Il n'en a pas parlé à Susan, ni à quiconque du Conseil pour être parfaitement honnête. Il aurait dû, pourtant; surtout qu'Elijah sait que Susan finit toujours par tout savoir  et qu'il est inutile de le lui cacher... mais mieux vaut avoir des remords que des regrets, se dit-il en transplanant à proximité de Storm's End, avant de s'engager dans le petit chemin de terre qui mène au cottage. L'endroit est étrangement silencieux, vide. La plupart des loups sont à Pré-Au-Lard et à Poudlard, en train de se battre ou de mourir.
De mourir. Tout le monde meurt. Ça fait presque un mois qu'ils se battent. Un mois qu'ils se lèvent, prennent leurs baguettes, se battent, dorment à moitié, et ils recommencent. Un mois que les Détraqueurs les hantent, qu'ils ont laissé leur satanée aura dans les pierres mêmes du château, un mois qu'ils sont en manque de bouffe, d'eau, de bandages et surtout, de baguettes. D'effectifs, parce que des baguettes, oh, ils en ont des tonnes, à cause de tous ces morts.
Mais des gens pour les tenir? Il n'y en a pas assez. Et Elijah sait que s'il demande son avis au Conseil, ils lui diront sans doute d'attendre, qu'ils ne peuvent être sûrs de rien, et surtout de personne, pas en ce moment. Mais Elijah fait confiance à son instinct de semi-loup, son instinct de loup tout court. Alix Blackwood, lui a-t-on dit qu'il s'appelait, les suivra ou mourra. Il n'y a pas de Rohan pour lui sauver la mise, et pas d'Édouard pour avoir son dernier mot sur ce qui se passe à Storm's End; pour tout ce qu'Elijah sait, ils sont sans doute déjà morts dans la boue sanglante de Pré-Au-Lard, et cette pensée lui est insupportable. Il ouvre la porte du cottage d'un coup d'épaule. Il voit le voyant — Sam, s'appelle-t-il, s'il se souvient bien, et il le salue d'un petit mouvement de la tête. Il n'a pas besoin de lui, alors il l'ignore, préférant se rendre directement au garage.

La dernière fois qu'il est allé à Storm's End, c'était en catastrophe, pour la petite Ginevra Weasley. Enfin, petite... disons qu'elle a bien grandi. La dernière fois qu'il l'a vue, c'était le lendemain de la pleine lune, sa première. Fatiguée mais pas détruite. Endommagée mais pas brisée.
La dernière fois qu'il est allé à Storm's End, ça puait le sang et le désespoir; maintenant, ça sent juste le renfermé et le chien mal lavé. “ Alix Blackwood? ” demande-t-il simplement à la silhouette sous sa couverture dans un coin du garage. La porte du garage est à moitié ouverte, laisse échapper un peu d'air et un peu de lumière aussi; Elijah discerne mal les traits de Blackwood, mais il sent sa présence comme si il pouvait voir dans le noir. Un loup et un semi-loup. Mais il n'a pas la même odeur que la plupart des loups qu'il connait; son odeur à lui hurle étranger, intrus, ennemi. Elijah allume la lumière électrique. “ Lève-toi. Je vais pas y aller par quatre chemins. J'ai besoin de toi. ” Il croise ses bras sur sa poitrine, ne bougeant pas de l'autre côté de la voiture, gardant une distance et un objet entre lui et un loup qu'on lui a prétendu dangereux et instable. “ Tu es venu ici pour nous aider, n'est-ce pas? Tu ne dois pas ignorer qu'une bataille est en train de se dérouler à Pré-au-Lard, près de Poudlard. On a besoin de baguettes, on a besoin de toi. Tu veux te battre pour la résistance? C'est ton unique chance. Sinon, on te redonne à ta meute. On n'a pas besoin de lâches et de bouches à nourrir. ” En gros, tu te bats ou tu crèves. Et il crèvera sûrement, mais Elijah a l'espoir qu'il le fera en emportant avec lui quelques vies de Mangemorts; de toutes façons, il faut qu'ils lui laissent sa chance, non? Il se demande si le voyant savait qu'il allait venir, si il a prévenu Alix. Il se demande quelle va être sa décision. Il se demande aussi si il devrait pas prendre le voyant sous son bras aussi pour l'emmener, quitte à l'offrir en sacrifice aux Détraqueurs. C'est pas un comportement de Pacifiste, c'est pas un comportement d'Elijah non plus; mais il a l'impression qu'il a perdu un peu de qui il était quand l'annonce de son frère mort est tombée.
