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sujet; Quand les balais sont à des endroits inhabituels [Bonnie]

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Bon alors, le premier qui me dit qu'on ne voit plus mon bureau sous tous les trucs plus ou moins utiles que j'ai empilé dessus, ben il aura totalement raison, mais j'en conclurais qu'il ne comprend rien à rien. Ce n'est pas désordonné, c'est chaotique et c'est très bien comme ça. Qui se soucie de la paperasse de toute façon ? Nous sommes des personnes d'action, des tireurs d'élite, pas des gratte-papiers ! Je suis une tornade moi, c'est normal que mon bureau ai l'air renversé. Ce n'est pas l'avis des autres je crois, mais bon, au moins on sait que je fais de mon mieux pour examiner toutes les choses qu'on me donne. C'est du sérieux, ce job.

D'ailleurs, en parlant de sérieux, j'étais en train de rajouter encore plus de désordre sur ma surface de... travail ? Disons ça, surface de travail, pour retrouver un des dossiers sur lequel je comptais m’appesantir plus particulièrement. L'attaque du musée m'était restée un peu en travers de la gorge, autant de pauvre citoyen sans défenses malmenés par des brutes d'insurgés. On prétend se battre pour le peuple et ensuite on le piétine et le mutile sans remord. Ils auraient mieux fait de suivre mon exemple, moi au moins j'essaye de faire quelque chose d'utile.

Essayer était le maître mot de la journée semblait-il. Pas de dossier. Ou bien beaucoup trop. Je soupire et passe une main dans mes cheveux avant de décider de passer aux grands moyens, la baguette. Pas besoin de prononcer ma formule, j'utilise beaucoup trop le sortilège d'attraction pour ne pas savoir le faire en informulé, mais rien ne bouge sur mon bureau et je me rends à l'évidence. Je vais devoir me déplacer en personne pour aller le chercher au pôle nord. Au moins.

Allez J.J. On se motive. On a connu des situations pires que celles-ci. Je rechigne. Je râle. Autour de moi on ne se pose pas trop de questions sur mon comportement, ça va. Je pose mes coudes sur mon bureau et mon visage dans mes mains, cherchant l'inspiration divine, le soleil de Floride, un peu de chaleur à emmagasiner avant d'y aller. Je pense à la plage. Je pense au surf. Je pense à la liberté de se balader en maillot de bain sans mourir d'hypothermie. Puis d'un coup, je me lève, c'est parti.

Mes pas m’entraînent hors du bureau de la Brigade de Police Magique et je m'interroge sur la société Anglaise. Ça fait combien de temps que je suis là maintenant ? Dix-huit ans ? Quelque chose comme ça. Les anglais ne sont pas tous aussi grincheux que je le pensais au premier abord, mais il y a une catégorie parmi avec lesquels j'ai vraiment du mal. C'est quoi cette histoire d'élite, sincèrement ? Ils vivent dans un pays évolué tout de même, pourquoi conserver des concepts aussi archaïques que la noblesse ou bien ce genre d'élitisme moyenâgeux ? Allez tous sur la plage, mangez une pizza, vous verrez c'est beaucoup moins prise de tête.

En vérité je suis persuadé que le problème majeur de cette société vient de là, et qu'il y a le potentiel de transformer l'Angleterre en côte ouest, avec un peu de bonne volonté. Je me demande ce que le chef Lestrange penserait si je lui proposais de venir manger une pizza dans mon appartement en bordel, la pensée me faire sourire avec une bonne humeur renouvelée. Rabastan Lestrange n'est sûrement pas du genre à aimer la pizza.

Je manque de louper la bonne porte et je dois faire un pas en arrière pour revenir devant. Le nom de la secrétaire est bien sûr écrit sur la porte et je roule un peu des épaules pour m'échauffer avant de frapper et d'entrer sans attendre de réponse.

-Yo m'dame. Je retrouve pas le dossier sur l'attaque du musée et j'en ai besoin pour revoir les détails, certains trucs me chiffonnent. Y a moyen que tu les ais quelque part s'il te plait ?

Le bureau n'a rien de glacial en soit, rien qui ne pourrait définir pourquoi la température chutait soudainement lorsqu'on en passait le pas. Rien à part Mademoiselle Bonnie Bee Rowle qui est toujours tellement bien enroulée dans ses tenues que je me demande comment elle fait pour respirer. J'ai l'air bien débraillé à côté d'elle, je ne porte pas de costume, mais des vêtements confortables. Je ne suis pas un homme de bureau que voulez-vous ? Une idée me traverse soudainement l'esprit.

-Oh, tu penses que M'sieur Lestrange aime la pizza ?
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Ces derniers temps, je me sens de moins en moins à ma place. Dans mon rôle de secrétaire d'abord. J'ai l'impression de tourner en rond, de répéter sans cesse les mêmes tâches plus ou moins ingrates et de n'avoir aucune perspective d'évolution. J'en avais, il y a peu, avant la trahison de Lazarus. Trahison… Le terme et ses conséquences me font froid dans le dos. Lazarus était un excellent mangemort et pourtant il a été déchu, qu'adviendrait-il de moi si l'on savait que je doute, comme a douté mon frère, comme a douté Luce avant de rejoindre tous deux les insurgés ? Je suis bien loin d'être un modèle d'intégrité, je ne suis loyale que pour ma sécurité et celle de mes proches. Aujourd'hui, j'ai de plus en plus peur, et je ne me sens plus non plus à ma place au sein des mangemorts. Bellatrix me l'a bien fait comprendre. Je serais incapable de faire de mal à une mouche, il faut qu'Âqen, Rod ou d'autres tuent à ma place pour que je puisse être digne de ce rang. J'ai honte, mais j'en suis fière à la fois. J'en étais fière quand j'ai annoncé à Alec que mes mains étaient vierges de tout sang. Alec… Il n'a toujours pas de nouvelles de moi, parce que je n'ose pas lui en donner. J'ai peur d'être découverte, j'ai peur d'être traînée dans la boue, et ça ce serait dans le meilleur des cas.

