait des œillades déconcertées en direction de Connor. « Vous êtes en train de vous faire rouler dans la farine. Connor, je t'ai connu plus malin. » Oh, elle parlait en habituée. Il ôta le cure-dent qui pendouillait au coin de ses lèvres et le glissa dans sa poche de veste. « J’avais deviné, » rétorqua-t-il sèchement, après avoir reposé la grossière contrefaçon. « Connor est un vieil ami. » À l’instar d’un bon nombre de douteux personnages marchandant dans les environs, une populace marginale à laquelle il aurait souhaité appartenir, si son nom ne s’était pas interposé entre ses aspirations de môme et ses désillusions d’adulte. Il vrilla la jeune femme de ses globes électriques, cherchant en vain à poser un nom sur ce visage, qui aurait pu le marquer, dans d’autres circonstances. « Cela dit, concéda-t-il presque à contrecœur, c’est toujours surprenant de rencontrer quelqu’un qui connaît la couleur que le pigment doit avoir. » Si le compliment en était un, son ton, aussi  chaleureux que pouvait l’être un blizzard, suffit à briser cet élan faussement avenant. Il détestait être interrompu, surtout par de parfaits inconnus. Avait-il l’air de quémander des informations ? Ses globes azurs tombèrent sur la cordelette qu’elle tenait entre les mains et la scrutèrent avec une vague curiosité – elle n’en aurait pas grande utilité en Angleterre, où même les créatures s’étaient occidentalisées. « Si l’envie vous prend de m’agresser encore une fois, je serai là-bas, » lança-t-il, en pointant son pouce au-dessus de son épaule, vers l’entrée de l’entrepôt. Une céphalée à s’en fendre le crâne en deux commençait cependant à poindre, et il songeait déjà à écourter son lèche-vitrine. « Merci et au revoir, j’imagine. » Comme si chaque mot lui coûtait un effort démesuré, il inclina légèrement la tête pour corroborer son intention de partir puis détourna les talons, deux doigts appuyés contre la tempe. Il ne comprenait pas comment, en l’espace de cinq minutes, son état s’était détérioré à ce point. Il perdait ses facultés de langage et supportait maintenant un début de migraine, de quoi tarir ses dernières velléités d’acheteur compulsif.
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Hécate observa fixement son interlocuteur tout le temps qu'il parla, juste pour éviter d'avoir à croiser le regard de la chose derrière lui.
Celle ci avait déjà changé d'apparence car incapable de fixer sa présence déliquescente au sein des flux de la magie. La femme nue avait disparue et était maintenant remplacée par une enfant d'une dizaine d'année, dont la petite main diaphane agrippait la veste de sa proie sans que cette dernière semble le percevoir. Une modification radicale d'aspect mais toujours cette même aura de pourriture, de désespoir, d'épouvante et de mort.
Hécate savait que le Void la vrillait des yeux mais il n'était pas le moment de déclencher une confrontation. Pour le moment, il lui fallait se concentrer sur la victime.

De près, la fatigue de ses traits apparaissait comme encore plus évidente et frappante. Ses cheveux, qui avaient au début de sa vie du être d'un noir lustré avaient perdu leur éclat et les cernes qui noircissaient sa peau à la manière de deux hématomes symétriques montraient à quel point le sommeil était une notion que cet homme devait ignorer. Mais ce qui frappa Hécate fut la couleur de ses iris. Un bleu délavé, comme vidé de sa substance, une couleur belle mais dépourvue d'intensité, dé-saturée. Ses mains étaient agitées, son corps raide et il penchait la tête sur le côté comme si sa tête le lançait sévèrement.

Hécate ne fut pas étonnée de cette réaction, pas plus qu'elle ne se formalisa du ton sur lequel il lui parla. On ne pouvait attendre nulle politesse, nulle affabilité d'une personne contaminée par l'immondice qu'était le Void. Tout au plus pouvait elle s'estimer heureuse qu'il lui ait répondu en articulant plus de deux mots. Il avait été touché par la chose moins de cinq minutes auparavant, qu'il tienne debout était un miracle. Peut être y avait il un moyen de le sauver avant qu'il ne soit trop tard, mais Hécate ignorait s'il aurait l'envie et la force d'accomplir le processus. Elle même ignorait si elle en aurait les capacités. La seule personne qu'elle avait jamais vu procéder à la traque et la destruction d'une de ces choses était son arrière grand mère, la plus grande sorcière qu'elle eut jamais connu. Elle se souvenait encore des bruits, des chuchotements éthérés dans la pièce, des visions cauchemardesque que la créature avait infligées à tous les combattants présents. ll avait fallu les efforts conjugués de trois générations de St Marc pour mettre hors de nuire le Void qui hantait les marais de la Nouvelle Orléans et de ce souvenir d'enfance elle avait encore des sueurs froides au plus noir de la nuit.

Cette créature là était plus chétive mais elle demeurait plus dangereuse que n'importe quel sorcier de Londres hormis le Magister lui même. Hécate déglutit alors que l'inconnu s'en allait, suivit de près par la petite fille. Sans perdre un instant, elle se tourna vers Connor.

-Qui est-ce? demanda-t-elle d'un ton pressant.
-Tout doux, princesse, si tu veux des infos il faut pay...

En trois ans qu'elle fréquentait le marché noir des docs et ses vendeurs à la réputation douteuse, jamais Hécate n'avait perdu son calme. Pas une fois. Elle avait toujours procédé avec efficacité et méthode, tirant de chacun ce qu'elle voulait au prix le plus arrangeant. Elle avait consciencieusement mis en sourdine ses instincts destructeurs qui voulaient que chaque insolent soit écrasé au sol et dressé à lui montrer le respect qu'elle exigeait. L'oubli de ces instincts avait été une question d'adaptation et donc de survie depuis son arrivée sur la terre de la Blanche Albion mais pendant un bref instant, elle oublia ses principes. La vue du Void avait réveillé en elle des pulsions qu'elle croyait éteintes et qui malheureusement pour Connor, connurent une résurgence spectaculaire.
L'empoignant par le col, Hécate le tira vers elle d'un coup sec, ses yeux dardant un regard menaçant vers le contrefacteur. Personne ne pensa à intervenir: Connor n'était pas en odeur de sainteté et cette crevette aux cheveux noirs faisait pour la majorité des personnes présentes un travail d'utilité publique. Intervenir n'aurait son utilité que s'ils en venaient au mains. Connor aurait été assez retord et rancunier pour dénoncer ses collègues et clients à la BPM avant de déménager sa fructueuse arnaque dans un quartier plus méconnu de la ville s'il venait à être humilié en public, sur son territoire. Pour le moment, toutefois, Hécate ne faisait que le tenir fermement et sa poigne était infiniment plus forte qu'on aurait pu le penser.

-Je veux son nom, son métier, tout ce que tu sais sur lui ou je risque de perdre mon calme. Je ne suis pas vraiment réputée pour ma patience et la dernière personne qui a joué avec mes nerfs comme tu le fais n'est plus de ce monde. Dois-je vraiment insister, Connor?

Ce dernier la regarda comme s'il la voyait pour la toute première fois et une moue d'horreur dégoutée s'afficha sur son visage rougeaud. Il hocha la tête en signe de dénégation et blêmit quand il vit les lèvres d'Hécate s'élargir en un sourire.

-J'attends.
-C'est Simon Rosier! un mangemort! Il était directeur de je sais pas quel département du ministère, le commerce je crois! le commerce international! et maintenant il est parti! il bosse pour lui! dit Connor d'un ton précipité -celui d'un élève récitant sa leçon à un professeur tyrannique- il splecule!
-"Spécule", corrigea Hécate froidement.
-Sa famille est connue comme le loup blanc ici! ils suivent le Magister depuis la première guerre mais y'en a plus qu'une poignée maintenant! riches mais stériles comme de vieux buissons!
-Épargnes moi tes comparaisons, siffla Hécate.
-Pardon! ce que je veux dire c'est que lui c'est...le dernier! l'héritier de la fortune des Rosiers! on le connait bien ici il vient depuis qu'il est tout jeune mais il a un truc qui cloche! on dit qu'il boit, qu'il fonctionne à l'Orviétant! y'a un truc pas net avec ce type!
-T'as même pas idée, marmonna Hécate en relâchant son emprise.
Elle se tourna vers Connor et lui lança une noise de bronze d'un air souverainement méprisant.
-Tiens. Pour ta peine

Puis, sans un regard en arrière, elle s'éloigna en direction de la sortie des docs. Hors de question de perdre ce Rosier de vue. Le Void l'avait aperçue, il l'avait regardée. Le proverbe disait "Si tu vois Monsieur Void, ferme les yeux et fuis. Si monsieur Void te voit, fermes les yeux et pries". S'il parvenait à vider sa proie de son énergie vitale il viendrait à elle et cela était hors de question. Elle mit les mains dans les poches de son jean noir et rabattit sa capuche sur ses cheveux alors qu'elle arrivait à l'extérieur.

