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sujet; bastus #5 • Feeling you insane how I need it

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bastus #5 • Feeling you insane how I need it Empty
Bastus#5 • Feeling you insane how I need it
Sacrifice my heart how I want it Crave the pain you give 'Cause I need it Claw away my skin then I see it Losing all my mind 'til I find it You are all that cuts and is biting You are all the things that enlight me Take away you're here and I'm nothing Just and empty hole I am nothing Take away my fear Please do something Everything that is Is love about you
« Pourquoi, Bacchus ? Pourquoi moi ? » Elle est allongée sur toi, nageant dans ton tee-shirt de Quidditch. Ses cheveux picotent comme de l’herbe sur ton menton glabre. Toi parce que t’as bien voulu de moi.
« Pourquoi, Bacchus ?  Pourquoi nous ? » Tu es un peu allongé sur elle, elle picote ses doigts sur tes cheveux drus. Nous parce que t’es fière de m’avoir apprivoisé, c’est ce que disent tes yeux.
« Pourquoi, Bacchus ? Pourquoi lui ? » Tu allonges ta baguette par-delà son bras brisé. Ça picote dans ton ventre parce qu’il te regarde. Lui parce que je lui ai ordonné de me l’ordonner.

Cela ne faisait que quelques jours que vous aviez débarqué en catastrophe à Buttermere. Tu avais eu le temps de piquer trop de têtes dans le lac pour supposer que tu avais uniquement échappé au rhume par miracle (ou par enchantement). Il était encore trop tôt pour s’aventurer très loin, donc en attendant, tu rongeais ton frein. De fait, tu avais eu le temps d’explorer la baraque et les environs. Ce n’était plus pareil, tu devais prendre tes précautions quand tu sortais, au cas où on te reconnaîtrait. Vu où vous étiez, c'eût été improbable, mais on n’était jamais trop prudent, et tu ne voulais surtout pas faire tomber la couverture de Rookwood. Auparavant, en tant que rafleur, tu avais cultivé tout l’art d’en imposer avec sobriété. Les rafleurs, quand ils ne traquaient pas des fugitifs, patrouillaient dans les rues. Il n’y avait pas d’uniforme règlementaire, si ce n’est le port de couleurs sombres et le brassard autour de votre bras, tout comme il était de mise pour un Mangemort de porter un complet. Tu avais d’ailleurs bien vite remarqué, pour le plaisir de tes deux billes d’yeux qu’avec son titre, Rookwood avait aussi laissé les vestons au placard -pour ceux qu’il avait sauvés de Herpo Creek.
C’est un peu parce que tu tournes comme un lion en cage que tu as toqué à la porte de son bureau pour lui traîner dans les pattes.

C’est un peu parce que tu es presque tout seul dans une baraque avec lui. L’état de Flint s’était détérioré à une vitesse incroyable depuis votre arrivée, son corps ne compensant plus le manque par l’adrénaline, et il n’avait pas fallu bien longtemps, même pour un benêt comme toi, pour piger qu’il souffrait de son sevrage. Là-dessus, tu ne te prononçais pas, t’avais bien poussé une beuglante mais il n’avait pas jugé bon de t’écouter ; après tout, t’étais un peu accro, toi aussi.
C’est un peu parce que t’es dans une baraque avec ton patron qui fait péter la tenue de vacances, on n’arrête plus le progrès, on ne t’arrête plus, ça pédale à toutes berzingues dans ton crâne, que tu te laisses tomber dans le canapé à côté de lui. Même si ce n’est plus ton patron, tu maintiens révérencieusement une distance entre vous. Ni lui ni Flint n’a jugé bon de te préciser que tu ne lui devais plus rien en tant que supérieur hiérarchique, en témoigne sa marque des ténèbres qui commence à s’estomper dans une douloureuse cicatrice. Et dire que tu aurais tout donné pour la voir et avoir la même que lui.

Ta marque à toi, le dragon rampant autour de ton oreille, ne s’arrête jamais. Tu as rapidement appris à t’y faire. Le bruissement des écailles qui raclent délicatement comme plein de petits ongles ne t’importune même plus.
Comme tout ce que Rookwood t’imposait, tu t’y étais résigné avec une déconcertante facilité, quand bien même il s’agissait là d’un sceau de magie noire. Quand bien même cette marque d’obéissance n’avait rien à faire là.
Vous me voulez tant que ça pour vous tout seul, patr-
(non, t’avais pas dit “patron”)
C’est donc un peu pour ça, pour ce souvenir, pour ce fantasme, que tu es irrémédiablement revenu vers lui.

Mais c’est aussi et surtout à cause de Willow.
Parce qu’après l’avoir t-… après ce qu’il s’était passé à Pré-au-Lard, j’AI FAIT ÇA POUR VOUS, PATRON - tu avais lutté de toutes tes forces pour ne pas ressentir de chagrin -qui sait, le dragon l’aurait peut-être ressenti et Rookwood n’aurait pas aimé. Confronté à ce village dans lequel elle t’avait emmené flâner malgré tes bougonnements, confronté à ces gamins qui sortaient à peine de l’école, une école pas si loin, et pourtant, un tas de ruines, tu n’avais plus su où donner du souvenir contre lequel se défendre. Tu avais tout ruiné ; le village, vous deux, son visage ; rendu méconnaissable à force de coups, comme pour la faire disparaître. Ça n’avait pas été elle ; elle n’avait jamais été et surtout, vous n’aviez jamais été ensembles.
Tu avais lutté de toutes tes forces, et ça avait marché : après tout, te battre, c’est tout ce que tu sais faire.

Cependant, depuis que vous étiez arrivés ici, et maintenant que tu connaissais à peu près les lieux -quand on est rafleur, on prend très vite ses marques, quel que soit le terrain-, tu n’avais plus à lutter contre rien d’autre que l’intérieur de ton crâne. Et il n’y a pas pire pour une âme damnée que de s’essayer à l’introspection.
De fait, passé le chagrin, tu avais essayé de te persuader que ça avait été du fait de la marque. Oui, voilà, c’est Rookwood qui T’Y AVAIS OBLIG- raconte pas de connerie, tu n’avais rien senti de douloureux à ton oreille, tu n’avais même pas attendu que le sceau fasse effet et qu’ainsi il te déresponsabilise. Tu l’avais tuée si vite, elle n’avait pas eu le temps de finir sa phrase, tu lui avais pas laissé le temps, tu n‘avais pas pris ce risque -sait-on jamais, elle aurait pu parvenir à te convaincre - Impossible. Rookwood était là, il veillait, il surveillait, réveillait cette passion en toi, celle qui autrefois avait pu brûler pour la gamine, tremblotante et pas rassurée, et il l’avait attisée de nouveau, plus terrible et plus dangereuse. Willow avait tenu à t’apprivoiser, Rookwood à te maîtriser sous couvert d’apprivoisement.
Tu étais toujours aussi fou au final. Fou à cause de lui.

C’est pour toutes ces raisons que, sans réfléchir -ou après avoir trop réfléchi justement-, tu te laisses tomber dans le canapé de son bureau. L’excitation d’avoir déniché un repère près d’un lac était à présent un peu retombée, poussée de côté à cause de cette ombre au tableau, de ce visage qui n’en était plus un. Et ça te sidérait, ça aurait pu te mettre dans une rage folle de savoir que tu souffrais encore tant par sa faute. Tu t’étais mis dans une rage folle, à péter du bois au fond du jardin. Et c’était aussi pour ça que tu avais trouvé refuge dans son bureau, pour contrôler ta colère et ton chagrin, au nez et à la barbe de leur instigateur qui lisait tranquillement dans ses quartiers.

Même si vous étiez des fugitifs et que vous n’aviez plus de boulot, il avait tenu à ce que votre refuge comporte un bureau et son canapé, comme s’il voulait recréer son ancien lieu de vie, qui avait été aussi le tien pendant un temps trop court à ton goût. Tu le connaissais bien, le sofa d’Augustus, pour t’y être endormi un nombre incalculable de fois. C’est presque d’instinct que tu t’y es dirigé pour t’y affaler, ton corps massif un peu replié sur lui-même, tes doigts caressant instinctivement tes phalanges ensanglantées que le froid avait irritées. Tu as l’air passablement anxieux, nerveux même, un peu aux abois, un peu à essayer de cacher tout ça, comme si tu t’adonnais simplement à une visite de courtoisie, pour venir chercher un nouvel ordre de mission.
« On fait quoi maintenant, patron ? »
Sauf que c’était fini tout ça, Bacchus. Fini les débriefings, les missions, les arrestations, les interrogatoires et les rapports. Tu avais du mal à réaliser que c’était terminé pour de bon ; tu t’imaginais sans doute que tout ça n’était que temporaire, que le Magister n’était pas réellement mort, qu’il finirait par refaire surface, comme il l’avait toujours fait, et que pourriez bientôt rentrer à la maison, Augustus retrouverait ses costumes et tu pourrais noyer le crime de Willow sous un tas d’autres cadavres anonymes. C’est pOUR T-VOUS QUE JE L’AI TUEE, AUGUSTUS.


Dernière édition par Bacchus Murdock le Dim 22 Jan 2017 - 12:16, édité 1 fois
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Bastus#5 •  Buttermere • Decembre

Feeling you insane how I need it, Feeling all your pain How I hold it. Crashing through your walls Like a hammer. Smashing up the floors Of your thinking. Pull me through the cracks when you're sinking. Pull me how you like... God I'm trying, Seeing all your life When it's dying. Dragging me, It kills when you're fighting. Everything that is, Is love about you. Stick me in my heart so I feel it, Take me with your tears so I feel it, Sharing all your love... Now I feel it
« On fait quoi maintenant, patron ?  »

Augustus leva à peine le  nez de son livre à la question de l'animal. Cela faisait quelques jours maintenant qu'ils étaient à Buttermere, et Augustus en était encore à se faire à  l'idée de n'avoir rien à faire. Il était, techniquement, au chômage. Il n'avait plus aucune responsabilité sans le Ministère, sans le Lord, ou même sans son réseau d'informateurs. Il risquerait trop de choses en se risquant à prendre contact avec qui que ce soit, alors il avait fermement décidé d'être absolument cloîtré dans sa petite maison de montagne pour un petit moment. Il ne suivait les informations qu'à la radio,et malgré la densité de ce qu'il y apprenait, cela ne l'occupait qu'une ou deux heurs par jour. Hors les journées d'Augustus étaient composées d'un peu plus de vingt heures les bons jours, vingt-quatre les mauvais. Il ne perdait jamais de temps, ou presque, dans la futilité du sommeil. Cela faisait d'autant plus d'heures à remplir.
Alors passées la crise du premier jour, le besoin d'organiser l'arrivée inatendue de Flint, ainsi que l'installation dans la cuisine qui était devenue son nouveau centre d'amusement... Augustus avait commencé à s'ennuyer. C'était une sensation étrange, et incongrue, qu'il n'avait pas ressenti depuis Azkaban. Cela avait d'ailleurs été en réaction au profond ennui qu'il avait ressenti dans la prison qu'il avait cherché à se noyer dans le travail. Dernièrement, cependant, Augustus se souvenait enfin que, avant 1981, il avait été en somme un homme toujours assez paresseux. Si une entourloupe manipulatrice pouvait l'empêcher de travailler, il l'avait toujours saisie. Combien d'ASPICS avait-il réellement passé sans avoir réussi à amadouer le juge de ses oraux ? Ainsi, Augustus renouait avec son naturel assez simple, qui pouvait se satisfaire d'une bonne tasse de thé, à manger, et un bon livre.
Les livres, cependant, allaient rapidement venir à manquer. S'il apprenait à apprécier la littérature moldue, elle était cependant assez simple pour qu'il ne soit que rarement gêné dans sa lecture. Il avait déjà hâte que l'hiver se termine, et qu'il puisse passer du temps à s'occuper de ce jardin désastreux que leur avait laissé l'ancien propriétaire, Callum.