C'est la Guerre maintenant, et elle doit se finir, avant qu'il ne perde quelqu'un d'autre.

Ça faisait deux mois qu'il se trouvait à Storm's End. Enfin, "storm's end", c'était un bien grand mot... Disons plutôt qu'il était coincé dans le garage qui était devenu sa chambre. De temps en temps, il voyait Samaël qui s'occupait de lui ramener à manger tout en essayant de lui poser des questions sur son passé et ce qu'il était afin de comprendre pourquoi il rêvait de lui. Parfois, Rohan et Edouard venait jeter à coup d’œil, voulant sûrement vérifier qu'il restait bien sage dans sa "chambre". Mais, en grande majorité du temps, il était seul. Il se faisait l'impression d'être un chien qui avait fait une connerie et qui avait été renvoyé de sa niche pour avoir fait une connerie. Un petit rire cynique échappa à Alix et il remit la couverture un peu mieux sur ses épaules. Ses pensées valdinguaient un peu partout, passant de Rohan qui lui en voulait, Samaël qui était un peu trop curieux et Edouard qui n'avait pas l'air de le porter dans son cœur sans que le jeune homme ne sache pourquoi. Il se savait une menace pour chacun d'eux d'une certaine manière : après tout, il était un membre de la meute Thurisaz mais Rohan aussi l'était. Alors pourquoi ne pouvaient-ils pas lui laissé le bénéfice du doute ? Il savait qu'ils étaient en guerre mais merde ! Ils ne devaient pas pour autant oublier qu'ils étaient humains. Chaque personne qui arrivait dans la résistance n'était pas pour autant une menace. Lui aussi avait souffert à cause de cette meute... qui était sensé être sa meute. Tous ses membres étaient sensés prendre soin de lui, le soutenir et surtout l'accompagner dans ce voyage qu'était la lycanthropie. Ils devaient être une nouvelle famille. Mais ils n'avaient rien était de tout ça... Ils avaient juste été ses bourreaux. Alix retint difficilement un sanglot face à ses pensées et son loup, pour la première fois, gémit de tristesse. Le jeune homme put le sentir se blottir contre lui à l'intérieur, essayant de le réconforter à sa manière. Il eut un bref sourire et se blottit dans cette sensation de chaleur que lui amenait son alter ego. Il préféra en profiter tant que ça durait : son loup était tellement imprévisible et incontrôlable.

Un bruit derrière lui le fit se retourner et une voix s'éleva. “ Alix Blackwood? ” Alix se retourna d'un coup, observant l'homme qui était devant lui. Depuis sa rencontre avec Susan, il avait réussi à contrôler un peu mieux les réactions de son loup face aux allers et venus dans le garage. Il ne se jetait plus à la gorge des personnes qui entraient - dieu merci - mais les grognements restaient toujours une première réponse face aux inconnus. L'homme avait laissé la porte ouverte, laissant entrer un air frais et de la lumière mais ça ne permit pas au Blackwood de discerner ses traits, étant en contre-jour. Cependant, son odorat se réveilla inspirant une grande bouffée de la senteur de l'inconnu. Un seul mot popa dans son esprit : semi-loup. Il en avait rencontré peu : ils étaient mal accepté par Morgana donc elle faisait tout pour ne pas les côtoyer - et Alix aussi de ce fait. Elle les considérait comme des êtres inférieurs : pire que des sorciers normaux, ils n'étaient ni humain, ni loup et ça lui faisait toujours montrer les dents quand elle en croisait un. Lui, n'avait pas hérité ce réflexe de sa créatrice. Mais son loup, lui, se mit aux aguets attendant la suite des paroles de l'homme qui alluma la lumière d'un coup. Alix ferma les yeux adaptant doucement sa vue. “ Lève-toi. Je vais pas y aller par quatre chemins. J'ai besoin de toi. ” Il croisa les bras sur sa poitrine et Alix pencha la tête sur le côté. Quelque chose clochait. Puis, il comprit en voyant que son vis-à-vis ne bougeait pas de sa position : l'homme voulait garder quelque chose entre eux au cas où il pèterait les plombs. Sa mésaventure avec Susan et Samaël avait dû fuiter... Susan ? Non, sûrement pas. Elle l'aurait défendu becs et ongles, il le savait. Samaël ? Peut-être... Après tout, que savait-il de lui à part qu'il rêvait de choses qui le concernaient ? Rien. La réponse était là, claire et nette, : rien du tout. Ça devait être lui... Ou Rohan, ou même Edouard. Il sentait bien que ces deux derniers ne pouvaient pas le voir en peinture. Enfin, Rohan ne pouvait pas tandis qu'Edouard... C'était plus "subtile" dans le sens où il ne le considérait pas : il n'était presque qu'un insecte sur son chemin.