Il s'était mis à pleuvoir et la lumière orangée des lampadaires formait un halo épais perturbé par les paillettes d'eau qui le traversaient. Sous cet éclairage couleur rouille, brutal, la silhouette mince de Simon Rosier se détachait en ombre chinoise près du bord des docs, avec à côté d'elle, une autre plus chétive que la pluie semblait traverser.
Hécate s'approcha, le bruit de ses bottes résonnant sur l'asphalte et vint se placer à sa droite. Il regardait la Tamise,  noire et agitée dans la nuit et seule la fumée de sa cigarette troublait parfois le paysage quand elle s'élevait en volutes blanchâtres dans la lueur du lampadaire. Il ne dit rien quand elle s'arrêta mais elle sentit clairement son regard se poser sur elle et toute l'irritation qu'il contenait.
Reniflant brièvement, elle joua avec sa cordelette et se décida à parler avant qu'il ne vienne à ce misanthrope avéré l'idée de transplaner et de continuer sa longue descente aux enfers, la laissant seule dans l'attente que la malédiction devienne sienne. Il se massait la tempe et Hécate y vit comme un signe.

-Ça fait mal pas vrai? Vous vous sentirez mieux dans quelques jours. Pensez juste à soigner l'hématome que vous découvrirez sur votre épaule ce soir, quand "ça" vous touche, "ça" laisse toujours une marque.

Il la regardait toujours mais cette fois comme on regarde un fou à lier. Hécate se décida finalement à se tourner vers Simon et lui offrit un demi sourire qui dans le noir, ne se vit pas distinctement.

-Vous n'avez pas l'air de comprendre ce que je raconte. Je ne vous blâme pas, vous avez un problème peu commun. Le manque de sommeil, les drogues, l'alcool, l'impression que la vie n'est un disque rayé qui joue le même morceau jour après jour...sans changements, sans couleurs...et les maux de crâne à vous vriller l'esprit...pas mal de gens vous croiront atteint d'une belle dépression. Le genre "Old school", comme vous dîtes ici. Vous auriez été mieux loti si ce n'était que ça: une "dépression"...

Elle inspira profondément l'air nocturne.

-Non, ce que vous avez aux fesses, ce n'est pas une maladie mentale, c'est un Void. Vous ne le voyiez pas, mais il vous colle à la peau comme une lèpre et si rien n'est fait, vous serez ad patres dans...

Elle examina le visage exténué et désormais sceptique -voire furieux- de Simon.

-1 an. 1 an et demie maximum, vous êtes déjà en fin de vie....je m'appelle Shacklebolt. Hécate Shacklebolt. Je vous ai vu dans l'entrepôt. Je vais être franche: je ne vous connais pas et vous ne m'intéressez pas particulièrement, ce qui me préoccupe c'est la créature qui vous suit comme votre ombre. Elle vous ronge n'est ce pas? Chaque jour est plus dur que le précédent? Rien ne vous atteint et toutes les informations se trouvent empêtrées dans cette...gelée qu'est devenu votre cerveau. C'est normal. Et ça va vous tuer plus efficacement que n'importe laquelle de vos cigarettes. Vous êtes un incubateur pour une saleté plus mortelle que la peste noire. Heureusement, dans cette nation d'incapables, il y a encore de bons docteurs, c'est à dire votre humble servante ici même.

Soupirant, elle se tourna vers le fleuve.

-L'entrée en matière est abrupte, je vous le concède, mais il va falloir passer outre et m'écouter attentivement. Vous êtes en danger de mort. Et étant la seule personne ici capable de voir ce qui vous menace je suis la prochaine sur la liste. Alors nous avons deux options: vous pouvez appeler Sainte Mangouste et me faire interner ou retourner avec moi dans cet entrepôt pour que nous nous procurions une lunette de vision. Ensuite, je vous prouverai la véracité de mes dires. Your choice.

Elle lui jeta un regard de défi, comme pour le menacer silencieusement. Elle n'accepterait pas qu'il refuse son aide, et le trainerait dans cet entrepôt par les cheveux s'il le fallait. Elle ne mourrait pas à cause des pulsions auto destructives et sceptico-cyniques d'un mangemort las et désabusé.
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PRISONERS • bloodstains on the carpet
Simon Rosier
Simon Rosier
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‹ dialogues : #669999.
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‹ liens utiles :
‹ âge : trente-huit ans (24/05/66).
‹ occupation : criminel, propriétaire déchu du Centuries.
‹ maison : Serpentard.
‹ scolarité : 1977 et 1984.
‹ baguette : brisée.
‹ gallions (ʛ) : 5330
‹ réputation : il n'est plus rien, l'héritier réprouvé d'une famille presque extincte, indigne de toute confiance et bon à moisir dans les geôles d'Azkaban.
‹ faits : toujours considéré comme une ordure remplaçable, dans le clan désuni de Voldemort, Rosier est désormais perçu comme un lâche ayant déserté avant la bataille finale. Un monstre qui a abusé de la confiance d'une sorcière honnête (Anna), et un père indigne par-dessus le marché. Nombreux sont ceux qui auraient aimé maintenir la peine de mort jusqu'à ce qu'il y passe.
‹ résidence : Azkaban.
‹ patronus : un vague filet argenté, sans forme ni consistance.
‹ épouvantard : un précipice.
‹ risèd : une plage, avec Anna et Charlotte.
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Fall on your knees, I hear the horrid voices of someone else’s angels


Il s’était éloigné sans plus attendre, abandonnant derrière lui une rencontre fortuite dont sa mémoire esquintée se débarrasserait à son tour. Une douleur, qu’il s’efforçait d’ignorer, lui vrillait le crâne et l’obligea à fuir la cacophonie de l’entrepôt pour le silence des quais, sous les regards perplexes de ses acolytes. Sa sortie en catastrophe manqua de se terminer contre les planches (trempées, il flottait) des docks après que sa semelle glissât sur un morceau de plastique, aussitôt emporté par les caprices des intempéries. Sa main chercha fébrilement la flasque de firewhiskey qu’il gardait dans une poche intérieure de sa veste, s’empressa d’en dévisser la capsule et la porta à ses lèvres pour y étancher une soif imaginaire ; chaque gorgée apaisait les ondes de panique submergeant son corps, si bien qu’il décida de réitérer ce geste malheureux une fois de trop. Ils étaient nombreux à clamer que l’alcool n’était en rien une solution, mais il trouvait dans ce liquide ambré un réconfort qu’aucun être humain n’était capable de lui apporter – et quand bien même la sensation d’étourdissement le fit vaciller, lorsqu’il souhaita s’approcher des eaux mouvementées de la Tamise, il eut l’impression de s’être lesté d’un poids (dont l’origine, ou même l’existence, lui était inconnue).
Son début de migraine persistait, malgré les légers mouvements circulaires que ses doigts imprimaient sur sa tempe endolorie ; mais au moins, il n’avait plus à souffrir de l’effervescence de la foule. Jusqu’à ce qu’une voix saccage sa quiétude à peine retrouvée, avec une impertinence déplacée. « Ça fait mal pas vrai ? (…) » L’emmerdeuse était de retour. Jamais quelqu’un n’avait osé l’importuner de la sorte. Passablement agacé, il feignit l’ignorance, à l’instar d’un enfant boudeur, et adressa une prière intérieure à tous les Mages traversant son esprit déglingué afin d’éradiquer cette gonzesse de la surface de la terre – à cet instant, son seul désir se consumait entre son index et son majeur, et il n’aurait, pour rien au monde, écourté le plaisir que représentait une pause clope sous prétexte de devoir prendre ses jambes à son cou. De ses divagations se détacha un mot en particulier, qui attira vaguement son attention, un « ça » qu’elle répétait avec insistance, sans qu’il fasse le rapprochement avec quoique ce soit de sa connaissance. « Vous n'avez pas l'air de comprendre ce que je raconte. (…) » Et comment aurait-il pu, avec de tels rébus ? Perdant patience, il ouvrit la bouche avant de la refermer aussitôt, sidéré par la logorrhée qu’elle lui infligea.
Comment.
Osait.
Elle.

