Susanna. Sa crinière brune. Sa démarche assurée. Je la repère aisément à travers la foule. Dense. Et bruyante. Sans réfléchir. Je la suis. Dans une boutique. Sans intérêt pour moi. Que la cliente qu’elle contient. Elle est là ma chance. D’obéir à mon père. Elle est là. L’occasion que j’attendais. Je n’ai pas pu prévoir un plan. Pour briser la glace. Qu’on a laissé s’installer entre nous. Depuis de trop nombreuses années. Mais je ne peux que saisir cette opportunité. Et réussir ma nouvelle mission. Celle qui m’a soulagé. Contrarié. Délivré. Gêné. Si seulement mon paternel avait arrêté son premier choix sur elle. Pas sur son hybride de sœur. Que j’ai dû convaincre. D’accepter des fiançailles. Qu’aucun de nous ne veux. Mais le piège s’est percé. Enfin. Le patriarche Flint préfère jouer sur deux tableaux. Favorisant le statut du sang. Je ne serai pas celui qui brise la pureté de notre lignée. Mais cette tâche est complexe. Il faut que je renoue le contact. Avec la seule pour qui j’ai éprouvé des sentiments. J’ai laissé la flamme s’éteindre. Et j’ignore comment la rallumer. Je ne peux pas aller à sa rencontre. Délibérément. En lui proposant un mariage. Ridicule. Sorti de nulle part. Réapprendre à la connaître. Longue et fastidieuse étape. Pas des plus discrètes. Mais certainement la plus raisonnable.
Voilà quelques minutes. Que je suis planté là. A l’observer. A analyser une possible tentative. A construire mes mots. Mes phrases. N’importe quoi pour engager une conversation. Je croise plusieurs fois ses prunelles. Elle sait que je suis là. Mais elle m’ignore. Puis me fuit. Ma poursuite continue. En dehors de la boutique. Elle pénètre dans une autre. Pour se réfugier ? Sa dérobade m’irrite. J’emboite ses pas. Je ne peux me permettre de perdre cette chance. De lui parler. Même si j’ignore de quoi. Exactement. J’en ai besoin. Là. Maintenant. Tout de suite. J’ai besoin d’entendre sa voix. J’entre à mon tour. Et panique en ne la voyant pas. Je suis pourtant persuadé de l’avoir vu entrer. « Bonjour Marcus. » Soulagé. Je laisse un sourire s’afficher sur mon visage de gosse. « Bonjour Susanna. » Et nos politesses. Habituelles. Répétées. Encore et encore. Elles résument notre relation. Devenue platonique. Comment on en est arrivé là ? Tous les deux. Adolescents pourtant si épris. L’un de l’autre. Entraînés dans une passion. Puissante et destructrice. Mais jamais enchaînés. « Tu t’es découvert le pouce vert ou tu cherches une nouvelle plante décorative ? » Je reste muet. Face à sa pique. Acceptant silencieusement le sac de terreau qu’elle m’impose. J’ignorais jusqu’à présent dans quelle boutique j’avais mis les pieds. Evidemment que j’ai l’air ridicule. Moi qui ai horreur de la verdure. Presque allergique à la nature. « Tu peux porter ça pour moi ? Merci. » « Avec plaisir. » Je marmonne. Je ronchonne. Et la suit docilement au fond du magasin. Elle s’arrête. Je m’arrête. Tel un vieux souvenir. Remémoré. Rejoué. « Si tu veux bien m’accompagner et porter mes sacs un petit moment, je veux bien t’accorder une conversation désagréable au possible, au sujet du monstre blond que tu comptes épouser. » Je sens sa colère. Sans réellement comprendre son emportement. De quoi s’agit-il ? Des fiançailles de Beatrix ? Des miennes ? Ou l’absence des siennes ? « Eh oui, je suis au courant, pas de chance je sais. Pourvu que je ne vienne pas de gâcher une surprise que tu comptais me faire, même si j’ai bon espoir que nous ne soyons pas devenus ennemis. » Ni les Flint, ni les Travers n’ont cherché à le cacher. Même si aucune des deux familles ne le crie sur tous les toits. J’avoue faiblement ne pas avoir pensé à la réaction de Sue. Ni même cherché à savoir si elle était au courant. Trop préoccupé à comprendre pourquoi cette sœur. Et pas l’autre. « Nous ne sommes pas ennemis. » Je souffle. Je n’en veux pas comme ennemie. Ayant fait pas mal d’efforts pour accepter son indifférence. Je ne supporterai pas son dégout. J’ai fais la connerie de la laisser m’échapper. Mais pas celle de lui donner la possibilité de me détester. Enfin, c’est ce que je croyais. Ses opales venimeuses me font douter. Sincèrement. Pas elle. N’importe qui. Pour me haïr. Mais pas elle. « Ce n’est pas le meilleur endroit pour en parler. » Je lâche le sac. Qui s’écrase sur le sol. Peu importe. J’ignore les messes-basses. Les mines choquées. « Viens, avec moi … s’il te plait. » Je la prend pas le bras. Nous fraie un chemin dans la foule. Et l’entraîne dans une ruelle. Puis une autre. Jusqu’à tomber dans un cul-de-sac. Tranquille. Isolé. Elle a su faire le premier pas. Je lui dois bien la première explication. « Je voulais t’en parler. Mais comment j’aurai pu aborder un tel sujet alors qu’on est devenus de simples connaissances ? » Je lui avoue une vérité. Que je ne m’étais pas encore fait à moi-même. Si j’avais quelqu’un à prévenir. C’était Susanna. « Je me suis laissé convaincre que tu t’en foutais. » Même si dans le cas inverse. J’aurai été fou de rage. Malgré notre séparation, j’ai toujours pris de ses nouvelles. Egoïstement, je suis soulagé de la savoir célibataire. Bien trop possessif pour accepter qu’elle se réconforte dans d’autres bras. Bien trop anciennement amoureux. « Je n’ai pas encore dit oui à Beatrix. Je ne comprend pas pourquoi mon père m’a imposé ça … » Je tais la suite. Il m’a imposé la demi-vélane. Mais désire néanmoins une sang-pur. Et je ne peux pas lui avouer. Que ma poursuite n’est due qu’à lui. Et non à ma véritable volonté. De reprendre contact. « Sue, essaye de comprendre. Tu aurais voulu que je te dise quoi ? Après six ans de rupture ? Je vais me marier avec la sœur que tu détestes, sinon j’espère que toi ça va … J’espérais … Je ne sais pas ce que j’espérais. Que mon père me dit qu’il s’est trompé de Travers. Qu’il plaisantait. Que cette nouvelle ne te toucherait pas. Que cette nouvelle ne m’obligerait pas à me condamner avec une hybride. » J’interromps mon flot de paroles. J’ai pourtant encore tant à lui dire. A lui avouer. Tant de mots enchaînés par six ans d‘absence.
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M
arcus à toujours ronchonner. D’aussi loin que tu te souviens, le brun a toujours été doué pour râler. Aussi, cette aide qu’il t’accorde malgré lui, de mauvaise foi quelque part, t’arrache un demi-sourire plein de nostalgie. Tu as toujours aimé l’entendre marmonner ou même le voir froncer les sourcils. C’étaient là tes moments favoris pour l’embrasser, pour chercher à reconquérir son cœur, à apaiser ses humeurs, à le faire tien. Mais pas aujourd’hui, plus maintenant. C’est terminé et il ne reste qu’une grosse poche de terreau dans ses bras, une bien maigre compensation qui te force à faire face à la situation : Marcus va épouser Beatrix, un jour. Tôt ou tard, vous serez liés par cette fausse sœur qu’on t’impose, par ce monstre qu’on glisse partout pour te remplacer. D’abord dans le cœur de ton père, puis dans le lit de Marcus, parfois tu te demandes qui sera le prochain à en faire les frais. Mais ce n’est décidément pas le moment, parce que Marcus reprend la parole, « nous ne sommes pas ennemis » ce qui te rassure un peu. Non, vous n’êtes pas ennemis. Jamais. Et là, il mérite l’un de tes petits sourires, malheureusement il ne dure pas, parce que la situation n’a rien d’agréable pour toi, que cette nouvelle que l’on ne veut pas encore rendre officielle, est déjà beaucoup trop officieuse dans la demeure qui est tienne. Alors tu baisses les yeux et tu laisses tes doigts te déconcentrer, remettant presque ton cœur en place, alors que tu effleures des feuilles au hasard. C’est un rituel à tes yeux, c’est une thérapie. Tu te sens mieux. « Ce n’est pas le meilleur endroit pour en parler » et comme il a raison, tu abandonnes tes doigts un instant à une plante aux feuilles plus délicate que ses voisines, plissant tes yeux pour répondre doucement, presque dans un souffle : « non, assurément pas. » Et tu abandonnes la plante, tu redresses un regard las sur lui, déjà épuisé. Déjà abattu, parce qu’il ne peut rien sortir de bon de cette conversation, mais qu’elle est essentielle. Puis il y a ce sac qu’il abandonne au sol, qui te fait sursauter, avant de battre des cils. Tu ignores, avec la même tête haute que celui ayant jadis été le centre de ton univers, les regards surpris, les murmures, tu ne vois que lui : magnifique dans son léger excès. Mais les excès ça le connait tellement bien. Trop bien. Tant pis. « Viens, avec moi … s’il te plait. » S’il n’y avait pas eu ce « s’il-te-plait » tu aurais probablement hésité, mais Marcus est parfait, comme toujours, avec toi. Alors, même si tu n’approuves pas le sac abandonné au sol, tu inclines la tête, silencieuse mais consentante. Oui, tu vas le suivre, tu n’as pas même peur de lui ou de ses réactions.