La voix de l'homme se fit entendre à nouveau et son attention se concentra sur lui.  “ Tu es venu ici pour nous aider, n'est-ce pas? Tu ne dois pas ignorer qu'une bataille est en train de se dérouler à Pré-au-Lard, près de Poudlard. On a besoin de baguettes, on a besoin de toi. Tu veux te battre pour la résistance? C'est ton unique chance. Sinon, on te redonne à ta meute. On n'a pas besoin de lâches et de bouches à nourrir. ” Bon, au moins, c'était clair. Soit il se battait, soit il retournait en enfer. C'était bizarre... Il ne pensait pas qu'ils lui laisseraient l'occasion de se battre : pas avant qu'il ait fait ses preuves du moins. Mais sûrement pensaient-ils qu'il mourrait rapidement... Son loup grogna à cette pensée : ils ne mourraient pas tous les deux. Ils étaient forts ! Bien plus qu'ils ne pouvaient l'imaginer. Ils étaient des combattants, prêt à se défendre becs et ongles pour le droit de vivre, le droit d'exister ! Alix secoua la tête essayant d'échapper aux idées parasites et violentes de son alter ego. Il connaissait son envie de se reconnaissance, son envie de combat mais surtout son envie de sang pour ceux qui les avaient abandonnés, battus. Enlevant la couverture de ses épaules, il se leva et seulement maintenant, il remarqua les marques en forme de demi-lune que ses ongles avait laissé sur ses biceps. Il ferma les yeux, intimant à son loup de calmer ses envies meurtrières avec succès. Il observa l'homme quelques instants. Il était beau - tout du moins, aurait-il pu l'être s'il n'avait pas eu une expression si dur sur le visage. Alix pouvait voir à travers : il avait souffert. Il y avait eu des pertes et l'homme en face de lui avait été concerné par celles-ci, c'était une certitude. Mais n'était-ce pas le lot de tout le monde durant une guerre ? Il pencha la tête sur le côté, réfléchissant. Pouvait-il lui faire confiance ? Vu son visage peu amène, la réponse était non. Cependant, avait-il le choix ? Non, encore. Il s'approcha de son vis-à-vis, posant ses mains sur la carrosserie de la voiture mais laissant toujours l'objet entre eux afin de ne pas rendre l'homme nerveux. “ Qui êtes vous ? ” Il aurait peut-être dû demander ça plus rapidement. Il avait l'impression d'être stupide à cet instant, à le fixer avec juste cette question aux lèvres. Il se redressa, mal à l'aise et commençant à triturer cette maudite bague à son doigt. “ Je ne souhaite pas être un poids pour vous. Au contraire, je voulais juste vous aider. ” Il releva un pauvre regard vers l'homme, le plongeant dans le sien. Devrait-il toujours s'expliquer ? Expliquer ses actions ? Peut-être pendant un temps. “ Je suis venu pour vous prévenir de l'attaque. Mon attention n'a jamais été que quelqu'un soit blessé. ” Il se sentait responsable pour ces morts, pour ces gens qui avaient reçu des sorts. S'il avait été plus rapide, s'il avait pris sa décision de partir plus tôt, peut-être qu'il aurait pu les aider. “ Je ne veux pas être un poids. Qu'est-ce que je dois faire pour vous le prouver ? ” Il avait attendu, dans ce vulgaire garage que quelqu'un vienne pour lui parler et le moment était enfin arrivé mais il avait toujours cru que ce serait Rohan ou ce Edouard qui serait venu pour lui dire de s'en aller ou pour le donner aux mains des Thurisaz. Il ne s'attendait pas à ça. Mais il était prêt à faire ses preuves, à montrer qu'il était là pour aider et non un vulgaire espion. Alors, il resta là, ses doigts triturant toujours cette bague que ses parents lui avaient offert lors de sa remise de diplôme, seul vestige de sa vie passée. Qu'allait-il lui arriver ?