Cette bonne femme lui parlait comme s’ils se connaissaient de quelque vie antérieure, comme si elle avait sondé la moindre parcelle de son esprit, comme si elle était parvenue à en décrypter les méandres, à apprivoiser les plus obscurs de ses secrets – à le deviner, sous sa façade savamment élaborée, à déconstruire son hypocrite mensonge. Non. Et si elle ne s’amusait qu’à supposer ? À moins qu’elle ait déployé des talents de legilimens pour l’intimider ? Il était sensible à ces attaques-là – les effets secondaires de l’orviétan ne pardonnaient guère, et son système nerveux peinait à supporter les intrusions mentales. Simon demeura immobile, mais son rythme cardiaque s’était affolé malgré lui et martelait désormais son angoisse contre sa cage thoracique. Bientôt, le sang commença à battre à son tour contre ses tempes. « Chaque jour est plus dur que le précédent? » Arrêtez, voulut-il lui intimer. Et elle persistait, cognait toujours plus fort contre des points qu’elle savait sensibles. Cinq minutes auparavant, ils n’étaient que deux étrangers avec pour seule passion commune la chasse aux vieilleries et aux totems. Cinq minutes. Ne pas répondre. Ne pas lui donner cette satisfaction. Il tourna à peine le menton.
Glissée dans sa manche, sa baguette glissa lentement le long de son avant-bras, jusqu’à ce que l’embout vienne frotter sa paume. Le malaise que provoqua la révélation de la jeune femme eut tôt fait de le dégriser de ses généreuses gorgées de whisky. Il était estomaqué, à tel point que les mots peinèrent à trouver le chemin de ses lèvres, pourtant entrouvertes. « You are out of your fucking mind, » articula-t-il d’un ton éraillé. Un murmure scandalisé, tout au plus, audible à condition d’y prêter une oreille attentive. Cela ne l’empêcha guère de prolonger son interminable exposé. « (…) Heureusement, dans cette nation d'incapables, il y a encore de bons docteurs, c'est à dire votre humble servante ici même. » What the fuck. Ses paupières clignèrent une, deux, trois fois, dans l’espoir de chasser cette illusion volubile, sans succès – ce n’était donc pas lui, et il ignorait encore si cette certitude était censée le rassurer. « Vous n’arrêtez jamais de parler ? » Sa patience, qui n’avait que trop duré, avait finalement cédé à un ire sèche et contenue. Un Void. « Les Voids ont été éradiqués, » grinça-t-il, « ils ne figurent même plus sur les listes du Ministère. » Combien de légendes avait-il entendu à propos de ces créatures ? Combien de fois avait-on baissé la voix en évoquant ce mal invisible, de peur d’être pris en chasse à son tour ? Il se mentait, en affirmant de telles balivernes – Rosier avait reçu la plus occidentale des éducations, pis, une éducation prônant la suprématie du sang-pur – et cette réaction était à l’image de ce bagage idéologique : un déni pur et simple. Peut-être s’attendait-elle à ce qu’il conteste. Faucheuse improvisée, elle lui promettait un an, (magnanime, un an et demi). Et lui, qui ne cessait de fantasmer sa fin prochaine, ne put retenir un ricanement. « Votre sursis ne me dérange pas, » murmura-t-il en exhalant un mince filet de fumée. « C’est long, un an. » En temps de guerre, du moins. Il était marqué à l’encre de la mort, suppôt d’un Mal personnifié, et personne ne lui avait forcé la main, sinon sa sinistre volonté ; alors, sur quels espoirs se fondait son espérance de vie ?  
D’une chiquenaude, il projeta le mégot dans l’eau, avant de pivoter vers son interlocutrice, avalant d’un pas la distance inexistante qui les séparait. Et sans crier gare, il pointa sa baguette sous le menton de la jeune femme. « Vous allez me foutre la paix maintenant. » Le bout du morceau de tremble glissa sur sa gorge, puis s’enfonça un peu plus contre la jugulaire de la dénommée Hecate. « Savez-vous combien de temps on peut mettre, pour retrouver un corps balancé dans la Tamise ? » Et sur cette énigme péremptoire, Rosier releva le col de son blouson sur sa nuque dégoulinante et battit en retraite vers l’entrée de l’entrepôt. Sa main, agitée d’un tremblotement qu’il n’aurait su dire anxieux ou rageur, remit un semblant d’ordre dans sa crinière trempée ; mais le mal était fait. Il rangea hâtivement sa baguette dans sa manche et se dirigea vers son groupe de comparses, rassemblés autour de quelques breloques dites enchantées. Était-il maudit ? « Il faut qu’on parte, » décréta-t-il.
Plusieurs paires d’yeux se détournèrent de l’étalage, et quelques sourcils se froncèrent. Pourquoi ? Entendit-il. Ses oreilles bourdonnaient. Une crise d’angoisse. Il avait perdu ses moyens – le simple mot « malédiction » éveillait en lui une peur mordante, dont les raisons demeuraient trop obscures encore. Il ne pouvait pas être maudit, et cette femme mentait. Il voulait qu'elle mente.
Parce qu'elle aurait pu avoir raison.
Elle mentait. « Parce que. »
Il n’était pas maudit.
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Le geste était venu vite. Trop vite pour qu'elle puisse penser à l'éviter. En une seconde, l'homme apathique en face d'elle avait sorti sa baguette avec la vivacité d'un fer-de-lance et l'avait presque enfoncée dans la chair de son cou. Elle pouvait sentir le bois frémir, parce que les mains de Rosier tremblaient, et parce que la magie qui bouillonnait dans ses veines implorait son maître de se déchaîner. Il était impossible de prédire son prochain mouvement et Hécate se prit à se maudire.
Pourquoi avait-elle cru qu'il écouterait? à quel moment de son raisonnement avait elle pensé qu'aller trouver cet individu à la dérive et tenter de lui parler était une bonne idée?
Simon Rosier la regardait et ses paupières ne cessaient de cligner, à tel point que cela en devenait presque irritant à regarder. Là résidait sans doute la seule chance de survie d'Hécate si d'aventure il décidait de la supprimer sur ces docks, ici et maintenant. Il était en souffrance physique et psychologique, sous l'emprise d'une drogue qui devait être l'Orviétan et par conséquent, infiniment moins réactif qu'il aurait du l'être pour quelqu'un prêt à en découdre. Mais la rapidité avec laquelle il l'avait mise en joue montrait que certains gestes lui étaient naturels et qu'il pourrait se transformer en tueur en un battement de cils.

A moins que.
A moins que son discours ait porté.
A moins qu'elle n'ait réussi à planter dans son esprit la plus vicieuse et dévorante des graines: la peur. Le doute.
Elle savait pertinemment qu'une fois bien en place, la peur ne partait pas, elle rongeait et dévorait. C'était un mal plus agressif qu'un cancer, plus destructeur que la peste. La peur. Son interlocuteur en était infesté, jusqu'à la moëlle des os, elle le voyait dans la manière dont ses yeux bleus s'agitaient, dont ses mains agrippaient sa baguette, dont il la regardait comme pour la mettre au défi de parler de nouveau.

"Vous allez me foutre la paix maintenant. Savez-vous combien de temps on peut mettre, pour retrouver un corps balancé dans la Tamise ?"

Elle ne répondit pas, trop occupée à calmer le rythme de son propre coeur pour être prête à réagir, quelque soit les mouvements du mangemort. Ce dernier la lâcha ensuite brutalement et de sa démarche nerveuse, s'éloigna. Derrière lui, le Void faisait ce qu'il faisait toujours: il suivait. Calmement, sans se presser. Il avait après tout, tout le temps du monde pour faire son oeuvre. Cette fois, il ressemblait à un vieil homme décati et sec comme une branche. Il trainait des pieds et suivait Simon comme un mollusque malfaisant, laissant dans son sillage une vibration de mort qui donna à Hécate un frisson d'horreur.

"Les Voids ont été éradiqués, ils ne figurent même plus sur les listes du Ministère"

Les listes du Ministère... La belle affaire. Que contenaient les listes du prestigieux et tout puissant ministère de la magie Anglais?! des loups garous? des fantômes?! des acromentules?! le Ministère ne s'intéressait qu'à ce qu'il connaissait, qu'à ce qu'il maîtrisait! toutes les cultures inférieures ou indigènes, leurs légendes, leurs fléaux ne l'intéressaient en rien! que connaissait le ministère aux Wendigos? aux hurleurs blancs des montagnes? aux Goliaths des marais et aux inferis créoles? que connaissait le ministère aux Voids?! rien du tout! Tel un chat empâté il se laissait cuire au soleil et sommeillait, jusqu'à laisser entrer sur son territoire des abominations qui jamais n'auraient du fouler le sol de l'île!

-Stadikru. Rohanze. Sarate hiti da plague del Eïgypt ke no farate nehan oska morore kom rass elle vermina (bande d'imbéciles. Arrogants. Vous pourriez être frappés par les plaies d'Egypte et ne pas réagir jusqu'à crever comme les rats et la vermine)

Les mains d'Hécate étaient agités de gestes nerveux. Elle avait envie de saisir sa baguette et de stupéfixier ce petit imbécile pour qui un an semblait visiblement une éternité et que la mort ne semblait pas inquiéter. Il voulait mourir? grand bien lui fasse, mais Hécate mourait d'envie de vivre. Ses yeux s'étaient plissés et l'adrénaline avait commencé à se déverser dans son corps lorsqu'elle se rendit compte qu'il revenait droit vers les entrepôts. Elle fit une pause. Le regarda.

Elle avait planté la graine dans son esprit. la peur l'emportait sur le scepticisme et contaminait sa victime comme l'encre imbibe un buvard. La jeune femme fit quelques pas en arrière et alla s'asseoir sur une pile de gigantesques caisses, un peu à l'écart du lampadaire. Croisant les jambes, faisant passer sa baguette entre ses doigts fins, elle se mit à attendre.

Il reviendrait. Un regard dans un miroir ensorcelé ou une lunette de vision lui révélerait le visage blême de ce qui lui collait à la peau et il comprendrait alors l'ampleur de son malheur. Il reviendrait, furieux, frustré, mais il reviendrait. Personne ne pouvait vivre une fois le voile déchiré, une fois le monstre révélé. Un Void était bien pire que n'importe quel autre malédiction et bientôt, Simon Rosier commencerait à le sentir près de lui, à sentir sa présence sur ses talons à chaque pas qu'il ferait. Il percevrait le regard froid, mort et dépourvu de conscience que la chose posait dans son dos, il frissonnerait sachant qu'elle le regardait quand il dormait, le guettait quand il marchait et jamais, jamais, ne le perdait des yeux.

Combien de victimes de Voids, une fois alertées de ce qui les menaçait, avaient préféré s'ôter la vie plutôt que de se savoir suivies et hantées par cette créature? combien avaient choisit de mettre fin au cauchemar avec un tant soit peu de "dignité"? trop.

Hécate commença à jouer avec le couteau qu'elle avait acheté quelques minutes auparavant. La pluie continuait de tomber et lui collait les cheveux au front. Mais immobile, elle guettait le retour de Rosier. Doucement, dans la nuit, elle se mit à fredonner, sa voix se mêlant à la mélodie des gouttes d'eau sur l'asphalte et le bois.