À présent que Lazarus n'est plus là, ma seule sécurité reste Rabastan. Le problème, c'est que je n'arrive plus à lui faire confiance comme avant depuis l'attaque du musée. Je sais que les Malfoy et les Lestrange se détestent, et je me demande si ce n'est pas Rabastan qui a envoyé la BPM pour piéger Draco. Tout sent le complot à plein nez, et je ne veux pas me retrouver au milieu de tout ça. Je ne sais pas s'il sait que j'étais également présente ce jour-là, et que j'ai fait partie de ceux qui ont risqué la vie de sa fille, notamment. Je n'aurais pourtant jamais touché à un cheveu de la tête de Gwen, pas plus que je n'aurais touché à celle d'Anita, j'en suis même ressortie extrêmement choquée, mais qui me croirait ? Je commence à sérieusement manquer d'alliés parmi les mangemorts, et je ne peux pas plus me raccrocher à Draco, même s'il a été innocenté. Je dois avoir beaucoup plus d'ennemis que je ne l'imagine, et cela ne fait que m'inquiéter davantage. Je continue néanmoins à faire mon boulot comme si de rien n'était et surtout à être aussi fidèle que je le peux à Rabastan, car pour le moment, il reste mon pilier le plus important.

Quelqu'un frappe à la porte tandis que je suis en plein remplissage de formulaires divers, et je relève la tête. Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche que déjà la porte s'ouvre sur un Jessie Jenner fidèle à lui-même. Machinalement, je ne peux m'empêcher de lever les yeux au ciel. Je n'ai jamais aimé voir débarquer un membre de la BPM dans mon bureau. C'est rarement de bon augure. Je préfère certes Jessie à Aramis, mais allez savoir pourquoi, sa présence ne me met jamais complètement à l'aise. Déjà, je n'aime pas franchement sa dégaine d'américain débraillé. S'est-il présenté ainsi à l'entretien d'embauche ? On est tout de même au Ministère de la Magie anglais, on mérite un peu plus de classe et de distinction… Là, il n'y a rien qui va. Ses vêtements d'abord… Est-ce qu'un costume serait trop demander pour un travail de bureau ? Bon, certes, il va sur le terrain aussi… Passons sur les vêtements alors. Mais ses cheveux sont une véritable catastrophe… Théoriquement parlant en tout cas. Je ne peux pas nier que ça lui va bien, et que j'ai toujours une folle envie de passer ma main dedans… Mais ce n'est pas une coiffure correcte pour ce genre de travail. Chez les moldus, les gendarmes se rasent… Mais je ne peux décemment pas évoquer la situation des moldus ici. Quant à son accent… Il manque hélas cruellement de classe. Certaines disent que c'est sexy, moi je pense que c'est… extrêmement sexy, mais encore une fois, à contre-emploi.

En parlant d'accent, voilà qu'il m'en offre un bon échantillon avec sa demande qui évidemment ne m'enchante guère, et c'est euphémisme. Je n'ai aucune envie de reparler de l'attaque du musée, et encore moins avec un membre de la BPM. Jessie me fait moins peur qu'Aramis – et je m'étonne que ce dernier ne soit pas venu fouiner par ailleurs – mais ça sent toujours le coup fourré avec eux. Je lui lance un regard désapprobateur et m'apprête à le renvoyer quand il me pose une question totalement incongrue. Du Jessie tout craché. « Pizza ? » répété-je avec une grimace comme si quelque chose venait de perturber mon odorat raffiné. C'était de la nourriture de moldus, si je ne me trompais pas, et j'imaginais mal mon patron apprécier ce genre de chose. « Non, il n'aime pas la pizza », réponds-je sèchement et fermement bien que je n'en aie aucune certitude. Je manque de lui demander la raison pour laquelle il me pose cette question, mais je sens que je ne vais rien en tirer d'intéressant et préfère passer à autre chose. « Tu peux me dire pourquoi tu as tant besoin du dossier de l'attaque du musée ? » m'enquis-je sans déserrer les dents.

