|
sujet; Smoke & mirror games {Morgana} |
| Morgana & Brynmor Choc frontal, la loi de la gravité au creux d’une terre gelée. Tu l’accueille les yeux fermés, abandon total à son parfum de vie humide de décomposition. Le froid embrasse ton visage, baiser de mort dans l’âme. Tu sais déjà ce que te relever signifie alors tu préfère faire semblant, profiter de quelques instants de paix volée. La réalité n’a été pour toi que le tourbillon d’un portoloin, finalement peu de choses face au cyclone qui fait rage dans ton estomac. Tu en vide d’ailleurs le contenu entre deux pâquerettes, pas très consistant ce déjeuner que tu as prit ce matin, comme toujours lorsque tu sais que tu as une toute autre cuisine à faire. Une grande inspiration d’air et voilà que tu rampe pour te redresser, titubant dans les hautes herbes. Tu as une gueule de bois de celles que l’on attrape avec la dépression et le dégout de soi, de celles que l’alcool n’épanchent même pas. Tu es rassuré dans le fond que personne n’était là pour observer ta chute et deviner ce que la simple action de rester debout te coûte. La lande est verte et généreuse, l’air sent bon ce parfum celte que tu connais si bien. Tu te dis qu’au final l’idée du portoloin était de trop, que la localisation de la mission était bien trop évidente. Mais tu suis les règles et ne bronche pas, comme toujours. Si les hautes sphères ont décidé d’un traitement spécial pour celle-ci, avec enlèvement et détention secrète, qu’il en soit ainsi. Qui es-tu après tout pour les contredire ? Toi qui ne sait même pas arguer contre cette raclure que tu es devenu. De cette schizophrénie morale que tu t’es imposé à cet être de mécanismes qu’elle habite, l’exemple parfait d’un imposteur. Pourtant tu joues si bien ton rôle, tu excelle dans cette pièce de noirceur. L’acte suivant, tu le connais déjà et l’arrivée soudaine de Mal à tes côtés te signale qu’il est temps d’entrer en scène. Elle a des feuilles mortes dans les cheveux, auparavant ce détail t’aurait fait sourire. Maintenant, tu n’as même pas un signe de tête pour elle et ta voix froide se contente de susurrer son prénom. La peur, la troisième invitée, s’accroche comme toujours à tes tripes alors que se dessine au loin l’ombre déformée d’un bâtiment. Une bourrasque passe au travers de tes os, s’engouffrent dans ce trou béant qui creuse ta poitrine, celui que tu laisse peu à peu ronger ta compassion. C’est cette haine symbiotique, celle que l’on a essayé de greffer à ton esprit à coup d’idéaux que tu ne partage pas. Tu ne les soutiens pas et pourtant tu les aides tout autant. Tu es né innocent et pourtant tu as mal tourné. Alors dis-moi, est-ce que tu regretteras ce jour-là comme tu as regretté les autres ?Octobre 1998 – Quelque part sur l’île de Man _____________________________________________________________ La vieille roue à aubes grince avec une régularité terrifiante. La porte de la ruine qui s’y rattache chante elle aussi l’abandon des lieux. Cette symphonie de solitude pourtant n’est pas car je sais qu’elle attend ici. Morgana Ives, accusée de haute trahison envers le magenmagot et par conséquent insurgée de premier ordre. Les détails ? Je n’en ai rien à faire et tout lâche que je suis ne veut même pas les connaître. Mallory a prit du retard sur mon avancée, peut-être marchais-je trop vite, impatient d’en finir avec cette tâche. Nous n’avons pas prononcé une seule phrase depuis les portoloins, à vrai dire nous ne parlons plus depuis quelque temps. Les mains crispées sur la sangle de ma sacoche, je jette un bref regard en arrière avant de franchir les derniers mètres. Un misérable cours d’eau tente de raviver la roue qui semble bloquée dodelinante comme la trotteuse bloquée d’une montre. Le temps va s’arrêter si j’entre ici, le temps va me dévorer avide du vide et déchiqueter mes derniers lambeaux de bien. Alors j’hésite, suffisamment pour que la main de Mal me rattrape et se pose sur mon épaule. D’un geste je m’en dégage, fuyant toujours son regard lorsque ma paume la repousse avec fermeté. « Je m’en occupe. Reste ici et monte la garde, on est pas à l’abri d’un sauvetage. » De simples mots pour une requête déchirante. Je ne veux pas avoir à entrer ici, surtout pas seul et revêtir cette peau de meurtrier taillée pour moi. Mais je ne veux pas voir l’absence d’expression sur son visage lorsqu’elle exécute les ordres, je préfère endurer que de voir endurer. J’ose un bref sourire fuyant et c’est sans doute suffisant pour la convaincre de m’obéir. Le jour décline à l’horizon alors qu’elle se poste un peu plus loin sur un rocher. Pendant