Trois petits enfants dans le marais joli
L'aîné mène la troupe, le plus jeune la finit
Trois petits enfants dans le marais joli
Ils trottent, trottent, trottent et un Void les suit.

Le plus petit part se baigner
Met la tête dans l'eau et soudain c'est finit
Le Void l'attrape par les pieds
Personne n'a rien vu ni ouï

Deux petits enfants dans le marais joli
L'aîné mène la troupe, le cadet la finit
Deux petits enfants dans le marais joli
Ils trottent trottent trottent et un Void les suit

Le cadet ralentit un peu
Le void l'attrape par les cheveux
Il se débat et tire aussi
Crick crack il perd la tête
Et on entends tout juste un cri.

Un petit enfant dans le marais maudit
Il est tout seul maintenant et est venue la nuit
Un petit enfant dans le marais maudit
Il court, court et court mais le Void le suit

Il se retourne pour lui faire face
Nous ne retrouverons de lui aucune trace
Car le Void est venu, oui le Void s'est montré
Il l'a fait hurler puis il l'a dévoré.

Nul petit enfant dans le marais joli
Il y en avait trois, mais ils sont tous parti
Si tu vois Monsieur Void, ferme les yeux et fuit
Si Monsieur Void te voit, fermes les yeux et pries."
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PRISONERS • bloodstains on the carpet
Simon Rosier
Simon Rosier
‹ disponibilité : dispo (1/6)
‹ inscription : 07/09/2014
‹ messages : 1145
‹ crédits : tplrs (avatar), tumblr (gifs).
‹ dialogues : #669999.
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‹ liens utiles :
‹ âge : trente-huit ans (24/05/66).
‹ occupation : criminel, propriétaire déchu du Centuries.
‹ maison : Serpentard.
‹ scolarité : 1977 et 1984.
‹ baguette : brisée.
‹ gallions (ʛ) : 5330
‹ réputation : il n'est plus rien, l'héritier réprouvé d'une famille presque extincte, indigne de toute confiance et bon à moisir dans les geôles d'Azkaban.
‹ faits : toujours considéré comme une ordure remplaçable, dans le clan désuni de Voldemort, Rosier est désormais perçu comme un lâche ayant déserté avant la bataille finale. Un monstre qui a abusé de la confiance d'une sorcière honnête (Anna), et un père indigne par-dessus le marché. Nombreux sont ceux qui auraient aimé maintenir la peine de mort jusqu'à ce qu'il y passe.
‹ résidence : Azkaban.
‹ patronus : un vague filet argenté, sans forme ni consistance.
‹ épouvantard : un précipice.
‹ risèd : une plage, avec Anna et Charlotte.
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Fall on your knees, I hear the horrid voices of someone else’s angels


Des envies de meurtre lui taraudaient les entrailles.
Pourquoi on partirait ? Que lui lance Julian, en l’attrapant par la manche. Parce qu’il avait l’impression d’être épié. Parce qu’une emmerdeuse sortie de nulle part avait réveillé des réminiscences dont même le plus puissant des oubliette ne viendrait pas à bout. Parce qu’il ne tarderait pas à perdre le contrôle. Ses lèvres scellées par une angoisse indicible, Rosier guettait désormais l’éventuel retour d’Hecate – sans savoir s’il redoutait ou attendait ce dernier, et s’il aurait l’intelligence de saisir l’opportunité, après l’avoir sèchement dédaignée. Probablement pas. Elle penserait peut-être qu’elle avait failli à sa mission, ou que le prévenir suffirait ; et ce n’était pas tant sa manière de l’aborder qui l’avait troublé, mais son aplomb mêlé de sang-froid, la vivacité de ses propos quant à sa condition. Des Voids, il ne savait pas grand-chose, quelques racontars exagérés tout au plus ; un tabou garrottait l’existence de ces créatures, et ce n’était pas en Angleterre que l’on commencerait à les étudier, pas plus que l’on ne croirait de tels boniments. La plupart reniflerait avec mépris et, chassant la possibilité que cette menace eût survécu aux purges, sifflerait que les voids appartenaient ni plus ni moins au folklore sorcier, que seules les harpies esseulées les cherchaient encore. « Est-ce que tu vas me dire ce qu’il se passe ou… ? » Ou devait-il deviner ce qui se tramait, dans cet esprit en décomposition ? Mais trop absorbé par ses pensées pour se fendre d’une réplique, Simon se contentait de fixer la sortie, les mains moites et le cœur au bord des lèvres. Mû par un instinct plus bestial que censé, il retira frénétiquement son blouson en cuir, révélant un simple teeshirt noir dont il arracha presque le sol afin d’examiner le soi-disant état de son épaule. Le menton collé à la clavicule, il tira un peu plus fort sur le tissu – sous le regard médusé de Julian – avant de l’apercevoir. Un hématome colorait son articulation d’une infâme teinte violacée, presque noirâtre aux bords. Ouch, qu’il entendit. Son teint, naturellement blême, vira au livide quand le bagou sibyllin d’Hecate se répercuta dans sa boîte crânienne. Quand un Void vous touche… Il n’était pas idiot. Il ne pouvait pas être si idiot. De tous les bigots masqués baisant le bas des robes du Maître, il n’était pas le plus étroit d’esprit, ses voyages, ses rencontres, avaient forgé un jugement plus aiguisé que cela, mais il ne voulait simplement pas y croire. Peut-être parce que l’idée d’une malédiction ne lui paraissait pas si incongrue que cela. Plausible, même. Ou certaine ?
Simon se pencha en avant pour ramasser la veste qu’il avait jetée par terre, l’épousseta distraitement et, Hecate partie (du moins, le pensa-t-il), sentit son cœur manquer une série de battements. « Non… » Ses doigts fourragèrent les épis corbeau, encore dégoulinant. « Non. » La redite plaintive se bloqua au fond de sa gorge. Des élucubrations absurdes et incohérentes s’entrechoquaient dans sa caboche, lesquelles mêlaient des souvenirs d’une vie qu’il aurait souhaitée antérieure et des paroles lointaines, l’histoire de cet archéomage ayant affronté un Void, dans une région reculée d’Asie mineure. C’était une autre époque — lorsqu’il était loin de l’Angleterre, et que son bras était encore vierge. Ses billes étaient vides. Il avait besoin de s’asseoir, et ne le fit pas, il avait besoin de se calmer, et ne le fit pas — il avait besoin de partir, et ne le fit pas. Transplaner aurait été judicieux. Quelque part, ce qu’il jurait être des conneries infondées rencontrait un écho inattendu dans le marasme de ses songes atrophiés par les abus et sa paranoïa. Lentement, comme s’il réfléchissait intensément à quelque sombre dessein, Simon jeta son cuir sur son dos et darda de ses orbes déphasés l’ensemble des groupes évoluant autour de lui. « Qui vend des verres ensorcelés ici ? » La panique lui avait asséché les lèvres, si bien que l’émail de ses dents en torturait la pulpe depuis une bonne minute. Julian haussa les épaules, sans mot dire. Son seul moyen de vérifier — réfuter — la théorie d’Hecate aurait été de mettre la main sur des lunettes de vision, ou whatever the fucking name was, mais il n’espérait pas non plus trouver son bonheur à tous les coins de ce putain d’entrepôt. « Fuck it, » marmonna-t-il. Vaincu par une curiosité maladive, il décida de rebrousser chemin à contrecœur. Faute de pouvoir repartir, il revint la queue entre les jambes, près de l’endroit où Hecate l’avait apostrophé — et où, par miracle (Merlin, était-il si désespéré ?), elle se trouvait toujours. « C’est quoi votre truc ? » Qu’il héla. Le ton était agressif, le verbe furieux. « Le troisième œil ? » Il se planta face à elle, tout en observant une distance raisonnable, et après avoir vaguement inspecté les environs (à quoi bon, il flottait), reporta toute son attention sur la jeune femme. « Shacklebolt. Le nom lui évoqua les bayous de la Louisiane profonde. Vous êtes de la Nouvelle-Orléans. La lignée vaudou. » Il aurait dû le deviner, à son accent. Sept ans aux États-Unis, et pas foutu de reconnaître les intonations si caractéristiques du Sud. « Vous l’avez vu. » D’une main nerveuse, il extirpa son paquet de clopes de sa poche de jean, qui manqua de lui échapper des doigts, et coinça un cylindre de nicotine entre ses dents. Pourquoi était-il revenu. Le bout du bâton blanc s’embrasa, un mince filet grisâtre s’échappa imperceptiblement de ses lippes. « Qu’est-ce que vous proposez ? » Il y avait une mésestime perçante, dans ses paroles ; pourtant, il avait demandé. Et elle avait raison, il était fatigué. Usé jusqu’à la corde. Il avait peut-être peur, aussi. « Vous en avez déjà croisé un, au moins ? » Cesserait-il un jour de prendre les autres pour des cons. La nicotine l’apaisait, et ses poumons noircissaient – il passa une main lasse contre son visage, frotta ses yeux cernés. Il aurait dû partir.
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Ah. Le voilà qui revenait.
Hécate, toujours assise sur sa pile de caisse, cessa de planter la pointe de son couteau dans le bois et le regarda littéralement de haut alors qu'il la hélait avec l'amabilité qui semblait lui être coutumière.

