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2000. Comme tous les jours, Bonnie rentrait chez elle directement après le travail. Comme tous les jours, elle était épuisée de sa journée passée à ranger, à s'occuper de la paperasse et à assister à des audiences. Comme tous les jours, elle avait hâte de s'installer dans son canapé et de lire un peu avant de se faire à manger. Comme tous les jours, elle transplana pour atterrir devant la très moderne Bran Tower. Comme tous les jours, elle pénétra dans l'ascenseur. Et comme tous les jours, elle leva le doigt pour appuyer sur le bouton correspondant à son étage. Mais contrairement aux autres jours, son doigt se posa sur un autre chiffre.

Cela faisait plusieurs jours qu'elle y pensait, qu'elle cogitait, qu'elle retournait la question et pesait le pour et le contre. Plusieurs jours qu'elle avait véritablement mis un mot sur ce qu'elle ressentait. Était-ce parce qu'il s'était rapproché d'elle professionnellement et qu'elle le croisait désormais chaque jour ? Ou bien parce qu'elle était systématiquement jalouse des conquêtes avec lesquelles ils s'affichait ? Elle n'en savait rien, mais une chose était sûre, il l'obsédait. Ce n'était plus Paris qui hantait son esprit à présent. C'était son petit frère. Et elle était incapable de dire si c'était une bonne chose ou non. Caleb avait été amoureux d'elle pendant des années, exactement comme elle l'avait été de son aîné, sans aucune réciprocité. Parce que pour elle, c'était un gosse, elle l'avait toujours considéré comme tel et elle avait du mal à le voir comme un adulte. Ou plutôt, elle avait eu du mal… jusqu'à présent. À présent, il lui apparaissait comme un homme séduisant et elle était tout à fait capable de s'imaginer avec lui. Le problème, c'est que cela allait au-delà d'une simple attirance sexuelle. Tout aurait été merveilleux si cela s'était imposé à elle quelques années auparavant. Hélas, de l'eau avait coulé sous les ponts, et elle doutait qu'il ait conservé ses sentiments intacts aujourd'hui. Et quand bien même ce fût le cas, il trouverait certainement ça un peu trop facile. À moins de ne rien lui dire. Pas tout de suite en tout cas. De tâter le terrain. Tâter le terrain, elle le faisait depuis un petit moment par ailleurs. Leur relation était plutôt cordiale, elle ne le sentait pas réticent aux avances subtiles qu'elle pouvait lui faire, mais cela ne signifiait pas pour autant qu'il était prêt à aller plus loin.

Arrivée devant la porte du jeune homme, elle hésita encore. Un instant. Avant de frapper. Si rien ne se passait comme elle l'espérait, s'il la rejetait, même violemment, ce ne serait que justice après tout. Il lui rendrait la monnaie de sa pièce. Elle avait d'ailleurs un pincement au cœur, une grande amertume quand elle repensait au moment où il lui avait avoué ses sentiments. Elle avait été idiote de s'accrocher à Paris. Hélas, on ne choisit pas ses sentiments. Mais en y repensant, elle se disait parfois que si elle lui avait donné une chance, ces sentiments seraient peut-être venus après. Caleb avait tout autant de qualités que son frère, sinon plus. La porte s'ouvrit sur celui qui ne cessait d'occuper ses pensées, et elle resta bouche-bée de l'avoir ainsi devant elle, se rendant compte qu'elle n'était pas si prête que ça. Fort heureusement, elle était douée pour cacher ses émotions. Elle se fendit d'un sourire légèrement pincé, mais sincère. « Bonsoir Caleb… Ça fait quelques temps qu'on se croise au travail mais on n'a pas encore eu l'occasion de discuter tous les deux… Je voulais te féliciter pour ton nouvel emploi et prendre un peu de tes nouvelles… J'espère que ça ne te dérange pas. »

Elle jeta un œil au-dessus de son épaule pour vérifier qu'il était bien seul, et pas en compagnie d'une quelconque conquête, avant de reporter son regard sur lui, un regard pénétrant. Bien malgré elle, ses yeux dévièrent sur son torse et elle s'efforça de stopper leur progression. Ce n'était pas pour ça qu'elle était là. Enfin, pas seulement. Elle ne savait pas vraiment ce qui était le mieux, au fond. Elle ne savait pas ce qu'elle avait l'intention de faire. Elle n'avait rien préparé, elle était venue ici au feeling, guidée par son instinct. « Est-ce que je peux entrer ? » s'enquit-elle en arquant un sourcil, ses lèvres toujours étirées en un sourire presque timide. Il était certain qu'elle ne ferait jamais preuve de froideur avec lui comme elle le faisait avec les autres. Il avait toujours été important à ses yeux, et ce même à l'époque de Poudlard. Et même si c'était à cause de lui qu'elle était véritablement devenu distante et antipathique envers le commun des mortels, elle n'avait jamais oublié son affection pour lui.