Pendant ce temps-là, Bacchus était intenable. Augustus, assez vite, avait choisi de l'ignorer. Tout comme il avait choisi d'ignorer les gémissements pathétiques du Flint, qui semblait incapable d'endurer un peu de douleur et qui n'avait pas la bienséance de rester silencieux pendant que des personnes étaient occupées à profiter de leur thé et de leur retraite. Il était cependant plus facile d'ignorer Flint, puisqu'il était dans un bien trop mauvais état pour se déplacer. (A ce niveau-là, n'était-ce pas de la générosité que de chercher d'abréger ses souffrances?) Bacchus, lui, cependant, bougeait partout. Il passait son temps entre l'intérieur et l'extérieur, et semblait incapable de simplement s'asseoir et de profiter de la vie. Ces personnes stressées étaient profondément fatigantes.
Augustus aussi avait des traumatismes qu'il devait gérer. Il avait perdu beaucoup, dans cette histoire, et il se posait beaucoup de questions sur lui-même et sur son futur professionnel et familial. Est-ce qu'il ennuyait tout le monde à ce propos ? Non. C'était effroyable qu'ils soient tous incapables de gérer leurs PTSD en silence...

Il finit par se souvenir que Bacchus lui avait posé une question après quelques minutes de silence. Ce n'était pas très poli, de ne pas répondre, alors il leva le nez de son livre, glissant un doigt entre les pages, pour poser son regard sur la brute. Brute qui se tenait au bord de son sofa comme s'il n'attendait qu'un ordre pour filer battre quelqu'un à mort. Sauf qu'il n'y avait que Flint à abattre dans le coin, et Augustus doutait que Bacchus apprécie grandement sa mort. Son impatience était inutile. Et son regard plein d'espoir, lui, était presque navrant.
« Rien, » commença-t-il par lâcher assez abruptement. Il réalisa qu'il avait dit cela avec un sourire assez léger, et il l'accentua aussitôt, devenant alors plus tendre et apaisant. « Il ne nous reste plus qu'à attendre que la situation évolue, mon cher Bacchus. » Ce genre de surnom, le plus souvent, apaisait l'animal. «  Ne t'inquiète pas, relaxe-toi, profite de tes congés. Tu n'en prends jamais, et moi non plus. Au vu de ces derniers mois, nous avons mérité un brin de tranquilité. » Il appuya son sourire d'un petit rire malicieux, espérant encore que cela suffirait à distraire le Murdock. Qu'il était ennuyant, à ce que l'on doive s'occuper de lui continuellement. Ne pouvait-il pas s'occuper tout seul ?
Jugeant la discussion achevée, Augustus rabaissa les yeux sur le livre qu'il rouvrit tranquillement. Du bout des lèvres, il ajouta pourtant : « Fais-toi un thé, je ne sais pas. »


Dernière édition par Augustus Rookwood le Lun 9 Jan 2017 - 14:57, édité 1 fois
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Si Rookwood s’était en apparence accoutumé à la vie tranquille dans votre refuge à grands renforts de thé et de littérature, tu n’avais, pour ta part, pas cherché une minute à dissimuler ta frayeur de l’ennui. Si Rookwood avait réglé ses affaires tranquillement et songeait sans aucun doute à tout un tas de plans pour vous sortir de ce pétrin, la moindre des choses à ton avis, puisque c’était son idée de se tenir reclus dans les montagnes -quel naïf tu pouvais faire-, tu avais constamment cherché à t’occuper les muscles et donc l’esprit.
Tu n’en étais pas rendu à faire le ménage tous les jours, mais disons que tu avais farfouillé plus que de raison dans la vie de l’ancien propriétaire, sans pour autant en témoigner un grand intérêt. Le plus utile que tu aies pu déniché étant cet affreux pull en laine aux couleurs passées que tu avais enfilé pour subsister au froid quand tu batifolais dans les jardins.

Ensuite, il avait fallu s’occuper de Flint, mais là encore, tu étais vite arrivé à bout de patience. Il n’y avait rien que tu puisses faire pour lui, si ce n’est essuyer grossièrement son front moite quand il se réveillait en sursaut de son sommeil agité.
Puis, quand tu n’avais plus su tenir en place, tu t’étais occupé de travaux manuels, sans utiliser ta baguette, cela va de soi -ce qui t’avait d’ailleurs valu quelques essais ratés, vu que tu n’étais pas habitué aux manoeuvres totalement moldues. Cependant, tu n’avais rien tenté de très compliqué ; de fait, une fois que tu avais chopé le coup de main, tu avais tout ton temps pour ne penser à rien. Ou plutôt pour penser à tout ça.

C’est pourquoi tu as fini par te raccrocher au dernier détail de normalité ; à savoir, Augustus dans son bureau. Sauf que maintenant que tu te tiens, fébrile, en face de lui, ce n’est plus du tout pareil. Il ne porte pas la même tenue que d’habitude. S’il te fait patienter, c’est uniquement pour finir sa page, et pas parce que tu l’importunes dans la relecture d’un dossier. Et aucune chance pour que vous soyez interrompu par qui que ce soit, comme Zaïtseva avait tendance à le faire quand elle te surprenait à entrer dans le bureau de votre patron. Vous n’étiez que tous les deux, et c’était précisément ce genre de situation que tu avais tenu à éviter à la veille de la guerre.
Pourtant, le désoeuvrement semble t’avoir obligé à revoir l’ordre de tes priorités. De fait, tu te sentais capable d’affronter Rookwood et ses bras nus afin de dénicher quelque chose à faire.

Seulement, lui qui était du genre à te ménager (pour mieux t’en faire baver par la suite), voilà qu’il te mettait en face de la dure réalité : il n’y avait rien à faire et il ne chercherait même pas à te faire croire qu’il y avait encore quelque chose que tu puisses faire pour y remédier ; ni toi, ni lui d’ailleurs. Toi qui cherchais à te rendre utile à n’importe quel prix, il n’y avait juste rien que tu puisses faire.
Rien d’autre que de penser à tout ça. Et on t’avait pas élevé pour que tu penses. C’est pas pour ça qu’il t’aimait te trouvait utile.

« Fais-toi un thé, je ne sais pas. »
La dernière fois que tu avais essayé de faire une infusion pour Flint, tu avais manqué de foutre le feu à la cuisine ; la seule distraction des derniers jours, d’ailleurs. De fait, tu refuses de manière impertinente son idée, en secouant la tête, tes yeux grands ouverts de merlan frit glissant sur lui sans trouver une seule accroche, le moindre signe de contrariété qui aurait pu signifier que tu ailles fureter à droite à gauche. Tu te frottes la barbe, multipliant par la même occasion ce genre de manies nerveuses.

« Donnez moi un truc à faire, j’vous en supplie. » Finis-tu par articuler, implorant et impertinent, en te levant d’un coup comme un diable sortant de sa boîte. Tu tournes en rond dans son bureau comme une bête en cage. Tu évites avec maladresse le mobilier dont la disposition était sensiblement différente que dans son manoir. Et parfois, on peut voir un muscle saillir, comme si tu étais prêt à en découdre avec une innocente commode. Ça ne te ressemblait pas de lâcher la bride devant lui. Ça te ressemblait définitivement trop, de te voir si démuni dès que tu n’avais plus personne à frapper.
« N’importe quoi pour qu’j’arrête de penser à ça… » Tu n’attends même pas qu’il feigne montrer de l’intérêt pour cet énigmatique « ça » pour éclaircir ton propos en bafouillant. « A c’qui s’est passé à Pré-au-Lard… c’que j’ai dû faire… pour vous. » Menteur, menteur, c’est pour toi que tu l’as fait. Pour te prouver que tu étais capable de le faire ! C’est pour toi, pour toi, pOUR TOI QUI NE PENSE PLUS QU’A LUI.

Tu te plantes devant lui, clouant tes poings sur son bureau. Heureusement que le bureau vous sépare. Tu sais d’ores et déjà qu’il va feindre ne pas se souvenir tout de suite de quoi tu parlais. Tu es certain. Et ça t’insupporte, et ça te rend fou qu’il ose ne pas se souvenir. Du mal que ça t’avais fait de le faire. Mais que tu avais fait malgré tout. Malgré tout ce que t’avais vécu avec elle.
« J’sais qu’vous êtes plus mon patron, mais tout ça, tout c’que vous m’avez fait faire -tout c’que j’ai fait pour vous… j’peux pas l’oublier » et je veux pas l’oublier, oh non, je veux encore, encore faire ce que vous me dites, je ne sais faire rien d’autre, de toute façon -c’est bien pour ça qu’vous m’avez tatoué comme un chien. Tu te passes une main fiévreuse dans la nuque, le nez toujours baissé, toujours incapable de le regarder dans les yeux ; mais ça, c’est même pas parce que c’est ton patron. « Ça m’fait mal ; alors que y’avait plus rien avec elle ; j’l’ai jamais revue, j’pensais pas qu’ça me… ferait ça si j’la… j’ai pas envie que ça fasse si mal, p- » Non, ce n’est plus ton patron, t’as plus à lui demander quoi faire, d’ailleurs. Il l’a bien compris, lui. Vous avez pas le droit de m’abandonner comme ça.