«C’est quoi votre truc ? Le troisième œil ? »

Hécate accueuillit la remarque avec un demi-sourire qui s'apparentait plus à un rictus. Là où certains disaient "troisième oeil", d'autres disaient "clairvoyance" et d'autres encore "oeil noir". Les termes importaient en fait assez peu tant que demeurait le concept. Voir ce que les autres ne percevaient pas n'était pas un don de naissance et n'avait aucun rapport avec ce talent de "voyance" que possédaient certains sorciers. Percer le voile de l'invisible, regarder les choses était le fruit d'un entraînement minutieux qui se faisait malheureusement le plus souvent au contact des ennemis que l'on cherchait à démasquer.
Hécate se souvenait très bien de la manière dont elle avait appris à voir. Bien évidemment, son aïeule ne l'avait pas mise face à un Void, la pédagogie vaudou n'ayant pas pour but un écrémage de la population enfantine, mais elle l'avait placée face à un tournicoteur. Ce terme légèrement ridicule n'était qu'un surnom daté pour désigner ce que les sorciers occidentaux appelaient les Abraxon. Esprits plus vagues encore que les Voids, ces créatures habitaient les objets, avec une préférence nette pour tout réceptacle chargé de sentiments et entouré d'une aura, d'un prestige qui empêchait sa destruction : miroirs, pianos, tableaux, vases, bijoux. Une fois installé, un tournicoteur ne partait plus et depuis son observatoir, vous menait à la baguette. Illusions d'optiques, illusions acoustiques, pénibles moments de déjà vu, absences, migraines...ces esprits étaient joueurs et le jeu se finissait toujours de la même tragique manière: suicide. C'était le grand plaisir des tournicoteurs, le plaisir de toute chose se sachant invisible et poussant au crime ou a la mort. Celui de voir sans être vu, de manipuler dans l'ombre.
Léonora St Marc avait un jour amené Hécate dans une des résidences du clan, près de Baton rouge et lui avait montré exactement ce dont un Abraxon était capable. Celui là avait été emprisonné dans une boule de cristal et Merlin, les choses qu'il lui avait montré...les images qui avaient défilées devant ses yeux d'enfant. Elle avait cru revoir son grand père marchant dans l'escalier de la demeure, avait couru après son oncle dans la vestibule -l'homme ayant pourtant perdu la vie deux ans auparavant- et ce n'est que lorsqu'elle avait manqué de se jeter du toit -croyant marcher dans le salon- que sa grand mère était intervenue. Elle lui avait appris à déchirer le voile, à percevoir les choses cachées. Hécate avait alors non seulement vu le tournicoteur dans toute sa laideur blafarde, son visage apparaissant dans la boule de cristal comme une tête décapitée et grimaçante de plaisir, mais elle avait aussi appris à résister. A ne pas céder face aux illusions. Pendant près de six ans, elle avait été mise en contact avec l'Abraxon de Baton Rouge jusqu'à ce qu'un jour, elle ne voit plus que sa forme réelle et plus les  images qu'il ciselait pourtant avec perfection, juste pour elle. Cela lui avait coûté des litres de larmes, une quasi-chute depuis le haut d'un bâtiment, une défenestration manquée et plusieurs gestes agressifs envers elle même, mais elle avait réussit.
Le troisième oeil...oui, belle manière de le dire.

« Shacklebolt...Vous êtes de la Nouvelle-Orléans. La lignée vaudou. »

Elle haussa un sourcil appréciateur et hocha lentement la tête. Il commençait à lui plaire, ce sale gosse mal embouché.

-Bravo. Peu de gens connaissent d'autres Shacklebolt que Kingsley et moins encore savent qu'une partie d'entre nous préfère le bayou à la lande anglaise...un bon point pour vous, Rosier, vous êtes moins auto-centré que la majorité de vos compatriotes. Et visiblement un peu plus malin également même si tout aussi arrogant...

Elle se laissa glisser au bas des caisses et s'approcha de Simon Rosier, le couteau tournant toujours entre ses doigts fins. Il était revenu, à contre coeur certes, mais il était revenu et la jeune femme savait qu'elle devait gagner sinon sa confiance, du moins son soutient, dans les minutes qui allaient suivre. Il doutait encore légèrement, et même une parcelle infime de ce doute serait utilisée par le Void comme la plus redoutable des armes. Ces choses avaient assez d'intelligence pour se mettre en sourdine, presque en sommeil, lorsqu'elles se sentaient menacées, juste le temps d'endormir la méfiance de la proie, juste le temps de préparer une contre attaque.

« Qu’est-ce que vous proposez ? Vous en avez déjà croisé un, au moins ? »

Hécate affronta Simon du regard. Il la méprisait c'était une évidence. Le mépris était parfois une réaction de peur, une armure d'étain derrière laquelle on se camouflait lorsque la peur coulait dans nos veines comme de l'eau viciée. Il la regardait de cet oeil glacé surement par habitude, mais surtout par peur. Il avait raison d'avoir peur: car si le Void se tenait encore tranquille, il le serait infiniment moins lorsque sa victime se déciderait à prendre les armes. Pour le moment, la chose attendait. Elle jaugeait la scène de ses yeux cadavériques. Et elle fixait Hécate, comme pour la mettre au défi de parler, de se dresser contre elle. Le Void avait pris l'apparence d'un homme à demi-chauve, vêtu d'un costume élimé et seuls ses yeux d'un blanc laiteux continuaient de trahir sa véritable nature.

-Tu n'aimes pas ça pas vrai? demanda Hécate en regardant juste au dessus de l'épaule de Simon, ça te fait enrager. Vas-y, réagis, montres toi. Montres lui que tu es là.

Le Void pencha la tête sur le côté. Ses yeux restaient fixes et il y brillait désormais une étincelle inquiétante. Hécate ne cligna pas des yeux et se tourna de nouveau vers Simon.

-J'ai déjà rencontré des Voids, je ne vous proposerais pas mon aide si ce n'était pas le cas. Ne faîtes pas l'erreur de croire qu'il faut une marque sur le bras pour savoir ce que contiennent les ténèbres.

Rosier lui jeta un regard terrible et Hécate s'approcha plus près de lui. Il était plus grand qu'elle, ce qui n'était pas en soin un exploi magistral, mais sa taille ne suffisait en aucun cas à compenser la décrépitude de son corps, la finesse excessive de ses membres, l'expression usée de son visage. Un vaisseau en plein naufrage, voilà ce qu'il était: un véritable radeau de la méduse. Qui continuait de se saborder à coups de cigarettes et probablement d'Orviétan. Hécate tendit le bras et sans hésitation, attrapa la cigarette de Simon avant de l'écraser au sol et leva le doigt à la seconde où il ouvrit la bouche -probablement pour l'incendier ou prononcer un impardonnable.

-Les addictions font partie de son influence. Alors essayez de vous contenir, une overdose ou un cancer foudroyant ne nous aideront pas. Ecoutez moi attentivement et retenez ce que je vais vous dire: je peux vous aider, mais vous devez comprendre exactement ce qui vous attend. A la seconde où vous verrez cette créature, à la seconde où le doute ne subsistera plus en vous, elle entrera en mouvement, elle se montrera agressive et sa violence ne cessera d'augmenter. Elle cherchera à vous tuer avant que vous ne la détruisiez. Elle utilisera votre environnement, vos souvenirs et vos peines contre vous, tout ce qu'elle pourra approcher deviendra une arme et il faudra plus qu'une baguette pour la repousser. Alors je ne vous la montrerai que quand en vous saurez assez pour la combattre à mes côtés. Restez ici, je serai de retour dans 5 minutes.

Et sans autre forme de procès, elle transplana avec un craquement sonore avant de réapparaître quatre minutes et 30 secondes plus tard. Elle avait fait au plus vite et ne doutait pas d'avoir tout amené avec elle. Le sac de cuir qu'elle portait en bandoulière était abimé, usé par les affres du soleil, le sel de la mer et les vents. Il en avait vu de belles, de grandioses escapades et de terribles combats mais un affrontement avec un Void, pas encore. Il fallait un début à tout et Hécate se prit à penser que ce début pourrait tout aussi bien être sa fin.

-Venez, fit elle avec un geste de la tête.

Elle guida Simon jusqu'à l'extremité des docks et rabattit sa capuche son visage avant de lâcher:

-Vos amis saurons retrouver le chemin de leurs pénates. Hors de question qu'ils nous collent au train, je ne veux pas plus de personnes que nécessaire dans ce fatras. Suivez moi, il y a un bar sorcier pas très loin d'ici. Nous y serons tranquilles.

Les deux acolytes de circonstance empruntèrent le pont qui liait les deux rives de la Tamise au niveau des docs, leurs silhouettes noires et nerveuses sous la lumière des réverbères et parvinrent à une série d'arcades qui de jour étaient un lieu de promenade mais la nuit un couloir de passage aussi obscur que peu recommandable. Il y avait là un bar, situé dans une des rares  vieux immeubles du quartier, qui ne fermait jamais et accueillait une clientèle souvent peu désireuse de se faire remarquer. l'endroit ne payait pas de mine et l'entrée était si profondément encastrée dans le mur de brique, les vitres tellement sales et l'enseigne si décrépie qu'aucun moldu n'aurait voulu y pénétrer, aussi pauvre soit-il.