Dernière édition par Bonnie B. Rowle le Mer 20 Jan 2016 - 20:25, édité 1 fois
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Caleb était rentré du travail et n'attendait plus personne à cette heure. Il avait très récemment accédé à son poste au commerce international et trouvait ce travail très satisfaisant malgré les difficultés que mettaient certains pays à échanger avec eux à cause de la situation de plus en plus précaire du pays. Caleb adorait la communication et le contact avec autrui. Il adorait les sourires jaunes, les poignées de main scellant symboliquement des accords et adorait les négociations serrées.

Il était donc là, légèrement affalé sur son canapé, s'étant débarrassé de ses robes de sorciers habillées qui lui servait d'uniforme de travail et n'avait gardé qu'un pantalon et une chemise, bien plus décontracté désormais, lorsque des coups furent frappés à sa porte. Il ne savait pas qui venait le déranger à cette heure-là, mais il n'aurait pas le plaisir de le voir sur son trente et un. Un léger passage devant un miroir pour se recoiffer malgré tout et il alla ouvrir la porte.

Il y eut un léger temps de flottement lorsqu'il vit qui se tenait devant elle, regrettant subitement de ne pas être en permanence dans ses vêtements les plus distingués avec un verre de whisky pur feu dans les mains, puis il se rappela qu'elle l'avait déjà vu dans son pyjama lorsqu'ils étaient à Poudlard et se contenta donc de lui sourire lorsqu'elle commença à parler. Il ne s'attendait pas à une visite de la magnifique Bonnie Rowle à cette heure-ci. Surtout qu'elle n'était pas du genre à rendre visite à un homme seul dans son appartement...

-Bien sûr, entre ! Ne t'inquiète pas, tu me déranges pas, je ne sors pas ce soir. D'ailleurs comme tu le vois tu me prends un peu au dépourvu.

Il eut un rire léger, signifiant que ça n'avait aucune véritable importance et s'écarta pour la laisser entrer chez lui. Cet appartement aussi était neuf, il venait tout juste d'emménager et la pendaison de crémaillère qu'il y avait fait avait bien entendu faire suffisamment de bruit pour réveiller tout ceux qui n'étaient pas invité. Ou bien ils auraient pu si les sortilèges d'insonorisation n'étaient pas aussi efficaces.

-Laisse moi te débarrasser de ta cape.

Il ferma la porte et posa ses mains sur ses épaules, sans doute un peu familièrement, pour lui ôter sa cape et l'accrocher d'un coup de baguette sur un cintre qui rejoignit son placard. Il se dirigea ensuite vers son salon d'un pas souple, l'invitant à le suivre et désignant son canapé sans perdre son sourire.

-Je t'en prie, installe toi. Tu veux boire quelque chose ? De l'alcool ? De l'eau ? Du jus ?

Il allait déjà vers sa cuisine pour sortir des verres, en hôte parfait, regrettant de ne pas avoir pu emporter l'elfe de sa famille pour le servir. Il pourrait l'appeler, mais il ne souhaitait pas priver ses parents de leur serviteur.

Caleb n'était plus le jeune homme légèrement brutal et pataud qui avait confessé ses sentiments à Bonnie des années plus tôt. Il avait grandit, s'était affirmé par lui-même parmi ses paires et avait cessé de vouloir à tout prix être comme son frère. Cependant, si une chose n'avait pas changé, c'était cette attirance persistante qui ne souhaitait pas s'envoler, comme un maléfice de glu perpétuelle dans son corps qui le poussait à vouloir que la jeune femme le remarque, qu'elle se rende compte qu'il n'était effectivement plus le même qu'avant et qu'elle comprenne l'erreur qu'elle avait fait en le repoussant à ce moment-là.
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Elle poussa un léger soupir de soulagement quand il l'invita chaleureusement à entrer. Ce qu'elle aimait avec Caleb, c'était qu'ils avaient toujours gardé une certaine complicité, et qu'elle ne se sentait pas obligée de jouer un rôle avec lui. Mais le fait qu'il ne se sentît lui-même plus gêné face à elle laissait le doute s'insinuer en elle. S'il était aussi naturel à présent, c'était sans doute parce qu'il avait complètement tiré un trait sur elle, parce qu'il n'avait plus aucun autre sentiment à son égard qu'une simple amitié. Mais elle ne pouvait pas lui en vouloir pour ça, non. Elle l'avait rejeté, c'était normal qu'il passe à autre chose. Elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle. Ou plutôt, au mauvais timing. L'esprit de contradiction peut-être. Il fallait toujours qu'elle cherche à obtenir ce qu'elle ne pouvait pas avoir, et qu'elle refuse ce qui s'offrait gracieusement à elle.

