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sujet; I won't let you fade away ~ Ginny Weasley

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Alan regardait vers la mer, les bras croisés sur son torse et la tête remplie de souvenirs tous plus déplaisants les uns que les autres. Il était de retour en Cornouailles après toutes ces années d'emprisonnement, puis de servitude et le paysage pourtant familier qui s'étalait devant lui lui était totalement étranger. Il n'appartenait plus à cet endroit. Il n'arrivait même plus à ressentir cette nostalgie pourtant récurrente des lieux où un être humain laisse la trace de son passage. À sa gauche, il y avait un chemin qui menait hors du sable pour s'enfoncer dans une forêt où ses parents et lui venaient marcher lorsqu'ils étaient encore en vie. Il se détourna de la mer pour l'emprunter.

Alan n'était pas venu ici pour se rappeler de bons souvenirs. Il n'avait pas quitté momentanément le camp des belliqueux pour se remémorer une vie qui ne reviendrait pas. Il était ici pour lui dire définitivement adieu et garder en lui l'idée que même si on ne pouvait pas revenir en arrière, on pouvait toujours avancer et se battre pour rétablir quelque chose de beau et juste comme il l'avait connu avant. Quelque chose de nouveau et de brillant.

De sa poche, Alan sortit sa baguette. Il la garda fermement en main et s'avança précautionneusement sous le couvert des arbres, pénétrant dans une toute autre atmosphère désormais. Sur la plage, il aurait pu voir n'importe qui approcher de loin car même une personne invisible laisse des traces de pas sur du sable. Ici cependant, chaque bûche, chaque arbre, chaque animal pouvait représenter un ennemi potentiellement mortel qu'il devrait abattre.

En vérité, il mourrait d'envie de faire une telle rencontre.

Cette soif de sang, de bataille, de violence, il ne la connaissait que depuis peu, mais il avait l'impression qu'elle était déjà devenue une partie intégrale de lui-même. Des hommes lui avaient fait du tord, l'avaient traité comme un esclave, avaient fait subir le même traitement à d’innombrables autres êtres humains qui n'avaient pas mérité la plus petite de ces offenses. Il y avait un prix à payer pour tout le mal qui avait été fait et Alan était désireux de leur rendre la monnaie de leur pièce, plus un petit supplément.

Alors qu'il s'enfonçait un peu plus dans les bois, un très léger bruit sur sa droite se fit entendre et Alan réagit au quart de tour, la baguette levée dans cette direction et un regard rempli de férocité. Son foulard qui lui servait de symbole d'appartenance à son groupe était noué autour de sa taille, rouge, quiconque était son allié le reconnaîtrait.

Un rapide examen lui appris que ce n'était pas quelqu'un qui avait ce bruit, mais un écureuil qui avait agité la végétation en poursuivant un compère. En revanche, la silhouette qu'il apercevait entre deux arbres, un peu plus loin dans la même direction n'était pas un écureuil. Immédiatement, il se derrière un tronc, puis se laissa glisser accroupi, l'esprit en éveil. Il sentait monter en lui l'excitation face à cet événement impromptu. Il s'agissait peut-être du premier affrontement hors mission qu'il ferait. Il ne pensait pas que quiconque connaissait les lieux où sa famille venait se divertir lorsqu'il était plus jeune, mais il ne fallait négliger aucune possibilité. Le gouvernement avait sans doute des moyens de le retrouver.

Il jeta un discret coup d’œil vers l'étranger pour un examen plus approfondi. L'autre ne semblait pas l'avoir remarqué, mais rien n'était moins sûr. Vu la corpulence, il s'agissait sans doute d'une jeune personne. Il ne pouvait pas déterminer son sexe puisqu'il le voyait de dos, mais il n'avait presque aucun doute sur son âge, même de loin. Un élève de Poudlard en cavale ? Quelqu'un de son camp en tout cas. Sûrement. Il fronça les sourcils. Comment réagir ? Le jeune au bonnet n'allait sans doute pas resté planté là avec un air stupide s'il allait l'interpeller. Tant pis, il allait s'y risquer, quitte à devoir lui lancer un sortilège pour l'empêcher de cavaler. Il se leva donc d'un bon et fit face à l'inconnu.

-EH TOI ! Rugit-il. Ne bouge pas si tu ne veux pas finir avec un ou deux membres en moins !

Subtil et en douceur. On sentait le belliqueux dans l'âme.
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« I'm longing to be free, I won't let you fade away»
feat. Alan


Les dernières heures sont diffuses, troubles, dans l'esprit de Ginny. Elle marche dans le froid et la solitude depuis assez longtemps pour avoir épuisé les sujets sur lesquels focaliser sa pensée. La voix de Bill s'efface peu à peu. Le sourire d'Emily semble si loin. Et l'écorchure dans le regard de Harry est noyée sous les reproches et la négligence. Elle s'est sentie si inutile, durant de longues semaines. Obligée de se ménager, de reprendre les forces qui l'ont pourtant quittée irrémédiablement. Ginny en a fini avec ces attentes qu'elle ne peut pas combler. Elle presse le pas, concentre désormais son esprit sur des objectifs simples. Aider les siens, les démunis, les laissés pour compte. S'affranchir des idées reçues. Savoir reconnaître les blessures sous un sourire de façade afin d'apporter sa force aux bonnes personnes. Trouver une force nouvelle justement. Ce point là est capital. La flamme de Ginny doit revenir, où elle sera condamnée à sombrer. Et la cadette Weasley n'a aucune envie de devenir la pâle copie de sa mère. Elle rejette les souvenirs, les pertes et la souffrance qui pèsent sur son cœur et la font trébucher, d'abord psychologiquement, puis physiquement sur une racine saillante. Ginny s'est éloignée du sable et abritée du vent. Elle a rejoint le couvert des arbres pour dissimuler sa présence à d'éventuels curieux. Shell cottage est loin désormais. Elle a franchit une forêt peu dense, puis a rattrapé la côté, laissé quelques temps ses traces dans le sable, avant de prendre la direction d'une nouvelle forêt, plus profonde et luxuriante que la précédente. Elle ignore si qui que ce soit s'est mis en tête de la pister. Ginny n'essaye pas réellement de semer d'éventuels poursuivants. Elle a cessé d'avoir peur de confronter les siens, de se laisser imposer des choix qui ne lui conviennent pas. Trop longtemps incarcérée, réduite à un semblant d'existence, lapidaire et inhumaine, la rousse ne conçoit plus de se faire abuser. Qu'ils puissent la rattraper ne l'obligera jamais à les suivre. Il est temps qu'elle trace sa propre route.

Il y a de l'inconscience dans sa démarche. Car seule, l'ancienne rebut est vulnérable. Et parce qu'elle ne se rendra pas, parce que la liberté vaut trop chère à ses yeux, elle court inévitablement à sa perte. En a t'elle conscience alors qu'elle arpente le chemin boisé qui sinue à travers la forêt ? Sait-elle que le choix de sa quête personnelle est le synonyme de sa mort ?