Je sais bien qu'il me prend pour une fille coincée. Tout le monde me prend pour une fille coincée, c'est volontaire et ça m'arrange. D'un autre côté, il est des moments ou j'aimerais bien qu'il me voie autrement. Mais ce serait trop facile. Alors, je lui sers mon plus beau sourire pincé, ma spécialité. « Je ne sais pas si je vais le trouver », précisé-je d'un ton faussement innocent. « Monsieur Lestrange l'a peut-être gardé avec lui. » C'est faux bien sûr, je sais très bien où il est et il me suffirait d'un coup de baguette pour le récupérer. Mais à la place, je me lève et me dirige vers un petit secrétaire dont j'ouvre le tiroir du bas et me penche au-dessus pour faire semblant de chercher ledit dossier, en me cambrant un peu – beaucoup – au passage. Je n'y peux rien si je ne peux pas m'empêcher de provoquer. Je me relève alors et me tourne vers le jeune homme. « Comme c'est dommage, je ne le trouve pas... », réponds-je avec un sourire sarcastique avant d'avancer vers lui et de poser mes mains sur le bureau en me penchant légèrement. « Une autre fois peut-être... »
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Le mot pizza sonne comme une insulte entre ses lèvres de bourgeoises et je ne peux pas m'empêcher de sourire, tout comme j'ai souri en la voyant lever les yeux au ciel tout à l'heure. En vérité, j'adore passer dans ce bureau car il me donne l'occasion de jouer à mon jeu préféré à savoir : tout faire pour remonter un peu plus le balais coincé quelque part dans l'illustre anatomie de mademoiselle la princesse de l'élite. Sa voix claque sèchement dans le bureau et je me passe une main dans ma barbe, devant ma bouche pour éviter qu'elle ne voit que j'essaye désespérément de me retenir de ricaner.

-Je pourrais te le dire, mais à quoi bon ? Tu connais le boulot de la police magique, ça t'intéresse autant qu'un radis est intéressé par un chou fleur.

Puis je me fends d'une révérence, la plus basse possible, agitant les bras comme j'ai pu voir un acteur le faire dans certains films moldu que j'aime regarder. Seul moment où j'apprécie les idées d'élitisme et de noblesse d'ailleurs, ils en font de merveilleux films, ces moldus. Vivre le film est bien moins amusant qu'on peut le penser, je m'en suis rendu compte assez rapidement au début de tous ces malheureux événements.

-Mais puisque mademoiselle semble vouloir me faire l'honneur de m'accorder un peu de conversation...

Je me redressais pour tomber devant son sourire le plus pincé. Merveilleux, j'adore ça, réellement.

-Je veux voir certains détails, cette histoire me déplaît et j'aime pas débarquer en retard. On avait installé un système de surveillance et tout si je me souviens bien, il doit bien avoir des rapports de la sécurité et des gens à interroger. C'était de la négligence et des gens ont été blessé, aussi inoffensif des chatons sans défense dans les griffes d'un aigle royal.

Un aigle, symbole de l'Amérique, symbole de la liberté, symbole de tout ce que l'Angleterre n'était pas pour le moment et pourtant un symbole négatif dans mon exemple. Ça me laisse pantois un instant, je ne peux plus penser à autre chose qu'à la dualité de chaque chose et de chaque problème. La voix de Bonnie me parvient, elle ne pense pas pouvoir trouver le dossier, mais je ne suis pas assez naïf pour la croire. Si Rabby Jacob avait décidé de le garder avec lui, elle le saurait forcément, c'était une certitude. Du coup je l'observe, suspicieux et mon œil est tel à celui de l'aigle, ne loupant pas un seul détail de la cambrure de son dos et... plus bas aussi.

Pourquoi est-ce que je me priverais ? Ce n'est pas un viol, juste un coup d’œil. En Amérique les femmes se battent pour se genre de coup d’œil. Pas littéralement, non, mais il y a une forme de combat avec elle-même, avec leur corps, avec la perfection qu'il peut devenir jusqu'à faire dévisser le cou de tous les hommes capables de les remarquer, ce qui tombe très bien car mon cou est assez souple pour suivre n'importe quelle femme qui cherche un tant soit peu d'attention. Elles ne sont d'ailleurs généralement pas les seules à le faire. J'aime ce qui est beau. J'aime être beau. J'aime qu'on me regarde. Pour le moment cependant, c'est moi qui regarde, tant pis pour la pour la pudibonderie Anglaise.

-Vraiment ? Tu devrais regarder une deuxième fois. Juste pour être sûr. T'as du manquer un truc.

Je voulais vraiment ce dossier, pour le bien des citoyens que je chéris tant et aussi pour pouvoir me rincer l’œil une deuxième fois au passage.

-À moins que tu veuilles me voir partir juste pour le plaisir de me voir revenir plus tard, lançais-je avec le sourire en venant prendre place sur une chaise en face du bureau Bonnie Bee. Mais j'ai tout mon temps, pas trop de taff aujourd'hui, ça va. Et toi, tu aimes la pizza ?
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Pourquoi fallait-il qu'il vienne me réclamer ce dossier, justement ce dossier, alors qu'il en existe des dizaines ? Je n'aime pas trop les raisons invoquées. Il a évoqué un système de surveillance… Justement celui que nous nous sommes fait un plaisir de régler, Draco et moi, pour qu'il nous filme parfaitement. Nous, grimés en insurgés. Bien sûr que des clichés ont été faits, que des vidéos ont été tournées. Le monde sorcier a bien pu constater que les auteurs de ce cambriolage qui a tourné au désastre étaient dans l'autre camp. Quelles personnes peut-il bien vouloir interroger, les gardes ? C'est déjà fait. Ils ont été mis hors d'état de nuire. Ça m'inquiète que la BPM veuille enquêter de plus près. J'ai peur que certains détails nous trahissent. J'ai beau être protégée par Rabastan et Rodolphus, je me sais sous étroite surveillance, et l'on peut me soupçonner à tout moment. Je ne pense pas que Jessie soit suffisamment fourbe pour trouver des failles nous confondant, mais si Aramis s'en mêle, le résultat risque de ne pas me plaire.