Tu ne t’attendais pourtant pas à ce qu’il te touche, pas après tout ce temps, pas après que tu aies donné ton accord pour le suivre. Il n’a pas besoin de te toucher, de prendre ton bras et de te « trainer », aussi gentiment soit-il, à l’extérieur. Tu peux le suivre sans ça, tu veux le suivre. C’est ce qui fait toute la différence, mais il ne s’en inquiète pas. Peut-être qu’il a besoin de te toucher ? Peut-être que tu as besoin qu’il te touche aussi. Tu ne sais pas où il t’entraine, mais une partie de toi t’assures que ce n’est pas important. Peut-être que ton cœur ne chavire plus pour lui, peut-être que tu lui préfères une certaine tête blonde, mais il reste encore cette chose en toi qui s’épanouie à son contact. Sa chaleur t’as manqué et quand il s’arrête enfin dans une ruelle, dans une rue sans aboutissement, tu te permets de lui échapper. Pas brutalement, doucement même, comme tu l’as toujours été avec lui. Douce et ferme, femme avant son heure, caractérielle aussi mais pas inflexible, docile mais jamais effacée. Pas devant lui. Pas pour lui. Une compagne et pas une chose. « Je voulais t’en parler. Mais comment j’aurai pu aborder un tel sujet alors qu’on est devenus de simples connaissances ? » Sa question est bonne et tu abandonnes ton expression de femme irritée, tu laisses tes sourcils se détendre et soupire même tout bas, acquiesçant lentement, il marque un point. « Je me suis laissé convaincre que tu t’en foutais » mais ça, tu ne l’avais pas prévu, pas vu venir. Alors tu braques un regard surpris sur lui, un regard d’incompréhension. Comment a-t-il pu croire que tu ne ferais pas de cas de ses fiançailles à venir avec cette créature qui se fait appeler « sœur » ? Lui qui te connaissait jadis mieux que quiconque, lui qui a tout partagé avec toi, lui pour qui tu savais incliner le cou avec grâce, comment peut-il avoir cru pareille stupidité ? Déconcertée, tu ne sais plus quoi dire ou faire, sauf le fixer en clignant lentement des yeux, tes sourcils menaçant de s’incliner à nouveau sur tes yeux, dont le regard cherche à sonder le sien. Te ment-il ? Te manipule-t-il ? Tu ne sais plus, mais tu veux savoir. Il ne te laisse pourtant pas le temps de réagir, de le questionner, de le mettre au supplice, qu’il te relance avec des informations supplémentaires : « je n’ai pas encore dit oui à Beatrix. Je ne comprends pas pourquoi mon père m’a imposé ça … » Tu bats à nouveau des cils, tu te sens presque aussi idiote que Beatrix, mais ta question t’échappes tout bas : « Imposé ? » Tu n’as pas eu vent de cette histoire, ce n’est pas celle qui flotte entre les murs de cette maison qui n’est plus la tienne depuis trop longtemps. Tu as bel et bien entendu parler des fiançailles à venir de la cadette Travers, mais jamais en ces termes, jamais en tant qu’obligation. Non, tu as entendu parler d’un souhait de la part des Flint de joindre vos deux familles. Vœu que tu crois sans grand effort, vu combien les deux patriarches sont amis.
Tu ne comprends plus, il flou tout ce que tu savais au sujet de cette entente, de ce souhait. Marcus ne veut pas l’épouser ? Tu ne sais plus et tu fronces les sourcils à nouveau, presque inquiète pour lui, t’avançant d’un pas pour effleurer son avant-bras gauche, du bout des doigts. Tu n’as pourtant pas le temps de le questionner, de toute manière les questionnaires ce n’est pas tellement ton domaine. Non, c’est lui le rafleur. Toi tu n’es jamais qu’une petite secrétaire. Tu préfères noter les faits, les emmagasiné dans ton esprit. C’est donc ainsi que tu enregistre le reste de ses aveux, une main pressée contre lui, tes doigts serrant délicatement son avant-bras, comme si tu étais l’empathie même. Mais c’est faux. Il le sait, toi aussi. « Sue, essaye de comprendre. Tu aurais voulu que je te dise quoi ? Après six ans de rupture ? Je vais me marier avec la sœur que tu détestes, sinon j’espère que toi ça va … J’espérais … Je ne sais pas ce que j’espérais. Que mon père me dit qu’il s’est trompé de Travers. Qu’il plaisantait. Que cette nouvelle ne te toucherait pas. Que cette nouvelle ne m’obligerait pas à me condamner avec une hybride. » Tu soupires, soulagée et à la fois agacée. Tes sourcils gardent la même inclinaison, mais ton corps se détend, tes doigts se font plus tendre contre lui et tu lui offres un minuscule sourire. « J’essaie de comprendre, je t’assure. » Oui, tu essaie, fort même. Tu veux comprendre surtout, comprendre pourquoi son père désire une hybride dans sa famille, comprendre les motivations poussant un homme aussi fier à accepter que son héritier puisse souiller les racines familiales. Des racines qui un jour seront des branches, qui un jour feront honte à de lointain descendant. Ta main relâche alors doucement son bras et une moue songeuse aux lèvres, tu laisses le bout de tes doigts couler le long de son membre, effleurant le bout des siens dans leur lente chute, « mais pourquoi avec elle ? C'est insensé, elle n'est pas pur… » Pourtant, ce n’est pas tellement les raisons de leur union qui te dérange, c’est que ce soit lui. Avec elle. Tu ne veux pas l’imaginer et tu grimaces intérieurement, alors que ta main l’abandonne définitivement, un pas te ramenant vers l’arrière, pas assez pour être hors de sa portée, jamais, mais assez pour que tu puisses parler sans que ce soit trop étrange. Par étrange, tu entends familier. Ce que vous n’êtes plus. Ce qui te manque, surtout quand tu plantes tes yeux foncés dans les siens. Par Morgana, tu avais oublié combien il était beau et tu t’en mords même faiblement la lèvre inférieure, troublée l’espace d’un instant. Marcus à sut éveiller le désir chez toi par le passé. Toi qui te croyais immunisée aux charmes physiques, aux désirs physiques, il avait su te faire vibrer. Et là, devant lui, dans cet endroit presque privé, dans ce cul-de-sac paisible, en pleine journée, tu te rappelles des sensations que tu avais repoussée bien loin en toi.
Ne l’as-tu pas aimé avec force par le passé ? Ne l’as-tu pas supplié à quelques reprises, pour qu’il daigne te reprendre ? Votre amour était pareille à des montagnes russes, mais il était réel, parfois tendres, souvent compliqué et de temps en temps, douloureux. Mais vous êtes devenus des inconnus et cette idée te pèse d’un coup sur la conscience. Alors tu glisses tes mains sur tes bras opposés, comme pour te serrer dans tes bras, au niveau de ton ventre : « six ans, c’est terriblement long… mais qu’importe l’appellation de ce que nous sommes devenus, connaissances, étrangers, anciens amis. Qu’importe au final, tu seras toujours Marcus et si je dois te partager avec une autre femme, j’osais au moins espérer que ce ne soit pas elle. » Oui, voilà le souci, le principal du moins. Tu détournes alors ton regard, tu t’occupes sur une demeure à ta droite, à sa porte rouge et tu hoches doucement la tête, agacée. Irritée oui, pour lui lancer un petit regard courroucé : « tu vois, je pourrais comprendre si c’était une autre, mais pas elle. Je ne peux pas l’accepter. Toi, comprends-moi ! Tu sais combien je la déteste, combien elle m’a été létale ! » tu t’emportes, toi qui te fait toujours un honneur de rester paisible, toi que le drame dégoute, les scènes publiques d’autant plus, tu lèves le ton. Tu te laisses t’emporter comme ta mère a su le faire, dès qu’on a ramené une vipère dans son nid. « Et de tous les hommes que son géniteur pouvait lui dénicher, il fallait que ce soit toi ! Toi… alors qu’il sait très bien que tu étais mien, que j’étais tienne… ! Comment est-ce que ça ne peut pas me toucher ?! Alors que là… » et ta main glisse contre sa joue, chaude et douce, la pulpe de tes doigts se pressant doucement à lui, ton regard le suppliant presque. Pour qu’il comprenne, pour qu’il ressente. Pour qu’il reste quelque chose, un fil rouge, vibrant quelque part en lui. Si jamais un fil a existé. « Là dans ce tout petit contact, il reste encore tant ? Je ne te demande pas de le ressentir, je sais que ce n’est pas facile pour toi… » ta voix baisse enfin de plusieurs octets et tu baisses les yeux, regrettant aussi subitement, que la passion et la rage ont déferlés sur ton corps, cet accès de colère. Tu murmures presque la suite : « … mais tu seras toujours spécial pour moi, Marcus. » Même si cela fait de toi quelqu’un de faible. Même si tu as honte. Que ça te couvre les joues d’un rose déplacée et que ta main se retire d’un coup de sa joue, flottant à quelques millimètres de la peau, pour se retirer, presque tremblante.
Et ce contact. Dont j’ai l’impression de ne pas avoir assez profité. Si j’avais su qu’on me l’enlèverait. Que je ne chercherai plus à le retrouver. Si j’avais su qu’on en arriverait là. Deux amants pourtant si épris l’un de l’autre. Peut-être qu’à cause de nos ruptures répétées, je la considérais comme acquise. Persuadé qu’on continuerait ainsi. Indéfiniment. Mienne pour l’éternité. Sien jusqu’à la fin. Gamin rêveur. Qui s’est laissé bercer par une histoire passionnelle. Qui n’en voyait pas la fin. Qui ne se l’imaginait pas s’éteindre. A tort. « J’essaie de comprendre, je t’assure. » Je laisse ses doigts s’aventurer. Par nostalgie. Presque par besoin. « Mais pourquoi avec elle ? C'est insensé, elle n'est pas pur… » Je continue de me poser la question. Même si depuis le revirement de mon père, la réponse m’obsède moins. Pourquoi Beatrix ? Pourquoi pas la première fille Travers ? Ou simplement une autre famille respectable ? Par amitié peut-être. Désirant faire plaisir à un vieil allié. Qui préfère l’une de ses filles à l’autre. Il s’est finalement rendu compte. Que ça ne valait pas le coup. De sacrifier la pureté de sa lignée.