Elijah se rend compte qu'il est dur. Injuste, même. Mais il faut être dur et injuste, même en temps de Guerre, surtout en temps de Guerre. Et évidemment, c'est cruel et froid, de recruter un gars juste parce qu'on a besoin de poings et de baguettes en pensant précisément qu'il va pas tarder à crever; mais Elijah ne pense pas à ça tout de suite. À vrai dire, il pense à Susan, qui lui dirait forcément que c'est une mauvaise idée et que surtout, c'est surprenant de sa part. Faut dire que même Elijah ne se reconnait pas, ainsi. La perte de Peter, son frère cadet, est difficile. Ça fait plusieurs semaines maintenant et... et Elijah a encore l'impression qu'on vient de lui annoncer et qu'il attend la chute de la blague.
Alix Blackwood se lève, s'approche, et Elijah reste dans l'encadrement de la porte sans bouger, l'observant en attendant qu'il dise quelque chose, réponde oui, pour qu'ils puissent transplaner vite fait bien fait à Poudlard pour aller rejoindre la Grande Salle. “ Qui êtes vous ? ” Ah. Oui. Il n'avait pas prévu de se présenter; après des années passées parmi les Insurgés, il a perdu l'habitude de rencontrer trop de nouvelles personnes. “ Inkfings, ” répond-t-il simplement, utilisant son surnom parmi les Insurgés plutôt qu'autre chose. “ Je suis un membre du Conseil de la Renaissance du Phénix, ” même si j'agis sans que le Conseil le sache; c'est le genre de détail qu'il n'a pas besoin de savoir. “ Je ne souhaite pas être un poids pour vous. Au contraire, je voulais juste vous aider. ” Bien malgré lui, Elijah pince des lèvres, se mord l'intérieur de la joue alors qu'il resserre l'entrelacs compliqué et nerveux de ses bras croisés sur sa poitrine. Juste les aider, hein? Qu'il aille dire ça à Ginny, ou à Longbottom. “ Je suis venu pour vous prévenir de l'attaque. Mon attention n'a jamais été que quelqu'un soit blessé. ” Elijah ne répond pas, parce qu'il se sent déjà en train de s'énerver. C'est peut-être son loup, ou sans doute le manque de sommeil cruel de ces derniers jours, ces dernières semaines: il se fait l'impression d'être un zombie, entre la vie et la mort.
Un peu comme tout le monde à Poudlard, finalement. “ Je ne veux pas être un poids, répète Blackwood. Qu'est-ce que je dois faire pour vous le prouver ? ” Au moins il est direct, et son intuition dit à Elijah qu'il est sincère. Tant mieux, le convaincre aurait pris trop de temps.