Jessie a parlé de personnes blessées… Il sait pourtant qu'il est loin du compte. Quand je pense à ma pauvre Anita, jetée par la fenêtre comme une vulgaire feuille de papier froissée, j'ai le cœur qui se serre. Je me remets difficilement de sa perte. Dans ces moment-là, je ne peux pas m'empêcher de regarder ma main. Je sais qu'elle n'est pas guérie. Mais je ne peux pas risquer d'aller à Sainte-Mangouste pour qu'un médicomage découvre quel maléfice a empoisonné ma main et surtout, d'où il vient… Et je n'ai aucun guérisseur de confiance dans mon entourage. De toute façon, ça n'a pas l'air bien grave. La potion d Bellatrix a sans doute presque complètement résorbé les effets. Ma main est un peu faible par moment, c'est tout. Quelle idiote j'ai été d'avoir touché cette armure à main nue… Mais je m'en sors bien, contrairement à d'autres.

Je n'ai vraiment pas envie de lui donner ce dossier. Si je pouvais arriver à faire repousser l'échéance, j'aurais plus de temps pour réfléchir, même si au fond, je ne suis pas certaine que ça serve à quelque chose. Après avoir fait mine de chercher sans succès, je reviens vers Jessie en espérant qu'il rebrousse chemin. Mais il insiste. Je me fends d'un sourire sarcastique. Je sais qu'il se moque de moi. Ça m'amuse et ça m'agace à la fois. Il ne compte visiblement pas quitter ce bureau avant d'avoir ce dossier. Je manque de chance. Si Rabastan arrive, il le lui donnera évidemment sans broncher. Bien sûr, il est du côté de la BPM sur ce coup-là. Je grimace un peu en y pensant. Et voilà que Jessie se met à me reparler de pizza, ce qui ne fait qu'accentuer le rictus sur mon visage. « Je ne mange pas de pizza », réponds-je en appuyant chacune des syllabes d'un ton sec et irrité et en esquissant une nouvelle grimace sur ce mot prohibé. « Nous ne sommes pas les moldus ici », insisté-je, « et encore moins chez les américains. Nous sommes en Angleterre, au Ministère de la magie, et il me semble qu'il y a un certain savoir-vivre à respecter. »

Mon ton se fait un peu plus cassant tandis que je me rassois face à lui. Mais après tout, il m'a cherchée. Qu'il soit agréable à regarder ne me fera pas plaisanter avec lui comme si de rien n'était. Peu de gens ont cette chance, et c'est loin d'être gagné pour lui. « Et puisque nous en sommes à parler de savoir-vivre », poursuis-je, « Il va vraiment falloir que tu fasses quelque chose pour ta tenue. Tu travailles dans la structure sorcière la plus importante du Royaume-Uni. Je sais que ton travail de terrain ne réclame pas un costume ou une robe habillée, mais tu pourrais au moins mettre une chemise… rentrée dans ton pantalon », ajouté-je avec un demi-sourire narquois. « Et tes cheveux… Ce n'est pas normal que tu ne sois pas obligé de te les couper. En tant que tireur d'élite tu es censé avoir une visibilité parfaite... » C'est évident, non ? Il n'y a pas pire qu'une mèche de cheveux pour nous cacher la vue. Je ne vais pas sur le terrain en ce qui me concerne et pourtant, j'ai toujours les cheveux savamment attachés pour ne pas être gênée dans mes tâches. Je lui adresse un nouveau sourire mesquin. « Je vais passer sur ta barbe de trois jours... » Machinalement, je tapote mon bureau du bout des doigts. « En admettant que je fasse l'effort de trouver ce dossier », m'enquis-je soudain avec un sourire énigmatique, « qu'est-ce que j'aurais en échange ? » Après tout, il n'y a pas de raison que je le cède gratuitement.
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Elle ne mange pas de pizza et son sourire se fait tellement polaire que je manque de zipper mon blouson. La Floride. Penser à la Floride. Penser à ma mère au soleil qu'elle voulait que j'emporte partout avec moi. Je me réchauffe et me détend, cette pauvre Bonnie est le fruit de ce que les autres ont fait d'elle. Elle n'a pas encore compris, ça se voit.elle n'a pas encore compris qu'elle est vivante et du coup elle ne fait rien. Elle ne peut rien faire après tout. Elle ne peut même pas respirer dans son uniforme ça se voit. Moi je respire. Moi je vais bien. Un jour elle prendra conscience et elle mangera de la pizza aussi.

-Un savoir-vivre, répétais-je, songeur.

Un savoir vivre oui. Je sais vivre, aucun doute là-dessus, mais elle alors ? Non, elle ne sait pas vivre. Où est son savoir ? Il voit qu'elle ne comprend pas. Il y a des barrières entre nous, sans doute autant qu'entre moi et mon moldu de voisin. Je ne suis certainement pas en Amérique, c'est vrai. Je me lève en regardant autour de moi, intéressé. Le dossier doit bien être quelque part, elle n'avait pas l'air très déterminée. Trop de travail pour une secrétaire sans doute. Elle devrait faire comme moi, un esprit sain dans un corps sain. L'exercice, la méditation, tout ça pourrait lui permettre de comprendre qu'elle est en vie.