Des brindilles craquent soudain sous son pas. Elle se fige instantanément et jette un regard circulaire et prudent sur les environs. Ginny est naturellement discrète, et sa morphologie gracile lui rend service dans ce type de situation. Néanmoins, les obstacles sur son chemin peuvent la faire repérer efficacement. Elle ne craint pas nécessairement les ennemis dans ce coin perdu de l'Angleterre. Mais elle sait que les bois abritent certaines créatures particulièrement redoutables. Combien de fois les jumeaux ont-ils essayé de lui faire peur en lui comptant les pires récits pour mettre à l'épreuve sa résistance... La rouquine ne s'est jamais laissée atteindre. A l'époque, elle était forte et confiante. Elle aurait pu abattre des montagnes. Le nombre de ses peurs étaient réduites. La pire d'entre elle était bien sûr de perdre ses proches. Cette peur a pris forme depuis, devenant réalité, et son esprit a subi les pires tourments. Son corps a connu son lot de souffrances également. Ginny n'est que l'aboutissement idéal et génial du sort qu'on lui a réservé. Une faille béant à la place du cœur. Le supplice dans les veines. Une éclipse au fond des yeux, prête à voiler complètement la flamme vacillante de ses iris. Les lèvres fragiles. Le visage émacié. Elle n'est plus que l'ombre de ce qu'elle a un jour été. Un fantôme, un secret, une lueur fébrile dans le noir et les ténèbres. Prête à s'éteindre, à disparaître, à laisser le monde continuer sans elle.

Le vague à l'âme, Ginny a repris sa progression. Elle avale quasiment un miles supplémentaire avant que son instinct ne l'oblige à faire halte de nouveau. Le sixième sens que Ginny a développé dans l'adversité ne lui fait jamais défaut. Il perçoit les ennuis, les identifie efficacement. Mais si elle sait désormais que le danger rôde, Ginny ignore la forme qu'il prendra. Elle soupçonne la présence de loups dans ces contrées. Ça ne l'empêche pas de reprendre sa progression. A l'arrêt, elle représente une cible trop facile. Elle passe plusieurs arbres, sans parvenir à distinguer la menace qui plane au dessus de sa tête chétive. Et lorsqu'elle passe à quelques centimètres d'un nouvel arbre, les sens en alerte, elle perçoit une présence, du mouvement, puis une voix s'élève dans son dos : « EH TOI ! Ne bouge pas si tu ne veux pas finir avec un ou deux membres en moins ! » Les mots s'insinuent en elle, jouent avec sa conscience, ses nerfs, et ses paupières s'abaissent sur ses yeux l'espace d'un court instant. Elle revit ses tortures, ses blessures se rouvrent et le sang coule sur son âme, teintant son inconscient du rouge de la guerre. Lentement, elle se tourne, faisant fi des menaces de l'homme derrière elle pour lui faire face à son tour. Son regard est la première cible de ses prunelles acérées. Les yeux plissés, elle remue légèrement les lèvres, remettant à plus tard l'examen approfondi de l'inconnu. « Si vous lancez un sort, soyez fatal. Avec un ou deux membres en moins, je ferai encore des dégâts. »

Tout en parlant, ses prunelles glissent sur le sorcier qui a levé sa baguette sur elle. Un foulard distinctif lui ceint la taille. Rouge. Comme le sang qui gicle sur Ginny lorsqu'elle ferme les yeux. « Insurgé. » Elle réfléchit à voix haute. Son regard remonte jusqu'au visage bourru du sorcier. Un insurgé, seul au beau milieu de nul part, doit nécessairement se méfier des inconnus. Deux alternatives se présentent à la cadette Weasley. Elle peut soit se démasquer, retirer son bonnet et dévoiler sa chevelure rousse raccourcie, qui la désignera comme Ginny Weasley, celle qui a survécu aux pires épreuves des mangemorts. Soit garder son identité pour elle. L'homme ne l'a pas reconnue, aucune affiche de son visage n'est placardée sur la place publique. Elle n'est qu'insurgée depuis peu, inactive, n'est pas la priorité du gouvernement en somme. Seuls ses cheveux peuvent éventuellement la trahir. D'un geste rigide, elle porte une main à son bonnet, et s'assure qu'il est correctement fixé sur sa tête. En glissant ses doigts le long de la laine, puis contre sa nuque, elle vérifie qu'aucune mèche trop longue n'en dépasse. Rassurée, elle laisse sa main dans sa nuque, et observe l'insurgé d'un œil naïf. « Je suis passée par là aussi. Nocturnes. Mais ... » Elle hésite, sa voix faiblit, et son regard tombe aux pieds du sorcier. Elle ne reprend qu'après quelques secondes de silence, évitant soigneusement le jugement qu'elle devine dans ses yeux. « J'étais … Je suis trop faible. » Elle se force, lève les yeux, les plante dans les prunelles d'un bleu lunaire qui la fixent. « Mais je n'ai besoin de l'approbation de personne pour agir. » Sa voix tente de s'affirmer, son bras est retombé le long de son buste, et elle hausse distraitement les épaules. La volonté de ne pas faiblir chevillée au corps.

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La main d'Alan restait ferme sur sa baguette tandis que l'étranger se retournait lentement. Il n'avait pas l'air très menaçant, mais dans le monde des sorciers les apparences pouvaient être trompeuses. D'ailleurs, malgré la distance, il lui semblait que ses traits étaient bien trop fins pour être ceux d'un garçon et cette impression fut confirmée dès que son vis-à-vis ouvrit la bouche pour parler.

C'était une voix de femme, indubitablement. Une voix de femme proférant des paroles pleines de défi et de combativité. Visiblement, s'ils devaient en venir au duel, elle vendrait chèrement sa peau et ce n'est pas son regard qui allait démentir ses paroles. Celui-ci ce fut scrutateur, l'observant, cherchant sans doute à savoir si Alan allait mettre sa menace à exécution. Il n'hésiterait pas. Il se fichait bien de son âge si elle était son ennemie. Les plus jeunes sont parfois les pires.

Alan n'était cependant pas décidé à l'attaquer, en particulier lorsqu'elle posa les yeux sur son foulard et qu'un mot lui échappa. Si elle connaissait le symbole de ce foulard, c'est qu'elle n'était pas une ennemie. Soit elle était des insurgés, soit elle avait déjà été en contact avec eux. Il n'abaissa pas son arme pour autant et son regard resta attentif, tantôt planté dans ses yeux, tantôt en train de surveiller ses mains qui s'occupaient désormais à tripoter son bonnet. Elle avait un sens étrange des priorités, mais Alan ne disait rien. Il voulait voir si elle allait s'expliquer.

Sa voix s'éleva à nouveau, mais toute la combativité qu'il avait entendu dans ses premières paroles semblait s'être envolée. Sa voix défaillait et même son regard se baissa vers les chaussures d'Alan. Celui-ci regarda légèrement sur sa droite et sa gauche avant de reporter son attention sur la fille. Personne n'allait intervenir, visiblement. Il s'approcha d'elle, lentement, sa baguette toujours levée comme un avertissement muet, mais néanmoins significatif.

-Mouais.

Enfin sa baguette se baisse totalement, mais reste dans sa main. Il ne lui faisait pas confiance malgré tout et restait sur le qui-vive.

-Les Nocturnes t'ont empêché de participer parce qu'ils te trouvent faible ? Résuma-t-il, soupçonneux.

Elle n'avait pas l'air particulièrement vaillante, à vrai dire, pourtant il y avait effectivement quelque chose de prometteur qui transparaissait de son attitude parfois. Les Nocturnes étaient des imbéciles. Quiconque souhaitait se battre devrait avoir le droit de le faire s'il s'en sentait capable.

-D'où tu viens ?