C’est pas tout de me ramasser sur le bord de la route, vous êtes responsables de moi ; si j’explose, c’est vous qui ramasserez les morceaux. J’ai signé, mais vous aussi. Vous aussi vous avez donné. Pourtant, j’ai l’impression d’avoir donné pour deux. Pourquoi vous m’donnez toujours cette impression-là ? Pourquoi j’ai envie qu’tu te donnes ? « J’n’ai plus envie d’y penser, mais j’y arrive pas… » Tu frottes tes cheveux qui commencent à éclater en épis sur ton crâne par manque d’entretien, depuis la bataille de Pré-au-Lard. Tes yeux le fuient comme si tu te rendais compte qu’il ne pouvait plus rien pour toi, bien qu’il t’ait ordonné de le suivre ; certainement le dernier ordre qu’il t’avait donné. C’était avant ou après qu’il t’avait ordonné de le tuer ? T’en pleurerais encore, tellement t’avais aimé détester ça. « J’pensais pas qu’ça f’rait ça… j’ai pAS ENVIE… c’est pas d’ça dont j’ai envie. » Tu le fuis et pourtant, tu restes planté là, boule de nerfs vrombissant sur place, les muscles tremblants et engourdis, prêt à bondir sur lui sur n’importe quelle occasion pour chasser de ton esprit ces tourments de jeunesse.
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Bacchus n'avait jamais compris quand se taire. C'était étrange, qu'un homme comme lui, près d'un homme comme Augustus, ai pu survivre aussi longtemps. Augustus n'était pas censé apprécier l'impertinence, ni le retard, ni la bêtise. Il ne savait pas ce que Bacchus faisait dans sa vie. Il ne comprenait pas pourquoi, visiblement, l'individu avait pris une si grande importance. Comment en était-il arrivé à le marquer comme sa chose ? Comment en était-il à réclamer chaque once de sa personne avec une possessivité jalouse qui allait niait à la brute jusqu'à son libre arbitre ? Augustus n'avait jamais véritablement prêté attention à Bacchus. Son intérêt était capricieux. Il ne se souvenait pas d'avoir jamais véritablement respecté la créature, ni de l'avoir sincèrement apprécié.
Alors que faisaient-ils là ?

« Donnez-moi un truc à faire, j'vous en supplie. » Augustus retint un soupir, tout en refermant de nouveau son livre et lançant un regard presque ouvertement lassé à Bacchus. Quoi encore? semblait-il lui dire. D'habitude, ce genre de regard seul calmait l'animal. Pas ce jour-là. Il était comme un lion en cage, instable, nerveux, à arpenter son bureau comme il ne l'avait jamais fait, et Merlin savait que c'était arrivé souvent. « N'importe quoi pour qu'j'arrête de penser à ça... » Augustus mis un certain temps à comprendre à quoi il pouvait bien faire référence. Il était à des milles et des lieux de prêter le moindre intérêt à ce qui taraudait Bacchus. Il n'avait vraiment pas envie d'avoir à gérer les névroses de quelqu'un d'autre, les siennes lui suffisant amplement. « A c’qui s’est passé à Pré-au-Lard… c’que j’ai dû faire… pour vous.  » Augustus fronça légèrement les sourcils, encore confus, se demandant bien comment il pouvait le rendre responsable de ses actes de guerre.

Puis il comprit. Il lui parlait de la petite, de Willow, de cette fille qu'il lui avait demandé de tuer. Il sentit alors lentement une certaine irritation s'installer au fond de sa gorge. Il avait demandé, exigé de Bacchus qu'il tue la seule femme qu'il ai jamais aimé. Oui, il l'avait fait, pour qu'elle arrête de le hanter. Il avait cru, ainsi, nettoyer définitivement l'esprit de son chien de ce genre de pensées parasites. S'il avait pu, il lui aurait demandé de tuer toute sa famille, juste pour l'empêcher de se détourner de lui. Sa mâchoire se contracta légèrement, en réalisant qu'il était plus possessif que prévu envers le Murdock. Il posa le livre sur le bureau, tout en observant Bacchus partir dans ce qui semblait une crise de, quoi ? de conscience ? Que lui arrivait-il ? Il n'avait pas véritablement l'air de regretter, alors que se passait-il ?
Augustus le regarda donc, attentivement cette fois, pendant que l'ancien rafleur semblait peu à peu perdre le peu de contrôle qu'il  avait sur lui-même. « J’sais qu’vous êtes plus mon patron, mais tout ça, tout c’que vous m’avez fait faire -tout c’que j’ai fait pour vous… j’peux pas l’oublier  » Il y avait des jours où comprendre Bacchus était simplissime. Il y en avait d'autres où il lui était complètement imperméable, et où il aggravait les choses en ne le regardant pas, l'empêchant de s'introduire dans son cerveau. Augustus ne comprenait pas qu'on se mette dans de tels états pour cela, pour une fille aussi insipide, pour un acte aussi anodin. Bacchus n'avait-il pas tué un nombre incalculable de fois ? Que se passait-il, exactement ? « Ça m’fait mal ; alors que y’avait plus rien avec elle ; j’l’ai jamais revue, j’pensais pas qu’ça me… ferait ça si j’la… j’ai pas envie que ça fasse si mal, p-  »

Aux yeux d'Augustus, il y avait toujours quelque chose d'effrayant dans le spectacle d'une personne perdant définitivement le contrôle de soi-même. Quelque chose en lui voulait toujours quitter la pièce lorsque cela arrivait. Il trouvait extrêmement malsain d'être forcé à observer l'intérieur rendu extérieur. Autant la legilimencie ne le dérangeait pas, autant il trouvait extrêmement désagréable de voir quelqu'un se perdre dans des réactions absolument illogiques. Bacchus, en cet instant, n'avait aucun sens aux yeux d'Augustus. Et à cause de cela, le contrôle qu'il avait sur la brute lui échappait.
Perte le contrôle de Bacchus ne faisait plus partie des choses qu'il tolérait.

Enfin, Augustus se leva. Il fit le tour de son bureau, tenta de s'approcher d'un Bacchus qui, pris dans ce qui ressemblait à une crise de folie, était occupé à l'éviter, ne pas le regarder, et s'arracher les cheveux. C'était absurde. Ce n'était pas censé se passer comme ça. Augustus avait tout organisé, tout paramétré, et les choses n'étaient pas censées déraper de la sorte. Bacchus aurait du aller mieux, après la disparition du Lord et de Willow, tout comme Augustus se sentait toujours allégé d'avoir des personnes en moins dans sa vie. Il n'arrivait pas à comprendre le rapport qu'avaient les autres par rapport au deuil. Il trouvait absurde, profondément absurde, qu'ils se laissent ainsi tourmenter par quelque chose qui n'était plus là.
Il s'approcha, encore, doucement, comme on s'approche d'un animal blessé. Il n'aimait pas ce genre de situation, car elle lui rappelait bien trop de souvenirs, étranges, dérangeants, toujours incroyablement flous dans sa mémoire qui avait tant de fois fait le tri. Il avait l'impression que, à chaque instant, Bacchus allait faire comme sa mère, son père, sa sœur avaient pu faire avant lui : se faire du mal, définitivement. Sauf que Bacchus lui appartenait exactement pour ce genre de raison : ne plus avoir le droit de se faire autant de mal. Cela ne lui était plus permis.

« J'n'ai plus envie d'y penser, mais j'y arrive pas... » Il détournait encore le regard. Augustus n'aimait pas cela. Bacchus n'était censé être obsédé par personne d'autre que son maître. Willow était faible, insipide, distante et morte, elle n'avait rien à faire ici. « Calme-toi... » commença doucement à murmurer Augustus, tout en continuant de s'approcher, alors que Bacchus continuait de ne pas le regarder, et même de reculer à son approche. Pourquoi s'éloignait-il au moment exact où Augustus avait peur de lui ? Ils n'iraient nulle part comme ça. Toutes les cases extrêmement ordonnées du mangemort commençaient définitivement à se mélanger les unes autres autres, et le filtre n'était plus aussi efficace. Il y avait quelque chose de profondément brisé dans la voix de Bacchus, et il était impossible pour son maître de comprendre pourquoi. « J’pensais pas qu’ça f’rait ça… j’ai pAS ENVIE… c’est pas d’ça dont j’ai envie.  »
Le cri, brusque, surprend Augustus. Il a un mouvement de recul, quelque chose se passe sur son visage, comme un haut le cœur, ou un sursaut, le genre de chose qui n'est pas censé le traverser. Bacchus ne lui crie jamais dessus. L'instant suivant, il a définitivement traversé l'espace qui les sépare.

Ses doigts, ses ongles, s'enfoncèrent aussitôt dans la chair du cou de Bacchus alors que leurs corps se percutaient, et que ses lèvres réclamaient jalousement ce qui lui revenait de droit. Il l'embrassa comme un ordre, comme un coup de poing en plein ventre. Il l'embrassa à lui couper le souffle, et ne le laissa pas le reprendre alors qu'il s'écartait de quelques centimètres pour lui siffler de façon presque précipitée : « Arrête de te faire du mal. » Il connaissait le discours qu'il était censé donner en cet instant. Il savait que ses doigts étaient censés se détendre, caresser le haut du crâne du Murdock, et sa voix prendre un ton doux et calme en lui expliquant que tout allait bien, qu'il était en sécurité, que tout était sous contrôle. Il n'était donc pas censé s’agripper d'autant plus à lui, ses ongles s'enfonçant presque jusqu'au sang. La mâchoire crispée, il ajouta, de cette voix froide et cruelle qui, d'habitude, était accompagnée du sourire le plus sec du monde.
Mais il ne souriait plus.
« Qu'est-ce qu'il te faut, pour arrêter de penser à elle ? » Elle était morte, elle avait été tuée, par lui-même, par la demande d'Augustus. Elle était censée avoir disparue. Pourquoi venait-elle encore se mettre entre eux ? Bacchus lui promettait toujours de n'obéir qu'à lui, mais il finissait toujours pas penser aux autres, toujours aux autres. Il n'était  pas censé penser aux autres.
Il était censé lui appartenir. « De quoi as-tu besoin ? »
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Bastus#5 • Feeling you insane how I need it
Feeling me insane how you need it, Feeling all my pain How you hold it. Crashing through my walls Like a hammer. Smashing up the floors Of my thinking. Pull you through the cracks when I’m sinking. Pull you how I like... God you’re trying, Seeing all my life When it's dying. Dragging you, It kills when I’m fighting. Everything that is, Is love about you. Stick me in my heart so I feel it, Take you with my tears so you feel it, Sharing all your love... Now I feel it
A trembler ainsi en face de lui, à te montrer menaçant face à un homme qui ne pouvait te craindre, tu te revois le soir où il t’avait donné l’ordre de le tuer. Ce soir où tu avais perdu le contrôle, où il t’avait fait perdre le contrôle, justement en te contrôlant. T’avais jamais réussi à mettre le doigt sur pourquoi il t’avait fait ça. Ou du moins, tu n’osais pas imaginé que ça puisse être ce à quoi tu pensais. Après tout le mal que tu te donnais pour ne pas perdre le contrôle. Comme si c’était trop beau pour être vrai, et qu’il voulait être sûr que ça l’était.
Pourtant, même si t’as l’air d’être sur le point de lui sauter à la gorge, tu restes immobile, immobile mais pourtant grouillant de nervosité. Tu as toujours eu cette capacité à avoir l’immobilité brusque, à faire trop de mouvements sans bouger d’un poil. C’est les tremblements, ils te font te tendre vers lui, irrémédiablement attiré vers lui, toujours tourné vers le responsable.