Je retiens un élan. Lorsque sa main se retire. Avide de conserver notre proximité. Enfin retrouvée. Mais je ne sais plus ce qui est d’usage. Et ce qui ne l’est pas. « Six ans, c’est terriblement long … » Beaucoup trop long. Lorsqu’on s’ignore. Lorsqu’on laisse son premier amour faire sa vie. S’envoler. En restant sur terre. Et le regarder s’éloigner. Presque impuissant. Abandonné. Désireux de s’enfuir avec le complice. De toute une adolescence. « Mais qu’importe l’appellation de ce que nous sommes devenus, connaissances, étrangers, anciens amis. Qu’importe au final, tu seras toujours Marcus et si je dois te partager avec une autre femme, j’osais au moins espérer que ce ne soit pas elle. » Si Lyubov a su apaiser ma violence et ma fureur. Sue ne l’a jamais fait naître. Malgré l’éclat de nos disputes. Souvent jouées et rejouées. Elle m’a parfois agacé. Parfois contrarié. Mais ce n’était rien. Rien à la colère dont j’ai pu faire preuve par la suite. Avec d’autres. Il ne me serait jamais venu à l’idée de lever la main sur elle. Jamais. Malgré ses prunelles haineuses. Malgré sa voix enflammée. Malgré ses reproches. Malgré nos différences. Jamais. « Tu vois, je pourrais comprendre si c’était une autre, mais pas elle. » Là est peut-être notre différence. Qu’importe ceux à qui elle s’est fiancée et se fiancera. Je n’ai jamais pu comprendre. Ils ne lui correspondaient pas. Jamais assez bien pour elle. N’arrivant même pas à la cheville de la belle. « Je ne peux pas l’accepter. Toi, comprends-moi ! Tu sais combien je la déteste, combien elle m’a été létale ! » Je le sais. Et j’aurai pu m’y opposer. J’aurai pu refuser cette union. Ridicule et destructrice. J’aurai pu contester ce mariage dont je ne veux pas. J’aurai pu. Si son autorité ne m’ôtait pas le courage d’un ancien amoureux. Gosse beaucoup trop lâche face à l’autorité paternelle. Trop obéissant. Faible et dégonflé. « Je sais … » C’est tout ce que j’arrive à lui souffler. Honteux de ne pas être un peu plus audacieux. Pour elle. « Et de tous les hommes que son géniteur pouvait lui dénicher, il fallait que ce soit toi ! Toi… alors qu’il sait très bien que tu étais mien, que j’étais tienne… ! Comment est-ce que ça ne peut pas me toucher ?! Alors que là… » Je frissonne. Lorsque sa paume trouve ma joue. « Là dans ce tout petit contact, il reste encore tant ? Je ne te demande pas de le ressentir, je sais que ce n’est pas facile pour toi… » Ça devrait l’être pour elle ? « … mais tu seras toujours spécial pour moi, Marcus. » Mon palpitant un peu fou s’enflamme. Je ne cherche pas à l’éteindre. Je n’en ai pas la force.
Et sa main se retire. Une nouvelle fois. Mais cette fois. Je ne peux pas retenir mon élan. Je rattrape ses doigts. Pour les entrelacer aux miens. Tant pis pour les formes de politesses. Ou formes d’usages. Que je devrai adopter. Je ne peux plus m’y plier. Je n’arrive plus à m’y résoudre. J’ai besoin de son contact. De sentir sa peau contre la mienne. De m’assurer de sa présence. Comme autrefois. « Je ne comprend pas plus que toi. Pourquoi elle. Pourquoi pas une sang-pur d’une autre famille. Ou pourquoi pas toi. » Ça aurait été plus simple. Que mon paternel arrête son choix directement sur Susanna. Plus agréable. Moins prise de tête. Plus plaisant. Peut-être aussi plus logique. Ou qu’il ne choisisse pas. Et me laisser maître de mon futur. « Il faut que je réponde. Un jour ou l’autre. Même si je n’ai aucune envie d’accepter. J’attends tous les jours une ouverture pour refuser ça à mon père. Je ne veux pas de quelqu’un comme elle. Surtout en sachant ta haine. » Je l’ai eu. Cette ouverture. Je l’ai enfin eu. Mais je n’ose pas lui avouer. De peur qu’elle prenne nos retrouvailles pour une simple mission. Même si c’est sûrement le point de départ. C’est maintenant bien plus que ça. Pourquoi ? Pourquoi je l’ai laissé m’échapper ? Comment j’ai pu être aussi stupide. Tout ça pour quoi ? Avoir joué avec Khloé. Et torturer cette sang-mêlé pendant une longue année. M’amuser à endosser le rôle du chaud lapin avec d’autres. Me distraire avec Beatrix. A montrer qui est le plus fort de nous deux. Et me laisser perdre dans la douceur de Lyubov. Tout ça pour devenir faible. Pour ne plus être à ma place. « Les parents peuvent parfois être incompréhensibles. Qui aurait cru un jour qu’un Flint aussi fier que mon père puisse imposer ça à sa famille ? Ou que le tien se préoccupe plus d’une batarde hybride que de sa fille légitime.» Il ne me semble pas l’avoir mérité. Enfant toujours soucieux de faire honneur à son patriarche. Il ne me semble pas qu’elle l’est méritée. Progéniture beaucoup plus précieuse. Plus estimable. Elle ne devrait pas subir l’infidélité du père. Tout ça parce qu’il a été assez faible. Pour succomber. A une chose. Inhumaine. Il n’a pas l’air d’en avoir honte. Encore maintenant. Qu’il préfère sa fille issue d’un adultère humiliant. Plutôt que celle digne. Honorable. Parfaite. C’est incompréhensible.
« Sue, j’aurai aimé que ce soit différent. » Que cette situation n’existe pas. Le choix de mon père. Le mariage obligatoire. Ma relation avec Khloé. Ou même mon lien avec ma rebut. Et surtout. Qu’on ne soit jamais quitté. Sue et moi. Couple d’adolescent amoureux. Solide. Malgré les ruptures. Couple que j’envie désormais. Il n’est plus question de mon père. De sa mission. De fiançailles. Il s’agit uniquement de ce que j’ai perdu. Il ne s’agit plus que d’elle. « J’ignore pourquoi je t’ai laissé partir. » Après six ans. Je n’ai trouvé aucune raison. Quelles soient valable ou non. Elle est la seule que j’ai réellement aimée. La seule.
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T
u tiens bien droite devant lui et même s’il te dit qu’il sait, tu n’arrives pas à y croire. Non, il ne comprend pas. S’il comprenait, s’il savait, il ne pourrait pas. Il n’aurait jamais osé croire que tu t’en fichais. Jamais. Où est donc passé l’ancien amant ? Où c’est envolé ce vieil ami te connaissant par cœur, pouvant prévoir tes humeurs ? Loin. Trop loin. Fort probablement avec ta jeunesse. Tu regrettes de l’avoir touché, tu regrettes de ne pas le toucher davantage. Tu ne sais plus ce que tu veux. Ce que tu ressens. Il te tue, encore aujourd’hui, il se joue de toi oui. Il t’enflamme, mais tu ne sais plus brûler, tu n’es plus une femme allumette, tu es devenue trop sage. Trop mûre. Trop adulte, pour vos anciens enfantillages. Tu ne cherches pas la guerre, ni les conflits. Tu ne cherches peut-être que sa chaleur, mais mieux, tu cherches sa compréhension. Et tes doigts te brûlent en quittant sa peau, ironie du sort, mauvais tour joué par un monde trop cruel. Tes doigts te font presque mal loin de lui, mais c’est pire quand il les rattrape et les fait siens. Ton souffles se coince dans sa gorge et tu figes, pareille à une biche en plein jour, au son d’une branche brisé avec force. Tu figes et tu attends. La mort. Sa chaleur. Son baiser. Tu n’arrives pas à te décider. Tu attends que ça cesse, que sa main relâche la tienne, mais c’est peine perdue. Il entrelace tes doigts aux siens, les ramènent à cet endroit fait sur mesure pour les tiens. Trop parfait. La nostalgie te frappe de plein fouet, pareille à un impedimenta cruel, faisant de ta main un poids mort. Non, pas mort, vivant d’une autre envie. Celle de lui, de sa main, de sa chaleur, de ses doigts agiles qui se resserrent doucement aux tiens. À qui les tiens répondent avec la même familiarité. Tu ne devrais pas, mais lui non plus. Vraiment pas. Puis sa voix bloque tout le reste; tes doutes, tes craintes, tes envies, ton soulagement et ton embarras. « Je ne comprends pas plus que toi. Pourquoi elle. Pourquoi pas une sang-pur d’une autre famille. Ou pourquoi pas toi. » Ça, tu ne l’avais pas prévu et encore une fois, il te coupe le souffle. Pourquoi est-ce lui qui doit parler de toi en ses termes ? Pourquoi Marcus ? Pourquoi pas Draco ? Pourquoi après tout ce temps ? Tu te sens stupide de paniquer à ce point pour un détail aussi insignifiant, ce n’est pas comme si tu ne vivais que pour te marier. Tu vaux plus que cela, décidément. Heureusement, il ne te laisse pas de répit, pas de pause pour trop réfléchir, pour analyser. Lui. Toi. Ce vous passé, révolu. Ce vous hantant un coin de ton esprit et possiblement de ton cœur. Il bat en toi, tu es fichu, mais tu refuses de rendre les armes. Jamais. Pas une Travers. « Il faut que je réponde. Un jour ou l’autre. Même si je n’ai aucune envie d’accepter. J’attends tous les jours une ouverture pour refuser ça à mon père. Je ne veux pas de quelqu’un comme elle. Surtout en sachant ta haine. » Il le faut, tu le sais aussi et tu plantes un regard inquiet dans le sien. Tu ne veux pas qu’il réponde. C’est là la pure vérité. Tu le refuses. Pas lui, pas avec elle. Jamais. Mais tu ne peux pas le supplier, tu ne peux pas le comprendre, tu ne veux pas de toute façon. Ni l’un, ni l’autre. Trop fière, trop caractérielle, trop toi. Trop Susanna pour te jeter à son cou et lui suggérer une autre fin, trouver d’autres plans. Alors tu te contentes de serrer doucement ses doigts des tiens, de t’approcher à nouveau, d’un pas. Puis deux. Enfin, trois.