La question n'était pas très précise. Il ne lui demandait pas où est-ce qu'elle avait passé les deux derniers jours, mais plutôt les deux dernières années. Avait-elle connu l'esclavage ? Ou bien avait-elle simplement vécu avec les sorciers lambda jusqu'à trouver et contacter un groupe d'insurgé pour se joindre à eux avant de se faire refouler ? Il voulait savoir si elle avait véritablement vécu la guerre, ou si elle avait simplement regardé les choses se passer avant de se décider à bouger ses fesses pour faire avancer la situation.

Sa voix, menaçante mais douce malgré son apparence des plus rudes, filtra à nouveau à travers ses lèvres. Il était très vaguement curieux. Est-ce qu'elle comptait renverser le gouvernement à elle toute seule ?

-Et qu'est-ce que tu compte faire alors que tu es seule et selon tes dires, faible ?

Elle l'avait dit, il n'inventait rien et ne cherchait de toute façon pas à ménager sa fierté. La sienne avait disparu quelque part dans une cellule sombre et froide dans lieu appelé Azkaban et une colère de la même couleur que son foulard lui collait maintenant au corps.
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« I'm longing to be free, I won't let you fade away»
feat. Alan R. Ancrath


L'homme est sur ses gardes. Il lâche une seconde Ginny des yeux pour épier les environs. Craint-il de tomber dans un piège ? Elle réfléchit, se demande ce qu'il y a de louche dans son apparence. Elle a prit soin d'enfoncer son bonnet sur son crâne. Il doit se méfier, la trouver maniaque de la plus étrange des façons. Elle sait qu'une jeune femme de son âge ne se promène pas seule dans les bois, par les temps qui courent, loin de toute habitation, à plusieurs centaines de miles de toute âme qui vive. La trouver là ne peut augurer que des ennuis. Et son joli mais triste minois ne peut rien changer à la perception que l'homme doit avoir d'elle. Ginny tente de construire le puzzle dans sa tête, d'imaginer la réflexion qui doit être celle du sorcier. Elle l'observe à nouveau, intriguée. Elle peut également se demander ce qu'un insurgé vient faire en ces lieux. La rouquine n'est pas dans la confidence, elle ne sait pas où se trouvent les campements des autres groupes d'insurgés. De la résistance, elle n'a connu que les toits silencieux des boutiques du Londres sorcier. Hormis ce qu'elle a vu, elle ne sait rien. Elle veut peser dans la balance, prouver que les années de calvaire n'ont pas fait d'elle une coquille vide et fade, incapable d'utiliser une baguette, mais elle ignore tout des coulisses de la guerre.

Un pas en avant distrait Ginny de ses pensées. Elle se crispe légèrement, tandis que l'insurgé présumé s'approche d'elle, baguette levée. Soudain, elle se questionne. Elle ignore si elle a bien fait d'indiquer à l'inconnu son appartenance aux insurgés. L'un des siens placerait-il en apparence un symbole si aisément déchiffrable ? Elle pourrait tout aussi bien faire face à un mangemort ou à un sympathisant, qui a arraché un foulard sur le cadavre d'un insurgé après l'avoir abattu. « Mouais. » Elle se raidit, mais garde le regard droit, dans celui de son adversaire. N'arrivant pas à déterminer son statut dans l'immédiat, Ginny préfère opter pour la moins favorable des hypothèses. Elle ne se détend pas lorsque la baguette rivée sur elle se baisse enfin. Elle a trop peur de retourner dans le noir et l'oubli. Aucun sbire de tu-sais-qui n'aura jamais raison de sa liberté. Mieux vaut se méfier d'un ami que d'accorder sa confiance aveuglément à l'ennemi. « Les Nocturnes t'ont empêché de participer parce qu'ils te trouvent faible ? » Il s'interroge. Ginny ne voit pas d'intérêt à mentir sur ce point. Si elle répond, il lui montrera l'étendue de sa curiosité. S'il pose trop de questions, la rousse pourra commencer à courir. Pour l'heure, elle se contente de trembler. Elle tâche de cacher l'état dans lequel la met cette rencontre fortuite, de dissimuler à quel point elle n'est pas préparée à la confrontation avec l'ennemi. Elle doit se montrer brave. Son salut ne viendra qu'à cette condition. Alors elle hoche doucement la tête, offrant une réponse silencieuse à l'inconnu, qui s'empresse d'ajouter : « D'où tu viens ? » Elle ne peut être encline à répondre. La voix sombre de l'homme ne se veut pas menaçante, pourtant Ginny sent ses muscles se contracter. Elle songe au temps qu'il lui faudra pour attraper sa baguette dans la poche intérieure de sa veste. Le sorcier réagira sûrement. Il lui faudra donc être prompte. Elle n'est pas persuadée d'être à la hauteur d'un affrontement de cette envergure, mais s'en remet à sa fureur de vivre. Au moins à cette volonté de n'être pas prise vivante. Ce sera libre ou morte, pas d'échappatoire.

« Et qu'est-ce que tu compte faire alors que tu es seule et selon tes dires, faible ? » Ginny tique, cligne plusieurs fois des yeux dans une réaction malhabile. Elle songeait déjà à sortir sa baguette pour se jeter sur lui, mais elle ignore tout de l'étape suivante. Toute sa bonne volonté semble s'effriter. L'homme ne cherche pas à la heurter, il ne se montre pas agressif, juste curieux. Trop curieux ? Se poser les questions auxquelles la cadette Weasley n'a pas pensé revient-il à se montrer trop curieux ? Sans le vouloir, ses lèvres se tordent dans une moue indéchiffrable. Ginny a oublié depuis longtemps les expressions faciales sur lesquelles ses anciens détracteurs auraient pu jouer. Son visage n'est que sécheresse placide. « J'irai là où on a besoin de moi. » Elle ne tranche pas à l'essentiel par agressivité. Ginny ne possède pas cette corde à son arc. Elle ne sait plus détourner, contourner. Lorsque le temps manque pour dire les choses, on apprend à aller au plus simple. Et la rouquine a manqué de tout, de temps, d'énergie, de ressources, de toutes ces choses qui ouvrent à l'oisiveté et aux manières. « Vous posez beaucoup de questions. » Elle constate, la neutralité dans la voix. « De nous deux, c'est vous la menace. » Le calcul est facile à faire. Sur le plan physique, Ginny ne fait pas le poids. Et le sorcier a déjà sa baguette à la main. D'un geste bref de la tête, elle désigne justement l'arme que tient son aîné, et plisse les yeux. « Si vous m'attaquez, je me défendrais. » Il ne peut pas craindre réellement cette situation, mais Ginny signale une fois de plus qu'elle ne se rendra pas vivante. Les bases sont posées. « Rangez votre baguette, vous n'en avez pas besoin. » Bien sûr, la rouquine resterait crispée et lui conserverait sa retenue, mais au moins se trouveraient-ils, virtuellement, sur un pied d'égalité.


« Le foulard que vous portez... » Elle le désigne d'un geste vaporeux de la main, y jette un bref coup d’œil, puis relève le regard vers celui qui la surplombe. « Comment être sûre que vous ne l'avez pas pris sur un insurgé que vous auriez tué ? » La question est légitime. Il peut choisir de l'éluder, auquel cas Ginny n'aura jamais de certitude sur son appartenance. Elle ne peut pas faire confiance au premier inconnu croisé. La captivité l'a rendue méfiante, craintive. Il lui est impossible désormais de poser les yeux sur un sorcier sans craindre le pire. Violence et perfidie vont de paire, dans le plus infect des mondes possibles. Son monde.