un instant, j’aurais juré voir une larme aux coins de ses yeux. Seul face à la porte, je n’entre pas pour autant. Le bord d’un mur effondré me sert de bref support et j’ouvre délicatement ma sacoche de cuir. Une dizaine de petites fioles de cristal alignées, chacune avec son effet particulier. Je me saisis de l’une d’elle, avalant son contenu d’une traite – un prototype pour annihiler mon empathie – de même que l’une de ses consœur aux reflets bleus. Celle-ci à un lien direct avec ce qui va suivre et avant de refermer l’étui, je me saisis d’une ultime potion. L’odeur rance et l’air chargé en poussière m’accueille dès mon entrée. Une partie du toit s’est effondré, des moisissures achèvent de remodeler le papier peint. Quelque chose est probablement mort ici à en juger par les traces sur le sol et le relent infâme qui me bouche les narines de trop de saturation. La femme est là, ligotée fermement sur une chaise au milieu, elle me tourne le dos. Le mangemort qui se tenait dans le fond de la pièce a transplané dès mon arrivée et c’est sans doute pour le mieux, je ne veux pas qu’ils voient combien je suis déjà des leurs. Le mobilier est sommaire mais suffisant : une vieille table en bois massif, deux chaises et un miroir de plein pied brisé. Il y a divers objets et livres sur le sol, nul doute que les anciens propriétaires ont mené défense contre l’agression extérieure. Sans un mot, je dépose ma sacoche sur la chaise libre que j’aligne face à sa jumelle. Je prend le temps de retirer ma veste que je dépose en vrac sur le dossier avant de me concentrer sur l’âtre de la cheminée à moitié démolit. « Inflamare » Un feu crépite aussitôt entre les pierres, irradiant et chassant la pénombre. Je réchauffe mes mains quelques instants, sortant ma baguette magique et d’un geste, fit pivoter brusquement la prisonnière face à moi. Sans un regard je me replonge dans mes effets personnels, sortant un sachet d’herbes sèches pour l’émietter sur les flammes. Une dense fumée commence alors à se répandre, opaque comme du goudron. Ses volutes dansent, lèchent le plafond et s’entortillent jusqu’aux pieds attachés de la femme. Je daigne enfin lui adresser la parole. « Je pensais qu’un bon feu aiderait à briser la glace. » Des mots dénués d’humour. « Et quelques herbes pour détendre l’atmosphère. » Je désigne les flammes noires d’un signe de tête. « On m’a prévenu de la nature indocile du sujet. » Un peu malaisé, je chasse une volute de la main, reprenant consistance. « Il est inutile de se présenter, ou de présenter ce qu’il va se passer ici je suppose. » Je fais quelques pas, déposant la fiole bleue à même le sol à sa vue. « Dans très exactement cinq minutes, les extraits de belladone qui ont déjà pénétré tes poumons vont commencer leur effet. Fièvre, sueur froides, raideurs. Dans dix minutes tu seras déjà loin. Dans vingt, tu seras incapable de discerner la réalité des horribles hallucinations qui t’assailliront. » Je pointe du bout du pied la fiole. « Ceci est un antidote identique à celui que j’ai pris. D’ici trente minutes, tu me suppliera de te l’administrer. Et là, les choses sérieuses pourront commencer. » Prologue à la violence, acte 1 de ce scénario de souffrance. Morgana Ives sera l’agneau et je serais le destin. |
| | | |
| Morgana & Brynmor Tick –Tock. C’est le son de ta mort qui approche. Tu as toujours pensé que tu reprendrais un jour la place de Minerva à Poudlard. C’est un bon endroit pour terminer sa vie. Paisible. Transmettre son savoir avant qu’il ne sombre dans l’oubli. L’école n’est plus et l’ancienne directrice de gryffondor non plus. Combien de jours as-tu réussi à leur échapper avant qu’ils ne passent sur ta tête l’un de leur petit sac noir ? Avant que tu ne disparaisses définitivement ? Comme le carillon des cloches qui te glacent, c’est le bruit des glaçons dans leur verre qui marquent le tempo de tes derniers jours. Tu n’as jamais été résolue à te sacrifier. Stupidement, tu te pensais invincible, parce que tu étais jeune et brillante, parce qu’on te disait douée. Tu vas sans doute mourir ici et ça n’a aucune espèce d’importance. Tu finiras exécutée sur la place publique et le peuple se gaussera de toi. Personne pour te pleurer. Personne pour prendre soin de ta sépulture. On donnera ton corps aux chiens et aux corbeaux. A quoi bon serrer obstinément les dents ? A quoi bon résister ? Ce sont toujours les mêmes paroles qui reviennent et te harponnent. Ils ouvrent une artère pour en fermer une autre. Le liquide chaud dégoute de ton poignet ouvert. Tu espère que ça ne prendra plus longtemps.Tick-Tock.