Que faire, que faire ? Tu te demandes la question, pareille à une litanie qui tourne en boucle dans ton esprit. Prête à te soutirer ta raison. Prête à devenir ta prison. Non, tu fronces les sourcils et incline la tête sur la droite, baissant les yeux pour chercher une réponse sur son torse. Trop fort, trop puissant, trop Marcus. Trop chaude et trop homme, tu te rappelles d’y avoir fait courir tes doigts. Tu y as perdu des baisers, mais tout ça appartient au passé. Tu n’es plus cette fille innocente. Tes jeux ne sont plus aussi sucrés, tu es une femme mieux avisée. Tu n’es pas de ses femmes qu’il convoite maintenant, tu n’es pas une libertine, pas une courtisane. À d’autres de faire courir leur doigt contre sa masculinité. À bien d’autres de perdre des baisers sur sa peau bouillante. Quand bien même tu les envies maintenant. Quand bien même tu regrettes de ne pas être devenue aussi légère. Aussi sensuelle. Aussi frivole. « Les parents peuvent parfois être incompréhensibles. Qui aurait cru un jour qu’un Flint aussi fier que mon père puisse imposer ça à sa famille ? Ou que le tien se préoccupe plus d’une batarde hybride que de sa fille légitime. » Batarde, un mot qui te fait grimacer de tout ton être. Batarde, le mot maudit. Tu rejettes aussitôt tes pensées impures, ce presque élan de désir pour lui. Pour l’homme qu’il est maintenant. Tu redresses les yeux, fait face et te permet un petit sourire plein d’ironie, d’une douleur qui ne sait pourtant pas lui mentir à lui. Tu peux te jouer des autres, mais pas de lui, l’as-tu oublié ? Tu t’avoues honteusement que oui. Marcus te connaissait, tu n’as pas tant changé, ce sourire qui se veut plein d’ironie ne cache finalement que cette douleur sourde, cette souffrant sans nom, que dissimule ton cœur écorché. La faute d’un père cruel, la faute d’un amour trop fort arraché trop tôt. Tu ne t’en remettras donc jamais ? Jamais. « Le sang de vélane, il parait que ça rend les hommes fous. Les pères n’y résistent pas davantage que les anciens amants. » Tu es injuste avec lui, tu ne veux pas réellement l’accuser, mais tu le fais. Tu craches ton venin, blessée. Pas par lui, tes doigts cherchent pourtant à s’écarter des siens et déjà tu rebrousses chemin. La faute de la batarde. Toujours. Tu baisses alors les yeux, coupable. Ça, tu sais l’être. Pour lui, pas pour tout le monde. Pas pour ce père ignoble. Pour Marcus. « Pardon, ce n’est pas ce que je voulais dire… ce n’est pas de ta faute. Pas vraiment. » Mais tu n’es pas non plus stupide, tu l’as vu rôder autour d’elle. Tu sais qu’elle a passé du temps seule avec lui. Une nuit même. Tu le connais aussi, très bien. Trop bien. Marcus l’homme de feu, le corps puissant et les désirs tumultueux. Tu te rappelles de tout, du meilleur surtout.
Tu te rappelles et tu rougis à la fois d’embarras, face à tes souvenirs, et de rage. Un peu plus quand il ouvre à nouveau la bouche, pourtant sage. Pourtant adorable. « Sue, j’aurai aimé que ce soit différent. » Menteur. Tu n’y crois pas et déjà, tu rebrousses encore chemin. Un pas, puis deux. Il te fait mal, il te gifle avec ses mensonges. Tu l’aimes encore, différemment, pas aussi fort. Pas aussi grand. Rien n’est intact en toi. Plus maintenant, même pour lui. Mais tu n’arrives pas à croire ça. Pas totalement. Tu te méfie et tu plisses tes jolis yeux chocolat. « Arrête… » Tu n’as pas parlé suffisamment fort et il t’achève tout simplement. Tout net. « J’ignore pourquoi je t’ai laissé partir. » Cette phrase, tu ne la désires pas. Tu ne veux pas la désirer en réalité. Non, pas dans sa bouche. Pas avec ce regard, pas avec cette main si proche de toi. Tu sens ta poitrine se gonfler, ta respiration s’accélérer. Tu ne paniques pas, tu as peur. Un peur grandiose. Pas maintenant. Pas lui. Pas comme ça. Tu secoues doucement la tête, faisant voleter une mèche de cheveux près de ta joue. « Ne me mens pas Marcus… » tu serres doucement un poing et quand il ose remuer, tu te braques un peu plus, presque menaçante. Fébrile et anxieuse. Tout ce que tu n’es jamais. Par sa faute, par sa présence. Par ses mots mal choisi. Par des mensonges honteux. « Je ne le supporterais pas ! Je… » Tu ne sais plus quoi dire, tu n’y vois plus clair. Ta vision est brouillée. Par des espoirs fous, des élans du passés. Des presque regrets s’entassent dans ta tête. Pourtant, tu ne regrettes pas votre passé, pas même votre séparation. C’était naturel, c’était logique. C’était prévisible.
Alors tu souris, de ce même air malheureux, de cette même façon douloureuse. Souffrante. « Je ne suis plus cette fille, je ne suis plus celle qui acceptait tes écarts. Qui pouvait fermer les yeux sur le feu brûlant en toi et prétendre s’y brûler à nouveau, pour peu que tu acceptes d’approcher de nouveau ta flamme près d’elle. Je ne suis plus elle… » Tu le regrettes presque, cette époque était moins compliqué. La vérité c’est que tu aimais l’aimer. Tu l’aimais. Tu ne sais plus comment le conjugué, là debout dans cette ruelle trop ensoleillé, trop banale, trop calme. Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ? « Je sais que tu as passé la nuit avec elle, il y a quelques jours… alors ne me dit pas que tu aimerais que ce soit différent. J’ai toujours de l’affection pour toi Marcus, mais je sais de quel bois tu es fait. Je sais combien tu peux sombrer dans les baisers des autres, te rouler dans leur gémissement et t’enivrer de leur chair. Je sais ce que tu as fait à cette fausse sœur qui t’es promise. Alors, non. Tu n’as pas le droit de dire que tu ne comprends pas pourquoi nous sommes dans cet état aujourd’hui. » Tu es injuste, mais tu l’assumes. Toi qui a toujours été mature, opposé à Beatrix, tu as toujours sur te montrer de mauvaise foi. Mauvaise joueuse, tu refuses de perdre sans te sauver la face. Marcus ne peut pas se rouler dans des draps avec le monstre et espérer te rappeler combien vos corps s’y emboitaient bien par la suite. Tu le refuses. Tu rejettes l’idée. C'est au-dessus de tes forces, comme de partir sur ces bonnes paroles et de l'abandonner. Rester, partir, tu ne sais plus quoi faire. Comme toujours avec Marcus. Maudit sois-tu d'encore fléchir devant lui, d'encore frémir. Femme faible. Femme stupide.
« Ne me mens pas Marcus… » Je ne mens pas. Pas là en tout cas. Je suis sincère. Tout ce qu’il y a de plus honnête. J’aurai aimé que notre histoire ne s’arrête pas comme ça. Qu’elle continue. Eternellement. Sans jamais connaître la signification du mot fin. Que Beatrix ne vienne jamais rencontrer ma route. Comme potentielle fiancée. Comme dangereuse tentatrice. J’aurai préféré la facilité. J’aurai aimé autre chose. Que cette situation pervertie. Qui se referme. Encore et encore. Cette situation pareille à une souricière. Je me sens oppressé. Pris au piège. J’étouffe. Mis là comme un appât. Par un père qui ne comprend rien aux sentiments. Qui se fout des conséquences de ses ordres. « Je ne le supporterais pas ! Je… » J’aimerai pouvoir la prendre dans mes bras. La rassurer. La bercer. Lui chuchoter que tout ira bien. Parce qu’on est ensemble. Et que rien ne peut nous arriver. Comme avant. Mais je ne suis plus en position de faire ça. Je ne le serai sans doute plus jamais. « Je ne suis plus cette fille, je ne suis plus celle qui acceptait tes écarts. Qui pouvait fermer les yeux sur le feu brûlant en toi et prétendre s’y brûler à nouveau, pour peu que tu acceptes d’approcher de nouveau ta flamme près d’elle. Je ne suis plus elle… » Pourtant j’aimerai. Désir brûlant et puissant. Qui consume ce vieux palpitant cramé. Je le souhaite. Qu’elle soit encore l’adolescente que j’ai aimais. Dont j’étais si épris. Qu’on puisse reprendre. Là où notre histoire s’est achevée. Comme si de rien. Comme avant. Comme on en avait l’habitude. Parce que c’est comme ça qu’on fonctionne. Qu’on fonctionnait. « Je sais que tu as passé la nuit avec elle, il y a quelques jours… » Les rumeurs vont vite. J’aurai préféré qu’elle ne soit pas au courant. Petit gosse coupable. Et découvert. Bêtise dévoilée. Exposée à la personne à qui je désirais le cacher. Je ne veux pas qu’elle sache. A quel point je peux être faible. A quel point je peux décevoir. « Alors ne me dit pas que tu aimerais que ce soit différent. J’ai toujours de l’affection pour toi Marcus. » Arrêtes toi en là. Pitié ne rajoute rien d’autre. « Mais je sais de quel bois tu es fait. Je sais combien tu peux sombrer dans les baisers des autres, te rouler dans leur gémissement et t’enivrer de leur chair. Je sais ce que tu as fait à cette fausse sœur qui t’es promise. Alors, non. Tu n’as pas le droit de dire que tu ne comprends pas pourquoi nous sommes dans cet état aujourd’hui. » Elle me dépeint comme un dépravé. Voilà tout ce qu’elle pense de moi maintenant ? Un homme abruti par ses désirs charnels ? Mais tout ça peut changer. Pour elle. Avec elle.