Après tout, il était responsable de toi, il était responsable de ce que tu ressentais pour lui parce qu’il était lui. Il avait nié ton humanité -à ce stade, tu n’étais plus un humain, juste un condensé musculeux de désir- alors à présent, il devait composer avec ce qui reste, là, debout et tremblant, de rage, de peine et de frustration et d’env- « j’ai pAS ENVIE… c’est pas d’ça dont j’ai envie. »

Son corps percute le tien comme une vague. Et comme avec les vagues familières, tu ne recules pas, tu la prends en pleine face, tu l’accueilles dans la robustesse de tes appuis. Comme une vague, Augustus te noie sous un baiser. Ses ongles qui s’enfoncent dans ton cou, comme si te caresser ne suffisait plus, comme si tes vêtements étaient de trop. Comme si c’était de ton vrai toi, fou, dont il voulait se saisir, quitte à s’en salir les mains. Tu l’accueilles s’échouer sur toi, tes yeux grands ouverts se refermant aussitôt, comme par réflexe. Pourtant, tu savais ouvrir les yeux sous l’eau. Mais tu n’étais jamais plus à fleur de peau que quand tu fermais les yeux. Il t’embrasse comme une noyade ; mais même si c’est étouffant, désagréable, mortel, tu ne peux t’empêcher d’y prendre goût, le goût de sa bouche. Parce que si c’est si dangereux que ça, alors ce sera peut-être la dernière chose que tu testeras sur terre, ou sous l’eau.
Parce que c’est pas comme d’habitude. C’est pas les baisers qu’il te fait du bout des doigts et des lèvres, pour te surprendre, te désarçonner avec son sourire pas possible. C’est pas les baisers qu’il contrôle.
C’est un baiser pour asseoir son contrôle sur toi, une nécessité de dernier recours devant son incapacité à ne plus pouvoir te contrôler. Il ne savait pas ce qui se passait dans ta tête présentement, alors c’est ton corps qu’il allait devoir dompter. Car on serait surpris de voir à quel point les deux sont liés chez toi.

Contre toi, tu sens qu’il ne sourit pas, que c’est définitivement pas comme d’habitude. Et c’est parce qu’il ne fait pas comme d’habitude que tu finis par céder et te jeter sur lui, écrasant tous les codes et les distances cérémonieusement tenues, écrasant cette fois-ci ton corps contre le sien, comme si c’était leur agencement initial.
« De quoi as-tu besoin ? »

Augustus, c’est comme se tenir au bord d’une fosse marine, face au monstre tapi au fond de l’abîme. La brusquerie prenant le pas sur l’hésitation, tu te jettes sur la gueule du loup.
Ta réponse s’esquisse à peine sur tes lèvres, « toi », mais avant que tu aies pu émettre un son, tu es sur lui, tu l’embrasses comme s’il n’avait jamais arrêté, comme on reprendrait son souffle avant de faire le grand saut, comme on prendrait son souffle, tu lui prends le sien et oh, tu vas certainement faire main basse sur davantage.
Parce que c’est lui que tu veux. Tu ne sais pas le dire, alors c’est ton corps qui le lui montre. Depuis que tu l’as rencontré, il n’y a toujours eu que lui, il n’y a plus eu que lui. Peut-être même qu’avant de le rencontrer, tu te languissais de quelqu’un comme lui.
Sauf que quelqu’un comme lui n’aurait pas suffi. C’était lui qu’il te fallait, lui seul que tu voulais.
Malgré tout le mal qu’il t’avait fait et qu’il t’avait fait faire. Et pour tout le bien aussi.
Tu avais toujours voulu quelque chose de lui, allant de sa mort à ses mains sur toi, presque dans toi, avec ses ongles qui griffent comme s’il était en train de tomber ; il tombe dans la fosse et t’attire avec lui et t’as jamais rien voulu d’autre.

Cette fois-ci, tes mains l’accueillent aussi. Tes bras s’enroulent autour de sa taille
l’attrapes par la taille. On dirait un peu que vous vous battez, alors que tu te frayes un chemin à l’aveugle jusqu’à l’asseoir à moitié sur le bureau en poussant vaguement ses affaires. On dirait que vous vous battez contre un désir contenu beaucoup trop longtemps. Tu l’avais senti monter en flèche, juste là, parce que la manière dont il t’avait demandé ce dont tu avais besoin avait résonné dans ta tête comme un « Si c’est de moi dont tu as besoin, prends. » Et même si ce n’est pas ce qu’il voulait dire, alors tant pis, il aurait tôt fait de t’arrêter d’un ordre maudit.
Au fond de toi, tu sais qu’il le fera pas. Parce qu’il avait pas souri, parce qu’il t’avait pas rassuré comme on flattait un bon chien. Parce qu’il avait compris qu’il fallait plus, que tu voulais plus, que sa main sur ton front.

Parce qu’il faut qu’il comprenne, Augustus, que s’il te lâchait, tu ne lui ferais aucun mal. Tu ne lui ferais que du bien. Un bien terrible, comme le bien qu’il te faisait parfois. Mais c’est comme ça entre vous, c’est un peu mélangé, ça se cherche un peu, ça tâtonne pour comprendre, comprendre ce qui se passe.
Vous vous faites du mal comme pour montrer à quel point vous êtes incapables de seulement vous faire du bien. C’était pas suffisant, quand on s’aim- trop comme ça.

Tes mains s’accrochent au rebord du bureau, tu te penches sur lui, le surmontes, le soulèves, écrasant l’absence de distance entre vous, avide de ce contact brutal et moite, et pourtant, si bon, car tant attendu, comme on crève de faim et de soif.
Tu l’écrases de passion. Tu n’as jamais eu la docilité aussi envahissante, comme des mauvaises herbes, sauvages. Tu l’embrasses sauvagement, ses lèvres, putain, ses lèvres, enfin. Il n’est plus question de faire la fine bouche et de goûter du bout des lèvres quand l’envie lui prenait de te taquiner ; tu prends tout, sans demander la permission, lui arrachant la permission comme une laisse sur laquelle tu avais trop tiré. Parce que tu te rends pas compte que la permission, il te la donne régulièrement, il te la tend, attendant juste que tu t’en empares. Espérant juste que tu ne t’en empareras pas. Augustus te teste, tout le temps, te tente, tous les jours, même quand il est pas là, il veille, il pèse, il reste tapi dans un coin de ta tête où il te fait envie.

Votre position est inversée par rapport à la fois où il avait scellé sa magie noire sur toi. Mais la marque que toi tu poses n’est pas douloureuse, si ce n’est quand ta langue ne suffit plus, et que tes crocs s’enfoncent dans la peau tendue de sa gorge, comme pour le punir d’être lui, d’être là, de pas te repousser, de te tirer plus à lui. Tu tires sur son tee-shirt qui te met hors de toi, dans un état de combustion instantanée. Brûlants, vous vous y mettez à quatre mains pour te défaire de ton pull trouvé dans le grenier, qui sent un peu le vieux, mais aussi maintenant toi, le fauve. Et toujours tu reviens à lui, tes caresses brutes reviennent à lui, tes yeux reviennent à lui, tous tes sens.
Ta respiration est lourde, tu souffles sur sa bouche, dans sa bouche, comme pour y reprendre ta respiration, vu qu’il a décidé de te la couper. Ta main s’alourdit sur sa ceinture qui claque entre tes doigts quand tu la défais. commences à te pencher, dangereux de proximité, assoiffé, grondant, vibrant, à l’étroit dans ton pantalon, le désir à l’étroit dans ton corps.
Et déjà, sur ton visage cramoisi, sur tes lèvres dévorantes, il y a les trois syllabes de son prénom qui se forment et glissent, comme ta main entre ses jambes.
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Bastus#5 •  Buttermere • Decembre

Feeling you insane how I need it, Feeling all your pain How I hold it. Crashing through your walls Like a hammer. Smashing up the floors Of your thinking. Pull me through the cracks when you're sinking. Pull me how you like... God I'm trying, Seeing all your life When it's dying. Dragging me, It kills when you're fighting. Everything that is, Is love about you. Stick me in my heart so I feel it, Take me with your tears so I feel it, Sharing all your love... Now I feel it
Attention ! Il arrive parfois que certains hommes aiment s'explorer leurs systèmes digestifs respectifs. Si vous n'appréciez pas que l'on décrive ce processus en détail, ne lisez pas ce message et passez directement au suivant.
Ah.
Bacchus craquait.
Ce fut la première chose que se dit Augustus lorsqu'il sentit que son atroce créature se tendait soudainement vers lui pour l'embrasser. La brute soudain se précipitait sur lui avec une rage qui ressemblait tant à de la haine que cela ne pouvait être que de l'amour. Il y avait des tremblements dans toute sa force et, tout en ayant l'air terriblement puissant et fier, le perfide ne pouvait pas ignorer la faiblesse avec laquelle on l'enlaçait. C'était comme d'être frappé par les tumultes, d'être ainsi plaqué contre lui, poussé, soulevé. Il y avait une violence presque effrayante dans la façon qu'il eut de faire tomber à terre tout ce qui, sur le bureau, aurait pu gêner l'animal. Tous deux précipités, ils s'accrochaient l'un l'autre à leurs vêtements, se les arrachaient plus qu'ils ne se les retiraient. Des ongles s'enfonçaient dans la peau, des dents s'inscrivaient dans la chair, et Augustus aurait pu frapper le fugitif, en cet instant, que cela n'aurait fait que les exciter d'avantage.
Bacchus craquait, et Augustus le laissait faire. Il s'était attendu à cela, en ouvrant les vannes : une violence inégalée. C'était, pour lui, une conséquence logique de ces années d'abstinence, de jeu, de sadisme et de tentations. Il lui semblait évident que Bacchus le haïsse autant qu'il l’idolâtre, et il s'était attendu à subir bien des choses dès qu'il avait glissé la clef à travers les barreaux de la cage. Augustus, en tout conscience de cause, se laissa subjuguer.