Alors il décroise les bras, lentement, et s'approche de la voiture, pose à son tour les mains sur le capote et se penche vers lui pour l'observer — vraiment l'observer, les yeux trop bleus, les cheveux trop longs, la barbe naissante. “ Passer un Serment Inviolable. Tu sais ce que c'est? ” demande-t-il en sortant sa baguette d'un mouvement fluide, faisant craquer son poignet en le détendant. “ Tu dois le savoir mais très simplement, tu fais le Serment de faire quelque chose — ou de ne pas le faire. Si tu ne respectes pas ta parole, tu meurs. ” Il sort une deuxième baguette de sa manche, en grimaçant à cause du toucher pas du tout familier, limite désagréable. Celle de Blackwood, qu'il dépose entre eux sur le capot de la voiture, comme un ultimatum — ou une offrande, une porte vers sa confiance peut-être. “ Je- Nous avons décidé de prendre le risque de te redonner ta baguette si tu acceptes. Les clauses du Serment seraient les suivantes: (il s'éclaircit la gorge, ça s'entend qu'il a révisé son texte; après tout, un Serment est un contrat, et la moindre formulation est importante) t'engages-tu à aller sur le champ de bataille de Pré-Au-Lard te battre pour la Renaissance du Phénix? T'engages-tu à ne pas attaquer, et défendre, quiconque de la Renaissance du Phénix? T'engages-tu à ne pas contacter ton ancienne meute, ou de faire quoique ce soit pouvant l'aider à atteindre ses objectifs? T'engages-tu à obéir aux ordres du Conseil que je représente?  ” Il l'observe un instant, baisse un oeil sur sa monter. “ L'Enchaîneur sera Édouard Douglas, tu l'as déjà rencontré. Il ne devrait pas tarder. ” Il lui adresse un petit sourire, un peu sec. “ Alors? ”

Alix le vit décroiser les bras et s'approcher de la voiture avant de poser à son tour les mains sur le capot. Le jeune homme sentit la nervosité le gagner alors que son vis-à-vis se penchait en avant pour l'observer d'un œil critique. Il n'aimait définitivement pas ça. Il avait l'impression que son regard fouillait son âme, voyant ses failles et tous ses secrets. Utilisait-il la magie pour voir à travers lui ? Sûrement pas. Il l'aurait senti. Il n'avait pas perdu toutes ses instincts de sorcier, n'est-ce pas ? Il le saurait automatiquement si quelqu'un était entrain de fouiller sa cervelle. Il prit une grande inspiration alors que ses doigts continuaient de triturer cette foutue bague qui le ramenait sans cesses à ses pensées moroses. D'un geste vif, il croisa les bras essayant de concentrer son attention sur le discours de l'homme, ce Inkfings - un alias sûrement - qui se disait membre du conseil. Pouvait-il le croire sur parole ? Il eut un moment de pause alors qu'une phrase popait dans son cerveau : avait-il vraiment le choix ? L'avait-il un jour eu ? Il poussa un soupir et observa à son tour le brun qui reprit la parole. “ Passer un Serment Inviolable. Tu sais ce que c'est? ” Il sortit sa baguette d'un mouvement fluide tout en faisant craquer son poignet. Alix fronça les sourcils, incertain. Était-il sérieux ? C'était le plus grand engagement qu'un sorcier pouvait faire envers un autre. Il ne pourrait aller contre les ordres qu'il - ils ? - lui donnerait. “ Tu dois le savoir mais très simplement, tu fais le Serment de faire quelque chose — ou de ne pas le faire. Si tu ne respectes pas ta parole, tu meurs. ” Ses mains se refermèrent sur ses biceps alors qu'il fermait les yeux. Il sentit les larmes affluer au niveau de ses yeux. Ça recommençait... Il avait été le chien de la meute, un moins que rien, un lâche, un insecte... Et c'était à nouveau le cas dans son nouveau groupe. Était-il donc destiné à toujours être au bout de la chaîne alimentaire ? Il ne savait pas s'il pouvait... Il ne savait pas s'il était encore capable de vivre ça. Il prit une grand inspiration et rouvrit ses yeux, chassant d'un battement de paupières les larmes traitresses. De toute façon, c'était ça ou mourir, non ? Il était clair dans le regard de son vis-à-vis que s'il n'acceptait pas : la mort lui était assurée. Mourir tout de suite ou plus tard ? Choix cornélien mais évident. Mais que devait-il faire dans ce cas ?