Elle s'exécuta donc, pénétrant à l'intérieur de l'appartement, et le laissa lui retirer sa cape. Encore une fois, les gestes qu'il avait pour elle étaient spontanés. Elle lui sourit en retour. « Merci », répondit-elle quand il lui proposa de s'asseoir. Elle s'installa dans son canapé, confortablement, se tournant sur le côté, posant son coude sur le dossier et pliant les jambes. Elle n'avait pas besoin d'être guindée avec lui, elle pouvait être elle-même. « Je prendrai la même chose que toi… si c'est alcoolisé. » Quoi qu'elle s'apprêtât à faire, elle avait bien besoin d'un verre. Elle le regarda faire sans manquer de le détailler de haut en bas pendant qu'il ne la regardait pas, la tête négligemment posée sur sa main. Non, il n'avait décidément plus rien d'un gosse, et ce même si elle continuait de le taquiner régulièrement à ce sujet. Une idée amusante lui vint d'ailleurs à ce sujet. « Oh mais attends, t'es pas un peu trop jeune pour boire de l'alcool toi ? » lui lança-t-elle avec un sourire goguenard. Il n'y avait rien à faire, elle avait beau l'avoir redécouvert, elle ne pouvait s'empêcher de l'asticoter. Mais ça faisait partie du jeu. C'était l'une des raisons pour lesquelles ils avaient une relation unique, complice. Sauf qu'elle l'avait bloqué dans la friendzone, et qu'elle n'avait pas envie de s'y retrouver à son tour.

Et tandis qu'il revenait vers elle, elle lui lança un regard mutin avant de porter la main à son chignon. « Ça t'ennuie que je me mette à l'aise ? » demanda-t-elle. « Je suis venue directement chez toi sans prendre le temps de me changer et je t'avoue que ma tenue de travail m'étouffe un peu. » Et pour cause, 8h d'affilée coincée dans un chemisier serré et boutonné jusqu'au menton, cela n'aidait pas beaucoup à respirer. En général, la première chose qu'elle faisait en rentrant chez elle, c'était se débarrasser de cette tenue qui l'enserrait. Mais il fallait bien qu'elle conserve son image de jeune fille psychorigide. D'ailleurs, elle avait beau être plus naturelle avec Caleb, il ne la connaissait pas totalement. Il la croyait certainement frigide, comme l'avait pensé Draco, comme l'imaginaient d'autres encore. C'était d'autant plus ironique qu'elle ne demandait qu'à lui prouver le contraire. Elle joignit donc le geste à la parole et détacha son chignon, secouant la tête pour faire tomber ses cheveux bruns en cascade sur ses épaules. Puis elle détacha les premiers boutons de son chemisier. Enfin, elle pouvait respirer un peu. Il ne lui restait plus qu'à se débarrasser de ses hauts talons, ce qu'elle fit prestement, avant de reporter son regard sur son hôte. « Alors, raconte-moi, comment ça se passe dans ton nouveau boulot ? » s'enquit-elle avec curiosité.
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Des envies d'alcool. Caleb arqua un sourcil qu'elle ne pu pas voir puisqu'il lui tournait le dos en cherchant dans ses placards de quoi la satisfaire. De l'alcool en soirée, seule à seule avec un homme mâture. Qui était-ce et qu'avait-elle fait de Bonnie Rowle ? Une douloureuse pensée lui rappela qu'elle devait sans doute le considérer uniquement comme un enfant encore et que c'était là la raison qui lui permettait de ne pas se sentir gênée de cette situation. La taquinerie qu'elle lui lança ensuite ne fit que confirmer son idée et Caleb songea qu'il était sans doute temps de la détromper à son sujet.

-Allons Bonnie, tu n'as pas reçu la nouvelle ? J'ai eu mes BUSEs l'an dernier, plaisanta-t-il.

Bien entendu il n'avait plus quinze ans, ça faisait un moment qu'il avait rendu ses parents fiers à force de bons résultats déjà. Il prit les verres dans ses mains, laissant la bouteille où elle était. Il ne souhaitait pas perdre le contrôle de lui-même ce soir. Sans compter qu'il ne pouvait pas poser des jours de congé n'importe quand et aller au travail avec une gueule de bois était hors de question dans sa branche. Allez essayer de conclure un marché avec une envie de vomir et une migraine.

-Fais comme tu veux, je serais bien hypocrite de le te le reprocher, répondit-il, toujours souriant.

Il la regarda défaire son chignon sans rien dire et son regard suivit ses doigts qui détachaient ses boutons avant de remonter vers ses yeux. Pour un peu il la prendrait pour quelqu'un d'autre. Il vint s'asseoir à côté d'elle, décontracté, puis lui tendit un verre avant de poser également son coude sur le dossier du canapé pour pouvoir mieux la regarder en lui parlant. Il fit un geste négligent de la main lorsqu'elle orienta la conversation sur son travail, bien que ce fut la raison de sa venue dans son appartement.

-Tu sais comment vont les relations internationales en ce moment... la CIMS n'est pas vraiment ravie de ce qui se passe ici et les autres pays sont méfiants vis-à-vis du changement de régime. Rien de bien étonnant. On fait ce qu'on peut pour garder la tête hors de l'eau.

Le commerce était important pour une île, ils ne pouvaient pas s'auto-suffire éternellement, certaines ressources viendraient à manquer, à moins qu'ils n'aillent en voler aux moldus. Cependant les moldus n'étaient pas de son ressort, seul le commerce comptait. Il eut un nouveau sourire, puis pencha la tête sur le côté.

-Est-ce que tu as vraiment envie de parler du Ministère alors qu'on vient de le quitter et qu'on le retrouvera, immanquablement, demain ?