Tick-Tock. Le mangemort te laisse à ton bourreau. Lui, tu le vois. Et si tu le vois, c’est que l’heure a sonné. Rien ne te semble grave. Ils pourraient forcer ton esprit, te violer ou t’écarteler que tu ne prononcerais aucun mot. Parce que tu ne sais plus rien. Parce que tu t’es réfugiée dans une partie de ton esprit très dangereuse mais inaccessible. Ton corps peut subir ce qu’il lui chantera, tu resteras prostrée jusqu’à ton dernier souffle. C’est la dernière de tes Epouvantes. Tu en as compté six. Une par année. Une part jour de la semaine. Dimanche compris. Les Epouvantes, c’est comme les Merveilles du Monde sauf que les Merveilles du Monde, à part la pyramide de Keops, elles ont toutes été détruites alors que les Epouvantes sont toujours là, elles. Existe-t-il une Merveille du Monde plus merveilleuses qu’une autre ? En tout cas, les Epouvantes ne se valent pas toutes. Il y a les petites et il y a les grandes. Le dimanche, c’est culte de la personnalité. A la onzième heure, on a le droit à une pause et on est immolé pour de faux alors on a pas trop à se plaindre. Le lundi, visite chez le médicomage. Les entailles au bistouri ont le temps de guérir en six jours et tu es à peu près sûre qu’il te met de jolis pansements. La piscine le mercredi, où l’on apprend à te noyer. Le jeudi, c’est psychomage. Des heures entières à faire cracher à ton cerveau le moindre de ses souvenirs dans une pensine, à mettre à nu la moindre de tes hontes. Jusqu’à présent le vendredi était réservé à la solitude et à la réflexion. Sans nul doute le pire de tes châtiments. Quant au Samedi…Dès l’entrée, tu entends des pleurs, des claquements. Tu sais qu’il y en a qui craque avant que la porte ne s’ouvre. Ca pue l’urine et la peur. Ceux-là, ne réapparaissent jamais. « La mise en condition ». Puis vient la chasse à proprement parler et tu rases le sol ventre à terre, sifflant et feulant, dents et griffes. Ils te rentrent dans ta cage le soir venu et s’échangent des gallions. Bonne fille. Tick Tock.
« Allez- vous faire foutre. Faites votre truc. Passez moi vos conneries et fermez là. Sauf si c'est votre manière de mettre vos ordres à exécution en me faisant crever d'ennui. » Ce n’est pas une supplique. Tu as cessée de pleurer depuis une semaine. Trop d’eau chlorée dans les poumons, ça doit assécher les larmes. Tu détailles son visage, enregistre ses traits pour pouvoir le traquer en enfer. Les fantômes existent. Tu les traqueras. Œil pour Œil. Dent pour dent. Supplices pour Supplices. Et ce sur les générations qui les suivront. Tu tousses. Tes poumons brûlent et la fumée te pique les yeux. Sait-il qu’il n’obtiendra aucun résultat ? Sait-il que les documents ont déjà changé plusieurs fois de main et que tu as oublié à qui tu les avais donné ? Alors tu patientes. Ton père te disait souvent, lorsque tu étais encore l’enfant docile qu’il chérissait : « La résignation est un don de Merlin ». La pourriture rampe et s’anime sur les murs alors que l’odeur de putréfaction emplit tes narines d’un remugle chaud qui te donne la nausée. On doit être vendredi. Tu as toujours détesté les vendredis.
Tick. Par terre, il y a des choses…des choses qui mordent. Des loups sans pattes qui se tortillent. Tu les vois ramper et dévorer d’autres choses. Des chats sans têtes, des corps corrompus. Ils tombent du plafond comme si la nuit les chiait. Tu es en enfer. Pour toujours. Alors pour empêcher les créatures de te mutiler, tu rues dans tes liens, les pupilles en mydriase, les dents claquant devant un spectre invisible. Tu n’es pas malade. Tu n’es pas folle. Tu hurles. A t'en faire péter les cordes vocales. Tock.
|
| | | | Smoke & mirror games {Morgana} | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
|
|
|