« Sue, ce n’est pas ce que tu crois. » Mais ça aurait pu l’être. Il ne s’est rien passé de plus que des baisers. Parfois passionnés. Parfois rageur. Et pourtant tous sans valeur. Oui, parce que la nuit ne s’est pas achevée comme je le souhaitais. Si Beatrix ne m’avait pas supplié. Sue aurait raison de m’accuser. Aussi sévèrement. Et je ne sais pas ce qui est pire. Entendre ses reproches. Ou comprendre que ça l’affecte à ce point. De faire naître sa déception. Et j’ai du mal. Avouer à Sue qu’on n’est pas allé loin. Et que j’ai laissé sa sœur dormir avec moi. Chastement. Sous sa volonté. Qu’une certaine complicité s’est créée. Même si je méprise ce qu’elle peut être. Cette soirée et son déroulement me relient à Beatrix. Et je ne peux rien y changer. Mais je m’en veux. Je regrette. Terriblement. « Je ne prétends pas avoir été irréprochable cette nuit là. Tu le dis toi-même, le sang de vélane, ça rend fou. » Et j’ai beau vouloir être le plus fort d’entre eux. Ce n’est pas le cas. Je suis humain. Un homme dans toute sa faiblesse. Un homme dans toute sa lâcheté. « Je sais que ça ne pardonne rien. Que tu as tous les droits de te méfier. Mais je te le répète, ce n’est pas mon choix. Beatrix m’a été imposée. Et peu importe ce qui a pu se passer cette nuit là. Ça ne signifie rien du tout. Je ne veux pas d’elle. » Mais qu’est-ce que je veux au fond ? Réussir cette mission pour mon père ? Ou pour moi ? Pour récupérer la plus belle personne. Qu’il m’ait jamais été donnée de rencontrer. Egoïstement. Injustement. Je veux la reconquérir. Regagner son cœur. Que je n’aurai jamais dû abandonner. Est-ce ça mon désir le plus profond ? Certainement. « Et non. Je ne comprends toujours pas comment on en est arrivé là. Ni pourquoi. Ça n’a rien à voir avec elle. Il ne s’agit que des deux adolescents qu’on été et qui ont grandi séparément. Tu peux me le dire toi ? Pourquoi on n’est pas devenus adultes ensemble ? Je t’aimais Sue. Et je sais que c’était réciproque. Alors dis-moi comment ça se fait. Explique-moi pourquoi nous sommes dans cet état là aujourd’hui. » Car moi je ne trouve aucune raison. Aucune explication. Rien ne peut justifier cette absence. Elle représente tout ce qui m’ait arrivé de mieux. Tous les meilleurs moments. Les plus beaux. Les plus précieux.
« Sue, tu es la seule raison qui m’empêchera de me fiancer avec elle. Dis-moi de refuser et je le ferai. » S’il te plaît, dis le. Exige-le. Cri moi de renoncer à elle. Que je puisse y voir un dernier espoir. « Parce que ça a toujours été toi. A Poudlard. Et même après six ans d’absence. Qu’importe ce qu’on a pu vivre chacun de notre côté. Ce n’est pas pour rien qu’on est là aujourd’hui, tous les deux. C’est parce que ça a toujours été toi. » Et ce sera toujours le cas. Elle a été assez importante pour me manquer. Et même là. Alors qu’elle est en face de moi. Alors que je lui parle. Elle me manque.
I will always have a swollen wrist scar tissue around my heart
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He was so knowledgable in loving, but had no clue how to love. Our nightmares are so different, it’s amazing we ever shared a bed.
Look at your watch now !
T
u ne veux plus être là, devant lui, dans cette satanée ruelle. Trop belle, trop paisible, trop parfaite pour une conversation intime, privée, interdite surtout. Parce que vous n’êtes plus un tout. Parce que vous n’êtes plus rien, sinon des fantômes du passé. Tu tords tes doigts ensemble, lance un regard par-dessus ton épaule, signe que tu désires fuir, que tu rêves de faire claquer tes escarpins sur les dalles inégales du sol. Marcus ne t’as jamais vu courir avec des chaussures pareilles, il n’a jamais vu combien tu peux rester gracieuse, même dans un état aussi lâche. Tu songes à lui en faire la démonstration, mais ton orgueil rage en toi, hurle son désaccord. Non. Non qu’il te rugit aux oreilles. Tu es peut-être une femme fragile, stupide même, mais tu n’en es pas moins orgueilleuse, un défaut, le seul, que tu devais hériter de ton géniteur. Oh combien tu le hais en ce moment même, de t’empêcher de fuir cet incendie que tu sens venir. La fumée envahit ton esprit, des foyers s’allument dans les recoins de ton cœur, alors que tu lui fais face. Alors que tu le vois se débattre dans son propre brasier : « Sue, ce n’est pas ce que tu crois. » Tu fronces aussitôt les sourcils, laisse l’incendie prendre de l’ampleur, y engouffre de l’air, pour faire grandir les flammes. Par Morgana, qui croit-il berner ? Croit-il réellement que tu ne le connais pas ? Que tu n’as pas suivis les frasques de ses relations intimes avec les femmes ? Que tu n’as pas retenue chacune des conversations que les femmes, pour la plupart stupides et sans intérêt, avaient autour de toi à son sujet ? Que tu ne sais pas qu’il frappait sa dernière petite amie ? Qu’il est devenu un homme à femme ? Que son aura de danger les font toutes tomber dans ses bras. Beatrix aussi. Beatrix surtout et tu grimaces. Sous la douleur de toutes ses pensées. Sous ce prénom maudit. « Je ne prétends pas avoir été irréprochable cette nuit-là. Tu le dis toi-même, le sang de vélane, ça rend fou. » Son excuse t’arrache, bien malgré toi, un bout de cœur. Tu le sens se disloquer de la masse informe qui vit en toi, cette masse qu’est devenu ton cœur. Il n’est plus rond, plus rose, plus lisse, il est rapiécé. Tu l’as remis en place, tant bien que mal, au fil des années. Avec son aide. Sans son aide. Tu le sens glisser et se déloger sans rien te demander, abandonnant le brasier qui brule en toi, pour tomber au sol. Ploc, tu ne te sens pas plus légère. Tu le sens presque, visqueux à tes pieds, bout de chaire noircit qui fume encore et que tu aimerais dissimuler sous un bout d’escarpin. Mais tu ne peux pas, même si tu sais que Marcus ne sera pas fourbe. Il saura. Il sait, parce qu’il laisse filtrer la douleur de par son départ, il laisse un presque gémissement t’échapper, ainsi que quelques mots, « ah oui, évidemment, je devrais me montrer plus compréhensive, c’est vrai ! Pauvre Marcus ! » Ton ironie dissimule toujours ta douleur. Ta souffrance. Il le sait. Toi aussi. Tu as honte, honte d’être ainsi. Tu as honte de te laisser atteindre par leur rapprochement. Par une stupide nuit qu’ils ont partagée.
« Je sais que ça ne pardonne rien. Que tu as tous les droits de te méfier. Mais je te le répète, ce n’est pas mon choix. Beatrix m’a été imposée. Et peu importe ce qui a pu se passer cette nuit-là. Ça ne signifie rien du tout. Je ne veux pas d’elle. » Imposé, ce mot résonne dans ton esprit. Ton cœur, avec son trou, te chuchote d’y porter attention. Il ne l’a pas choisi. Toi oui. Autrefois, dans un passé pas si lointain. Dans un passé qui pulse encore en toi. Un bout vivant dans ce qui se meurt à tes pieds, un autre se consumant lentement en toi, vivant dans cette fournaise que tu abrites. Tu n’es plus une femme devant lui, plus une fille allumette, une fille de papier. À bruler, à déchirer, à consumer. Tu es le feu, celui qui rougeoie, qui monte vers le ciel. Mélange de jalousie, de rage, de remord, d’accusation et de désir. Par Morgana, tu le désires encore et tu le regrettes. Tu ne veux pas. Tu ne veux plus. De ses doigts, de sa bouche, de cette voix chaude, onctueuse. Non. Pas encore. Pas lui. Pas vous. Et si ton esprit te rappelle qu’il s’est passé « des choses » au courant de cette fameuse nuit, dont il ne veut pas parler, tu sais que vis-à-vis de lui, ton cœur à toujours sut parler plus fort. Il t’oblige à baisser les yeux, à fixer les dalles inégales, à y chercher ce bout que tu y as laissé. Il est disparut, il n’est plus. Puis sa voix revient à l’attaque, te forçant à fermer les yeux. Pour t’y perdre, pour faire rouler le gout de ses mots, contre ta langue. Comme un bonbon. Comme une douceur. Amer, acre, à l’arrière-goût aigre. « Et non. Je ne comprends toujours pas comment on en est arrivé là. Ni pourquoi. Ça n’a rien à voir avec elle. Il ne s’agit que des deux adolescents qu’on été et qui ont grandi séparément. Tu peux me le dire toi ? Pourquoi on n’est pas devenus adultes ensemble ? Je t’aimais Sue. Et je sais que c’était réciproque. Alors dis-moi comment ça se fait. Explique-moi pourquoi nous sommes dans cet état là aujourd’hui. » Tu ne sais pas. Tu ne sais plus. Comme toujours avec lui, toujours. Il mêle tes pensées, ferme les fenêtres que tu avais ouvertes pour que le feu fasse tout flamber. Tu refuses d’ouvrir les yeux, refuses de le regarder en face. Tu pourrais t’y perdre. Tu pourrais te perdre. Pire, tu ne veux pas le perdre lui. Femme fragile, femme de papier, il saurait encore te déchirer. Il suffirait qu’il te touche pour que tu t’enflamme. Il suffirait qu’il t’embrasse pour que tu te consume. Dans ses bras, dans son lit, dans cette ruelle trop propre.