Sauf si des Insurgés venaient le faire exploser, mais ce n'était sans doute pas pour demain. Ses yeux dévièrent à nouveau volontairement vers la chemise que Bonnie venait d'ouvrir. Il pourrait très bien se contrôler et ne jamais laisser son regard traîner autre part que sur le visage de son vis-à-vis, mais il avait décidé que puisqu'elle s'autorisait quelque relâchement, il pourrait tout aussi bien en profiter aussi.

-Je dois t'avouer que je suis surpris de te retrouver dans mon salon ce soir, avec un verre de Whisky pur feu dans les mains. Est-ce que je te manquais tant que ça ?

Il n'avait pas peur d'être présomptueux avec elle. Elle était assez grande pour le rappeler à l'ordre si jamais elle trouvait qu'il dépassait les bornes et la remarque ainsi que le ton innocent sur lequel il l'avait faite pouvait tout à fait passer pour une aimable taquinerie du même genre qu'elle lui avait fait tout à l'heure, mais démenti par le regard qu'il posait sur elle. Ce n'était pas le regard d'un enfant, ni le regard d'un adolescent en chaleur. Il la regardait comme un homme regarderait une femme qu'il trouve particulièrement attirante, ce qui avait toujours été le cas. Ce n'est pas parce que l'amour passe que l'attirance physique doit s'évaporer avec, n'est-ce pas ?
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Son verre de whisky pur-feu fraîchement servi dans la main, Bonnie s'efforça de l'écouter avec attention tandis qu'il parlait de son travail. Après tout, c'était pour ça qu'elle était venue… même si ce n'était qu'un prétexte. En réalité, elle n'était pas vraiment intéressée par ce qui se passait du côté du commerce international. Par chance, il éluda rapidement le sujet. Rassurée, elle sourit avec amusement. « Non, tu as raison, on aura tout le temps de parler travail… au travail. Mais je suis contente de voir que tu es impliqué », répondit-elle simplement. Elle put constater d'elle-même que ce n'était pas vraiment ce sujet qui intéressait le jeune homme ce soir. Le décolleté de son invitée semblait beaucoup plus attractif, et cette dernière s'en amusa intérieurement. Au moins, elle avait peut-être encore ses chances de ce côté-là, et elle s'en était déjà rendu compte quelques minutes plus tôt en déboutonnant légèrement son chemisier. Mais ce n'était pas vraiment ça qui l'inquiétait. Elle savait bien qu'il y avait peu de chance qu'il résiste si elle lui faisait des avances, mais elle n'avait pas envie d'être un simple coup d'un soir pour lui, et c'était ça, la partie la plus difficile dans l'histoire. Elle avait attiré son attention, bien. Maintenant, il fallait l'orienter dans le sens qu'elle voulait. Elle avait un avantage néanmoins. Il ne la voyait sans doute pas comme une croqueuse d'hommes.

Elle but une gorgée de whisky tandis qu'il reprenait la parole et ses lèvres s'étirèrent en un sourire malicieux. Il était plus que prêt à mordre à l'hameçon si elle lui en présentait un. « Il faut croire que oui », répondit-elle avec sincérité en haussant légèrement les épaules. « Ça fait bien longtemps qu'on ne s'est pas retrouvés seuls tous les deux pour discuter. La vie nous a un peu éloignés, mais maintenant qu'elle nous rapproche grâce à ton job, ce serait dommage de ne pas en profiter... » Elle n'était pas vraiment sûre d'elle sur ce coup-là à dire vrai. Il n'avait certainement jamais eu l'intention  de faire ami-amie avec elle après avoir été éconduit. Elle porta à nouveau son verre à ses lèvres et son visage s'assombrit un instant. Elle éprouva l'espace d'une seconde le besoin de s'excuser pour ce qu'elle avait fait, mais ce n'était certainement pas le sujet à aborder avec lui. Il préférait certainement oublier cette mésaventure. Lui dire qu'elle avait fait le mauvais choix serait tout aussi malvenu, avait-il besoin d'entendre ce genre de chose des années après ? Non, et elle risquait même de le voir se braquer à cause de ça. Elle pouvait jouer la sincérité, mais là, c'était elle qui risquait de se voir repoussée. La meilleure des choses à faire était sans doute de suivre son instinct, en tâtant un peu le terrain tout de même.