L'eau qui dort

Un nom énigmatique pour un lieu qui l'était tout autant. Poussant la porte d'un coup d'épaule, Hécate entra et traversa la salle obscure, de toute évidence désaffectée et destinée à tromper les importuns qui auraient le courage de passer le seuil du bâtiment. Sortant sa baguette, Hécate lança un lumos avant de se diriger vers le vieux juke-box du fond de la salle et de regarder la liste des chansons. Elle avança sa baguette vers le bouton poussiéreux sur lequel était inscrit "The things we hide et le tapota trois fois. Immédiatement, la machine s'alluma, projetant une myriade de couleurs dans l'espace noir de l'ancien bar moldu et s'enfonça dans le sol, révélant un escalier dérobé. En bas résonnait de la musique, des voix et il montait depuis les profondeurs une odeur de rôti et de bière.

-Après vous, dit Hécate.

Comme d'habitude, L'eau qui dort, décorée comme la cale d'un navire et au moins aussi odorante et bruyante, était chargée de contrebandiers, d'explorateurs à la dérive et de personnalités colorées voulant éviter le Londres sorcier traditionnel et ses désagréments. Le patron, un homme d'un soixantaine d'années et au corps de body builder du nom d'Aaron Rowel, salua Hécate d'un signe de la tête et lui désigna une table dans le fond de la salle avant de jauger Simon du regard. Il avait vu le visage auparavant, il connaissait le nom. Les mangemorts, il leur crachait à la gueule, à ces empêcheurs de tourner en rond. tous des emmerdeurs...mais il était avec Shacklebolt alors autant laisser filer.

La jeune femme alla s'asseoir à la table que lui avait assignée Rowel -empereur en son royaume et ancien capitaine de navire, l'homme n'avait jamais perdu l'habitude de diriger ses clients comme ses hommes- et ouvrit sa besace, avant d'en retirer un livre épais, fermé par un cadenas rouillé. Le feuilletant sans prêter attention à Simon, Hécate lâcha:

-Il nous fallait un lieu fréquenté. Ici le Void hésitera à agir, nous gagnerons du temps lorsque vous l'aurez vu. Point positif: le temps c'est plus que de l'argent dans votre cas. Point négatif: nous sommes en train de le mettre en pétard, et croyez moi, il va bien nous le rendre...voilà. Lisez moi ça et lisez le bien. Quand vous l'aurez lu, relisez le et ensuite, nous parlerons.


Les Void - Lucius Marcus Sforza in Créatures démoniaques et esprits de l'ombre de l'Antiquité à nos jours   (1995 - Edition de la plume Noire - Rome)


*Nom: "Void" (langage courant) / "Vohid" (langue vaudou) -> littéralement: les néants.

*Origine Géographique: inconnue. Les traces et marques les plus anciennes de leur existence (peintures rupestres, statuettes, de protection) permettent toutefois de localiser un foyer probable d'émergence, en Afrique Subsaharienne, sur la côte Ouest du continent (actuels Côte d'Ivoire, Togo, Bénin, Nigeria, Cameroun, Gabon et Guinée équatoriale). Le commerce de l'époque médiévale puis la traite négrière sont les facteurs les plus probables de l'expansion de la présence des Voids sur la surface de la planète depuis cette région de l'Afrique.

*Epoque d'apparition: inconnue. Les éléments les plus anciens attestant de la présence des Voids remontent à près de 100 ans avant Jésus-Christ et son aujourd'hui conservés au département des mystères, pour une raison classée secret défense.

*Histoire : Les Voids ont été reconnus comme un fléau du monde sorcier occidental aux alentours du 13e siècle. Présents en Afrique depuis une date bien antérieure, c'est chez les mages et les marabouts  que sont venus chercher conseil les émissaires des grands royaumes européens. Les échanges d'informations, de techniques de combat et d'artefacts ont permis l'enrichissement considérable de certaines tribus, dont certaines ont par la suite migré vers le Nord et l'actuel Sénégal, y formant le célèbre empire Songhai. Les mondes sorciers Européen et Africain, alors plus proches que jamais, ont de là œuvré pendant près de deux siècles à l'éradication des Voids sur leurs territoires respectifs, la France, L'Italie et l'Espagne se montrant les plus appliqués dans la traque des créatures et leur éradication. Au XVIIIe siècle, ne subsistent plus en Europe que de rares cas d'attaques, dans les régions slaves reculées, et dans la partie Sud du continent Africain. Ce n'est qu'au XIXe siècle que les Voids semblent reparaître dans les colonies d'Amérique et notamment dans les régions du sud-Est. L'alerte est donnée et les efforts conjugués de l'élite sorcière blanche et des tribus vaudous locales permettent à la "seconde purge" de s'achever sur un succès éclatant. Les Voids sont désormais déclarés éteints en Europe, en Asie de l'Est et du Sud-Est ainsi qu'en Amérique du Nord.

*Créatures apparentées: Les détraqueurs. Les études les plus récentes sur ces créatures laissent à penser qu'elles sont les ancêtres directes des détraqueurs . Les grandes purges médiévales auraient poussé les Voids d'Europe occidentale à fuir vers les régions slaves, au fond desquelles elles auraient dépéri et perdu leurs capacités offensives jusqu'à oublier totalement comment les utiliser. Si le Void est un être malfaisant doté des mêmes capacités qu'un esprit frappeur et capable de déclencher des poltergeist d'intensité variable en cas d'attaque, le détraqueur ne possède plus cette arme et ne garde de son lointain ancêtre que la capacité à vider une proie de son énergie vitale.

*Caractéristiques: Le Void constitue encore aujourd'hui une des menaces les plus inquiétantes du monde sorcier et ce sur le plan international. Bien qu'en voie d'extinction, cette espèce demeure classée 3e sur l'échelle des animaux et créatures les plus dangereux pour l'homme, derrière le Basilique et les Sirènes.
Le Void possède un certain nombre de caractéristiques qui lui sont propres et se doivent d'être retenues en cas de rencontre avec un membre de l'espèce:

-Le Void est un être généralement invisible à l'oeil nu. Si les sorciers vaudous et Africains recoivent par tradition une formation complète dans l'art de les percevoir et de les éviter, le commun des sorciers ne peux percevoir leur présence. Tout au plus les voyants peuvent ils détecter leur aura, reconnaissable entre mille car faîte de désespoir et de terreur pure. Afin de voir ce que l'oeil ne perçoit pas, l'on utilisera une lunette de verre ensorcelé (voir p.165)  afin de localiser le Void. Attention: la créature est rapide et joue sur la furtivité avant tout, ne laissez pas le monde extérieur vous distraire de votre observation si vous êtes certain d'être en présence d'un Void.

-Le Void est un changeforme. Son absence d'âme et de stabilité dans le flot de la magie l'empêche de se fixer sur une apparence précise, c'est en partie la raison pour laquelle il demeure invisible autant que possible. Si vous parvenez à le voir grâce à un artefact ou une magie traditionnelle, il tentera de vous abuser en simulant une apparence humaine mais sachez qu'il en changera presque toutes les minutes. Ne vous laissez pas abuser par ce que vous verrez: l'enfant ou le vieillard qui se tiennent devant vos yeux ne sont pas des hommes et beaucoup ont payé cher le fait de croire le contraire.

-Le Void se nourrit et tue sa proie de trois manières différentes:

->dans le cas le plus courant, il demeure invisible et s'attache à elle, la suivant où qu'elle aille et vampirisant son énergie vitale jusqu'à ce que rien n'en subsiste. Souvent menée à l'épuisement ou à la folie, la victime finit souvent par mourir des suites d'un accident, d'un abus de substances psychotropes ou à la suite d'un suicide.  Une fois l'âme de la proie consommée, le Void s'accroche à une autre victime et poursuit sa traque silencieuse.

-> Le second cas de figure est moins fréquent et se produit en cas de résistante de la proie. Si le Void se trouve dans une impasse l'empêchant de se nourrir, il provoquera un poltergeist, c'est à dire une suite de manifestations surnaturelles et violentes visant à attenter à l'intégrité psychique et physique de la proie, jusqu'à ce que celle ci cède ou décède. Dans cette configuration, le Void demeure invisible, mais peut-être entendu.