Leur première fois fut donc d'une sale violence. Écrasé sur le bureau depuis lequel il l'avait nargué tant d'années, Augustus laissa Bacchus se faire les crocs sur son corps. Il le regarda, dans ce qui devait être la première fellation de sa vie, le dévorer bien plus que le sucer. La brute y laissa ses dents, plusieurs fois, sans que l'on puisse savoir si c'était intentionnel ou s'il tremblait juste trop tout en ingurgitant le sexe pour pouvoir être doux. Il se fit pousser, posséder, marquer. Bacchus semblait incapable de la moindre caresse. Augustus le laissa faire. Il ne faisait que suivre ses mouvements, son corps se collant au sien, l'autre déjà bien assez désespéré pour qu'il semblait impossible d'attiser sa frénésie davantage. Il avait les yeux fous, Bacchus, des yeux terrifiants tout en osant enfin (c'était effarant comme, soudain, il se permettait tout sans qu'un geste ne soit nécessaire) enfoncer son sexe en son maître.
Ils n'avaient pas eu à se concerter. En dehors des grognements de Bacchus et de la respiration erratique d'Augustus, il n'y avait pas un bruit dans la pièce, silence qui n'avait cependant pas l'air de les gêner. Bacchus avait pris Augustus, naturellement, parce que cela faisait des années qu'il ne pensait qu'à cela. Et Augustus l'avait laissé faire, parce que sa proie l'avait mérité, et parce que, vraiment, se faire désirer avec tant d'urgence et avec tant de rage avait quelque chose d'êtremement plaisant.
Leur première fois, Augustus eut vraiment mal. Ce chien de Bacchus semblait ne pas comprendre le principe des préliminaires, ou n'avait clairement pas l'esprit assez clair pour les considérer. Il le suça avec violence, le serra dans ses bras avec violence, le prit avec violence. C'était dans l'ordre naturel des choses. C'était ce à quoi Augustus s'était attendu. Il se laissa prendre ainsi, allongé sur le bureau, écrasé par le poids de son monstre, pénétré sans aucune forme de délicatesse, son anus presque écartelé par la violence des coups de reins du Murdock qui n'avait vraiment plus rien de conscient à ce niveau-là.
Augustus n'avait jamais vu quelqu'un perdre autant la tête en le touchant. Pourtant, de nombreuses fois, la tendre Langue-de-Plomb avait été le centre de folles passions. Cette fois-ci, il n'assista pas tant à un acte d'union que de combat. La pénétration ne dura guère longtemps, mais elle sembla s'étendre sur une éternité pour eux deux. Chaque convulsion de Bacchus à l'intérieur de lui était un éclat de rage à elle seule, et ni l'un, ni l'autre, n'auraient pu tenir bien longtemps de se sentir ainsi aussi exposé l'un en face de l'autre.
Lorsqu'Augustus regarda Bacchus jouir, il se demanda s'il ne venait pas là de lui arracher sa dernière goutte d'humanité.

Il y eut ensuite l'abandon de la bête. Elle s'écroula sur celui qu'elle venait de posséder, presque dépourvue de toute vie. Ce fut avec une abominable et nécessaire lenteur que son sexe fut retiré, comme on expire. Puis il y eu le silence. Il n'y avait rien à dire. Ils avaient à reprendre contact avec leur corps, avec la réalité de la pièce où ils se trouvaient, et à essayer de réalise ce qu'il venait de se passer. Sauf que si Augustus avait ouvert une vanne en son chien, Bacchus avait tout autant laissé s'échapper un monstre en son maître. Celui-ci laissa à l'animal une dizaine de minutes pour récupérer, avant de le faire se redresser, se relever, quitter le bureau, s'asseoir sur le canapé, avant de lui grimper dessus avec un sourire si honnêtement malicieux qu'il en était dérangeant.

Lors de leur deuxième expérience sexuelle, ce fut au tour d'Augustus de se venger. Lorsque la première fois avait été brutale, rapide, deux corps qui se percutent, celle-ci fut délicate, lente, et terriblement mesquine. Du bout des doigts, du bout des lèves, Augustus reprit possession de Bacchus. Ce qu'ils avaient pu vivre pendant six ans, il le saisit entre ses mains et l'exacerba comme jamais auparavant. Bacchus se fit frôler, taquiner. Il du supplier, implorer. Il du murmurer le prénom de son maître une centaine de fois, et pleurer parfois d'être cloué, attaché d'un ordre à ce canapé d'où Augustus osait lui suggérer tous les délices qu'il pourrait lui procurer. Il se vengea, sans aucune retenue, de la douleur précédente, et savoura avec un plaisir rare la détresse dans les yeux de sa victime. Sans qu'il puisse faire un seul mouvement.
Bacchus resta ainsi à sa merci durant un temps impossible à quantifier. Augustus vit rarement ce visage se tordre autant d'horreur et de plaisir à la fois. Car malgré tout, même si son premier instinct avait été la violence, la brusquerie et l'immédiateté, le Murdock n'avait, au fond, jamais véritablement voulu que d'être le jouet de son maître. Ses orgasmes, finalement, n'avaient semblé  que des broutilles, en comparaison du spectacle de la langue d'Augustus parcourant son torse pour venir y lécher son sperme.
La pénétration, à côté de cette merveilleuse torture, sembla presque fade. Fade au sens où le plus important ne fut pas de s'emboîter, mais d'admirer Augustus au dessus de lui, et qu'il s'installe littéralement sur son sexe comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Augustus ne fut jamais autant dévoré des yeux qu'au moment de son propre orgasme.

Le reste ne pourrait être résumé en un nombre de fois. Trois, quatre, fois ? Ce fut le moment où Augustus, clairement, n'arriva plus à comprendre ce qu'il se passait. Lorsqu'il avait préparé ce moment (car, ne soyons pas dupe, tout avait été calculé), il n'avait toujours prévu que deux actes de sexe : la violence de Bacchus et la vengeance d'Augustus. Il aurait du, ensuite, se séparer, respirer, et reprendre une relation légèrement modifiée. Dans tous ses calculs, au fond, ce qu'Augustus avait toujours oublié de prendre en compte, c'était la véritable passion de sa proie. Il la considérait comme un désir sexuel, un besoin de vengeance, de l'admiration mêlée à de la haine. Augustus n'avait jamais réussi à comprendre ce qui, dans les passions amoureuses, faisait que les lois sociales qu'il connaissait ne servaient plus à rien.
Ainsi, il n'avait pas prévu que la passion de Bacchus puisse être tendre. Une fois le coït terminé, il fut honnêtement surpris de se retrouver allongé sur le canapé, son amant entre ses jambes, à se faire sucer, lécher et dévorer, avec quelque chose d'étrangement... affectueux. Encore une fois, il se laissa faire, ou plutôt il se laissa subjuguer par l'application, la dévotion et, surtout, l'abnégation avec laquelle la bouche embrassait le corps. Bacchus n'était pas censé être beau, lorsqu'il faisait l'amour. Il n'avait toujours été que la salissure, la folie, la déformation du monde qu'Augustus avait réussi à mettre en cage et à réguler, avant de parfois laisser sortir l'abomination, par jeu. Il était incompréhensible que, à cet instant, il soit si beau.

Bacchus finit par s'arrêter. Et lorsqu'il le fit, il sembla être incapable de s'en relever. Se redressant à peine, il alla presque glisser le long de son maître, dans une position étrange, voire absurde, pieds dans le vide, bras écartés, visage enfoui contre son torse. Il s'y endormit. Augustus, lui, essayait encore de comprendre ce qu'il venait de lui arriver, de définir à quel moment il s'était trompé, et à quel point tout allait changer. Il n'avait jamais prévu de se sentir aussi détendu de coucher avec Bacchus. Il ne l'avait pas tant fait pour son propre plaisir que pour asseoir davantage encore son pouvoir sur l'animal. Plus le temps passait, plus il se sentait étrangement accroché à ce parasite de sa vie qui, s'il avait été utile, n'avait jamais eu de réelle importance.  Même Rabastan avait eu plus d'impact dans sa vie que l'homme qui dormait à présent paisiblement contre son corps nu. Bacchus n'était pas censé avoir de pouvoir sur lui.
Ce fut sur ce genre de questions, posées distraitement par un esprit épuisé, qu'Augustus s'endormit pour la première fois depuis des années sans s'imposer de Silencio.




Le chef l'appelle. Il entend le chef l'appeler et il essaye de le rejoindre, mais le bureau est rempli et il y a trop de gens, bien trop de gens autour de lui pour qu'il puisse voir le chef. Il en a marre qu'il y en ai autant, de gens, alors il pousse un de ses collègues. Le collègue tombe, se cogne la tête contre le bureau, meurt. Il voit le rouge qui s'écoule de son crâne. Mort. Il ne sait pas comment il en est aussi sûr, mais il est mort. Personne ne le remarque. Il avance encore, on lui bloque encore la route, il pousse encore, mort. Ils meurent si facilement. Il les tue tous, finalement, les uns après les autres. Cela devient vite un jeu, et il se concentre dessus, pour n'en manquer aucun, parce que s'il en manque un il sait que ce ne sera pas bien. Il ne sait pas pourquoi exactement, mais il n'a pas le droit d'en oublier un.
Finalement, ils sont tous morts. Il regarde autour de lui, satisfait, et remarque qu'il y en a un, dont il a brisé les jambes, qui est en vérité son frère. Il reconnaît sa fille près de la machine à café. Une ancienne petite amie sur cette chaise, à droite. Il se souvient qu'il les a tous tués parce qu'ils l'ont tous trahi. Ils le trahissent tous, à la fin. Alors il cherche le dossier qu'il est venu chercher, mais alors qu'il se retourne il y a l'immense vitre, de l'autre côté de la pièce, et il y a la foule qui le regarde. Ils ont des petits calepins, et ils ont des lunettes, et ils prennent des notes en le regardant.
Il se demande s'il a réussi le test.
Il regarde ses mains, et il remarque qu'elles sont rouges, et qu'il y a une tête dans ses mains, une tête arrachée, pleine de vers et d'insectes grouillonnant et dévorant la peau verte et rouge et noire. La tête qu'il a dans les mains est celle du chef.
Le chef est mort.
C'est lui qui l'a tué, et on va le punir pour ça.
Il veut crier son innocence, crier que ce n'est pas lui, que c'est une erreur, qu'il y a méprise et qu'il n'aurait jamais fait le moindre mal à-




Le hurlement d'Augustus trancha l'air et le réveilla avec une brusquerie qu'il n'avait pas connu depuis longtemps. Il n'était plus habitué à pouvoir émettre le moindre son au réveil. Il se demanda, un instant, qui avait pu hurler avec tant de désespoir. Il pensa d'abord à Marcus, avec une pointe d'irritation, avant de se souvenir que c'était à cela que ressemblait sa propre voix. Il inspira profondément, essayant de chasser les restes de terreur et de panique. Son corps était parcouru de quelques tremblements, sa bouche s'ouvrant à la recherche d'air avec une avidité inhabituelle. Il allait se calmer, il le savait, assez vite. Le temps  qu'il réussisse à chasser le reste de souvenirs de ce que lui imposait son subconscient. Il avait dormi atrocement longtemps, réalisa-t-il, en homme habitué à pouvoir chronométrer chaque prise de sommeil. Lui qui, d'habitude, restait rarement endormi plus de quarante minutes avait la nette impression d'avoir dormi plusieurs heures, potentiellement trois. Il était en train d'apprécier la sensation étrange de sentir effectivement son corps et son esprit un peu plus détendu lorsqu'il sentit un regard posé sur lui.
Il baissa les yeux et croisa ceux de Bacchus. Il ne se souvint qu'à cet instant ce qu'il venait de se passer, pourquoi l'animal était encore collé à lui, nu, et pourquoi ils s'étaient endormi là. Il réalisa que, dans son plan parfaitement maîtrisé depuis six ans, il venait de laisser échapper sa première erreur. Bacchus le regardait, et il l'avait entendu, c'était certain. Il pouvait encore le voir fragile, faillible, humain. Exactement le genre d'état qu'il ne montrait qu'à de si rares personnes, et en des circonstances toujours finement pesées et mesurées. Bacchus, en aucun cas, n'aurait du assister à ce genre de spectacle.
Augustus sentit quelque chose de froid descendre le long de sa colonne vertébrale, sans réussir à savoir ce que cela pouvait bien être. Il serra la mâchoire, calmant en quelques secondes à peine ce qu'il avait l'habitude de réguler en plusieurs minutes. Il n'arrivait pas à comprendre comment il en était arrivé à se dévoiler de la sorte face à celui qui n'était qu'une victime parmi d'autres. Il articula finalement, d'une voix encore faible mais qui, heureusement, ne tremblait pas :