« Côté professionnel, on dirait que ça se passe bien pour toi », reprit-elle en retrouvant son sourire, « et côté personnel ? Je veux dire, en dehors de ta nouvelle indépendance dans cet appartement ? » Elle espérait qu'il comprendrait où elle voulait en venir, parce qu'elle se voyait mal lui demander à brûle-pourpoint s'il fréquentait quelqu'un en particulier où s'il enchaînait juste les aventures. « La vérité », poursuivit-elle ensuite, « c'est que j'avais juste envie de passer un peu de temps avec toi. » Son regard se fit plus ardent et ses doigts effleurèrent le dossier du canapé avec volupté. « On est plus des ados maintenant, on peut faire table rase du passé et partir sur de nouvelles bases, non ? » Elle trempa ses lèvres dans son whisky sans le lâcher du regard, puis se fendit d'un sourire espiègle. « Enfin, je dis ça, mais je me trompe peut-être, je n'ai pas encore eu la preuve que tu sois sorti de l'adolescence... » Il avait certes l'habitude de ses taquineries, mais celle-là lui donnait pour une fois l'occasion de la contredire.
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Dire que la vie les avait éloigné était une belle exagération. Sauf si la vie s'appelait à présent Caleb et avait vingt ans aujourd'hui. Caleb était à l'origine de la distance qui s'était installé entre eux, jamais sa fierté n'aurait supporté de rester à ses côtés, à leurs côtés. Il se rappelait encore de chaque mot prononcé à ce moment-là. Elle en aimait un autre. Cet autre était son propre frère, paris. Nul étonnement à ce qu'il décide de faire bande à part. À se trouver des amis de son âge. À devenir quelque d'autre que l'homme qu'il n'était pas, avec la petite amie qu'il n'aurait pas. Cependant, le temps avait passé à présent et Caleb s'était décidé à ne plus voir Bonnie que comme un objectif inatteignable comme il y en avait tant dans la vie des gens. Pas qu'il ne soit pas assez bien pour elle, juste qu'il ne pourrait pas l'avoir. Ça ne dérangeait absolument pas en revanche qu'elle souhaite se rapprocher de lui, peu importe la raison, il continuait de l'apprécier en tant que personne.

-Ma vie personnelle est très tranquille. J'aime mon indépendance et je ne suis pas pressé de la troquer contre autre chose.

C'était un fait connu que Caleb n'avait jamais tenu plus de deux semaines en couple. Il était bien trop volage pour ça et ne s'en plaignait pas. Bonnie semblait être totalement l'opposé de son propre caractère, elle avait été amoureuse pendant des années de son aîné et avait mis du temps avant de se lasser de son indifférence, contrairement à Caleb qui avait simplement décidé de déchargé son trop plein d'amour ailleurs. Elle était toujours si coincée et si... pincée avec les hommes. Caleb se demandait à quel moment elle avait décidé de devenir comme ça.

-Faire table rase ? Il me semblait que c'était déjà fait depuis quelques années maintenant.

Il n'avait plus de ressentiment pour elle. Il n'avait plus qu'un fantasme plus ou moins inaccessible et des sentiments enterré suffisamment loin pour que sa fierté n'en souffre pas, sans réussir à les faire disparaître totalement. Sans doute était-ce un point commun à ceux qui avaient déjà tout, de vouloir ce qu'ils ne pouvaient pas avoir.

La provocation ouverte qu'elle lui lança quant au fait qu'elle n'avait aucune preuve de sa sortie de l'adolescence le poussa à boire une gorgée de whisky avant de répondre. Il n'avait plus rien d'un adolescent à présent, son absence de barbe n'était dû qu'au fait qu'il refusait de la laisser pousser et son corps était désormais loin de toute morphologie dégingandée caractéristique des adolescents en pleine croissance. Sans compter que Caleb prenait soin de lui et s'était épaissi avec le temps et l'exercice.

-Je ne pense pas avoir besoin de fournir de preuves, Bonnie, lança-t-il avec un léger sourire en reportant son regard sur elle à nouveau. Cependant, si tu trouves ça absolument indispensable, je pense pouvoir te fournir plusieurs noms qui sauront te convaincre du contraire en les interrogeant.

Il avait rajouté ça sur un ton légèrement sarcastique. Comme si c'était le genre d'information qui l'intéressait. Il prit une nouvelle gorgée et reposa son verre avant de déboutonner ses boutons de manchettes pour remonter les manches de sa chemise jusqu'au dessus de ses coudes, plus à l'aise ainsi. Il s'installa également beaucoup plus confortablement et posa son coude sur le dossier du canapé, sa tête sur main.

-Et toi alors ? Comment se passe ta vie personnelle ? Toujours personne en vue ? Je ne t'ai pas beaucoup vu fréquenter de garçon ces derniers temps. En tout cas, personne de l'élite.
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Les mots du jeune homme furent sans appel. Il n'avait pas envie d'une relation avec qui que ce soit. Bonnie accusa le coup, son sourire se fissurant légèrement. Bien sûr, il était jeune, il avait envie d'en profiter, surtout après avoir été amoureux d'une chimère pendant plusieurs années. Elle aurait été bien présomptueuse de prétendre revenir dans sa vie et se mettre en couple avec lui comme si de rien n'était. À sa réaction suivante, elle se rendit compte qu'elle avait été maladroite dans ses propos. Pourquoi avait-elle employé cette expression alors que de toute évidence, il était passé à autre chose depuis longtemps ? Elle l'insultait plus qu'autre chose en réalité. « Oui, bien sûr », se défendit-elle de façon un peu trop empressée. « Ce n'est pas ce que je voulais dire... » Pourquoi fallait-il qu'il ait pris justement cette phrase en compte, et non celle qu'elle avait prononcée juste avant, celle où elle disait qu'elle voulait passer un peu de temps avec lui ? Ça ne l'avait de toute évidence pas plus enthousiasmé que ça, et Bonnie commençait à se dire que l'idée d'une quelconque relation avec lui était définitivement morte et enterrée.