Inkfings sortit sa baguette en grimaçant et le coeur d'Alix s'accéléra d'un coup. Sa baguette, c'était sa baguette. Quand l'homme la déposa sur le capot, il se jeta dessus presque avidement. Il la caressa du bout des doigts dans des gestes tremblants. C'était peut-être bête mais il avait vraiment l'impression de la retrouver maintenant. Il l'avait toujours possédé durant son séjour à Thurisaz mais jamais Morgana ne l'avait autorisé à la garder alors à l'utiliser ? Jamais. Elle se faisait un malin plaisir à l'utiliser contre lui pour lui balancer des sorts de son cru. Un soupir de soulagement le gagna et il ignora superbement le grognement de son alter ego. Peu importe ce que ce dernier pensait : il était peut-être un loup garou mais il était avant tout un sorcier. Il la prit en main, la soupesant pour savoir si c'était bien la sienne mais il ne pouvait nier cette impression de bonheur, presque de sérénité en sentant la baguette au creux de sa paume. Il avait le sentiment d'avoir retrouvé un membre qu'il avait perdu. Premier sentiment positif depuis des semaines. Il jeta un regard à Inkfings et le remercia d'un sourire bref. Il savait que ce n'était que pour lui permettre de mettre en place le sortilège mais peu importait : il avait retrouvé sa baguette. “ Je- Nous- ” Alix remarqua l'erreur et tiqua mais il ne préféra pas relever. Il était un membre du Conseil après tout et parlait au nom de tous. “ -avons décidé de prendre le risque de te redonner ta baguette si tu acceptes. Les clauses du Serment seraient les suivantes: Il s’éclaircit la gorge et Alix se concentra sur chaque mots, chaque intonations, chaque détail que l'homme allait lui dire. Chaque terme du contrat avait son importance, il le savait bien. C'était un serment inviolable, pas n'importe quel contrat sans importance. Il mettait littéralement sa vie en jeu. t'engages-tu à aller sur le champ de bataille de Pré-Au-Lard te battre pour la Renaissance du Phénix? T'engages-tu à ne pas attaquer, et défendre, quiconque de la Renaissance du Phénix? T'engages-tu à ne pas contacter ton ancienne meute, ou de faire quoique ce soit pouvant l'aider à atteindre ses objectifs? T'engages-tu à obéir aux ordres du Conseil que je représente?  ” Alix grimaça. Il n'avait pas vraiment envie d'être le petit tout du Conseil, franchement. Mais ils étaient sensés être les "gentils", non ? Ils n'en profiteraient certainement pas. Mais quand il voyait le comportement de l'homme en face de lui, il n'en était même plus sûr... Pour ce qui était de sa meute : il ne s'était pas enfui pour revenir auprès d'eux et se faire tuer comme un chien. Pas question.

Inkfings l'observa et baissa un oeil sur sa montre. “ L'Enchaîneur sera Édouard Douglas, tu l'as déjà rencontré. Il ne devrait pas tarder. ” Alix grimaça. Oui, il l'avait rencontré et il savait très bien que le brun ne l'appréciait pas, pour il ne savait quelle raison. Au moins quand il était dans la meute, il savait pourquoi les autres le haïssaient. Ici, il était dans un état constant de brouillard : il ignorait ce qui allait lui arriver, pourquoi les autres le détestaient, quand on allait venir le chercher pour le tuer ou autre choses... Le sourire sec ne l'homme ne le rassura pas, bien au contraire mais il préféra se concentrer sur la décision qu'il avait à prendre. “ Alors? ” Le Blackwood l'observa quelques instants alors que sa baguette roulait entre ses doigts avant de resserrer sa prise autour. Il eut un petit bref, ironique et presque... triste. Il plongea son regard torturé dans celui de l'homme et prit la parole d'une voix fatigué, presque blasé tandis que son loup continuait à grogner doucement. Il restait tranquille. Pour l'instant. “ Ai-je vraiment le choix ? Vous me faîtes une proposition qui n'en est pas une... Mourir maintenant sous le coup de vos sortilèges ou au mains des membres de la meute Thurisaz ? Ou bien mourir plus tard durant l'un des combats de la résistance ? ” Il passa sa main dans ses cheveux, essayant de les remettre en place mais en vain. Ils étaient ordonnés, sans présence de nœuds depuis que Susan lui avait une réflexion sur l'état de sa chevelure. Quand il était dans la meute, il n'avait pas eu besoin de se