« Personne ne doit savoir. »
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En moins de temps qu’il n’en faut à Augustus pour te faire rougir, tu avais la gueule entre ses cuisses, les bras fermement tendus pour le maintenir cloué au bureau. Tu n’avais pour modèle que les gâteries de mademoiselle Coco et pourtant, ce que tu as infligé à ton patron ne ressemblait en rien aux services que la demoiselle avait pu te prodiguer. Il n’y a pas de douceur parce que tu as beaucoup de mal à prendre soin de ce qui t’appartient, parce qu’il t’appartient, là, tout de suite, maintenant, quitte à ce que tu sois obligé de le clouer à son plan de travail, par la simple force de tes poings enroulés autour de ses poignets. Tu fais ça vite, tu fais ça assez mal, parce que tu ne contrôles pas tout ce que tu ressens pour lui, que tu sais pas comment le montrer si ce n’est en le bouffant avec indécence. C’est indécent, de l’avaler comme un malpropre, sans serviette, ni couverts, avec les doigts, avec la bouche et avec les dents.
Il est à toi et t’en laisseras pas une miette.

Ta respiration est haletante, tu ahanes comme un forcené, comme si tu étais sous l’eau, sauf que quand tu vas sous l’eau, c’est justement pour te calmer. Et quand tu sors la tête hors de l’eau, la rage remonte avec. Ça monte très vite, quand tu sens qu’il n’y a pas de résistance sous ta poigne ; à ce moment-là, c’en est fini de lui. Tout remonte et déborde : la rage et la colère enfouies, le désir de reprendre le dessus, autour duquel l’ouroboros s’était enroulé et qu’il avait exacerbé quand il t’avait ordonné de le tuer, celui de lui arracher ce qu’il avait volé sans même plus savoir exactement de quoi il s’agissait, tout en te précipitant en lui, ce qu’il avait écrasé la première fois que vous vous êtes rencontrés, lorsqu’il avait sondé ton esprit pour la première fois, de force ; il s’agissait clairement d’une vengeance quand tu lui écartes les jambes et que ça devient soudain brûlant d’être à ton tour dans lui, partout dans lui sauf dans sa tête. Tu te venges d’Augustus qui t’avait fait si mal, la première fois, en pénétrant dans ta tête, de force, en remplissant ce qui avait été si vide jusque là.
Le bureau craque sous votre poids, et chaque coup de reins que tu assènes fait grincer les pieds sur le plancher. Tu ne le vois même pas te voir dans cet état, tu ne vois plus ni n’entends plus rien ; tu ne fais que ressentir, tu n’es plus qu’un concentré in(can)descent. Tes mouvements de va-et-vient l’engorgent, tu comptes bien lui faire subir la même chose, parce qu’à ce moment-là, au moment où il t’avait ravagé de l’intérieur de la tête, tu ne t’étais jamais senti aussi vivant, aussi plein de lui. Il t’avait tout pris, tu n’avais alors plus qu’à être à lui. Tu avais eu l’impression de ne plus t’appartenir, alors c’est à ton tour de le posséder, toi-même possédé par cette envie folle. Tu le possèdes comme un tour de magie noire, quitte à éveiller un monstre en lui.
Tu es hors de toi, tu te contrôles pas, tu te laisses juste aller à une rage folle, une frustration folle, fou de lui.
Tu es une bête.

Dans un souffle rauque, vos épidermes moites se décollent l’un de l’autre. Encore sonné par ce qui venait (enfin) de se produire, tu sais pas comment tu t’es retrouvé assis sur le canapé, les bras engourdis et les jambes en vrac, à reprendre ton souffle, avec difficulté. Tu n’as pas eu le temps de te refroidir lorsque Augustus t’a enjambé, te coupant le sifflet.
Son sourire est du jamais vu, et pourtant, tu en avais vu des déclinaisons ; aucun n’avait jamais été aussi mutin, aussi prêt à te faire une bêtise, à s’imaginer autant de choses qu’il ne te ferait pas. Tu les as vues grandir dans ses yeux, ces idées, ces envies qui transpiraient de chaque pore de ta peau, qui suintaient de sa bouche souriante, qui ciselaient ses ongles baladeurs. Il pèse sur tes cuisses, et bientôt, c’est tes membres qui pèsent, qu’Augustus rend si lourds que tu ne peux pas les bouger, tu le sais, ton oreille bourdonne, le dragon sifflant dans ton oreille t’enchaîne à la couche ; pas besoin de force brute pour t’immobiliser, si ce n’est de la tienne, parce que c’est toi-même qui te tend, immobile et tendu comme un arc, secoué de soubresauts erratiques pour essayer de l’atteindre quand il prenait un malin plaisir à se défiler, tandis que tu sanglotes son prénom, sifflant la dernière syllabe d’impatience.
Et ça devait être plaisant et fascinant de te voir te battre contre toi-même, après que tu aies eu l’air et l’audace de te battre contre lui : telle était sa revanche. C’est fascinant de te voir autant vouloir désobéir et obéir à la fois. Obéissant quand, d’innombrables fois, il t’a demandé son prénom et qu’autant de fois, tu l’as gémi, implorant de ne pas te faire toutes ces choses qu’il te faisait et de te faire toutes ces choses qu’il ne te faisait pas, dans un ballet de suggestions insupportables.
T’as atteint l’apothéose quand il s’est assis au sommet de toi. Là où tu l’avais pénétré un peu plus tôt sans manière ni révérence, il prend place comme un monarque, asseyant son pouvoir entre tes jambes, y atteignant un plaisir jouissif sous ton regard assoiffé.
S’il n’était pas en train de te faire l’amour, tu le lui aurais fait rien qu’avec les yeux. C’était pas nouveau que tu déshabilles et cloues au mur Rookwood rien qu’avec le regard ; à cause de ça, tout le monde t’a grillé. C’est souvent dérangeant car on ne peut pas ne pas voir comment tu le vois. C’est indécent de te voir le vénérer aux yeux de tous, comme s’il n’y avait que lui. Tu le dévores tellement des yeux qu’on ne sait plus si tu le hais ou si tu l’aimes trop. Il t’obsède et à cet instant-là, c’est ton regard sur lui qui est obsédant. Ton regard fou de lui qui s’accroche à sa bouche particulière, à ses cheveux malmenés, à sa bouche entrouverte, à son dos cambré sur toi, à ses bras tendus vers toi, à sa respiration rompue, à sa gorge sacrifiée à la morsure. Même sans marque maudite, il te cloue sur place.
Au fond, tu as toujours aimé te laisser contrôler parce que c’était ce qui se rapprochait le plus de l’affection, pour Augustus Rookwood. Même si l’amour, ça se contrôle pas ; ça pouvait se réduire au silence, comme une punition, mais il avait suffi de si peu, une impulsion, le choc de deux corps, pour qu’il n’y ait plus que ça qui s’exprime, sous toutes ses formes, même les plus violentes, même les plus vicieuses.
Sans la douleur, ça n’aurait pas été suffisant.
Après tout, tu étais sa bête.

Tu ne sais pas combien de temps le supplice a duré. Ça a été à la fois bien trop long et bien trop court. Vos démons sont sortis, chacun leur tour, explosant comme des gerbes. Une fois retombés, ils n’ont laissé en face l’un de l’autre que vous deux, humains.
Si tu ne t’étais pas contrôlé lors de la première fois, te laissant submerger par ta propre envie et ta propre frustration, si lors de la seconde fois, tu l’avais laissé on ne peut plus prendre le contrôle, tu n’as sans doute jamais été autant toi qu’à partir de ce moment, quand tu t’es montré tendre, même après qu’il t’ait fait subir un tel supplice. Même après que vous en ayez fini avec vos petites revanches, tu avais toujours envie de lui, de lui faire du bien.  
Cette fois-là, si tu pesais lourd sur lui, c’était plus doux, plus chaleureux. Ça ne brûlait plus, ça chauffait, ça ronronnait, ça faisait du bien. Ça savait enfin comment faire, maintenant que la bête avait pu assouvir ses désirs ; derrière, il n’y avait plus que les tiens, bêtement humains, bêtement amoureux.
Tu deviens alors une marée montante qui le lèche comme vos sorcières d’ancêtres qu’on avait brûlé. Tu montes sur lui, tendre, indolent, des baisers en cascade, pas douloureux, mais suffisamment lourds pour qu’il s’accroche à toi pour ne pas s’y noyer, les griffes plantés dans ton dos noué de muscles. Tu n’étais jamais aussi beau que quand tu ne parlais pas, que quand tu n’essayais pas de parler, de te ridiculiser, de te rendre plus con que tu ne l’étais. Tu n’es jamais aussi beau que quand on pense que c’est fini, que tu n’as plus faim ni soif, et que pourtant, tu continues de le bouffer, des yeux et des mains, de la bouche et des bras, parce que ce n’est pas qu’une histoire de vengeance et de jeu de pouvoir. Ce n’est pas que ça.
La première fois, tu l’avais pris.
La deuxième fois, ça t’(ap)prendra de lui faire subir ça.
La troisième fois, plus que prendre, t’as tout donné de toi, tu lui as offert ce qui lui manquait pour tout posséder de toi.
Désormais, tu es sien.

C’est naturellement, sans te poser la moindre question, sans te demander si ça pose un problème, que tu t’endors sur lui. Tu avais pris l’habitude de dormir un peu n’importe où, si bien que tu avais développé cette singulière capacité d’engoncer ton corps pourtant robuste dans les endroits les plus improbables. Et le canapé d’Augustus faisait partie de tes destinations favorites, à ceci près que jusque là, tu t’endormais sur le canapé d’Augustus et pas sur Augustus. C’est plus anguleux et vallonné, un corps, c’est moins confortable que les coussins rembourrés, moins prévisible que les coins de bureau de la Ruche. Mais c’est aussi plus tiède, et sa respiration encore un peu haletante te berce. Tu ne t’es jamais endormi aussi paisiblement.
Dans ton rêve, c’est une tempête à la surface mais tu es sous l’eau et tu fais l’amour à Augustus Rookwood.