« Sue, tu es la seule raison qui m’empêchera de me fiancer avec elle. Dis-moi de refuser et je le ferai. » Il le fait, il le fait vraiment. Tu sens un bout de toi se déchirer, mais pas comme plus tôt. Ton presque cœur ne se démembre pas, au contraire, il ralentit sa cadence. Comme pour t’aider, comme pour t’encourager à te concentrer sur ton esprit. Marcus n’a pas le droit de te donner ce pouvoir. Il ne peut pas le faire. Il ne doit pas le faire. Tu te décides enfin à ouvrir les yeux, à battre des cils, tes paupières te semblant lourdes, trop lourdes. Tu cherches le mensonge dans ses jolis mots, tu cherches le piège qu’il te tend. Non pas qu’il ait toujours été ce genre d’homme. Tu lui fais encore confiance quelque part, mais tu te veux méfiante. Parce qu’il a changé, parce qu’il a vieillit. Parce qu’il la frappait, parce qu’il a passé une nuit avec Beatrix. Il n’est qu’un homme faible avec ses défauts, mais toi tu le faisais roi. Tu le voyais monarque, régnant sur les sept royaumes vivant en toi. Dirigeant chacun des battements de ton jeune cœur, celui déjà bien abimé qu’on t’avait légué toute petite déjà, mais de plus en plus vigoureux au fil des années, de ses moments passé avec lui. Ta surprise est totale, la sienne aussi. Il ne s’attendait pas à dire cela, non ? Il ne t’a pas attendu, c’est impossible, donc oui, la surprise ce doit d’être entière pour lui aussi. « Parce que ça a toujours été toi. A Poudlard. Et même après six ans d’absence. Qu’importe ce qu’on a pu vivre chacun de notre côté. Ce n’est pas pour rien qu’on est là aujourd’hui, tous les deux. C’est parce que ça a toujours été toi. » Cette fois, ton corps réagis de lui-même, tu t’avances, plaque une main contre sa bouche. Tu le forces à se taire. Par Morgana qu’il se taise ! Qu’il cesse de te labourer la poitrine de ses deux mains puissantes. Qu’il arrête de jouer avec ton esprit. Qu’il cesse de faire battre ton cœur aussi fort, à battre ainsi, il pourrait le briser. Il l’a déjà fait. Il le fera encore, voilà la vérité et le souffle irrégulier, la poitrine gonflée à son maximum, haletante presque, tu dardes un regard désespéré dans le sien.
Il tue les mots dans ta bouche, il te repousse au-delà de ce que tu te sens capable d’endurer pour le moment. Il t’accule au pied du mur. Marche ou crève ? Mais tu ne veux pas, ni l’un, ni l’autre. Toi tu veux courir. T’enfuir de cette ruelle, de ses yeux sombres, trop veloutés, trop lui, où se reflète votre passé. Où tu aperçois encore de la lumière, une chandelle allumée pour toi. Un peu de chaleur accessible, toi qui meurs de froid, alors que tu te consumais en un fabuleux brasier il y a quelques instants encore. Marcus se joue de toi, de ton cœur, de ton corps. De ton esprit. Tu chavires, tu perds pied et tu te décides à lui répondre avec empressement, en chuchotant : « arrête ! Je t’en supplie, arrête… je... je ne peux pas prendre ce genre de décision. Pas pour toi… si vraiment c’est toujours moi… » tu t’essouffles, tu respires trop vite. Tu dois te calmer, mais ta main contre ses lèvres ne t’aide pas et tu le retires lentement, le suppliant d’être sage du regard. De ne pas te toucher. De t’embrasser. De rester à une distance raisonnable. À te prendre dans ses bras. Tu lui envoie tous les signaux contradictoires, ton regard passant de son œil droit à celui de gauche, tes lèvres s’entrouvrant sous ta respiration laborieuse. Ce n’est pas toi. Ce n’est pas la vraie Sue. Celle en plein contrôle de ses émotions, de ses actes. Ou peut-être que si. Peut-être que tu n’es finalement que feu ardent et lave mousseuse de l’intérieur. Pour lui. Tu chuchotes la suite, faute de retrouver la parole. Faute de savoir quoi lui dire. « Pourquoi avoir passé la nuit avec elle ? … » Oui voilà la bonne question, celle qui te fait tourner la tête, qui te donne la nausée, qui te pousse à t’enfuir. Est-ce que Beatrix à gémit sous son corps ? Est-ce que, comme toi, elle a chuchoté contre son oreille : encore. Encore et encore, afin qu’il ne s’arrête jamais, comme dans le passé. Quand tu rejoignais sa chambre, quand tu le chevauchais, quand tu glissais tes doigts dans sa tignasse sombre, un « plus fort » suppliant hoqueté dans les airs. Tu t’es offerts à lui, tu lui a tout donné, même quand il ne te restait plus rien, tu as cambré les reins, gonflé tes seins et tu t’es tordu pour atteindre le plaisir avec lui, infatigable, inlassable. A-t-elle la même énergie que toi ? Le même dévouement pour sa personne, pour sa force ?
Ta main hésites, tremble et se referme finalement contre sa joue, alors que tu effleures ta lèvre du bout de tes dents, ton regard passant du sien à sa bouche. Cette bouche que tu as tant aimée, à qui tu as tant offert, à qui tu as gouté encore et encore. « Est-elle devenu ton nouvel autel ? Est-ce elle, que maintenant tu pries, la nuit … Marcus ? » Tu ne devrais pas dire ça, tu ne devrais pas le laisser savoir que pour toi vos moments intimes étaient de véritable rituel. Des cérémonies en l’honneur de l’amour, de la passion, de tout ce qu’il y a de meilleur en ce monde. Mais c’est trop tard, il a vu le désir dans ton regard, il a vu la jalousie et n’y tenant plus, enflammée par tes propres craintes, par ses souvenirs que tu as mis en toi, tu te hisses sur la pointe des orteils pour plaquer une bouche avide contre la sienne. Tu le bois des lèvres, comme une eau de vie, tu résistes pourtant un instant à plaquer ton corps au sien. Seule ta main te relie à lui, ta main et ta bouche, tes lèvres qui s’entrouvrent avec les siennes, dans un unisson qui te vrille le cœur. Qui t’en tord l’estomac. Tu ne respires plus, tu ne fais que le boire, que le vivre, que le désirer et ta main glisse finalement contre sa nuque, des mèches brunes se faufilant entre tes doigts, alors que ton corps retrouve le sien et que tu te plaque à lui. Masse de désir, masse de besoin, masse de chaleur. Tu halèterais si tu le pouvais, si tu savais comment respirer, mais non, tu l’embrasses tout simplement avec désespoir, à y perdre ton âme, à te détester dans quelques heures. Aucune rage ne vit en ce baiser qui s’éternise, qui se transforme. Tu n’as que de l’amour, que de la peur, qu’un énorme besoin à lui offrir. Tu crains le pire, tu sais qu’il te brisera le cœur et que tu n’y survivras probablement pas, mais tu l’embrasses quand même. Quand ta bouche relâche la sienne, tu fronces les sourcils, les yeux clos, la douleur faisant la guerre au plaisir. À ce besoin de plus. Encore que tu veux lui dire. Plus fort que tu pourrais chuchoter. Comme autrefois, comme avant. « Répond moi… » Fait moi mal Marcus, rappelle moi que nous ne sommes plus rien. Aide moi à retirer mes mains de sur toi. À ne plus songer à ta bouche. Aide-moi. Ou embrasse-moi. Encore. Plus fort.
Et sa main. Qui se plaque contre mes lèvres. Qui me cri de me taire. D’arrêter de lui faire mal. D’arrêter d’exprimer ce que je ressens. De formuler cette vérité qui m’effraie. Celle rivalisant avec une angoisse lointaine. Lorsque nos ruptures survenaient. Une angoisse de les voir s’éterniser. De ne plus la voir revenir à moi. De me repousser lorsque je faisais le premier pas. Ma pire crainte a finit par se réaliser. Sue n’est plus jamais revenue. Et maintenant je suis effrayé de constater que la nostalgie ait réveillé tout ce passé. Qu’on s’était pourtant mis à deux à enterrer. Lors de nos ignorances. De nos échanges formels. Finalement, je n’ai jamais voulu oublier. Sinon jamais je n’aurai gardé un œil sur ce qu’elle faisait. Sur qui elle fréquentait. Par jalousie. Par égoïsme. Vieil adolescent possessif. Qui n’a jamais su tourner la page. A cause d’un amour beaucoup trop grand. Trop fort. Trop puissant. Imprimé éternellement dans un cœur vieillissant.
Je reste docile. Je ne peux pas la repousser. Pas lorsqu’elle m’accorde son contact. Pas quand elle me prie d’arrêter de la blesser. Alors que c’est la dernière chose que je cherche. « Arrête ! Je t’en supplie, arrête … je ... je ne peux pas prendre ce genre de décision. Pas pour toi … si vraiment c’est toujours moi … » Et pendant un instant je perds cet espoir. De la retrouver. Mes sentiments n’ont jamais su s’éteindre. Et je m’en rends compte seulement maintenant. Evidemment que je tenais toujours à elle. Evidemment que j’avais encore de l’affection. Que quelque chose me rattachait encore à elle. Mais des sentiments ? Toujours aussi durs. Toujours aussi réels. Non. Je ne m’étais pas rendu compte. Aveuglé par de trop nombreuses années de silence. « Pourquoi avoir passé la nuit avec elle ? … » Si seulement je pouvais savoir. Comprendre pourquoi j’ai laissé la soirée s’éterniser. Pourquoi je me suis laissé séduire. Comment j’ai pu être si faible. Si lâche. Mais l’espoir renait. Quelque part dans mon esprit. L’espoir reprend sa place. Grâce à sa jalousie presque charmeuse. Elle n’est pas indifférente. C’est tout ce qui compte.