Et voilà que maintenant, il prenait un malin plaisir à lui parler de ses conquêtes. Évidemment, volontairement ou pas, il n'avait pas interprété ses propos comme il l'aurait dû. Dépitée, presque agacée, Bonnie se renfrogna et s'enfonça dans le canapé, bras croisés. « Très bien », répondit-elle avec un sourire pincé qui ressemblait plus à un rictus. « J'imagine en effet que tu ne les as pas déçues à ce niveau-là… Dommage pour elles que tu ne sois pas resté avec. » Et heureusement pour Bonnie, même si finalement, ça n'avait plus tant d'importance. Elle avala le reste de son verre cul-sec tandis qu'il lui parlait, et manqua presque de s’étouffer quand elle l'entendit évoquer ses fréquentations à elle. C'était assez ironique. Personne de l'élite. Sous-entendait-il qu'elle allait taper dans le prolétariat ? C'était bien mal la connaître. Mais c'était bien mal la connaître également de penser qu'elle ne fréquenter que peu d'hommes dans sa vie.

Soupirant, elle lui tendit son verre. « S'il te plaît », s'enquit-elle, « j'en ai vraiment besoin d'un autre. » Il allait certainement prendre cette soudaine déprime comme une réaction à ce qu'il venait de dire. Il n'aurait qu'à moitié tort. Sauf qu'en réalité, cela ne concernait que lui. « Je ne fréquente personne en ce moment, non. Je me suis beaucoup trop consacrée à mon travail depuis que je suis au ministère. » Elle leva sur lui un regard résigné. « J'imagine que tu me penses toujours amoureuse de ton frère... » supposa-t-elle avec un sourire sans joie. « Mais je suis passée à autre chose à partir du moment où il s'est mis avec Garden. Je ne suis pas masochiste. Et à dire vrai… J'ai quelqu'un d'autre en tête depuis quelques temps, et ça m'obsède… Ça m'obsède d'autant plus que je pense avoir loupé le coche avec lui. J'ai appris à le connaître, et ce que je découvre me plaît de plus en plus… Malheureusement, je crois que je ne l'intéresse plus du tout maintenant. Mais ça m'est difficile de me résigner, alors que j'aurais pu vivre une belle histoire avec lui. Tant pis pour moi », conclut-elle avec un sourire triste. Elle se demanda s'il avait compris qu'elle parlait de lui. Mais de toute façon, elle n'était pas certaine que ça change grand-chose. Elle soupira, puis plongea son regard céruléen dans celui du jeune homme dans une ultime tentative. « Tu ferais quoi, toi, à ma place ? »
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C'est avec un amusement réel que Caleb vit Bonnie se renfrogner, presque boudeuse. Visiblement elle n'aimait pas qu'il parle des femmes qu'il fréquentait. Quel délicieux retournement de situation pour lui. Bonnie jalouse parce qu'il n'était pas resté la garçon amoureux qu'il avait été. Il n'aurait jamais cru en arriver là avec elle et se délectait de ce qui se déroulait dans son salon ce soir. Quant à savoir s'il avait déçu ses conquêtes ou pas, Caleb pensait pouvoir affirmer que ça n'était pas le cas. Avec une assez grande certitude en plus de tout.

-Dommage pour elles en effet, répéta-t-il avec amusement. Ou tant mieux, je ne suis pas sûr qu'elle auraient supporté de rester plus longtemps avec moi.

Légère mise en garde ? Peut-être. Défi ouvert ? Probable. La question sur ses fréquentations la fait boire d'une traite le reste de son whisky et pousse Caleb à s'interroger sur les déboires de sa vie sentimentales. Était-ce si mauvais que ça ? Il sortit sa baguette et l'agita une seconde, ce qui eu pour effet de ramener la bouteille à lui avant de servir Bonnie sans son aide. Il n'avait pas eu envie de se déplacer cette fois, préférant garder un œil sur elle puisque la conversation prenait un tour intéressant. Il n'allait pas la laisser souffler.

De ce qu'elle lui raconta ensuite, Caleb ne fut pas étonné. Elle ne fréquentait personne et était dévouée à son travail. Rien de surprenant en soit. En revanche, pourquoi avait elle besoin de parler de son frère ? Caleb se doutait bien qu'elle n'avait plus de prétentions amoureuses à son sujet, sinon il ne lui aurait épargné sa question sur sa vie sentimentale. Son agacement s'afficha brièvement sur son visage, mais la suite de son discours eu pour effet de raviver sa curiosité. Un homme obsédait Bonnie Rowle ? Un homme avec qui elle avait eu l'occasion de créer quelque chose, mais qu'elle avait repoussé. Caleb était suffisamment prétentieux pour penser qu'on parlait de lui et qu'elle lui demande son opinion ne fit que confirmer ce qui était une évidence pour lui. Eh bien. Qui l'eu cru ? Les rôles s'étaient inversés.

-Question délicate, un homme éconduit peut se montrer susceptible. Mais n'aie pas l'air si triste, il y a toujours de l'espoir, rajouta-t-il d'une voix feutrée.