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Elle semble mal à l'aise, elle tremble devant lui. Elle a peur. Elle jouait les bravache tout à l'heure, mais désormais il pouvait voir que son langage corporel la trahissait. C'était une bonne chose. La main d'Alan se leva machinalement pour venir pincer son oreille, un tic qu'il conservait depuis des années désormais, signifiant qu'il réfléchissait à la situation. C'était une gosse apeurée qui ne répondait pas à ses questions de façon satisfaisante.

Personne n'aurait besoin d'une telle sauveuse, seule, sans aide, tremblante devant un seul adversaire. Surtout pas au milieu d'une forêt dans laquelle elle marchait avec une tranquille naïveté qui aurait pu la faire tomber dans un traquenard tordu. C'était d'ailleurs cette naïveté qui le rendait nerveux. Une jeune fille seule devrait faire preuve d'un peu plus de vigilance normalement. Il jeta un nouveau coup d’œil aux alentours et laissa retomber ses yeux dans les siens.

-C'est exact, je pose des questions. Je n'ai pas encore décidé de ce que j'allais faire de toi.

Il lui avait lancé ça avec un sourire, juste pour voir si elle allait appeler des renforts. Son sourire s'élargit lorsqu'elle lui avoua qu'entre eux, c'était lui la menace.

-Merci.

En revanche, son sourire se fana lorsqu'elle lui annonça qu'il n'aurait pas besoin de sa baguette. Elle se trompait grossièrement.

-Si c'est ce que tu penses, je suis étonné que tu sois toujours en vie. La tienne ne devrait pas être dans ta poche, mais dans ta main. Tu es seule et pourtant tu te comportes comme si tu ne craignais rien. Je me méfie. Même si tu as dit la vérité et que tu es effectivement seule, rien ne me dit que quelqu'un d'autre ne risque pas de venir nous attaquer par surprise.

Il détourna les yeux un bref instant pour scruter à nouveau les environs. Il ne voyait même pas pourquoi il lui expliquait les bases de la survie. Sans doute parce qu'il savait qu'il ne serait pas la dernière personne qu'elle rencontrerait et que la prochaine serait sans doute la dernière si elle ne changeait pas rapidement de d'attitude. Il n'avait rien contre ceux qui n'étaient pas des mangemorts ou des sympathisant. Il n'avait même rien contre ceux qui se contentaient d'exister dans une querelle qu'ils ne considéraient pas comme la leur, à part du mépris. Quant à elle, elle voulait aider, elle bénéficierait donc de ses conseils pour survivre. N'importe qui pouvait donner un coup de main à l’insurrection. À condition de rester en vie. Il cracha par terre.

-Il n'y a que les pacifiste pour se faire tuer et ce ne sont pas ces foulards là qu'ils portent, répliqua-t-il durement. Les miens ne sont pas faciles à abattre.

Il la dévisageait à présent, l'étudiait de haut en bas. Elle avait peur, certes, mais elle tenait bon et il y avait toujours cette envie de se battre en elle. Seule, elle ne vaudrait rien, c'était une certitude. Elle n'en avait pas encore la carrure. Cependant il y avait les bases, de très bonnes bases. De quoi construire quelqu'un d'utile à condition de la guider correctement sans doute, mais peut-être se trompait-il. Il décida de faire un pas mental vers elle en lui dévoilant son nom.

-Je m'appelle Alan. Toi, qui es-tu ?

Son nom en lui-même ne devait rien lui dire. Chez les belliqueux il jouissait d'une certaine réputation, mais il n'avait eu presque aucun contact avec les autres. Faire connaissance au milieu des bois était certes légèrement mais étrange, mais en soi il valait mieux se rencontrer ici que sur ces maudits échiquiers géants pour rebuts. Il se détendait très légèrement. Cette fille n'était pas une menace pour lui, il l'avait compris, mais il restait environs un million de choses qui pouvaient mal tourner. L'arrivée massive de mangemort en vacances. Des fichus rafleurs en manque de chaire fraîche. Un imbécile de campeur moldu qui les découvrirait et se demanderait pourquoi un homme seul et visiblement menaçant se tenait devant une pauvre jeune fille apeurée.
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« I'm longing to be free, I won't let you fade away»
feat. Alan R. Ancrath


Avec la minutie de la biche apeurée, Ginny analyse chaque geste de son vis-à-vis. Son regard suit sa main lorsqu'il la porte à son oreille, se pince le lobe dans un semblant de nervosité. Ce mouvement lui ménage un peu de temps pour réfléchir, et cela n'échappe pas à l'ancienne lionne. Elle a cessé de parler, laissant rouler la balle dans le camp de l'inconnu. Les réponses qu'il apportera lui diront s'il s'agit bien d'un insurgé, ou d'un sympathisant se faisant passer pour ce qu'il n'est pas. A ce stade, Ginny demeure interdite. Le flou la berce et la nervosité s'installe. A peine plus vaillante qu'un animal fraîchement rendu à la liberté, Ginny épie et scrute. Elle ne souhaite pas retourner à sa prison. Elle ne pourra supporter à nouveau cet enfer. Craintive et fragile, elle imite l'homme lorsqu'il sonde nerveusement les environs. Son attitude impose, contrairement à la sienne. Il n'a pas besoin de faire semblant, pas besoin de se convaincre pour espérer convaincre les autres. Il ne feinte pas, mais agit, et réfléchit. Mangemort ou insurgé, Ginny aurait énormément à apprendre d'un homme comme lui. Il est force et charisme, là où elle n'est que faille et résignation. Et soudain son regard revient plonger dans le sien. La rouquine frissonne. Il pourrait lui rompre la nuque en un instant. S'il en décide ainsi, sa vie n'est plus qu'un mot.

« C'est exact, je pose des questions. Je n'ai pas encore décidé de ce que j'allais faire de toi. » Leurs pensées se sont fait écho. Ginny sent un frisson glacé lui remonter contre la nuque. Son sort se trouve entre les mains du sorcier. Et elle déteste ça. Elle n'a pas choisi de tracer sa propre voie pour se retrouver soumise à la première rencontre. Ses joues se creusent et sa mâchoire se serre. Ses ongles lui rentrent dans la paume lorsqu'elle sert les poings. Elle lui rappelle que des deux, il représente la plus grande menace, et il se contente de sourire et de la remercier, cynique. Ginny est tout bonnement à sa merci. Alors elle lui conseille de ranger sa baguette, il n'en aura pas besoin face à elle. Car la rouquine ne ripostera que si elle est acculée, comme le félin qui feule et qui sort les griffes en arrondissant le dos. « Si c'est ce que tu penses, je suis étonné que tu sois toujours en vie. La tienne ne devrait pas être dans ta poche, mais dans ta main. Tu es seule et pourtant tu te comportes comme si tu ne craignais rien. Je me méfie. Même si tu as dit la vérité et que tu es effectivement seule, rien ne me dit que quelqu'un d'autre ne risque pas de venir nous attaquer par surprise. » Il est prudent et méthodique, il scrute à nouveau les environs. Ginny profite de ce moment de répit pour laisser son regard se fixer sur l'homme en toute impunité. Il a raison et elle est idiote. Mais elle est aussi persuadée qu'il a mal compris ses intentions. Ça ne l'empêche pas de marquer un point. La baguette de Ginny est trop difficile à atteindre, et la rouquine ne possède plus ses anciens réflexes. La captivité et la servitude l'ont amollie. Autrefois, elle n'aurait pas été aussi imprudente. Elle avait les cartes en main pour devenir une sorcière redoutable. Mais son jeu lui a été volé pour être redistribué à d'autres. Elle n'est plus rien désormais, et ne possède plus rien. Hormis la rage. Ce sentiment sourd et aveugle.