-> Le troisième cas de figure n'a presque jamais observé et n'est employé par le Void que lorsque la victime se trouve en mesure non seulement de résister, mais aussi de répliquer. Le Void est alors en mesure d'utiliser ses pouvoirs d'esprit frappeur et maléfique pour enfermer la proie dans un monde imaginaire, directement tiré de ses peurs les plus profondes. Les théories divergent quand à ces mondes que les rares rescapés décrivent comme apocalyptique: sont-ils le fruit du Void et de lui seul ou la créature est elle en mesure de former des passages vers d'autres univers hors de notre portée? le mystère demeure, mais les faits sont bien là. Une fois la victime enfermée dans son monde d'épouvante, la seule issue est la destruction totale du Void. Peu sont ceux dont la résistance mentale permet un tel exploit. Les moyens de détruire un Void varient d'une culture à l'autre, mais les propriétés des sortilèges de sang, de l'ambre rouge et des sortilèges apparentés à ceux du patronus ont été cités comme ayant leur efficacité. L'énergie nécessaire à la création de ce monde fait que le Void n'aura plus l'énergie nécéssaire pour demeurer invisible ni pour adopter un déguisement d'apparence humaine. Il sera donc obligé de se révéler sous sa vraie forme.
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Instinctivement, il osa jeter une œillade derrière son épaule et, malgré l’obscurité brouillée par la pluie, ne distingua qu’une rangée de conteneurs délavés. Le réflexe fut aussi bref qu’animal, comme une proie réalisant soudainement qu’un prédateur la traquait. Plus décontenancé qu’agacé par le franc-parler de la jeune femme, il s’offusqua à peine qu’elle lui reproche son arrogance mais manqua de s’étouffer avec ses protestations quand elle se saisit de sa cigarette pour l’écraser. « What the fuck ? » Curieusement, sa voix avait gagné en vivacité. Il lui en foutrait, des addictions – et il ne prévoyait pas s’épancher des heures durant sur ces problèmes-là. Du reste, à l’entendre, Shacklebolt ne se faisait pas d’illusions à son sujet ; il était même tenté de croire que si elle avait confiance en son savoir et en son expérience pour vaincre la « créature », elle ne comptait pas sa survie au nombre de ses priorités. Quelque part, il ne pouvait lui en tenir rigueur. Lorsque l’insondable jeune femme et son insupportable culot s’évanouirent sous son nez, l’envie de s’esclaffer se bloqua dans sa gorge. C’était ridicule. Cette nuit, ce lieu, cette fille. Rien ne le retenait, pas même sa parole (s’il en eût un jour une), mais il ne bougea pas d’un iota. Aimanté aux planches des docks comme, il l’attendit sagement. Alluma une autre cigarette dans la foulée. Jura, plusieurs fois. Elle ne cessait de jouer avec sa curiosité et il se laissait manipuler comme un pantin usé, trop las pour lui arracher ses fils des mains – oh, well. Elle réapparut, envoya des ordres valdinguer contre ses tympans. Il l’épargna d’une réplique cinglante, conscient que dans sa position, il avait tout à perdre (pour une fois). Lui emboîtant le pas de mauvaise grâce, la mine renfrognée et déjà une cigarette roulée pendant à ses lèvres, Rosier avait rentré les épaules, enfoncé deux poings serrés dans ses poches, et suivait la silhouette d’Hecate, les semelles de ses godillots raclant l’asphalte, cagnard.
« L’eau qui dort ? » Il avait murmuré, les yeux plissés. Hecate semblait habituée – il détaillait encore la devanture qu’Hecate s’était frayée un chemin à l’intérieur, baguette à la main. Dernière chance de disparaître – mais il l’abandonna sur le pas de la porte défoncée, rejoignant son acolyte qui, décidemment, ne cessait de le surprendre. Il la fixa un moment avant de se décider à descendre les marches qu’elle lui indiquait, prêt à dégainer sa baguette à la moindre entourloupe. Ses tendances autodestructrices finiraient par le conduire dans un véritable traquenard. Shacklebolt ne lui avait réclamé ni confiance ni sourire, et en cela, il lui accorderait le bénéfice du doute.
Ironiquement, ses connaissances en matière de bars et autres tavernes étaient limitées – il ne se mêlait pas à la populace, encore moins pour se biturer la gueule. Son éthylisme demeurait pourtant un secret de polichinelle discrètement moqué dans les sphères qu’il daignait fréquenter. L’eau qui dort avait sa réputation, mais il n’y avait jamais mis les pieds – et celui qu’il devina être le patron le darda d’un tel regard qu’il comprit immédiatement que sa présence serait tout au plus tolérée en ces lieux, de même qu’une myriade d’œillades mauvaises en sa direction. Hecate ne lui laissa pas le temps de commander à boire (ou l’en dissuada tacitement) et partit s’installer à une table désignée par le gaillard du comptoir, sur laquelle elle posa un vétuste grimoire. À priori, le Saint Graal, renfermant toutes les réponses à des questions qui avaient dû lui chatouiller un neurone, à un moment donné de la soirée. « Mmh, » qu’il grogna. Une traduction grossière et gutturale d’un méprisant, did I fucking ask ?
Il commença à parcourir les premières lignes avec une mauvaise foi affligeante, louchant de temps à autre sur les chopes qui s’entrechoquaient quelques tables plus loin, ou reluquant les bouteilles fièrement dressées derrière le bar. Cependant, sa lecture désinvolte céda bientôt à un intérêt enfiévré, alors qu’il penchait le nez vers les pages du livre usée. Au fur et à mesure, il se remémorait la brève histoire de ce type et du soi-disant Void qu’il avait affronté, ou les murmures terrifiés de ce mage quand l’un de ses compagnons de route osa soulever la question de ces créatures, qu’en Angleterre l’on pensait disparues. Ça cogitait, dans sa caboche. De l’angoisse, de la panique – le palpitant qui s’affole, le sang qui bat les tempes. « Maintenant que vous m’avez annoncé la couleur, je vais devoir affronter le deuxième cas de figure, n’est-ce pas ? » Il tapota le paragraphe d’un doigt nerveux. Ses ongles étaient, pour la plupart, courts, vraisemblablement arrachés ou rongés. D’ailleurs, il avait commencé à mordiller la pulpe de son pouce. « Le premier cas ne s’applique qu’à ceux qui ne savent pas. » Ses dents parvinrent à réclamer une cuticule, qu’elles lâchèrent aussitôt. « Quoiqu’avec votre aide (de tout le vocabulaire composant la langue anglaise, ce mot en particulier lui inspirait un incommensurable dédain), ce sera le troisième. » Ses omoplates rencontrèrent un peu trop brusquement le dossier de sa chaise. « Vous planifiez mon assassinat, » marmonna-t-il en se pinçant l’arête du nez. Il était paumé. C’était ironique, il se dit. Pour quelqu’un comme lui – quelqu’un maîtrisant sa vie. Il avait soif. Une envie de se siffler une bouteille de vodka, de dégainer son tabac d’importation moldue (parce que les merdes qu’ils y foutaient augmentaient ses chances de mourir connement), d’appeler des putes.
« Putain. »
Sa façon à lui d’exprimer ses sentiments, aussi vides soient-ils. Une vague de chaleur ne tarda pas à l’assaillir – ses joues en brûlèrent. Ses coudes cognèrent la table, tandis qu’il prenait son visage entre deux mains trop moites pour en pétrir les traits fins. Il était dans la merde. Pourquoi chercher plus loin. « Mais j’ai… peut-être une idée de… » Les mouvements nerveux, circulaires, de sa main ne purent remplacer les mots qu’il peinait à trouver. « J’étais au Cameroun, il y a quelques années. J’ai eu un accident là-bas, et apparemment… » Ce n’était pas une histoire qu’il évoquait régulièrement. À dire vrai, seule sa pensine pouvait se targuer de connaître ses « aventures » de chasseur de trésors en devenir. Il parlait rarement des raisons qui l’avaient poussé à revenir en Angleterre, mais Hecate lui apparaissait être une exception de circonstance, ou confirmant la règle. Peut-être lui inspirerait-elle une confiance inattendue, dans ce bar décrépit. (Ou pas.) « Apparemment, reprit-il après s’être raclé la gorge, les premiers guérisseurs qui sont arrivés sur place venaient d’un village sorcier entre, hum (se servant du livre comme carte imaginaire, il traça du bout de son index le massif montagneux, une ligne invisible entre deux paragraphes), Mokolo et Maroua. Un peu plus au nord, cela dit. Il marqua une pause. Ils ont refusé d’avancer en me voyant. C’est ce qu’on m’a dit. L’un d’entre eux aurait même foutu le camp fissa. » Qu’importe – il ne se souvenait pas, pas même des quelques minutes ayant précédé la chute. Un gouffre noir dans la mémoire, et une douleur chronique lui rappelant constamment que ce n’était pas son imagination, ni un cauchemar. « Enfin… j’imagine que ça peut attaquer plus facilement s’il y a une blessure grave. » Et il n’ajouta rien de plus.
Il s’était agacé, de tant parler.
« Je devrais même pas vous raconter ces conneries. »
Il y avait cette envie de partir qui ne dégageait pas, qui lui agrippait autant la gorge qu’elle lui tordait le bide, mais il tenait bon, affalé sur sa chaise, l’œil plus alerte que jamais. L’ambiance de ce bar ne lui plaisait pas, et les gueules burinées penchées au-dessus de leurs pintes n’allaient pas avec lui, avec son décor. Le rapprochement avec le Centuries était inévitable – et à coté de ces bourrins aux multiples identités et vies, il n’était qu’un parvenu s’étouffant sur sa cuillère en argent. Un emmerdeur qui s’emmerdait. Les traits trop fins, le corps trop mince, les fringues trop soignés. Cet endroit, c’était une gifle. Et pourtant, elle, il ne la méprisait pas autant qu’il le voulait. Shacklebolt était bien fichue – belle, l’aura empreinte de la prestance des aristocrates, de l’arrogance de leur caste, mais elle n’était pas une intruse, ici, et il lui aurait trouvé une place, au beau milieu de cette horde de marginaux. « Vous allez m’interdire de boire un truc pour digérer ça ? » Son index, accusateur, se planta sur le grimoire. Bientôt, ce fut sa chevalière qu’il commença à faire glisser autour de son annulaire.  
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Hécate l'écouta parler, le dos solidement calée contre le dossier de sa chaise, les jambes croisées à la manière des baroudeurs en errance plus qu'à celle des femmes de l'élite. Ici, elle n'avait aucun besoin de jouer la comédie. Alors autant laisser tomber le masque totalement.