Un cri à glacer le sang te réveille. Tu as tout d’abord cru que c’était Flint et tu te redresses sur tes appuis, prêt à t’arracher à l’étreinte d’Augustus pour aller voir ce qui n’allait pas. Sauf que ce cri ne ressemble pas à celui de Marcus.
C’était Augustus qui venait de crier. Tu ne l’avais jamais entendu crier ; il ne levait jamais la voix, même quand toutes les raisons du monde se présentaient à lui. Même quand tu l’avais pris sur le bureau, il avait semblé canaliser sa voix. Même quand il t’était grimpé dessus, il n’avait jamais autant fait de bruit que toi.
Tu réalises alors que, dans son plan parfaitement maîtrisé depuis six ans, il venait de laisser échapper sa première erreur. Ça monte en toi, tu sais pas si ça te grise, ou si c’est de la panique. Tu te sens si unique en ce moment, et si en danger. Il pourrait te tuer d’avoir vu ; mais il ne le fera pas, parce qu’il t’-
Enfin.
Enfin il se dévoilait à toi malgré lui, enfin c’était lui qui ne parvenait plus à se contenir devant toi.
Tu ne l’as sans doute jamais trouvé aussi beau que dans cette panique sourde, le désarçonnement dans son regard quand il se rend compte que tu as vu, que tu sais, alors que tu n’as rien fait pour transgresser ses règles. Tu sens que ça remonte, le désir, qui gonfle ton coeur dans ta poitrine. Tu sens que ça remonte, de le voir si dépourvu, si affaibli, pris sur le fait, si humain et si à toi. Enfin.

Et pourtant.
« Personne ne doit savoir. »
Tu comprends ça comme « toi non plus tu ne dois pas savoir » ; parce qu’à l’époque, t’avais pas compris que, plus que d’avoir peur d’être trahi, Augustus avait envie d’être compris.
T’as pas compris.
Si personne ne devait savoir, pour lui, ça aurait voulu dire que tu le gardes pour toi, que tu l’acceptes, que tu l’acceptes lui, comme ça aussi, comme ça surtout. Et c’est comme ça que tu le voulais ; plus que ce lui fantasmé et inatteignable. Ça y est, tu l’avais atteint, et c’était encore mieux.
Alors pourquoi t’as pas compris ça comme ça ?

Terrible, tu te penches au-dessus de lui, tes yeux plantés dans les siens, tu n’as même plus besoin de t’aider de tes poings. « Dans ce cas » Tu vas lE REGRETTER. « efface-le de ma tête » que tu lui chuchotes, irrésistible parce que tu le lui murmures sur sa bouche, terrifié d’avoir eu cette idée et déjà terrassé par les conséquences que tu ne voyais même pas arriver, et que pourtant tu ne pouvais pas empêcher d’arriver. Comme si, tout au fond, tu te vengeais - mais de qui ?
Il n’est pas à toi ?
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bastus #5 • Feeling you insane how I need it Empty
Bastus#5 •  Buttermere • Decembre

Feeling you insane how I need it, Feeling all your pain How I hold it. Crashing through your walls Like a hammer. Smashing up the floors Of your thinking. Pull me through the cracks when you're sinking. Pull me how you like... God I'm trying, Seeing all your life When it's dying. Dragging me, It kills when you're fighting. Everything that is, Is love about you. Stick me in my heart so I feel it, Take me with your tears so I feel it, Sharing all your love... Now I feel it
« Personne ne doit savoir.
- Dans ce cas, efface-le de ma tête. »

Les deux murmures se répondirent, doucement, alors que les deux émergeaient tous deux doucement du sommeil. Dans cet état étrange, léthargique, que l’on a lorsqu’on a éveillé par un cri de terreur. Augustus était encore paniqué, Bacchus encore surpris. Ils furent honnêtes, tous les deux, chacun à leur manière. L’un laissa parler sa paranoïa, son inquiétude d’être méconnu, sous-estimé ou plaint. L’autre se laisser avaler par sa propre passivité, son habitude de tout laisser aux mains de son dieu et de ne jamais, jamais trop s’approcher des flammes. Lorsque le maître avait cru ouvrir les portes de la cage, l’animal, par habitude, s’était réfugié toujours plus loin dans ses fers. On avait cru lui tendre la main, l’accueillir entre ses bras et lui murmurer je te fais confiance. L’animal aurait du devenir un homme, saisir ce qui lui revenait de droit, exiger sa place dans l’univers de ce qui, ce jour-là, n’était plus son supérieur.
Augustus Rookwood avait sous-estimé la qualité de son dressage. Il n’avait pas compris, ou avait oublié, à quel point la bête aimait sa cage et ses douces tortures. Lui qui n’avait jamais laissé son libre-arbitre à qui que ce soit, ne pouvait comprendre le vertige de soudain avancer de ses deux pas. Lui, le vertige, n’avait lieu que lorsqu’il lâchait un instant seulement les rênes pour accepter que l’autre puisse avoir son mot à dire. Vertige plus grand encore était d’accepter une erreur, de l’embrasser et de rien avoir à effacer, ou corriger.
Bacchus Murdock aurait du approuver, et peut-être que tout ce serait passer autrement. Mais comment aurait-il pu comprendre, soudainement, qu’il avait  le droit ? Lui qu’on avait systématiquement puni de ses initiatives ? Lui qui avait chaque fois été félicité par de la souffrance, au lieu de tendresse ? Chaque fois qu’il s’était approché plus près de son Dieu, il avait du abandonner peu à peu tout ce qui avait pu le constituer. Le mangemort avait dévoré tant de repères qu’il ne fallait plus s’étonner de le voir dépourvu lorsque, enfin, on vient à s’intéresser à l’homme sous le monstre. Augustus avait été aimé dans sa cruauté, son dédain, le fait qu’il ne laisse jamais la créature lui glisser entre les doigts.
Et maintenant, il aurait fallu abandonner tout ce qui lui avait un jour procuré de la sécurité pour se plonger dans les méandres de ce qui avait toujours été si sévèrement puni ?

Quel imbécile, au fond, avait été Augustus Rookwood. Et avec quelle puérilité réagit-il ! Les quelques mots, cruels, prononcés par son esclave lui coupèrent un instant le souffle qu’il avait si péniblement repris en main. Il se sentit, tout simplement, effroyablement vexé. Il ne comprit rien, et tout ce qu’il vit, ce fut qu’il avait tendu une main, et qu’on l’avait chassée avec dédain. Lui, on l’avait chassé avec dédain. Il sentit sa mâchoire se contracter, alors qu’un sourire, à la fois  crispé et cruel, véritable rictus pour le néophyte, s’installait. Bacchus l’avait dévoré, puis l’avait recraché. Ce fut tout ce qu’il accepta de voir. Il lui avait enfin offert ce qu’il avait toujours souhaité, et la brute avait déclina. Non merci, semblait-il dire avec son délicat murmure. Augustus l’aurait tué sur le champ, s’il en avait encore été capable.

Il fallut, finalement, réagir à l’insulte. Tout d’abord, il n’y eu que ce rictus, qui aurait été bien plus terrifiant sans l’étrange crainte qui avait un instant torturé les yeux du rescapé. Quelques secondes plus tard, interminables, il se mit en branle et se redressa, délogeant d’un geste presque tendre celui qui ne méritait plus d’être appelé un amant. Il resta à peine assis sur le canapé, se relevant vite, s’étirant un instant, avant de parcourir du regard la pièce. Il fit quelques pas, s’attarda vers les vagues de vêtements jonchant le sol, avant de se pencher pour en dénicher son paquet de cigarette et sa baguette.
Un instant plus tard, il était de retour à la place qu’il n’aurait peut-être jamais du quitter : légèrement assis sur son bureau, cigarette fumant lentement entre ses lèvres, et le regard caressant l’être échoué sur le canapé. Des centaines de fois, ils avaient connu cette configuration. Cette fois-ci, ils étaient tous deux nus, et l’on pouvait se demander qui des deux était le chien de l’autre. « Lève toi. » La voix claque brusquement dans le silence. Une voix qui n’a plus rien de tendre ou même d’effrayé. Elle perfore la distance entre eux deux et réveille l’ouroboros autour de l’oreille tant convoitée. Augustus n’avait jamais utilisé le tatouage qu’en cas de nécessité. Jamais en avait-il abusé pour des choses aussi simples. Il semblait, en cet instant, privé de ce genre de considération. Bacchus debout, Augustus s’approcha, baguette en main. Il la leva et, méthodiquement, commença à nettoyer et soigner toute trace qu’il avait pu laisser.
Il le fit sans tendresse, sans même s’attarder sur les parties d’un corps qu’il avait un instant dévoré avec avidité. Méticuleux et froid, il ne semblait pas prendre soin de lui mais au contraire le priver de toute affection. Il n’y eut aucun contact, la baguette faisant tout ce qu’il aurait pu faire de ses doigts. L’idée d’effleurer de nouveau ce corps le révulsait avec une force qu’il ne souhaitait pas appréhender.

Sa tâche terminée, il s’éloigna de nouveau de lui, jugeant de son travail avec distance. Tout se confondait, sur cet espèce de patchwork humain, traversé de tatouages et de cicatrices, de blessures et autres tâches comme s’il était une peinture humaine que la moitié du monde avait cherché à marquer. Augustus, au fond, n’avait jamais été qu’une de ces multiples personnes pour qui Bacchus s’était dévoué. Plus longtemps, peut-être, plus soigneusement, sûrement, leur relation avait eu un éclat plus vif par les efforts du Rookwood. C’était à se demander si Bacchus lui avait un  jour appartenu.
Augustus inspira profondément.
Puis il prononça doucement et calmement les mots qui allaient définitivement mettre un terme à ce qu’on aurait pu, un instant, appeler une relation.