Elle parle des chemises que je n'ai jamais appris à porter à l'Anglaise. Ça ne dérangeait pas à l'époque de Poudlard, je m'en souviens. Même cette chère McGonagall ne m'avait jamais fait de réflexion dessus et pourtant si on regardait entre ses rides, on pouvait y voir le mot « sévérité » tatoué couleur chaire.

-Mes cheveux son très bien, lançai-je d'un air absent.

Je n'avais jamais eu de problème avec sur le terrain. Ils étaient parfait, rien d'autre à dire dessus. D'ailleurs je passe machinalement une main dedans, comme pour les ébouriffer un peu plus sans y penser. Mes cheveux sont ma fierté. Je ne vois pas son sourire mesquin alors que je me penche sur un meuble qui me semble prometteur et que je l'ouvre pour regarder ce qu'il y a dedans. Des dossiers en grande quantité bien sûr.

-Je suis presque sûr d'avoir une meilleure visibilité que toi. D'ailleurs, tu sembles moins bien faire ton travail que moi le mien. Je suis obligé de t'aider à chercher ce dossier alors que je ne me souviens pas avoir eu besoin de ton intervention lorsque j'étais sur le terrain. Au contraire même.

C'est vrai quoi, un peu de reconnaissance, par Morgane ! Je lui ai sauvé la mise une fois. Elle semble vouloir faire l'effort de trouver le dossier que je souhaite et je me redresse en retirant mes mains de son... comment ça s'appelle ce meuble ? Un secrétaire ? Ça serait amusant. Je me retiens de rire mais je ne peux pas m'empêcher de sourire avec insouciance en me tournant vers elle pour répondre.

-Tout ce que tu veux tant que ça ne concerne pas mes cheveux, mon travail, ou un tatouage.

Devenir Mangemort non merci. Il savait parfaitement que Bonnie portait la marque, mais pour sa part il était très bien où il était. Je me penche à nouveau sur le secrétaire en me demandant si les secrétaires avait inventé ce meuble ou bien si elles avaient été nommées après lui. Le plus amusant aurait été que le meuble les invente bien sûr, mais je ne suis pas sûr qu'elle pourrait comprendre la plaisanterie. Je ne suis pas sûr qu'elle comprenne le mot « plaisanterie » d'ailleurs.

-C'est dommage, vraiment. Pour la pizza je veux dire. En plus je connais un super bon restaurant italien qui en fait des divines.

Un restaurant moldu, évidemment. En plus les serveuses aiment beaucoup mon accent. Moi je déteste celui de Bonnie. Je n'aime pas son ton également. Je prends un dossier au hasard et je lis le titre, mais ce n'est pas le bon. Au lieu de le remettre où je l'ai trouvé, je le pose par dessus le secrétaire et j'en prends un autre hasard qui subit le même sort.

-Comment tu fais pour t'y retrouver ? me plaignais-je soudainement.
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Je m'efforce, non sans violence, de rester calme quand il prétend mieux savoir faire son travail que moi le mien. Je peux aisément lui prouver en un simple coup de baguette qu'il a tort, cependant, cela annulerait automatiquement les efforts que j'ai faits jusque là pour l'empêcher de tourner en rond. Pourquoi fallait-il que cela se retourne si facilement contre moi ? « Je fais parfaitement mon travail », protesté-je posément mais fermement, « je t'ai dit que le dossier n'était pas ici. Si tu ne veux pas me croire, c'est ton problème, mais moi j'ai fait ma part. » Il accepte néanmoins ma requête et je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire sardonique. J'ai bien saisi le sens du mot tatouage, mais je n'ai aucune intention de l'enrôler chez les mangemorts. D'ailleurs, je n'ai aucune intention d'enrôler qui que ce soit chez les mangemorts, j'aurais même plutôt envie d'en sortir moi-même. J'aurais bien émis une condition concernant son travail en revanche, tant je hais cette fichue BPM qui fourre toujours son nez là où il ne faut pas. J'aurais pu lui demander, par exemple, de ne plus se mêler de mes propres dossiers. Hélas, nos services sont forcés de collaborer, et je n'ai donc pas le choix. Quant à ses cheveux, je sais au fond de moi que ce serait un sacrilège de les couper, mais je ne peux m'empêcher de le titiller avec ça. Non, en vérité, je ne sais pas exactement quoi lui demander, sinon peut-être d'arrêter d'être aussi… américain.