préoccuper de tout ça. Mais il avait fait un effort pour la jeune femme. Il se souvenait du sourire doux, compatissant de la médicomage. Ça lui réchauffait le cœur, lui permettant de marcher un pas après l'autre. Il y avait au moins une personne dans son entourage qui était là pour lui... Il secoua la tête et tourna à nouveau son attention sur Inkfings. “ Je n'ai aucune objection avec toutes les conditions du Serment mais... ” Il eut un moment d'hésitation fronça les sourcils et prit son courage à deux mains. “ Suis-je vraiment obligé d'obéir à tous les ordres du Conseil ? Comment savoir que vous n'allez pas abuser de votre pouvoir, que ce soit vous ou l'un des autres membres ? ” Il garda ses mains le long de son corps, montrant qu'il n'était pas un danger pour lui et qu'il ne voulait pas se rebeller face à ses paroles. Mais les conditions du Serment lui paraissaient... "extrêmes". “ Je sais que vous ne me faîtes pas confiance, ce qui est légitime, mais comment savoir que vous n'utiliserez pas ce pouvoir contre moi ? ” Comme l'avait fait la meute. Comme l'avait fait Morgana... voulut-il rajouter mais il se tut, les sourcils froncés et des frissons parcourant son corps aux souvenirs des tortures de sa créatrice. Ce sortilège ne pouvait être brisé que par la mort de l'une des personnes et il savait très bien que ce serait la sienne qui le finirait. Il lui suffisait d'un seul faux pas, une simple petite erreur et il était mort. Au final, sa vie ne sera toujours qu'une succession de choix pour survivre et non pour vivre. Il grogna alors que son loup commençait à se battre à l'intérieur de lui - rien de grave pour l'instant mais il devait le contrôler. Comment pourrait-il faire croire qu'il était de leur côté si son alter ego se permettait de sortir à tout bout de champ ? Il plongea son regard dans celui de son vis-à-vis, essayant de voir si un minimum de confiance était possible mais il se voilait la face : il n'y aurait sûrement jamais de confiance entre eux. Il soupesa le poids de sa baguette, le contact le rassurant plus qu'il ne l'aurait pensé. “ Si je choisis de me battre pour vous mais de ne pas faire de Serment, me laisserez-vous rester ? ” Il en doutait mais il voulait que Inkfings lui disent clairement. “ Je n'ai jamais aimé ma meute... Je n'ai aucun souvenir heureux avec eux. ” Il laissa un petit blanc s'installer, se replongeant dans sa mémoire. “ Je ne veux pas vous attendrir en vous disant tout ça, je veux simplement que vous compreniez que je n'ai aucune intention de retourner auprès d'eux. Je peux même vous laisser fouiller dans ma tête, s'il le faut mais pourquoi en venir à un Serment inviolable ? ” Il voulait sincèrement savoir, comprendre pourquoi. Il n'était pas stupide et savait qu'ils se méfiaient de lui mais le fait de fouiller ses souvenirs les aideraient sûrement à mieux comprendre ce qu'il avait voulu faire...

Le regarder jouer avec la baguette le rend un peu nerveux, peut-être que donner un artefact magique potentiellement létal à un individu à l'air un peu instable et réputé étrange n'est pas une bonne idée et peut-être, qu'effectivement, il aurait dû consulter le reste du Conseil... mais d'un autre côte, aux grands maux les grands moyens, n'est-ce pas? Elijah est bon pour masquer ses émotions et il ne laisse rien filtrer, l'observe avec froideur et dureté, le sourire s'évanouissant rapidement de ses lèvres pour le toiser d'un air attentif et impatient, curieux aussi de sa décision et de ce qu'il va lui répondre. La manière qu'il a de jouer avec sa baguette lui semble nerveuse; il note ça dans un coin de son esprit. Il va sans doute tenter de négocier...? “ Ai-je vraiment le choix ? Vous me faîtes une proposition qui n'en est pas une... Mourir maintenant sous le coup de vos sortilèges ou au mains des membres de la meute Thurisaz ? Ou bien mourir plus tard durant l'un des combats de la résistance ? ” Il reste silencieux, il hausse les épaules imperceptiblement, quelques millimètres à peine, montrant bien à quel point il se fiche complètement de l'aspect cornélien du choix. Pour lui, ça lui semble plutôt simple. Soit se livrer à une mort certain, soit se donner une chance, rare mais éventuelle, de survivre.