Décidément bourru, l'homme crache à terre avant de lancer d'un air dédaigneux : « Il n'y a que les pacifiste pour se faire tuer et ce ne sont pas ces foulards là qu'ils portent. Les miens ne sont pas faciles à abattre. » Évidemment. L'indice est de taille, car il lui donne une idée assez précise de la faction à laquelle appartient l'insurgé. Elle acquiesce, silencieuse, opinant juste assez de la tête pour que cela soit perceptible. Elle sent le regard de l'homme la détailler, et elle le soutient avec ténacité. Elle fiche ses mains sur ses hanches, tâchant d’apparaître plus détendue. Mais l'attitude n'est que façade. Ginny ne sait toujours pas quoi faire des propos de l'inconnu. Elle ne peut pas lui faire confiance. C'est un luxe dont elle s'est séparée. Torturée et méprisée, des mois durant, des années, la cadette Weasley n'est même plus capable de confier son existence aux siens. La confiance se mérite. Et le mérite est un concept de plus en plus vague dans son esprit. Des pans entiers de ses anciennes conceptions ont été arrachées à sa mémoire. Il ne reste plus dans son esprit qu'une immense et scandaleuse confusion.

Puis soudain, une lueur dans le chaos. « Je m'appelle Alan. » Alan. La lionne terrorisée s'accroche à ce nom, cet espoir.   « Toi, qui es-tu ?
 » Prise de court, Ginny tente de faire le vide dans son esprit, de déterminer une ligne de conduite. Elle sent le regard de l'homme la presser. Il doute d'elle, laisser s’égrainer quelques minutes de plus revient à lui donner raison. Elle doit réagir vite pour paraître crédible. Alors elle redresse le menton, et rassemble son courage. « Scar. » La rouquine ne peut dévoiler son prénom, son identité. Tout comme ses cheveux, elle doit les dissimuler, le temps de savoir si elle peut faire confiance à ce sorcier. C'est également une chance de brouiller les pistes. Au sein des insurgés, Ginny n'a pas encore eu le courage de faire ses preuves, elle n'a pas gagné le droit d'obtenir un nom de code. Si  elle veut marquer les esprits, enterrer le passé et prendre sa revanche sur la vie, elle doit accepter d'abandonner Ginny, pour ne plus être que Scar. Cette étape est douloureuse et pourtant cruciale.

Son regard, pénétrant, se pose sur celui qui prétend être son homologue. « Les vôtres … vous faites partie des belliqueux n'est-ce pas ? » Lorsqu'elle a rejoint, de fait, les insurgés, on ne lui a pas laissé le choix de la faction. Les quelques membres de sa famille engagés dans l'effort de guerre le sont parmi les nocturnes. C'est donc naturellement qu'elle s'est retrouvée à leurs côtés. « Je croyais que les belliqueux passaient leur temps à poser des pièges et tenter des attaques inconscientes. » La voix de Ginny est posée, elle ne cherche pas à blesser ou à juger, elle ne fait que répéter ce qu'elle a entendu, curieuse d'avoir la version d'un belliqueux sur le sujet. La cadette Weasley a perdu l'art du tact et de la finesse. Des deux, c'est elle qui a l'allure la plus frêle, c'est d'elle que l'on attend des marques de douceur. Attentes qu'elle ne peut combler. « Ce que vous faites ici ne me regarde pas. » Elle poursuit d'un ton égal, nébuleuse. « Je ne vous poserai pas de questions sur votre passé. » Elle n'oublie pas à qui elle a à faire, elle n'oublie pas que toute confiance est dérisoire. « En contrepartie, vous ne m'en poserez pas non plus. » Elle ne demande pas, mais exige, et ses prunelles claires scrutent davantage le fond des yeux de Alan. Ils sont comme deux rebuts sur un jeu d'échec géant, et c'est à Ginny de dévoiler sa stratégie. « Je ne me comporte pas comme si je ne craignais rien. » Elle répond enfin à l'une des précédentes remarques du sorcier. Les mots ont sinué doucement dans son esprit, jusqu'à atteindre le centre névralgique de sa pensée. La rouquine est plus lente à réagir qu'elle n'en avait l'habitude. Ce constat lui fait serrer les dents. Lentement, prudemment, elle glisse sa main dans la poche intérieure de sa veste. Elle jauge l'inconnu d'un regard qui se veut rassurant, mais ne parvenant pas à se rassurer elle même, elle doute de l'efficacité de cette marque d'attention.

« J'ai oublié ce qu'était un duel. » La voix traînante et basse, elle extirpe dans le même temps sa baguette de l'endroit où elle la gardait trop précieusement. « J'ai ma baguette en main. » Droite et fière, elle le fixe d'un regard qui perd à peu à peu de son éclat, et tranche avec l'attitude qu'elle tente de se composer. « Mais ça ne fait plus aucune différence. » Sa voix se brise, son timbre s'est morcelé. Ginny est incapable de faire usage de la baguette qui lui a été confié après sa libération. La tenir devant le sorcier n'est qu'un leurre. Ginny est désarmée.

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-Et comment !

Évidemment qu'il était un belliqueux. Il ne portait pas un fichu ruban rouge juste pour la plaisir d'avoir une ceinture d'une couleur inhabituelle. Elle ne devait pas avoir rencontré beaucoup d'entre eux chez les Nocturnes. Alan ne savait même pas où était leur planque. Il n'y avait pas beaucoup de communication entre les différents groupes de résistants, mais Alan ne trouvait pas ça dérangeant pour le moment. Les Pacifistes étaient des lâches et les Audacieux devraient faire un peu plus honneur à leur nom. La rumeur disait que Potter était parmi eux, mais Alan ne savait pas vraiment s'il devait y croire. En tout cas, il ne croyait plus en l'espoir qu'il représentait. Il croyait en la force des efforts des belliqueux et il croyait en la puissance de sa rage pour débarrasser le monde des Mangemorts.

Un sourire féroce étira peu à peu ses lèvres en entendant la description que Scar faisait de lui et de ses semblables.

-Les Belliqueux passent leur temps à changer le monde efficacement, contrairement au reste des insurgés qui se tournent les pousses en attendant que ça passe, répliqua-t-il.

Sa voix avait toujours une intonation douce, malgré son regard et son ton qui paraissaient souvent menaçant. Ses yeux se plissèrent lorsque « Scar » commença à lui faire part de ses exigences et Alan releva sa baguette pour en appuyer le bout sur la poitrine de son vis-à-vis.

-T'es pas en position de négocier. Je ne te poserai pas de question parce que je me fiche de ton passé.

Quant au sien, il était venu ici pour l'enterrer convenablement. Désormais il n'en restait rien, pas même l'odeur délicate de sa candeur passée. Peu importe le passé de quiconque. En se penchant sur le sien, on pourrait penser qu'il n'avait pas l'étoffe d'être un Belliqueux et pourtant il en était là, féroce et déterminé comme un tigre blessé qui ne craint plus la douleur.

Il ne quitta pas un instant des yeux la main de Scar lorsqu'elle se perdit dans sa poche pour en ressortir avec sa baguette. Elle l'écoutait. Elle voulait survivre. Bien. Sa baguette à lui était toujours contre la poitrine de la jeune fille, il détenait toujours l'avantage. Soudain il explose et s'écarte d'un coup en abaissant sa baguette.