Cette idée s'impose de plus en plus dans mon esprit quand je le vois errer dans mon bureau et fouiller les tiroirs en quête du fameux dossier. Là, je m'insurge. Trop c'est trop. Je me lève et m'approche de lui pour le transpercer de mon regard glacial. Je me fiche de ses élucubrations sur la cuisine italienne, tout ce que je vois, c'est qu'il met à mal mon précieux rangement, et ça me met hors de moi. « Tu vois bien que je fais mieux mon travail que toi », sifflé-je avec un demi-sourire sarcastique. « Ce n'est pas à toi de chercher. Tu n'as pas à fouiner dans mon bureau ! » Sur ces mots, je sors ma baguette et d'un sort rapide remets tous les dossiers à leur place. « Tu es vraiment insupportable », soupiré-je avec lassitude. « Viens avec moi », ordonné-je soudain avec autorité, le regard déterminé. Sur ces mots, je l'attrape par le bras tout en rangeant ma baguette et le guide jusqu'au fauteuil en face de mon bureau, où je le force à s'asseoir en posant mes mains sur ses épaules. Le surplombant ainsi, je lui adresse un sourire sardonique, sans retirer mes mains. « Il me semble t'avoir dit que je pouvais, éventuellement, retrouver ton dossier, et que j'attendais quelque chose en retour », déclaré-je d'une voix mielleuse. « Si tu ne tiens pas tranquille et préfère dévaster mon bureau, tu ne mettras jamais la main dessus, c'est certain. » Je l'observe un instant. Mon visage n'a jamais été aussi proche du sien. Pourquoi faut-il que cet enfoiré soit si séduisant ? Troublée, je sens mon visage s'empourprer légèrement et relâche immédiatement mon emprise pour retourner m'asseoir en face de lui tout en tentant de rester digne. Je ressors alors ma baguette, l'agite une seconde en l'air et le dossier de la discorde arrive directement entre mes mains. En le serrant précieusement contre moi, je lance un regard narquois à Jessie. Maintenant, il a intérêt à être sage.
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Je ne fouine pas, je cherche un dossier particulier, c'est tout. Il n'y a pas marqué « confidentiel » sur ce meuble, j'en conclu donc que je peux venir chercher mon bonheur là-dedans, peu importe ce qu'elle en pense. En tout cas, j'ai réussi à la faire un peu bouger de son bureau, c'est tant mieux d'ailleurs, je ne voudrais pas qu'elle s'empâte, elle a beau ne pas montrer grand chose ce que je vois me convient parfaitement. Cette fois-ci en revanche, je décide de remonter le zip de mon blouson pour de bon devant son regard à héberger des ours polaires.

-Brr tu veux pas monter un peu le chauffage ? On se les gèles dans ton bureau.

En tout cas j'ai gagné, elle a l'air de vouloir renoncer à ne pas m'aider. En gros elle s'est décidé à m'aider. Cette double négativité qui donne du positif au final est si perturbante, je suis sûr qu'en Amérique on m'aurait laissé retourner le bureau si j'avais eu envie de me trouver un dossier tout seul. On m'aurait filé un café au passage aussi, un vrai, pas un thé bizarre comme les anglais aiment en boire à heure fixe. Non mais vraiment. Le thé. Quelle culture étrange.

Je me fais emporter de force jusqu'à un fauteuil où elle me fait m'asseoir en appuyant sur mes épaules, je me laisse faire, on crache jamais sur une petite pause, chercher des dossiers c'est fatiguant. Elle me dévisage bizarrement, puis elle se met à rougir et moi à sourire. Est-ce qu'elle vient vraiment de le faire ? Elle vient vraiment de rougir ? Mon sourire est juste en coin pour le moment, mais je ne laisserais pas passer ça. En revanche, le mot dévaster est un peu fort et je m'indigne. À ma façon.

-Du calme ma poule, j'ai rien dévasté.

C'est vrai quoi, je n'ai sorti que deux malheureux dossier que j'ai simplement déposé au dessus d'un meuble. J'espère qu'elle ne passera jamais voir mon propre bureau. Si jamais elle le retrouve sous mon tas de paperasse. C'est un camouflage naturel pour éviter qu'on me le vol, chaque espèce dans la nature à ses moyens de se défendre ! Mon bureau est un survivant né. Je l'ai entraîné tel Maître Shifu a entraîné les Cinq Cyclones. Je suis un vrai maître de l’entraînement. Si ça a du sens.

Je m'affale sur ma chaise en la regardant sortir le dossier d'un simple coup de baguette magique. Intérieurement, je me dis que c'est une peste, mais ça j'ai déjà pu le sentir à travers mon merveilleux don. Cette femme est née pour compliquer la vie des gens. Un peu plus et elle finissait à l'accueil de Sainte Mangouste pour se mettre du verni sur les ongles au lieu d'envoyer les blessés où ils doivent.

-Je suis trèèèèès tranquille princesse, dis-je en levant les mains en l'air avant d'en passer une dans mes cheveux pour finir sur ma nuque.

Est-ce que j'ai envie de l'être ? Pas vraiment. Je voudrais bien l'avoir en main et pouvoir le perdre tranquillement dans la montagne qui se trouve déjà sur mon bureau. Ou bien m'amuser avec le chien d'Aramis, ce cher bon vieux Phil. Je crois qu'une partie de ce qui se trouve sur mon bureau provient directement de sa fourrure fournie.

Je rapproche ma chaise et pose mes avant bras sur le bureau, penchant la tête sur le côté et faisant l'aller-retour entre le dossier qu'elle serrait contre sa poitrine et ses yeux. Ben j'attends ! Elle veut quelque chose en retour et moi je sais pas ce que c'est, mais je suis disposé à tout lui céder du moment que je peux enfin examiner ces papiers.