« Maintenant que vous m’avez annoncé la couleur, je vais devoir affronter le deuxième cas de figure, n’est-ce pas ? Le premier cas ne s’applique qu’à ceux qui ne savent pas.Quoiqu’avec votre aide... ce sera le troisième.Vous planifiez mon assassinat. Putain... »

Tout de suite les grands mots. Si elle avait voulu le laisser mourir, elle n'aurait eu qu'à passer son chemin et le laisser crever seul, une chose dont il se serait sans doute même pas formalisé vu son évidente propension à l'auto-destruction. Oui, Hécate aurait pu l'ignorer. Mais elle haïssait les Voids, comme tout ceux de sa lignée depuis des millénaires. Ils étaient une nuisance et une partie de sa mission consistait à les éliminer dans pitié. Au péril de sa propre vie. Cela était son devoir. Que la victime au secours de laquelle elle vole soit une personne aussi proprement détestable que Simon Rosier n'était qu'un malheureux concours de circonstances et ne faisait aucune différence: elle ne prévoyait pas sa mort. Elle planifiait sa renaissance. Qu'il soit incapable de le voir était somme toute relativement prévisible au vu de sa déliquescence mentale.
Derrière lui, le Void avait repris une forme féminine, celle d'une femme entre deux âges aux cheveux noirs et aux dents gâtées. Les yeux aveugles semblaient vouloir percer un trou dans l'arrière du crâne de Simon et Hécate claqua discrètement de la langue contre son palais comme pour le dissuader d'aller plus loin.
Pendant ce temps, Simon parlait. Et il ne semblait pas rodé à ce genre d'exercice.

«J’étais au Cameroun, il y a quelques années. J’ai eu un accident là-bas, et apparemment…Apparemment, les premiers guérisseurs qui sont arrivés sur place venaient d’un village sorcier entre, hum,Mokolo et Maroua. Ils ont refusé d’avancer en me voyant. C’est ce qu’on m’a dit. L’un d’entre eux aurait même foutu le camp fissa.Enfin… j’imagine que ça peut attaquer plus facilement s’il y a une blessure grave.Je devrais même pas vous raconter ces conneries.»


Hécate préféra ne pas lui répondre immédiatement, d'une part parce qu'elle était bien trop occupée à réfléchir elle même et de l'autre parce que Rosier ne semblait pas être le genre d'individu avec lequel on entretenait une conversation à proprement parler.Son débit était lent, il semblait avoir besoin de temps pour rassembler ses pensées et les formuler, lui répondre et l'abreuver d'informations avant qu'il ne soit parfaitement attentif n'aurait résulté qu'en un fiasco. Hécate pouvait pourtant percevoir son intelligence, l'esprit affûté mais engoncé dans une sorte de coaltar noir et poisseux. Il aurait pu être infiniment plus incisif si seulement il ne traînait pas derrière un boulet plus lourd que n'importe quel pénitence de bagnard. Un tel gâchis. Une telle perte....fort heureusement non inéluctable. Il est encore temps de réagir et s'il a raison quant à la dangerosité de l'affaire, il se trompe sur l'issue: Hécate meurt d'envie de vivre. Et elle ne laissera pas une chose sortie d'un autre âge lui enlever sa seule et unique chance d'apprécier le monde des vivants, la terre de ceux qui marchent debout, ce pan d'existence que les gaëliques nomment Tir nam Beo et que son peuple appelle Munda Douhal: le monde dual. Ils vont s'en sortir, inutile d'essayer de le convaincre sur ce point,elle n'a besoin que d'en persuader elle même et tout ira bien.
Alors qu'il la transperce d'une remarque suintant le cynisme et demande à boire, Hécate s'autorise à sourire pour la première fois depuis le début de leur entrevue.

-Je ne suis pas sans coeur au point de vous refuser ça. Attendez ici. Et essayez de ne toucher à rien, le patron ne vous a pas à la bonne.

Sur ces mots, elle se leva et fila droit vers le bars. Aaron la regarda depuis son mètre quatre vingt quinze et se pencha vers elle, ses coudes tatoués appuyés sur le bois vieillis du comptoir.

-Depuis quand tu ramènes des putains de mangemorts ici?
-Relax Aaron. C'est le fils Rosier et tu le sais. S'il y a bien un mangemort qui n'a pas intérêt à voir le monde souterrain disparaître, c'est lui. Il dira rien.
-J'aime pas sa gueule. Et les autres non plus.
-Donne moi une heure. S'il te plaît. Ensuite, on sors.

Les yeux d'Aaron, d'un bleu vif et alerte, se fixèrent sur les siens.

-Qu'est ce que tu fabriques, gamine?
-Il est dans la merde et moi aussi.
-Qu'est ce que t'as fait? C'est les connards de l'entrepôt le problème?
-Non. C'est pire que ça.
-Si t'as besoin de te planquer, tu sais qu'on peut te trouver une filière pour virer ton cul de ce pays. Lui ça sera plus dur, personne acceptera de l'aider.
-C'est pas ça.

Elle fouilla dans son sac et lui tendit soudain un monocle, qu'elle fit glisser sur le comptoir.

-Sois discret.

Le patron fronça les sourcils et prudemment, pris l'objet dans son énorme main ornée de bagues. Il savait ce que c'était que cet instrument et on l'utilisait rarement pour des noises. Lentement, son regard alternant entre Hécate et la lunette de vision, il la plaça devant son oeil et se tourna vers Simon. Ses sourcils se levèrent, son teint pâlit et avec une brutalité involontaire, il rabattit le monocle sur la table, et eut geste de recul qui demeura mesuré, mais seulement parce qu'il avait la réputation d'être un homme dur à déphaser.

-Merde. Putain de merde Hécate. Putain de merde.
-Tu l'as dit.
-Il t'as vu?

Aaron se pencha en avant et attrapa le bras d'Hécate, sa main enserrant son biceps avec facilité.

-Il t'as vu, gamine, c'est ça? Oh Putain de Merlin...qu''est ce que tu vas faire?
-Je vais l'éliminer.
-T'es pas sérieuse?
-Très sérieuse. Je te demande juste de supporter notre présence une heure. Le temps de remettre le petit gars d'aplomb et de lui montrer le Void. On est dans un lieu bondé, il n'attaquera personne et sa prochaine cible, c'est moi. Vous n'avez rien à craindre.

Aaron la fixa d'un oeil perçant, ses mains s'agitant nerveusement sur le comptoir.

-Une demi-heure.
-Vendu. Merci Aaron.
-Fais gaffe à toi gamine. Je veux pas qu'Antonicus ramène son cul dans quelques jours pour nous dire que t'as crevé pour un mangemort.
-Je me bats pas pour lui. Je me bats pour moi.

Et sur ces bons mots, elle désigna une bouteille remplie d'un liquide vert émeraude, posée sur l'étagère derrière Aaron.

-Mets nous deux chartreuses.
-Ca m'étonnerait qu'il supporte. ce truc est illégal depuis le début du siècle. Tu vas nous le rendre aveugle.
-Le sous-estime pas. Quelque chose me dit qu'il en plus dans les tripes que ce qu'il laisse penser.

Elle se saisit des verres qu'Aaron venait de faire glisser jusqu'à elle et les ramena à table. En donnant un à Simon, elle prévint:

-Voilà de la chartreuse, même si je doutes que ce soit une découverte pour vous. Celle çi viens de chez moi, elle est forte, alors avalez moi ça vite et essayez de ne pas tousser trop fort. Les autres ne vous ont pas à la bonne.

Elle leva son propre verre et laissa le liquide lui brûler la gorge. Et dire que sa grand mère et les frères de cette dernière en buvaient au petit déjeuner....ça laissait rêveur.

-Parlons peu, parlons bien. Nous avons une demi-heure. Premièrement, je ne planifie pas votre assassinat je vous sauve le cul. Vous me trouvez vulgaire? faîtes avec. Deuxièmement, je ne suis pas étonnée que vous ayez attiré le Void au Cameroun. Les sorciers locaux ont encore des problèmes régulier avec ces choses dès lors que certaines personnes....mettent les pieds dans des endroits où elle n'ont rien à faire.

Elle lui jeta un coup d'oeil sombre.

-Vous avez du entrer dans un lieu infesté de magie noire dont il avait fait sa tanière et il a provoqué un accident afin de vous fragiliser et de se greffer à vous. Il n'aura pas hésité à intervenir physiquement, vous deviez être sa première proie depuis un bout de temps. Même aujourd'hui il est plus malingre que beaucoup de ses semblables. Les guérisseurs ont eu raison de fuir. Ils peuvent le voir, tout comme je le vois. Vous approcher aurait été une condamnation à mort. Je suis d'ailleurs assez étonnée que vous ayez tenu tout ce temps.

Jetant un oeil vers le fond de son verre, elle lâcha:

-Votre envie de vivre ne doit pas être aussi faible que vous le pensez.

Puis, alors qu'elle repoussait son verre, Hécate posa sur la table la lunette de vision.

-Mettez la sur votre oeil et retournez vous. Quand vous le verrez, et quoi que vous voyiez, quoique vous perceviez, ne faîtes pas de geste brusque, ne criez pas.. il sent la peur. Il n'attaquera pas ici, mais si vous lui laissez des failles il les exploitera dès que nous serons en comité réduit. Je suis juste à côté. Et je le vois aussi. Vous n'êtes pas seul.

Du bout des doigts, elle fit glisser la lunette vers lui. Le moment fatidique. Le moment qui signerait le début de l'horreur. Par les esprits, faîtes qu'il ait assez de courage, faîtes qu'elle ait assez de force, et faîtes que le destin se place de leur côté.

Il allait voir l'invisible. Et c'était un jeu auquel les vivants n'auraient jamais du avoir à jouer.
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