En prononçant cette dernière phrase, il avait étendu le bras pour repousser les cheveux de Bonnie derrière son oreille du bout des doigts, effleurant sa jour et son oreille au passage. Cependant, le contact en resta là puisqu'il décida de se lever ensuite pour rejoindre la porte fenêtre donnant sur son balcon. Elle n'allait pas avoir ce qu'elle voulait aussi facilement. Pas après lui avoir octroyé son éternelle seconde place. Caleb n'était pas un lot de consolation pour ceux que son frère avait déçu.

-Tu sais, mon travail dans le commerce est vraiment intéressant. On y apprend à évaluer la valeur des occasions qui se présentent à nous. Il fit une pause et rentra ses mains dans les poches de son pantalon. On y apprend aussi que les volte-face sont possibles, mais compliquées. Tu comprends bien qu'après avoir refusé un contrat, nous ne sommes plus en position de force pour négocier et que si on en vient à changer d'avis, il vaudra mieux soigner son discours et faire preuve d'honnêteté. Il se tourna vers elle. Ou au moins, ne pas s'amuser à tourner autour du pot.

Il retourna tranquillement près du canapé d'un pas nonchalant, le contournant pour finalement sortir ses mains de ses poches et s'asseoir à nouveau à côté d'elle, souriant et jubilant intérieurement. Caleb se savait parfaitement en position de force. Il avait de plus qu'elle qu'il n'avait aucune attente à part l'espoir qu'elle se jette à l'eau. Il n'accepterait rien de moins. Il avait fait sa part des choses en son temps, à présent il voulait qu'elle subisse la même peur de se livrer entièrement, au risque d'essuyer un refus. Il saurait la récompenser si elle faisait l'effort.

-Les relations humaines ne sont pas différentes. Quand on a fait un erreur avec quelqu'un, on se rattrape. À ta place j'essayerais de faire le même effort qui a été fait envers moi. Enfin, seulement si je pense que ça en vaut la peine...
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Bonnie n'avait pas vraiment l'habitude de se dévoiler ainsi. D'habitude, quand elle séduisait un homme, soit elle jouait à souffler le chaud et le froid pour garder son côté vierge effarouchée jusqu'au bout, soit fondait dessus telle une succube. Mais là, c'était complètement différent. Elle n'était pas en position de force, et ne l'avait d'ailleurs plus été à partir du moment où elle avait éconduit Caleb. Elle marchait donc sur des œufs et devait avancer avec précaution pour ne pas s'étaler par terre. En restant floue sur l'identité de l'homme qui lui plaisait, elle espérait tout de même plus ou moins qu'il se reconnaîtrait et la guiderait, ou la dissuaderait, tout en lui laissant sa dignité. Une façon pour elle d'avancer sans filet. À son ton, elle sut tout de suite qu'il avait compris où elle voulait en venir, et son cœur s'emballa quand il s'approcha d'elle et l'effleura de ses doigts. Aucun doute à présent, elle éprouvait vraiment quelque chose de particulier pour lui et n'avait qu'une envie, qu'il l'embrasse. S'il lui manquait la certitude de ce qu'elle ressentait pour lui, c'était chose faite à présent.

Elle ferma les yeux… Et les rouvrit presque aussi sec quand il se releva pour se diriger vers la fenêtre. Frustrée et irritée, elle l'observa avec un regard désapprobateur avant de s'adoucir brusquement. Elle n'avait aucune raison de s'indigner. C'était de bonne guerre, après ce qu'elle lui avait fait subir à Poudlard. Il cherchait certainement à assouvir une petite vengeance, et c'était réussi. Elle pouvait à présent avoir un léger aperçu de ce qu'il avait pu ressentir, et sachant qu'il était resté amoureux d'elle pendant des années, elle pouvait multiplier ce petit pincement au cœur par dix mille. Alors, cette amertume qu'elle éprouva se transforma en sentiment de malaise vis-à-vis de lui. Bien sûr, il y avait prescription, mais elle ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir énormément, et pas seulement parce qu'elle avait changé d'avis à son sujet. Elle pouvait donc, sans ciller, le laisser profiter de ce soudain pouvoir qu'il avait sur elle.