-P'tain, ça doit être sympa d'être un dossier de temps en temps. Alors, tu veux quoi en échange de... soudain je me rappelle. Oui, car j'avais oublié en quelques minutes puis retrouvé le fil. Un grand sourire éclaire mon visage déjà solaire, j'imagine que j'ai l'air taquin. Au fait... je t'ai vu. T'as rougie.
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Ma poule? Est-ce qu'il vient vraiment de m'appeler comme ça ? Je sens à nouveau le rouge me monter aux joues, mais cette fois, de colère. Ce type me met vraiment hors de moi. Comment ose-t-il se permettre tant de familiarités avec moi et dans le cadre du travail de surcroît ? Après ça, j'ai encore moins envie de lui donner ce fichu dossier. Et voilà maintenant qu'il utilise un autre petit nom et se la joue relax, comme s'il était chez lui dans son canapé. Est-il toujours comme ça au travail ? Je l'imagine bien affalé dans son propre bureau. Il ne doit certainement pas beaucoup s'occuper de la paperasse… Sans doute laisse-t-il ça à Aramis. À bien y réfléchir, j'ai beau ne pas aimer le fils de mon patron, c'est sans doute le type le plus normal et le plus raisonnable de la BPM. Le plus légitime peut-être également. Elain est une furie et Jessie un je m'en foutiste. Bref, je ne suis vraiment pas faite pour m'entendre avec ce service. Et vu que par surcroît ils prennent un malin plaisir à me mettre des bâtons dans les roues, volontairement ou non, ça n'arrange évidemment pas mes relations avec eux.

Je continue de serrer le dossier contre moi et fixe mon gêneur avec un regard perçant. Nul doute que si je pouvais tuer d'un regard, il serait déjà mort depuis longtemps. Et maintenant, il me provoque. Encore. Parce qu'évidemment, il a remarqué que je rougissais tout à l'heure. C'est bien ma veine, d'autant que d'habitude, je n'ai pas trop de mal à camoufler mes émotions. Un moment de faiblesse, il faut croire. « Je n'ai pas rougi ! » répliqué-je sèchement, crachant presque. Le banal réflexe de la mauvaise foi. « Ou plutôt si », me rattrapé-je alors, « si je rougis, c'est de colère. » Je me lève alors, fais quelques pas, et, tout en jetant à Jessie un regard noir, je sors de nouveau ma baguette et fais immédiatement disparaître le dossier. « Depuis quand te permets-tu autant de familiarité avec moi ? » m'exclamé-je avec indignation. « Nous n'avons pas gardé les cochons ensemble ! » Je croise les bras, toujours fulminante. « Si tu veux ce maudit dossier, il va falloir te montrer un peu plus coopératif, et surtout, un peu plus professionnel ! D'abord, tu te permets de fouiller mon bureau, et maintenant, tu te montres impoli… Est-ce que tout le monde se comporte comme ça en Amérique ? » J'ai certainement l'air choqué en prononçant ces mots. Les États-Unis sont décidément, pour moi, un pays de rustres. Je les imagine tous débraillés, affalés dans des canapés en train de manger des hamburgers ou des pizzas. Écœurant.

J'ai fait les cent pas tout en parlant. Voilà longtemps que je n'avais pas été aussi stressée au point de ne plus pouvoir tenir en place. Ça ne me ressemble pas. C'est sans équivoque, ce type me rend dingue. Il me fait perdre mes moyens. Je suis incapable de rester stoïque quand il est présent, il est capable de réveiller mes émotions les plus enfouies, et pas les meilleures. C'est d'ailleurs pour ça que je me suis levée. Pour m'éloigner de lui. Mais il va se lever aussi, je le sens, il va me rejoindre, et je ne sais pas comment je vais réagir. Peut-être devrais-je lui donner ce fichu dossier, finalement, pour me débarrasser de lui. Mais je n'arrive pas à me résoudre à donner suite à sa requête. Pas aussi facilement.
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-Ben tiens, rouge de colère c'est ça.

Je pouvais pas m'empêcher de sourire. Alors comme ça je plais à madame la reine des coincées désagréables ? Elle cachait bien son jeu, la jeune femme. Enfin j'imagine qu'elle est jeune. Elle à l'air de l'être un peu plus que moi, mais son expression est toujours tellement froide qu'on la penserait de la génération de McGonagall. Quelqu'un devrait sans doute lui dire que ça ne lui allait pas. Ou peut-être un peu trop, il y avait quelque chose de sexy dans cette froideur sans cesse affichée sur ses traits. Enfin pour le moment elle avait vraiment l'air furieuse. Peut-être était-ce dû au surnom, je ne savais pas bien pourquoi elle montait sur ses grand chevaux.

Elle sortit sa baguette, mais je réagis en un quart de seconde pour intercepter son geste et attirer le dossier à moi. Elle ne pensait tout de même pas pouvoir m'arracher mon dû alors qu'il était enfin à ma portée. Un point pour Jessie, yeah ! Je me mets à rire lorsqu'elle parle de familiarité, c'est plus fort que moi. Aaaah, ces anglais. Toujours le mot pour rire.

-C'est trop tard, je l'ai ce dossier !

Je le brandis d'un air triomphant, toujours souriant, et fit tourner ma baguette entre mes doigts avant de la ranger dans ma poche. Un vrai cow-boy. Les sorciers Américains de cette époque devaient être sacrément impressionnant. Les moldu l'étaient en tout cas. Enfin, pas en Angleterre. Peut-être était-ce dû au temps qu'il faisait sans cesse dans ce pays et qui avait fini par déteindre sur ses habitants. Je me frottais le menton, soudainement très pensif. L'Angleterre était sans cesse sous la pluie, mais la pluie c'est de l'eau et l'eau en quelque sorte, c'est la vie ! Alors pourquoi les anglais refusaient-ils obstinément de vivre ? Était-ce l'eau et donc la vie qui les en empêchait ? Ça voudrait dire que la vie les empêchait de vivre ? Quelle idée intéressante, je ne peux pas m'empêcher de poser la question à Bonnie dont je n'ai pas écouté un seul mot.