-NON !

Il avait crié, arrivé au bout de sa patience très limitée. Ça faisait une différence, elle était idiote. Alan se prit la tête dans les mains et ferma ses yeux en serrant ses paupières si fort qu'il s'en fit mal. Elle devait comprendre, elle devait saisir l'importance de tout ça. De toute ça quoi ? L'importance d'avoir sa baguette dans sa main et de la conserver. Peu importe les duels, peu importe les oublis. Il se rapprocha de Ginny d'un coup, à grand pas et cette fois-ci c'est du doigt qu'il la poussa.

-Ça FAIT une différence ! S'acharna-t-il. Comment tu vas te défendre contre moi sinon ?

Il y avait quelque chose en elle, il le savait, il le voyait, mais comment le mettre en avant tant qu'elle essayait de l'enfouir le plus profondément possible à chaque fois ? Il fallait qu'elle le sente elle aussi. Il la poussa plus rudement et s'écarta d'elle avant de la viser avec sa baguette.Elle avait besoin d'être secouée.

-Défends-toi !

C'était là son test. Qu'elle essaye, c'était tout ce qu'il demandait. Qu'elle essaye et il saurait qu'il y avait quelque chose à faire. Qu'elle renonce et il la laissera là sans même se retourner. Il n'avait pas besoin d'un fardeau, il n'avait pas besoin de quoi que ce soit. Cependant, il voulait exploiter quelque chose et pour ça il fallait que ce quelque chose fasse preuve d'un peu de combativité, ou même d'existence.

Son regard était allumé d'une lueur folle. Sans doute devenait-il fou. Être réduit en esclavage après avoir passé plusieurs années à Azkaban avait de quoi rendre fou. De toute façon pour lutter contre le fou furieux qui dirigeait le Gouvernement, il fallait être fou. Pas de survie sinon. Mais pire que la folie, il avait soif de combat. Il voulait se battre, même contre une gamine. Il se battrait contre la lâcheté qu'il sentait en elle et la tuerait, de cette façon il ne resterait plus que le bon, plus que le nécessaire. Plus que cette petite flamme de défi qui deviendrait une tempête de flamme.
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« I'm longing to be free, I won't let you fade away»
feat. Alan R. Ancrath


Le jugement n'a jamais été au nombre des qualités de Ginny. Et encore aujourd'hui, elle préfère établir des constats sur des bases solides et vérifiables, plutôt que sur des impressions et des faux semblants. La rouquine n'aime pas jouer avec les apparences, mais est réduite à le faire. Elle doit faire en sorte qu'on la juge plus capable qu'elle ne l'est en réalité. C'est là son unique espoir de se rendre utile un jour. Elle tente de garder la face, de poser sa voix, de ne rien montrer à Alan des écorchures qui parsèment son être. Il ne doit pas soupçonner sa véritable identité. S'il le fait, elle peut être assurée d'un retour imminent à la case départ. Car aucun insurgé digne de ce nom ne prendrait le risque de se mettre la famille Weasley à dos en couvrant sciemment la position de la cadette. Ginny ne se fait plus aucune illusion sur les sorciers qui l'entourent. Peu importe le camp, ils sont guidés par des préoccupations égoïstes et personnelles. Même les insurgés, qui prétendent se battre pour la liberté et le retour à un monde sans mangemort, sont avant tout motivés par la recherche du confort qu'ils ont perdu, la vengeance d'un être cher emporté dans les combats, la vie qui était la leur avant de connaître l'enfer. Les sorciers capables de se battre pour un idéal plus grand que leur propre petite personne sont rares. Ceux que Ginny connaît, elle peut les compter sur les doigts d'une seule main.

« Les Belliqueux passent leur temps à changer le monde efficacement, contrairement au reste des insurgés qui se tournent les pousses en attendant que ça passe » La rouquine fronce les sourcils, et ne laisse pas l'occasion à ses prunelles de se détourner de son soit-disant homologue. Alan n'a pas l'allure de l'homme qui se bat pour le bien commun. Ginny rassemble les faits, le peu d'indice qui émane de l'imposant sorcier qui lui fait face. Elle suppute une aspiration au combat, perçoit au fond de ses pupilles une rage bouillonnante dont il ne peut se détourner. Une vengeance peut-être. Changer le monde ? Peut-être … mais pas par bienveillance et grandeur d'âme. Alan est un rustre qui s'ignore, une montagne de muscles qui se complet dans la soumission d'autrui. Ginny frissonne. Il lui rappelle les monstres qui l'ont asservi. Il a la même fureur dans le regard, et cette arrogance, cette estime de soi qui lui fait soudainement lâcher : « T'es pas en position de négocier. Je ne te poserai pas de question parce que je me fiche de ton passé. » Ginny tient bon, mais la débâcle n'est pas loin. Elle tente, de toutes ses forces, elle essaye de faire bonne figure. Elle a besoin de faire illusion pour se convaincre elle-même. Mais sa voix lui échappe et sa volonté se désagrège.

D'un mouvement qui effraie la biche blessée en Ginny, Alan se recule subitement et abaisse sa baguette en grondant : NON ! La peur fige la rouquine, qui ne trouve pas le courage de l’imiter en abaissant à son tour sa baguette. Elle reste là, droite mais inerte, tandis qu'il enfouit son visage dans ses mains et ferme les yeux. La bouche de Ginny s'entrouvre légèrement. L'éclat de colère est identique à celui qu'avait le frère Carrow lorsqu'il n'obtenait pas ce qu'il désirait. Si elle résistait, il s'acharnait davantage, pour la faire rompre. Mais la cadette Weasley ne faisait guère que plier à l'époque et se redressait invariablement, la flamme dans le regard et la hargne aux lèvres. Où était passée cette rage qui lui permettait de tenir debout, d'affronter tous les cataclysmes et toutes les violences sans ciller ? Sa flamme s'était-elle définitivement évaporée, ou Ginny serait-elle un jour capable de renouer avec cette force devenue étrangère ?

Comme s'il comprend le dilemme qui se joue en elle, Alan s'avance d'un pas décidé vers elle et la pousse de l'index. Il ne la ménage pas, mais aucun son ne s'échappe des lèvres de Ginny. « Ça FAIT une différence ! Comment tu vas te défendre contre moi sinon ? » Les prunelles pâles de l'ancienne lionne passent de l'index du sorcier, cloué à sa poitrine, à son visage et son regard furibonds. Il ne comprend pas. Ne pourra jamais comprendre ce par quoi elle est passée. Du plat de la main cette fois, il la pousse avec davantage de force, de rage. Elle la reconnaît, cette rage, qui brûlait en elle autrefois. Ses lèvres tremblent, et ses yeux ne parviennent pas à se détacher de l'homme immense et fort qui la surplombe. « Défends-toi !  » Il la met au défi, et la lueur démente qui danse au fond de ses yeux profonds la désoriente cruellement. Il n'est plus l'insurgé dans lequel elle aurait pu trouver un allié.

Il est Amycus. Gregory. Draco. Ces hommes qui l'ont abusée, se sont servis de leur statut, de leur folie pour la mettre en pièces. Il est aussi Fred, Percy, Bill Charlie et Ron, ces frères auxquels elle ne peut plus ni parler ni s'identifier, que sa propre folie éloigne chaque jour un peu plus. Il est même Harry. Le seul qu'elle ait jamais vraiment aimé, mais que le devoir a aveuglé au point de la laisser sombrer dans le désespoir et la souffrance.