Sa main glisse sur ma joue. Et je me retiens. De l’embrasser. De plaquer son corps contre le mien. D’emprisonner sa silhouette. De me laisser succomber. De revivre nos instants charnels. Je promets de rester sage. Alors que tout me hurle le contraire. « Est-elle devenu ton nouvel autel ? Est-ce elle, que maintenant tu pries, la nuit … Marcus ? » Non. Non. Non. Non. J’aimerai lui hurler que non. Qu’elle cesse cette jalousie. Qu’elle cesse de penser à Beatrix et à moi. Qu’on s’en fout. Que seule elle compte. Personne d’autre. Ni Bea. Ni Khloé. Ni personne d’autre. Mais les mots restent bloqués. Et viennent mourir dans ma gorge. Et ses yeux. Où se mêlent désir et jalousie. Sentiments presque sortis de nulle part. Eclos dans un lieu inapproprié. A un moment où je n’osais plus les souhaiter. Et ses lèvres. Qui captent les miennes. Dans une surprise totale. Qui viennent rythmer les battements d’un palpitant perdu. Consumé par les souvenirs. Par de vieux sentiments. Qui ont su se faire une place dans le présent. Et ses lèvres. Son corps contre le mien. Sa fougue. Son désir. Son désespoir. Ses gestes. Son emportement. Son ardeur. Sa main contre ma nuque. Le satin de sa peau. Et cette impression. De retrouver un trésor perdu. Dans un baiser enflammé. Que je la laisse contrôler. Presque par peur de l’effrayer. Et de briser ce moment.
Mes pensées me reviennent. Lorsqu’elle me vole ses lèvres. Les yeux fermés. Comme elle le faisait si souvent. Comme elle a pu le faire la première fois que je l’ai embrassé. Baiser encore innocent de deux adolescents. Si jeunes. Qui ne s’attendaient pas à finir ainsi. Qui n’auraient pu se l’imaginer. Combien de fois je me suis perdu ? A l’admirer ainsi ? Les paupières closes. Le visage rosi par trop d’émotions. A attendre de revoir ses prunelles. A juste apprécier ce moment. D’un couple simplement amoureux. « Répond moi … » Je ne cherche pas. A savoir si elle parle de ses questions. Ou de son baiser. Je me laisse simplement guidé. Par la frustration du contact arraché. Par le feu qu’elle a rallumé. Celui qu’elle avait éteint il y a six ans. L’incendie se propage. Dans mes veines. Dans mon cœur. L’adrénaline. Le désir. La passion. Tout se mêle. Me transformant qu’en pantin. Torturé par la tentation. Qui hurle. Qui hurle. Encore et encore. Ma bouche retrouve la sienne. Dans une excitation féroce. Tandis que mes paumes se collent dans le creux de ses reins. Pour la presser contre moi. Avec force. Pour sentir sa fragilité. Goûter son ivresse. Une main disparaît dans ses mèches brunes. Pour la retenir. L’empêcher de s’éloigner. Une bouffée d’oxygène. Alors qu’elle me couple le souffle. Mon corps l’emprisonne. Durement. Parce que je ne sais plus faire autrement. Avec l’excitation masculine qui m’enivre. Jusqu’à la pousser. Lentement. Et son dos vient taper le mur de la ruelle. Presque brutalement. Je lui rends ses lèvres. Après avoir perdu la notion du temps. Quand les miennes glissent jusqu’au côté de son cou. Pour venir embrasser. Sa jugulaire. Sa gorge. Sa clavicule. Mais je veux plus. Je veux la retrouver encore plus. Et lui arracher ses gémissements. Des soupirs exaltants. Mes doigts tirent sur le tissu de sa robe. La relève un peu. Alors qu’ils désirent simplement la lui arracher.
Mais je m’arrête là. Net. Quand ma bulle se perce. Je ne peux pas faire ça. Pas ici. Pas maintenant. Mes phalanges filent le long de ses bras. Et finissent leur course en s’entremêlant aux siennes. Mon front se pose un instant sur le sien. Le souffle court et saccadé. Déçu d’interrompre ce moment. Mais je dois me confesser. Je serre nerveusement ses mains. Avant de me retirer. Je recule. Mais je n’ai plus envie de parler. Je voudrai ne pas avoir à dire ça. Ne pas me sentir coupable. Le temps s’échappe. Avant que je me décide. Enfin à reprendre la parole. « Pourquoi j’ai passé la nuit avec elle ? On a simplement fait ce que voulait nos pères, faire connaissance. » Et je ne sais pas ce qui est pire. La laisser s’imaginer. N’importe quoi. Ce qui aurait dû se produire. Si Beatrix ne m’avait pas arrêté. Si j’avais pu agir comme je le voulais. Sous l’impulsion charnelle. Ou lui avouer qu’on a simplement dormi. Que j’ai permis à Beatrix de partager mon lit. Sans aucune contre partie. Sagement. Que je me suis laissé attendrir. Alors que Sue était la seule à savoir le faire. Mais elle mérite la vérité. Et je ne peux pas la lui refuser. Je ne lui ai jamais menti. « Et je sais plus comment on en est arrivés là. On s’est retrouvés à lancer des sorts sur ma rebut. » Et c’est dur de l’admettre. A Sue. Parce qu’elle ne m’a pas connu comme ça. Colérique, parfois un peu violent. Mais pas au point de torturer. Volontairement. Et de ne pas regretter. Ce sadisme accentué par Alecto. Qui m’emmène parfois à la chasse. Juste pour martyriser. Telle une récréation. Un loisir comme un autre. Un passe-temps simple et naturel. Et juste y prendre plaisir. D’apprécier ce sentiment de puissance. Engendré par l’éducation d’un père. Qui n’a cherché qu’à placer sa famille le plus haut possible. A travers un fils qui désormais ne connait plus l’innocence. Trop brisée par l’ambition.
Et j’ai peur de la décevoir. Par cet aveu. Et celui qui va suivre. C’est un combat d’opposition. Dans ma tête. Dans mon cœur. Une tempête de contradiction. Qui fait rage. Est-ce que je continue ? Ou dois-je lui cacher le reste ? Je ne veux plus la blesser. Mais sil elle l’apprend par sa sœur ? Je pourrai nier. Et lui mentir pour la première fois. Est-ce que je suis prêt à aller jusque là ? Non. « Je l’ai embrassé. Mais elle s’est refusée. Et je ne sais pas … il se faisait tard, elle m’agaçait avec ses suppliques, je voulais juste qu’elle se taise. Alors elle est restée. C’est tout. » Alors que j’aurai pu la foutre à la porte. J’ai préféré qu’elle reste. Lui autorisant beaucoup trop. « Comme je te l’ai dis, je n’ai pas été irréprochable. » Mais je sais que c’est différent. Je n’ai jamais cherché à contrôler Sue. A lui imposer mes volontés. A me sentir le plus puissant des deux. Je lui ai toujours laissé sa liberté. Ce que je n’arrive pas à autoriser à Beatrix. Je n’ai pas eu peur d’aimer Sue. Je l’aimais comme elle était. Et jamais je n’aurai voulu briser cette personnalité. Dont j’étais éperdument amoureux. « Je sais que mes regrets ne changeront rien. Je ne peux pas changer ce qui s’est passé. » Pourquoi agir comme si je l’avais trompé ? Ce n’est pas le cas. Notre couple a cessé de vivre il y a longtemps. Alors pourquoi je me justifie comme si ce « nous » existait encore ? « J’ai simplement joué avec la fiancée dictée par mon père. » Je sais que Beatrix est particulière. Qu’avec Khloé ou les autres, ça ne la pas touché autant. Mais pourquoi rester sage ? Alors qu’elle ne l’a sûrement pas été non plus.
I will always have a swollen wrist scar tissue around my heart
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He was so knowledgable in loving, but had no clue how to love. Our nightmares are so different, it’s amazing we ever shared a bed.
Look at your watch now !
Q
u’as-tu fais, pauvre folle ? Tu cherches à retenir cette pensée, cet éclair de lucidité qui te transporte, mais elle file, il t’échappe. Tout s’envole avec sa bouche. Ses lèvres sont beaucoup trop chaudes, bouillantes même, contre les tiennes. Si ton baiser se voulait avide, désespéré, le sien est plus brutal encore. Plus violent. Plus prenant. Plus affamé. Tu ne sais pas y résister. Tu ne veux pas y résister surtout. Non, tu le laisses prendre ta bouche, s’approprier ta langue, te retourner tout l’intérieur. Il ne devrait pas avoir le droit de t’embrasser ainsi. Il ne devrait pas pouvoir ou savoir le faire. Plus maintenant, pas après tout ce temps. Pourtant il y arrive, il fait éclore une fleur de désir en toi, un bouquet d’envie qui fleuris pour lui. C’est terriblement stupide de votre part, surtout de la tienne. Tu n’avais pas le droit de l’embrasser, tu n’avais pas le droit d’en avoir envie. Et là, alors qu’il te dévore, depuis ta bouche jusqu’à ton âme, un visage t’apparais en pensée. Le visage de celui que tu devrais embrasser à sa place, des cheveux blonds, des yeux froids, morts même. Draco, voilà qui, si tu dois absolument embrasser quelqu’un, tu devrais attaquer de la sorte. Pas Marcus, pas ton ancien amoureux. Ce cœur qui battait jadis pour toi. Cette bouche sensuelle. Ces lèvres trop charnues, trop expertes, sachant où s’attarder pour t’arracher de long frisson. Oh oui, tu frémis contre lui. Un peu plus fort quand ton dos rencontre un mur, tes reins se cambrant, ton corps s’offrant. Tu rougis encore. Plus fort même. Tu as honte, mais tu as envie aussi, tu oscilles, tu souffres et tu nages dans le plaisir à la fois. La frustration joue des coudes avec ta honte. Draco, oui c’est lui que tu devrais embrasser. Lui qui te fait envie dorénavant, sauf qu’avant ce moment précis, tu ne l’avais jamais réalisé. C’est un choc, tu prends cher. Sauf que Marcus est toujours là et l’expertise de ses baisers chasse la tête blonde de tes pensées, t’obligeant plutôt à t’accrocher à sa nuque, à l’attirer plus près. Tellement plus près. Tu sais où tu le voudrais, où tu veux l’enfouir. Tes joues ne cessent plus de rougir, tu as tellement chaud, tu dois rosir jusque contre la gorge. Bout de chaire qu’il gagne d’ailleurs, abandonnant ta bouche, qui happe avec avidité l’air qu’il t’offre. Haletante, tremblante, tu lui caresse la tête avec insistance, l’encourage, lui offre ta gorge. Mais pas que ça, non, tu bombe le torse, tes dents retenant un bout de lèvre alors qu’un soupire t’échappe. Triste supplication que voilà. Parce que ses doigts remontent légèrement le bas de ta robe. Ils te brulent, ils te marquent, ils te tordent l’estomac. Plus fort Marcus que tu te dis. Plus vite. Sauf que non, il cesse en même temps que tu fais couler tes mains sur ses épaules, prête à l’arrêter. Du moins, tu aimes le croire. Tu dois avoir en toi cette force de l’arrêter, tu en as besoin.