-Tu penses que la vie peut nous empêcher de vivre ? J'ai l'impression que les nuages anglais sont tellement lourd que la vie n'arrive pas jusqu'aux anglais. C'est triste.

Ma voix traînait, signe que j'étais perdu dans mes pensées profondes. Je ne suis même pas sûr qu'elle comprenne ce que je voulais dire. Ce n'était pas de sa faute, ça n'était pas à sa portée de demoiselle de la haute société anglaise. Enfin, l'était-elle ? Je ne me rappelle jamais de trente glorieuses. Ou bien était-ce les quarante superbes ? Je n'arrive pas à me souvenir de ces histoires de noblesse. Je n'étais pas concerné après tout. Je suis Américain dans mon cœur.

-L'Amérique est une belle nation, Bonnie Rowle, rajoutais-je d'un ton doux. Un pays libre où les gens sont heureux. En Floride le soleil ne brille pas seulement au dessus de mes compatriotes, il irradie depuis leur cœur.

Je me sens soudainement très nostalgique de mon pays et mon regard se baisse, comme si le sol du bureau froid de Bonnie pouvait me rappeler les longues plages de sable fin et la façon dont les vagues léchaient le rivage. Comme s'il pouvait me rappeler ce bonheur simple d'être entouré de ceux qui comptent, jusqu'au soir, d'allumer un feu de camp avec des allumettes moldus et de s'enfuir en courant et riant pour échapper aux policiers qui considéraient ce genre d'amusement comme un délit.
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Évidemment, il ne me croit pas. Et voilà qu'il se paie ma tête, par-dessus le marché, parce qu'il m'a vu rougir et doit être persuadé maintenant qu'il me plaît. Il n'a peut-être pas tort, mais il peut toujours courir pour que je le lui avoue. J'ai déjà du mal à l'admettre moi-même… Pourquoi donc m'enticher d'un homme comme lui, si négligé, si nonchalant, à l'opposé même des hommes qui d'habitude me plaisent ? Ce n'est pas digne de moi. Pas digne d'une femme de ma classe et de mon rang. Mais c'est peut-être ça qui m'attire chez lui justement, le fait de sortir des sentiers battus. Un certain esprit de contradiction, sans doute. Ce côté sauvage, aussi. C'est vraiment le genre d'homme avec lequel on ne doit pas s'ennuyer. Mais c'est niet. Je ne me ferai pas avoir par ses beaux yeux et ses beaux cheveux. J'ai un orgueil à préserver.

Alors, je tente de faire disparaître ce dossier pour lui donner une bonne leçon. Il ne l'aura pas, parce qu'il s'est montré insolent et qu'il doit comprendre que ce n'est certainement pas ainsi que l'on m'apprivoise. Pas au travail, en tout cas. Malheureusement pour moi, il est plus vif que je ne l'imaginais. Immédiatement, il a sorti sa baguette et a récupéré le dossier, sous mon œil hébété et scandalisé. Furibonde, je serre les poings. Il n'a pas le droit de me faire ça, non ! Et il se permet de se vanter par-dessus le marché ! D'accord, je l'ai mal jugé. Il n'est pas si nonchalant. Il a eu du réflexe. Cela dit, c'est logique, quand j'y pense, il n'a pas été embauché à la BPM pour rien, il est censé être un tireur d'élite. Malgré tout, j'enrage de m'être fait ainsi avoir et son regard triomphant ne fait qu'ajouter à ma fureur et à mon ressentiment. Voilà à présent qu'il me sort une espèce de phrase philosophique que je ne comprends pas et que je n'ai pas envie de comprendre. Je me moque de ce qu'il peut dire, tout ce que je constate, c'est qu'il a le dossier entre ses mains.

J'écoute son petit laïus sur l'Amérique les sourcils froncés, un rictus irrité sur le visage. Il se veut poète après avoir été philosophe, visiblement, mais ça ne me touche aucunement. Il semble en tout cas possédé par ses propos car il se met à fixer le sol d'un air rêveur. Agacée, je donne un coup sec sur le bureau avec ma baguette pour le faire relever la tête, et lui adresse mon regard le plus glacial. « Très bien », sifflé-je entre mes dents. « Tu l'as, ton fichu dossier. Maintenant, si tu voulais bien t'en aller, ça m'arrangerait. Je n'ai que faire de ton pays de débauchés et de tes histoires de nuages. Tu as obtenu ce que tu voulais, d'une façon extrêmement malhonnête, permets-moi de te le dire, mais j'imagine que tu es fier de toi, alors va-t'en maintenant. » Je plisse le nez comme si une odeur nauséabonde y parvenait, puis lui lance un regard de défi. « Mais je te préviens, ce dossier s'appelle reviens, il appartient à Monsieur Lestrange, pas à la BPM ! D'ailleurs, je ne sais pas ce qu'il pensera du fait que tu l'aies subtilisé sans ma permission. » Un demi-sourire sardonique apparaît sur mon visage. Il n'y a aucune raison que je le laisse s'en sortir aussi facilement.
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