Le folie dans son regard, la rage sur son visage, qui se distille dans ses veines et le fait presque trembler, cette soif de violence... Il est la somme de ses antagonistes, de ces âmes qui sont entrées en contact avec la sienne, pour la déchirer, la sectionner, la ravager. Il est eux et eux sont lui, coupables de son traumatisme.

Le regard soudain clair, elle relève le menton et lui fait face. Ce n'est pas la fierté qui se promène sur son visage terne, mais la protestation. Le rejet de la violence et des blessures qu'elle engendre. « Everte Statim  » Le sortilège  projette Alan à plusieurs mètre de sa position. Ginny jette un coup d’œil interdit vers sa baguette, puis vers l'homme. Il a dû être surpris par l'attaque de la rouquine, sans quoi il se serait protégé contre ce sortilège mineur. Ginny semble alors retrouver possession de son corps et de ses mouvements. La pulsion qui a parcouru son être et lui a donné la force d'attaquer a fait fondre provisoirement les peurs qui la retiennent. Elle s'avance jusqu'à Alan, et pointe sa baguette sur son torse alors qu'il commence à se redresser. Elle peine à respirer, le souffle court, encore sous le choc. « Si tu es une menace, je n'hésiterais pas à me défendre. » Elle vrille un regard galvanisé sur lui. « Je n'ai pas peur de toi. » Elle aurait voulu avoir le courage de cracher ces mots à ceux qui l'ont meurtrie. Des étincelles jaillissent de ses prunelles restées vides trop longtemps. La lueur électrique se prolonge quelques secondes, et l'extrémité de la baguette de la rousse creuse un sillon dans le vêtement du sorcier qu'elle domine désormais. Un sentiment puissant lui bat les tempes alors qu'elle le détaille sous un jour nouveau. Doit-elle lui laisser l'opportunité de devenir son prochain bourreau ? Ne vaut-il pas mieux en finir ici et maintenant, tracer un trait sur ses faiblesses en même temps que sur la vie de cet homme qui a eu l'audace de défier sa névrose ?

Elle agite distraitement la tête, puis écarte sa baguette du buste du sorcier. Son regard s'est résigné lorsqu'elle le pose à nouveau sur lui. Elle tend la main pour l'aider à se relever. « Ennemi ou allié ?  » La balle est dans son camp. Le choix lui appartient désormais.

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Alan ne savait pas vraiment à quoi il s'attendait. Pas à ça en tout cas. Il avait vu quelque chose en Scar, quelque chose de faible, quelque chose de mourant et pourtant quelque chose de prometteur qu'il souhaitait qu'elle exprime. Il ne se doutait pas cependant que ça lui viendrait aussi aisément, il pensait devoir la bousculer un peu plus que ça pour qu'elle se décide à réagir et le voilà qui s'envole dans les airs pour atterrir plusieurs mètres plus loin, la baguette toujours dans sa main. Pour rien au monde il ne la lâcherait.

Il resta un moment sur le dos, les bras en croix et les yeux perdu dans les branchages des arbres qui le surplombaient. L'instant était d'une certaine beauté quand il y pensait. Ça faisait un moment qu'il ne s'était pas senti aussi vivant qu'en cet instant où un sort l'avait cueillit en plein ventre. Il se redressa lentement sur ses coudes, sa folie évaporée lorsqu'il avait trouvé la preuve que quelque chose était possible. La baguette de la jeune femme s'appuya sur son torse, mais il n'y jeta pas un coup d’œil, ses yeux fixés dans ceux de Scar.

Il se mit alors à sourire, puis à rire et se laisse retomber par terre, comme secoué par un excès de joie brute. C'était bien là, à sa place, dans son regard. Ses traits semblaient se souvenir de cette expression qu'elle adoptait naturellement, du moins temporairement, jusqu'à qu'elle ne s'évapore. Alan souriait toujours lorsqu'elle lui tendit la main pour l'aider à se relever, mais il ne la prit pas.

-Je ne suis pas ton ennemi, déclara-t-il.

Il se releva tout seul et se débarrassa des relief de l'automne qui étaient restés accrochés à son manteau et son pantalon lorsqu'il s'était étalé par terre. Elle n'était pas aussi faible qu'il l'avait pensé au premier abord, mais ça mettait trop de temps avant qu'elle ne réagisse. Il lui faudrait être plus sûre d'elle dès le départ.

-Et j'ai comme l'impression qu'avoir ta baguette en main fait effectivement une différence.

Elle n'était pas aussi désarmée que ça, contrairement à ce qu'elle lui faisait croire depuis le début. Peut-être le croyait elle également, mais cette petite démonstration avait dû la faire changer d'avis sur sa propre force intérieure. Il reprit son sérieux assez rapidement, le moment était venu de prendre une décision sur ce qu'il allait faire de la gamine. Sa main se porta automatiquement à son oreille à nouveau, pinçant son lobe machinalement.

-Écoute, t'as l'air de savoir te défendre jusqu'à un certain point, mais toute seule dans la nature, tu risques pas de faire long feu.

Il laissa retomber sa main libre et étudia Scar de haut en bas, comme un entraîneur de Quidditch qui examinerait un potentiel nouveau joueur dans son équipe.

-Les Nocturnes voulaient pas de toi, mais moi je suis pas un Nocturne. Je suis un Belliqueux. Un Aliéné. Contrairement à eux je sais reconnaître quelqu'un qui veut et peut faire avancer les choses, tout comme les autres qui sont avec moi.

Il regarda autour de lui, soudainement tendu à l'extrême. Sa paranoïa était revenue au grand galop. Il se rendit compte qu'il qu'il était toujours autant à découvert et toujours en position de se faire cueillir par n'importe qui.

-Voilà ce que je te propose. Tu veux aider les autres ? Nous aussi. Viens avec moi. Tu pourrais apprendre quelques trucs et vraiment participer à l'effort de guerre. Tu pourras vraiment venir en aide à ceux qui ont besoin de toi. Il se tourna à nouveau pour la regarder dans les yeux. Je t'oblige à rien, mais ça serait du gâchis que tu te fasses harponner par la première bande de rafleurs que tu vas croiser.

Il lui tendit sa main, calleuse, non épargnée par le temps et les épreuves, pour qu'elle la serre. Il savait qu'elle pouvait représenter un plus pour eux, du moment qu'elle retrouvait cette énergie qui l'avait poussée à l'envoyer voltiger dans les airs. Sinon elle ne durerait pas plus longtemps chez eux que seule dans la nature. Les Belliqueux n'étaient pas réputés pour leur longévité ou leur capacité à rester à l’abri.
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Le sourire du sorcier marque une ride d'expression entre les sourcils de la lionne. Elle ne sait pas sous quel augure elle doit prendre cette réaction. Elle réfléchit encore à la possibilité de se montrer plus revêche encore. Si se retrouver sur le dos le met dans cet état, elle ne peut qu'imaginer sa joie à passer de vie à trépas. Il bascule à nouveau sur le dos et se met à rire franchement. Ginny, elle, secoue vigoureusement la tête, pour se chasser les idées noires du crâne. Sa rage s'évapore lorsqu'elle tend une main engageante au sorcier pour l'inviter à remettre la balle au centre. Il dédaigne cette marque de politesse, des restes de sa vie d'avant que les mauvais traitements ont épargné, car la politesse et le respect représentaient des valeurs appropriées, que tout bon rebut se devait de partager. « Je ne suis pas ton ennemi. » Il ne semble pas lui en vouloir. Ginny, devenue négative, attend les reproches qui ne viennent pas. Il s'acharne à faire bonne figure, et une forme dérangeante de douceur s'est immiscée sur ses traits. Pourtant, l'homme conserve sa fierté. Il met un point d'honneur à se relever seul. Ce doit déjà être suffisamment douloureux d'avoir été surpris par une gamine en cavale, et de se retrouver les quatre fers en l'air, ce serait d'autant plus pénible d'avoir à accepter son aide pour se remettre debout. A ces pensées, la rouquine ne peut empêcher une légère grimace de percer sur son visage d'ordinaire inexpressif. Les muscles de sa peau sont raides, ils ont connu nombre de grimaces ces dernières années. Mais aucune grimace de compassion, comme celle qui tord presque délicatement son visage à cet instant.


