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sujet; de l'eau pour les combattants - babane

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Tu n’avais plus de conscience, Augustus Rookwood était ta conscience, depuis qu’il avait fait main basse sur l’intérieur de ton maigre esprit.
Et Augustus Rookwood ne serait pas très content de voir que tu hésites tant. Il veillera par la suite à ce que ce genre de prise de conscience ne se reproduise plus. Il ne s’agirait pas que tu te fasses un avis sur la question du sort de tes anciens petits camarades.
Peut-être que dans le fond, tu avais espéré qu’elle soit la première à céder ; la première à lâcher prise, pas à lâcher son Impardonnable. C’était toi le méchant, c’était toi qui aurais dû le prononcer. Tes yeux se sont grand ouverts que, si elle avait pu le finir, on aurait retrouvé ton épais cadavre baillant aux corneilles, comme s’il avait assisté à l’horreur de sa vie. Parce que c’est bien l’horreur qui déforme ta face. T’as pas osé. Si, Bacchus, elle avait osé ; parce que tout ça, ça n’était pas qu’une histoire de gentils contre des méchants. Parce qu’Albane avait au moins autant de raisons de ne pas fermer l’oeil de la nuit que toi. Parce que dans cette histoire-là, les gentils se salissent les mains aussi, tandis que les méchants voudraient bien se les laver, de temps en temps.
Le fait est là : tu ne voulais pas la tuer. Même si Augustus Rookwood l’aurait voulu, lui. Bah, il veillerait à ce que ça ne se reproduise plus.
Ça t’apprendra à t’autoriser le luxe des états d’âme, Murdock : tu ne voulais peut-être pas la tuer ; en revanche, elle, elle le voulait.

Hé, Albane, je suis pas si différent d’autrefois. Du moins, j’ai pas l’impression d’avoir tant changé, la preuve : je me souviens encore un peu trop bien de nous.

Elle avait été sur le point de le faire. L’horreur de la situation est si grande que ta réaction n’en est que plus absurde, puisque ton visage saignant se fend d’un rictus, le blanc de tes yeux luisant dans la pénombre de sa baguette éteinte.
T’allais quand même pas oser, Oswell ? qu’ils lui crient, tes yeux. C’était pas à toi d’oser, ça aurait dû t’arrêter, Cedric, tout ça. Pourquoi ça t’a pas arrêté ? Je suis pas si différent d’avant, si ? Je suis pas-

Une gerbe explose devant tes yeux. Une intense brûlure au poitrail te jette en arrière -comme si elle t’arrachait le coeur-, alors même que tes collègues arrivaient sur vous. Tu t’écrases une nouvelle fois au pied du mur, te redresses dans un geignement de douleur, des relents de cuir, de chair et de poils roussis te brûlant les sens. Tu enfouis ta main dans le trou béant de ton tee-shirt déchiré. La bougresse ne t’a pas loupé ; et dire qu’elle aurait pu te lancer un Avada avec cette justesse. Tu en as d’autant plus froid dans le dos que se rappelle à toi la réalité qu’elle l’aurait fait.
Elle doit croire que tu as changé, se conforter dans le fait que tu n’es plus celui qu’elle avait connu. Mais ce serait trop facile ; c’est pas si facile, tu sais.

Tu jettes un regard confus de ta main poisseuse de sang à elle, sur le point de disparaître. « T’as pas os- » que tu souffles, exaspéré. Tu n’en reviens pas et tu n’en reviendrais sûrement pas pendant un long moment, suffisamment long tu espérais pour ne plus hésiter, la prochaine fois que vos routes se croiseraient.
Dans un élan de désespoir, tu te précipites vers elle alors qu’elle est sur le point de disparaître, handicapé d’une main plaquée contre la plaie béante qu’elle a creusé sur ton poitrail, juste en-dessous du coe- « T’AS PAS OSE OSWELL ? J’OUBLIERAI PAS T’ENT- » Le souffle de la transplanation te coupe dans ton élan. Et ce n’est qu’à ce moment-là que tes collègues se remettent de leurs émotions, s’attroupant autour de toi. Ils te demandent certainement si tu tiens le coup, sont peut-être même en train de soigner ta plaie. Tu les vires comme des mouches « RESTEZ PAS LA A RIEN FOUTRE ! TROUVEZ-LA-MOI ! MEME SI ON DOIT BRÛLER TOUT LONDRES ! » C’est trop tard, y’a plus rien à soigner, elle t’a porté le coup de grâce.
Elle avait osé.

Comment t’as pu oublier, Albane ? Comment t’as pu m’oublier derrière tout ça ? C’était moi tout ça, comme c’était moi, juste là ? J’ai pas changé, Albane. J’ai pas changé, hein ? Je suis pas si différent, Albane, je suis p- Rookwood n’allait pas être content.
5 décembre 1994 Retour de soirée, tu desserres ton foulard et jettes ta cape sur le rebord du canapé. Tu crevais de chaud là-dessous, et en plus de ça, tout le monde t’avait pris pour un élève de Durmstrang, avec tous les égards qui leur étaient dus. Qui l’eût cru en effet que la petite sauvageonne d’Oswell parvienne à mettre la main sur un élève invité qui s’arrachait comme des petits pains.
Vous formiez davantage une contrefaçon assez mal assortie du roi et de la reine de promo, à voir l’indécente différence de carrure entre vous deux et les regards en chien de faïence que vous lanciez à Diggory, fier comme un paon.

La première partie de la soirée avait été un calvaire à supporter, puisqu’aucun de vous deux n’était capable de danser correctement. La bougresse était trop légère que tu manquais de la faire décoller à chaque pas de valse. Vous aviez bien vite abandonné, avant qu’une dispute éclate en plein milieu de la piste de danse. Et quoi de mieux pour se réconcilier que de cracher sur les dos des autres aux pieds du buffet. Un dénouement prévisible pour des sales caractères dans votre genre.

Ce qu’Albane n’avait sans doute pas prévu -et dont elle ne te croyait plus capable-, c’est que tu fasses un parfait garde du corps quand il s’agissait de se frayer un chemin dans la foule compacte des élèves agglutinée autour de la scène des Bizarr Sisters. Albane n’a sans doute jamais dû se sentir aussi grande, alors que tu la faisais voler à bout de bras.
Tu n’en es que plus fourbu en ce bout de nuit, et t’en oublierais même de répliquer alors qu’elle pleure ses pieds écrabouillés. Ou peut-être que tu ne répliques pas parce qu’il n’y a rien à répliquer et que tu restes coi face à ce semblant de compliment qu’elle te dépose sur la joue. Ton expression reflète l’incompréhension la plus totale, si innocente qu’on ne peut t’en vouloir.

C’est souvent ça le problème avec toi, Murdock. Tu es parfois trop con que tu en oublies d’être méchant. Tu as l’air parfois si paumé qu’on en oublie de te détester.
Et, il fallait croire que malgré ses manières de fouineuse, Albane l’avait un peu oublié ce soir aussi.

J’oublierai pas ce que t’es devenu.
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