« Je comprends. » Il n’avait peut-être jamais aussi peu compris quelqu’un. « Ne t’inquiète pas. Tu oublieras. » Il aimerait tout effacer, absolument tout de ces six ans passés ensemble, à construire peu à peu une relation cruellement vouée à l’échec. Il se retint. Pour des raisons étranges, il ne réussit pas à se résoudre à mettre un terme définitif à l’existence du Murdock dans sa vie. Quelque chose d’étrange se déroulait en lui : il avait terriblement envie de quelque chose, mais semblait incapable de supporter l’idée de la réaliser. Il fallut, ainsi, faire un compromis. « Dès que tu partiras de cette pièce, tu retourneras dans ta chambre. Tu iras t’allonger sur ton lit. Tu t’endormiras en une trentaine de secondes et, à ton réveil, tu aurais oublié tout ce qu’il s’est passé aujourd’hui. Tout, depuis l’instant où tu as franchi cette porte pour  la dernière fois. » Augustus ne pouvait pas être le seul à être puni. Il refusait de souffrir, seul, pendant que la créature pourrait vivre impunément après avoir oser le dénigrer, un crime dont il n’aurait jamais du pouvoir se relever. Pour cette audace, cette cruelle insubordination, Augustus lui retirerait son bien le plus cher.
« Je suis navré de t’avoir réveillé de la sorte, et j’espère que tu comprends que je ne peux pas te laisser te souvenir de ce genre de scène. »
Insensible et froid, il resta quelques secondes à observer avec satisfaction l’homme qu’il avait failli aimer se dissoudre sous son regard de glace.
Ce fut dans un sourire atrocement satisfait qu’il lui susurra finalement :

« Sortez, maintenant, Murdock. »
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Bastus#5 • Feeling you how I need it
Feeling me insane how you need it, Feeling all my pain How you hold it. Crashing through my walls Like a hammer. Smashing up the floors Of my thinking. Pull you through the cracks when I’m sinking. Pull you how I like... God you’re trying, Seeing all my life When it's dying. Dragging you, It kills when I’m fighting. Everything that is, Is love about you. Stick me in my heart so I feel it, Take you with my tears so you feel it, Sharing all your love... Now I feel it
Pourquoi t’as répondu ça ? C’est ce qu’il y avait de mieux à faire pour lui. Pour lui ? Menteur. C’est pour toi que t’as dit ça, pour ton confort et ta sécurité à toi. Pour préserver tes petites habitudes, le train-train quotidien que vous aviez développé pendant six années, et pour lequel tu avais tant souffert avant qu’il en arrive là. Tu avais entrevu quelque chose de plus grand, de plus beau et de plus fort. Quelque chose de trop beau pour être vrai. Alors tu avais fait en sorte que ça se produise jamais.
T’aurais jamais dû répondre ça. Tu en prends conscience à mesure que le rictus sur la figure d’Augustus s’agrandit. Tout va redevenir comme avant. T’aurais jamais dû dire ça. Vous vous étiez échappés de vos cages respectives, à trop forcer sur la porte, et maintenant, il s’agissait de rentrer à l’écurie, comme si de rien était. T’aurais jamais dû dire ça !

Comment t’aurais pu savoir ?
Personne ne doit savoir.
Pas même toi. T’étais personne, après tout. Un sous-fifre comme il aurait pu en avoir des dizaines. Un bon à rien à qui il fallait toujours dire quoi faire. Un amas de chair dépourvu de volonté propre, vidé de la sienne et remplacé par le bon vouloir d’un maître ultime. Un être vide engorgé de cette volonté, mu par les ordres d’un seul et la terreur de ce qui pourrait lui advenir s’il ne s’exécutait pas aussitôt. Tu n’obéissais qu’à ses ordres, ne te satisfaisais que de son dédain, ne te pliais qu’à ses désirs.
Et là, il avait désiré quoi, à ton avis ?
Il n’y avait pas eu d’ordre dans sa voix, pas de dédain dans ses yeux. Mais alors, c’était quoi, ce que tu y avais vu ? Qu’est-ce que tu venais de voir ?
L’homme sous le m-

Promis, patron, j’ai rien vu. J’dirai rien j’vous assure ! Et, si vous me faites pas confiance, alors faites-moi oublier. Vous pouvez me faire confiance. Je suis prêt à vous sacrifier ça, aussi, si ça peut vous rassurer. Je suis prêt à vous sacrifier vous. C’est ce que j’ai de plus beau à vous offrir.
Pourquoi t’as dit ça mais pas comme ça ?
Béat, tu contemples le masque se recoller peu à peu sur son visage et que sa terreur nocturne avait brisé sur tes genoux. Presque imperceptiblement, il se reforme sur l’autre visage, terrifié et un peu hébété, affaibli et en cela égal au tien. Il avait trébuché à ta hauteur, il t’avait hissé à sa hauteur et tu l’avais repoussé, d’instinct, l’avait fait remonter de force sur son piédestal.

Je mérite pas ça, patron, que t’as peut-être murmuré alors qu’il se levait. Je mérite pas votre confiance, je mérite pas votre sincérité, je mérite pas le vrai vous. Je ne mérite qu’une bonne correction, qu’une pâle et impérieuse façade. Je ne mérite que ce qui vous rend fort. Je ne mérite qu’une bonne leçon d’avoir tant aimé de vous voir si faible.
Je suis à vous, patron. Est-ce que t’es à moi, Augustus ?
Je mérite pas ça. Je mérite pas d’oublier, patron. Je regrette ce que je viens de dire. Je le répèterai à personne, promis, faites-moi confiance. « Lève-toi. » Personne n’a à savoir, ils n’ont pas à savoir. S’il n’y a que vous et moi qui le savons, alors personne d’autre. Parce que tu es tout pour moi et qu’il n’y a personne d’autre. Je regrette Augustus, laisse-moi savoir ça.
Je veux pas être personne.

Tu t’es même pas rendu compte que tu t’es redressé à ton tour et que tu te tiens debout à quelques centimètres de lui, trop loin de lui, et que sa baguette vous sépare et qu’elle nettoie, insupportable dans sa méticulosité, toutes les marques qu’il avait posé en une nuit, mille fois plus nombreuses et passionnées que celles qu’il avait pu faire en six ans. Ton corps tremble, retenu par la marque de se jeter sur lui. De lui arracher sa baguette des mains et de le clouer au sol et de lui avouer tout ça.
Pourquoi t’as pas dit ça ? Parce qu’il ne m’a pas laissé le choix. Parce qu’il ne m’a jamais laissé l’initiative, que je n’ai jamais eu de choix à faire. Et que ce choix, je l’ai fait pour lui. Menteur. Il t’a toujours laissé le choix. Dès le premier jour, il t’avait laissé le choix de le respecter et ainsi, il n’aurait peut-être pas jeté son dévolu sur l’impertinent rafleur crachant sur ses chaussures. Peut-être que, si le premier jour, tu lui avais simplement donné ton nom et que tu étais redescendu rejoindre les autres, il n’aurait pas eu à te prendre en charge, à te prendre à son service, à se rendre indispensable dans ta minable existence. C’était toi qui avais provoqué tout ça. Toi qui l’avais provoqué, toi qui l’avais invoqué, comme on attire les requins en battant des bras et des jambes, à te débattre dans l’eau comme un noyé sans bouée ni repères. La première fois, tu avais tant pué la peur et le désir de soumission qu’il aurait été absurde de ne pas saisir l’occasion comme il t’avait saisi par le collet.
On ne saura jamais dans cette histoire qui fut le premier : le maître à faire de toi son esclave, ou toi l’esclave à faire de lui ton maître.

Baillant aux corneilles, incapable de lui dire que tu as changé d’avis ou de protester, tu restes prostré, le regard dans le vague s’il n’était pas occupé à balayer chaque partie de son corps, comme en écho à ton corps qu’il nettoie avec une rigueur chirurgicale. Tu sais pas si c’est les sortilèges mais tu es frigorifié, des sueurs froides traînant le long de ton dos. Il ne laisse pas la moindre petite griffure, pas le moindre bleu que tu te serais fait en le prenant contre le bureau. Il prend son temps, afin de ne rien oublier. Et les minutes qui passent, interminables, sont autant d’occasions que tu aurais pu saisir pour lui dire que c’est pas ce que tu voulais.
C’était lui que tu voulais. Tu pensais que c’était assez clair.
Mais quel lui ?

« Fais pas ça- » que tu crois articuler, alors qu’il t’a demandé de prendre congé. Le dragon siffle si fort qu’il ne t’a peut-être pas entendu.
Celui avec lequel tu avais plongé. Vous aviez plongé tous les deux. Pourtant, tu étais remonté et l’avais laissé s’y noyer.
« Fais pas ça ! » et on ignore si tu lui parles ou si tu t’adresses à l’ouroboros qui se resserre, alors que tu refuses d’avancer, cloué sur place. C’est plutôt à toi de pas faire ça, d’arrêter d’avancer, irrémédiablement, vers la sortie. Tu cherches ses yeux, son coeur ; il peut pas te faire ça. Il peut pas se faire ça à lui-même. C’est inhumain. « Tu vas le regret- »

Tu ignores comment tu t’es retrouvé dans le couloir. Tu sais qu’il s’agit du serpent, qu’il t’avait fait sortir d’ici, par bonté d’âme peut-être. Parce que te laisser mourir aurait été trop facile. C’est donc comme contre ta volonté que ton corps continue de se mouvoir tout seul vers ta chambre. Et ton âme qui se débat te fait te cambrer, te recroqueviller, arracher les tapis et les papiers peints. A te voir te rouler ainsi au sol, dans ton plus simple appareil, te donne des allures d’homme-bête en pleine transformation.
Et il y avait en effet quelque chose qui changeait en toi, qui se brisait, petit à petit, et puis d’un coup plus brusquement et ça faisait mal si mal. Parce que ce n’est pas tout d’effacer un souvenir en supprimant des images. Il y avait les sensations procurées et les sentiments installés depuis. Et ils avaient été si forts, si forts que le serpent devait forcer la main qu’il n’avait pas pour les déloger.
Ton poing se loge dans une vitre de la fenêtre condamnée de ta chambre que tu ouvres à la volée pour hurler à la mort. Pourquoi personne ne devait savoir ? Tu n’étais pas personne, tu ne voulais pas être personne pour lui ! Tu t’y penches au plus dangereux possible, jusqu’à ce que ton corps soit secoué d’un dernier soubresaut instinctif de survie pour te projeter en arrière dans les débris. A quoi bon rester en vie quand on ne sait plus pourquoi on vit ?

Personne ne doit savoir. Tu réalises qu’il ne te reste à présent précisément que trente secondes avant de tout oublier. Personne ne doit savoir. Dans le peu de raison qu’il te reste, moi je veux savoir, bien que l’acte en lui-même semble déraisonné, je suis pas personne, tu ne m’aurais pas laissé faire toutes ces choses si je n’étais personne ! tu saisis un morceau de verre dont la pointe s’enfonce sans une once d’hésitation sous ta peau. Toutes ces choses que vous aviez faites, que tu lui avais fait et qu’il avait fait avec tant de s-

La lumière traversant le carreau brisé te réveille. Tu bondis de ton lit tel un diable à ressort comme si tu étais en retard. Ça n’est pas dans tes habitudes de te lever si tard, bien qu’il n’y ait malheureusement pas grand-chose à faire ici.
Le mal de tête qui te vrille les tympans te coupe dans ton élan. Tu sens soudain comme un grand vide en toi, si grand et si douloureux que tu ne remarques pas tout de suite le sang séché qui s’est écoulé de ta jambe durant la nuit. Tu en as aussi dans la paume de la main, comme si tu t’étais coupé. Confus, tu vas rincer les taillades que tu sembles t’être asséné toi-même. Dans la précipitation et l’agitation qui embrouille tes sens, tu ne remarques pas les lettres maladroites que forment les plaies, comme des petites bouches qui répètent en silence « personne ne d- ».

Quelques minutes plus tard, plus ou moins frais, la main bandé et le pantalon renfilé, tu te présentes devant le bureau de Rookwood.
« On fait quoi maintenant, patron ? »
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