« Et j'ai comme l'impression qu'avoir ta baguette en main fait effectivement une différence. » La grimace se dissipe, remplacée par un air sérieux, presque contrit. Ginny souhaite se défendre du contraire, insinuer qu'il se trompe, et qu'il ne connaît pas aussi bien qu'elle ses propres limites et faiblesses. Mais le sortilège qu'elle vient de lui jeter semble apporter la preuve flagrante du contraire. Elle se mure donc dans un silence raisonnable, et garde les yeux rivés sur le sorcier, attendant de voir son prochain coup. Elle doit s'admettre curieuse. Il a réussi à piquer son intérêt. Il prétend ne pas être son ennemi, et Ginny a envie de le croire. Elle a besoin de le croire. Même si elle sait qu'elle ne parviendra jamais à lui faire confiance. La rouquine observe à nouveau le tic de son vis-à-vis. Ses sourcils se froncent à peine, tandis qu'elle enregistre le geste, le range dans l'une des cases de son cerveau parcellaire. « Écoute, t'as l'air de savoir te défendre jusqu'à un certain point, mais toute seule dans la nature, tu risques pas de faire long feu. » Cette fois, elle n'a même pas l'idée de contester. Elle demeure silencieuse, docile, tombant parfaitement d'accord avec les paroles d'Alan. Elle soutient son regard, une main fichée sur sa hanche, l'autre le long de son corps, baguette en main, tandis que le sorcier la détaille de haut en bas . Elle n'aime pas particulièrement être jaugée comme un animal mené à l’abattoir ou à un vulgaire concours, comme le rebut qu'elle était en somme. Elle sent sa mâchoire se crisper et ses yeux se révulser légèrement, mais tient bon. « Les Nocturnes voulaient pas de toi, mais moi je suis pas un Nocturne. Je suis un Belliqueux. Un Aliéné. Contrairement à eux je sais reconnaître quelqu'un qui veut et peut faire avancer les choses, tout comme les autres qui sont avec moi. » Ginny demeure songeuse, décortiquant chacun de ses mots, et chaque intonation par laquelle il les accentue. Elle n'a pas souvenir d'avoir mentionné les Nocturnes. Alan est donc plus observateur et malin que sa carrure et ses manières bourrues ne le suggèrent. Ginny note également cet indice, le grave dans ses pensées, de sorte à ne pas se laisser surprendre à l'avenir. Dans les paroles d'Alan se cache un compliment, sur lequel la rouquine glisse sans s'arrêter. Elle n'est plus assez familière de ce genre d'attentions pour les reconnaître lorsqu'elles se présentent à elle.

Nerveux, le sorcier se met à nouveau à contrôler les environs. Placide, Ginny ne le quitte des yeux qu'un instant, pour épier à son tour les arbres alentour. La forêt autour d'eux est d'un calme extrême, presque inquiétant. Leurs voix sont seules capables de venir troubler l'équilibre fragile de la faune et de la flore locales. « Voilà ce que je te propose. Tu veux aider les autres ? Nous aussi. Viens avec moi. Tu pourrais apprendre quelques trucs et vraiment participer à l'effort de guerre. Tu pourras vraiment venir en aide à ceux qui ont besoin de toi. » Le timbre posé et mûr de l'homme vient rompre le silence qui s'est installé. La forêt ne peut demeurer en paix tant qu'ils sont là. Et tant qu'il est là, la raison de Ginny est mise à rude épreuve. « Je t'oblige à rien, mais ça serait du gâchis que tu te fasses harponner par la première bande de rafleurs que tu vas croiser. » Cet écho persistant dans sa voix, la façon avec laquelle il lui tend soudainement la main, et ce regard soucieux. Ginny plisse légèrement les yeux et son nez se fronce sensiblement alors qu'elle affiche une mine dubitative. Elle croit reconnaître ce sentiment qui se dégage du sorcier. Elle l'a lu et reconnu récemment dans les yeux de Bill.

Les prunelles diaphanes de Ginny se posent prudemment sur la main qui lui est tendue. Elle retire sa propre main de sa hanche, et l'avance doucement vers celle du belliqueux. Ses doigts arrivent à quelques infimes centimètres des siens, et leur course s'immobilise. Elle relève le regard et le plante dans celui d'Alan. Les traces de son hésitation ne sont enfin chassées que lorsque sa voix trouble à son tour la quiétude instable des lieux. « Je connais mes limites. » Ou du moins croit-elle les connaître, naïve. « Et je sais que j'ai besoin d'un allié de ta trempe. » Elle ramène son bras le long de son corps et, de l'autre côté, sa main qui tient toujours la baguette se raidit. « Mais je ne me suis pas éloignée des nocturnes pour devenir une belliqueuse. » Elle croise les bras, et tâche de se composer une attitude déterminée. « Je suis une insurgée, je partage leurs valeurs et leurs buts. Mais il ne devrait pas être nécessaire d'avoir à choisir une faction plutôt qu'une autre. » Sa voix frémit davantage à mesure que les mots s'écoulent. Et une lueur flamboyante reprend peu à peu possession de ses prunelles. Elle commence à trembler, mais ne veut pas se laisser submerger par ses émotions. Elle poursuit, péniblement, le cœur à vif. « En face, les mangemorts ne sont pas divisés ! » Elle tente de se contenir, serre les dents pour empêcher ses lèvres de trembler. Elle range sa baguette et attrape brusquement la main de Alan. Le contact la trouble, et ses pensées s'emmêlent. Elle se reprend, fixe son regard dans le sien, s'accroche. « Je viens avec vous. Avec toi. Pas les belliqueux. Nous sommes insurgés avant tout, peu importe les méthodes. » Son regard se brouille alors qu'il explore les recoins les plus noirs de son esprit, ses souvenirs les plus enfouis. « Nos ennemis ne s’embarrassent pas des méthodes... » Elle sent sa voix, ses forces et sa volonté commencer à lui faire défaut. Sa main gauche saisit fermement l'avant bras du sorcier, et elle s'approche de lui tout en l'attirant vers elle. Son regard plonge plus profondément en lui, cherchant à insinuer sa pensée dans les tréfonds de son âme. « Tu m'apprendras à ne pas m’embarrasser des méthodes. Tu m'enseigneras comment devenir insensible. » Ce n'est pas un ordre, mais une demande. Une demande si solidement et viscéralement ancrée en elle que Ginny n'a jamais osé la formuler jusque là. Elle la porte, la supporte, depuis des mois, depuis sa libération. Et Scar sent un déclic, sent que ses rouages se remettent doucement en marche, le désir qui lui martelait le crâne enfin exposé à voix haute.

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