Il prit la parole, finalement, et elle l'écouta avec intérêt, comprenant parfaitement où il voulait en venir. De toute évidence, il voulait qu'elle se jette à l'eau comme lui l'avait fait avec elle, qu'elle comprenne l'anxiété, le stress du moment où il fallait parler, avant, éventuellement, le choc, la déception et l'extrême embarras face au refus. Elle lui adressa un demi-sourire quand il se réinstalla à ces côtés. « Ça va, oui, j'ai compris l'idée », répondit-elle en soupirant. Elle s'installa confortablement pour lui faire face, le cœur battant. Elle était à peu près persuadé de s'exposer à un refus, mais elle allait tout de même lui offrir ce cadeau, parce qu'au moins, ils seraient quitte. Enfin, à peu près. « Caleb... » commença-t-elle, avant de prendre une inspiration. « Je suis désolée pour ce que je t'ai fait subir à Poudlard. Je sais, je te l'ai déjà dit, mais aujourd'hui, je suis d'autant plus désolée que je te vois comme un homme différent. Un homme, oui, pas un enfant. Et depuis que je t'ai redécouvert, et que j'apprends à te connaître un peu plus chaque jour, je me rends compte que tu éveilles en moi des sentiments nouveaux, et que j'ai envie d'aller plus loin avec toi qu'une simple amitié. » Elle marqua un temps. Son regard s'était adouci, et elle le dévorait presque des yeux à présent. Quand elle s'en rendit compte, elle cessa de le fixer, gênée. « La suite, tu la connais », reprit-elle d'un ton un peu plus sec. « Je te l'ai dite tout à l'heure. » Elle était fidèle à elle-même, ou plutôt, à l'image qu'il devait avoir d'elle à présent. Une fille froide et coincée. Mais ça n'avait pas vraiment d'importance si tout ce qu'il voulait c'était se venger d'elle.
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Caleb l'écouta avec attention, enregistrant chaque moi avec un léger sourire. La forcer à faire une déclaration, bien moins bonne que la sienne en plus, lui apportait un ravissement parfaitement malhonnête. Il était rancunier, très rancunier, surtout lorsqu'il s'agissait d'être comparé à son frère. Voilà pourquoi il n'avait jamais pu continuer à aussi proche d'eux deux après qu'il aie mis son cœur à nu devant elle. Aujourd'hui ses sentiments avaient bien changés. Évidement qu'ils avaient changé. Caleb n'était plus un adolescent et il avait sa fierté. Jamais il ne se permettrait d'être au faible au point de rester à la botte d'une femme qui ne partageait pas ses sentiments ou pire, qui en avait pour quelqu'un d'autre.

Il ne répondit pas tout de suite à cette déclaration, la fixant, la faisant attendre. Pourquoi devrait-il lui répondre tout de suite ? Qu'est-ce qu'il lui devait ? Il n'avait pas besoin d'être un gentleman ce soir. Il avait le droit de ne pas en être un. Il se passa une main dans les cheveux et lui fit un sourire un peu plus large, bien que ses yeux n'affichaient pas l'émerveillement auquel on aurait pu s'attendre.

-Comment tu te sens à présent ? Susurra-t-il. C'est dur n'est-ce pas ? Avoir ses sentiments en suspense comme ça, au bord du vide, prêt à tomber au premier signe de refus que je pourrais t'apporter.

Et encore, elle ne parlait même pas d'amour. Lui l'avait aimée. Il l'avait vraiment aimée. Au point d'en avoir le cœur brisé. Il ne pensait pas que Bonnie ressente les choses de cette façon pour lui. Il l'intéressait, certes. Elle pensait pouvoir vivre une belle histoire avec lui. Cependant elle ne lui avait pas dit les mots qu'il voulait entendre. Les mots que lui avait su prononcer. Cette absence le laissait à penser qu'en cas de refus, elle se contentera de se lever et de partir de chez lui en lui souhaitant une bonne soirée, sans doute un peu déçue, mais rien de plus.

-Maintenant imagine que tu m'aimes. Je veux dire, réellement. Imagine que tu sois réellement amoureuse de moi. Imagine ce creux dans ton ventre et ton cœur qui bat la chamade. Imagine l'effort que ça t'aurait coûté, tout ça pour finalement entendre que je suis vraiment désolé Bonnie, mais que je suis amoureux de quelqu'un d'autre.

Sans doute l'exercice était-il compliqué pour elle. Ou bien peut-être pas. Peut-être avait-elle tenté sa chance avec Paris. Sans doute avait-il rit avant de lui dire de ne pas plaisanter. Ou bien peut-être n'avait-elle même pas essayé, par manque de conviction ou de courage.

-Amoureux de quelqu'un que tu admires, en plus de tout ça. Quelqu'un que tu aimes plus que toi-même et qu'il t'est impossible de détester pour les sentiments que je lui voue. Maintenant dit moi, Bonnie. Si après tout ça j'étais revenu vers toi alors que tu avais passé des années à essayer de m'oublier. Si tu m'avais vu arriver, seul, chez toi pour finalement te dire que j'étais désolé et que j'avais développé des sentiments pour toi après m'être résigné parce que l'autre personne que j'aimais s'était fiancée à quelqu'un d'autre. Est-ce que sincèrement tu m'aurais dit que oui, que tu n'attendais que ça depuis des années, que tu veux de moi et qu'on devrait s'embrasser, s'enlacer, s'embraser ensemble jusqu'au matin et recommencer tous les jours prochains ?

La voix de Caleb était restée douce jusqu'à la fin malgré la colère qui avait pointé en lui. Encore une fois il était sincère avec elle. Ou peut-être pas autant qu'il le voulait. Sa mâchoire se serra. La colère qu'il avait n'était pas entièrement dirigée contre elle, mais aussi contre lui-même. Parce que malgré tout ses efforts pour enterrer ses sentiments dans un endroit où ils se feraient oublier, Caleb ne pouvait pas s'empêcher de se sentir heureux, triomphant qu'elle se rende enfin à l'évidence. Satisfait d'obtenir ce qu'elle n'avait pas voulu lui donner à l'époque..
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