Et n'est-ce pas la survie qui les motive tous? “ Je n'ai aucune objection avec toutes les conditions du Serment mais... ” Elijah attend, contrôle son visage. Il aimerait arquer le sourcil, lui accorder un sourire ironique, l'air de dire: tu penses que tu as la possibilité de poser tes conditions? Mais il ne laisse rien passer, reste impavide et impassible, sentencieusement silencieux. “ Suis-je vraiment obligé d'obéir à tous les ordres du Conseil ? Comment savoir que vous n'allez pas abuser de votre pouvoir, que ce soit vous ou l'un des autres membres ? ”

Elijah essaie de ne pas tiquer, mais il cille; comme d'habitude quand il est gêné, mal à l'aise, ou pris de court, il détourne les yeux un instant, vers le sol, vers la gauche, alors que ses sourcils se froncent légèrement; mais bientôt le masque impavide remonte sur ses traits et il replonge son regard froid dans celui d'Alix. Il comprend bien le doute du loup-garou, mais il ne peut aussi pas lui révéler que le reste du Conseil ignore tout de ses manigances. Susan sera sans doute la première à l'apprendre, elle est apparemment proche du jeune homme; elle lui pardonnera, hein?
Il est plus du genre à s'excuser qu'à demander la permission. “ Je sais que vous ne me faîtes pas confiance, ce qui est légitime, mais comment savoir que vous n'utiliserez pas ce pouvoir contre moi ? ” Cette fois, il ne parvient pas à réprimer le sourire ironique, qui veut clairement dire: vous ne le savez pas. “ I find your lack of faith disturbing, ” dit-il, faisant référence à un de ses films favoris (il fait d'ailleurs souvent cette référence, devant les yeux abasourdis de ses camarades et amis. Tout le monde n'a pas vu Star Wars dans le monde sorcier, ce qui lui semble absolument horrible et triste, comme existence). “ Si je choisis de me battre pour vous mais de ne pas faire de Serment, me laisserez-vous rester ? — Non. ” Pas besoin de se leurrer à propos de ça. “ Je n'ai jamais aimé ma meute... Je n'ai aucun souvenir heureux avec eux. Je ne veux pas vous attendrir en vous disant tout ça, je veux simplement que vous compreniez que je n'ai aucune intention de retourner auprès d'eux. ” Il a raison de ne pas attendre de la compassion de la part d'Elijah: même si il n'était clairement pas le genre à ignorer les douleurs des autres, il avait une guerre à gagner, ils avaient tous une guerre à gagner. Il s'excuserait en temps et en heure, mais pas maintenant.

Ils n'avait pas le temps.  “ Je peux même vous laisser fouiller dans ma tête, s'il le faut mais pourquoi en venir à un Serment inviolable ? — Parce que je ne te fais pas confiance, ” répond-t-il aussitôt, haussant les épaules. “ Soit tu acceptes de battre pour nous, avec nous, soit nous te rendons à ta meute. Et tu ne veux pas de ça, n'est-ce pas? ” Il a l'air si raisonnable. Si intelligemment raisonnable. “ Personne ne veut de ça. Tiens, nous pouvons rajouter une clause au contrat, si tu veux. ” Il a l'air embêté, Elijah, croise les bras dans son dos et se met à arpenter la pièce sans vraiment plus faire attention à Blackwood. “ Le Conseil s'engage à ne pas abuser de ses pouvoirs sur toi, établis grâce au Serment, formule-t-il rapidement, font color=olive>et à ne plus jamais rien demander de toi à la fin de la Bataille. Les ordres ne seront que des directives stratégiques et militaires. Rien d'autre. ”
Il reporte son regard sur Blackwood. “ Je mets ma vie sur la ligne aussi, Alix. Je ne prends pas ce Serment à la légère. Je ne te veux aucun mal et le Conseil non plus. Ils m'ont envoyé parce que je suis un loup, comme toi — un semi-loup, certes... et je ne veux pas dire que nous serons ta nouvelle meute. Mais contrairement à ton ancienne meute, nous te protégerons, nous te soignerons, nous te donnerons à manger et nous t'aiderons, à la fin de la Guerre. Ce n'est pas un lien unilatéral, Alix. Non-réciproque. C'est un engagement entre le Conseil, et toi. ” Il lui tend la main. “ Je comprendrais que tu n'acceptes pas, toutefois, ” dit-il avec une fausse sympathie.