Tous vos mouvements cessent en chœur, alors que vous vous dévisagez, respirant aussi fort et vite que l’autre. Toi peut-être davantage. Tu n’es plus que magma interne, lave bouillante, mousseuse. Mais ses mains cessent, à ton plus grand soulagement. À ta plus grande déception. Tu frissonnes sous leurs parcours, sous ses phalanges qui glissent sur tes bras, avant d’attraper tes doigts. Là, tu retrouves son front et tu fermes les yeux, pour puiser des forces, par soulagement, par frustration. Tu soupires fortement, te vide les poumons, puis les remplis de son odeur, de sa présence. Tu le laisses grandir en toi, vicieux comme tout. Vicieux comme cette chaleur qu’il sait encore faufiler en toi. Homme sournois. Homme terrible. Homme trop tentant. Que vous est-il donc arrivé ? Là, contre lui, tu ne te rappelles pas. Comment as-tu pu seulement cesser de le vouloir, de le désirer ? Un vide te hante l’esprit, comme si on avait effacé ta mémoire. Ça te fait froncer les sourcils, ça te grignote le coin de l’estomac, mais il s’éloigne et tu ouvres les yeux. Tu bats des cils, troublé par ce soudain vide qui se déploie lentement en toi. Tu ne te comprends pas, tu ne te comprends plus. Depuis quand es-tu devenue Beatrix ? Jonglant avec tes sentiments, avec tes émotions ? Ce n’est pas ton genre. Embrasser Marcus avec autant d’audace, non plus, plus maintenant. Mais quand tu le touches, quelque chose vibre en toi, or dès que tes doigts le quittent, dès qu’il t’échappe, tout retombe. C’est comme s’il s’amusait à soulever de la poussière, à la faire scintiller dans les airs, pour finalement la laisser retomber platement. Marcus t’aurait-il lancé un sort ? Tu ne sais pas. Tu ne sais plus. Tu te contentes de te perdre dans son regard, dans ce brun chaleureux, dans ce brun familier et à la fois étranger. « Pourquoi j’ai passé la nuit avec elle ? On a simplement fait ce que voulait nos pères, faire connaissance. » Quand il te parle ainsi, il est davantage étranger que familier. Il a fait « simplement connaissance » qu’il dit et tu fronces les sourcils. Ce n’est pas ce que tu voulais entendre, tu te veux irritable. Tu ne fais pas un drame, mais tu n’es clairement pas satisfaite par ses explications bancales. Fait mieux Marcus, épate moi, rassure moi, montre-moi que tu n’es pas qu’un connard cherchant à tout garder : Beatrix et moi. « Et je sais plus comment on en est arrivés là. On s’est retrouvés à lancer des sorts sur ma rebut. » Ça, tu ne l’avais pas prévu et l’espace d’un instant, tu sens toute frustration t’abandonnée. Ton visage ne laisse rien transparaitre, sauf un léger haussement de sourcil. Non, tu n’es plus en colère, tu es surprise, tu es sous le choc. Il a torturé son rebut avec ta demi-sœur ? Réellement ? Tu sens la déception couler dans ton ventre, parce que malgré ses frasques, jamais tu ne l’aurais imaginé ainsi. Homme violent, oui, homme passionné, mais pas homme cruel. Pas ton Marcus. Sauf qu’il n’est plus tien justement.
Puis, alors que tu entrouvres la bouche, ton dos se pressant plus fort au mur, comme pour mettre de la distance entre vos corps, tu accuses le coup de ta propre conscience. Toi aussi, tu as torturé. Tu te débats mentalement, ce n’était pas la même chose, tu n’as pas mêlé qui que ce soit à ton petit jeu. Sauf que voilà, dessiné des fleurs sur l’estomac de Beatrix était tout de même un jeu. Tu t’y es amusée. Tu as apprécié la chose. Tu ne vaux guère mieux que lui. Qu’êtes-vous donc devenus tous les deux ? Tu ne peux pourtant pas le blâmer. Ta propre cruauté n’a rien à voir avec son influence. Tu es la seule coupable de ce que tu as imposé à Beatrix et tu n’hésiterais pas à recommencer. Alors tu fermes la bouche, tu détournes même les yeux, aussi coupable que lui. Du remord dans le ventre, faute de pouvoir le ficher dans ton cœur. De toute manière, ce dernier est en vrac, la faute à Marcus, et ne sers guère plus qu’à te maintenir en vie. Le silence s’épaissit autour de vous, jusqu’à ce qu’il se montre courageux. Comme toujours c’est lui ton sauveur. Valeureux chevalier aux passe-temps discutable oui, il reprend la parole et t’offres de nouveaux aveux : « Je l’ai embrassé. Mais elle s’est refusée. Et je ne sais pas … il se faisait tard, elle m’agaçait avec ses suppliques, je voulais juste qu’elle se taise. Alors elle est restée. C’est tout. » Tu notes mentalement que c’est cette presque sœur qui s’est refusée et pas Marcus qui n’en voulait pas. Tu te sens légèrement jalouse, mais quand vous ne vous touchez pas, c’est beaucoup plus facile. De te détacher. De garder une distance. D’ignorer le problème. Le brun disait donc vrai, le sang de vélane rend fou. Ils ont donc dormis ensemble, mais rien de plus. Ça ne te regarde pas, tu n’arrêtes pas de te le répéter, mais tu n’arrêtes pas pour autant de le regarder. De le jauger. Coupable, coupable. Coupable. « Comme je te l’ai dit, je n’ai pas été irréprochable. » Cette petite phrase t’arrache un demi-sourire, quelque chose au goût amer. Ton cœur se serre, se moque de toi, pompe plus lentement ton sang. « Le contraire m’aurait étonnée… les rumeurs qui cours à ton sujet, sont loin de te peindre comme un homme irréprochable. » Entre les coups portés, les humiliations, les différentes maitresses, oui, Marcus a tout un curriculum vitae et ta voix se veut plus douce, plus amère aussi. Oui, il te déçoit, mais non, tu ne peux pas le juger. Pas toi. Plus maintenant. Peut-être plus jamais. Au revoir Sue l’immaculée, toi aussi, tu as été cruelle. Peu importe qu’elle le mérite ou pas. « Je sais que mes regrets ne changeront rien. Je ne peux pas changer ce qui s’est passé. J’ai simplement joué avec la fiancée dictée par mon père. » Des regrets ? Lesquels ? Tu bats encore des cils, patiente et muette. Il sait ne pas avoir été irréprochable, mais rien ne l’exigeait, aussi tu te contentes de secouer doucement la tête, tes cheveux se répandant autour de ton visage, dans une vaine tentative de te dissimuler. Le temps de réfléchir. Le temps d’oublier qu’il te serre encore le cœur.
Tu te décides à avancer, tout en prenant soin de ne pas le toucher. Tu ne peux tout simplement plus rester là, coincée contre le mur. Coincée devant lui. Tu ne veux pas être sa proie. Tu ne veux pas être sa cible. Tes doigts ont cette envie bien propre de se tendre, de l’effleurer, de goûter sa chaleur. Tu leur refuse pourtant leur droit. Pas maintenant, peut-être plus tard. Mais il vaudrait mieux que non, parce que quelque chose vit en toi quand vous reprenez contact, sournoise magie. « Tu as simplement « joué » avec la fiancée choisir par ton père… qui essais-tu de convaincre, Marcus ? Toi ou moi ? » Tes jolies yeux se plissent, une moue gagne tes lèvres et reprenant tes air de jeune fille, celle qu’il embrassait sans se questionner il y a huit ans de cela, tu le dévisage. Tes doigts cherchent alors à s’occuper, lisse le bas de ta robe, cherche les plis et tu soupires, fronçant les sourcils, ta bouche hésitant à donner suite à tes pensées. Il aurait fait davantage que « joué » avec Beatrix. Ou pas. Peut-être qu’il voulait jouer avec elle, comme il a joué avec toi et un sourire sans joie se redresse dans sa direction, ton regard se teintant de déception. De jalousie, tant pis si tu ne le touche pas. Tu lui en veux d’avoir eu envie d’elle de cette manière, comme il te voulait toi autrefois. Mais tu lui en veux tout autant d’avoir la possibilité de la désirer ainsi, alors que toi, tu t’interdis de songer à Draco en ces mêmes termes. Il n’y est pourtant pour rien, tu es l’unique responsable de ce qui se trame avec l’héritier Malfoy. Et pourtant, tu lui en veux, à lui. Marcus. « Et avec moi aussi, tu jouais ? Qu’est-ce que ça veut seulement dire, jouer, pour toi, hein Marcus ? » tu t’avances sur un terrain miné et pourtant, il y a une idée, une pensée vicieuse, qui vit en toi. Qui s’empare de ton esprit. Tu la vomis alors devant lui, lentement, doucereusement presque. Avec une voix calme, chacun de tes mots pesés avec soin. Trop de précaution oui. « Cette petite chasse à travers les boutiques, ce n’était pas un jeu, ça aussi ? Après six ans de silence et de désintérêt de ta part, te revoilà ? … Je… » tu inspires lentement de l’air, baisse les yeux, t’imaginant déjà le pire, « je ne comprends pas. » Pourtant le plus difficile reste à venir et quand tes mots tombent de ta bouche, c’est pour aller mourir plus loin : « Tu dis regretter, tu dis me donner le choix… mais la réalité, Marcus, c’est qu’avec elle, tu t’es arrêté parce qu’elle l’a demandé. Alors qu’avec moi… moi je ne t’ai rien demandé. » Ton regard plonge dans le sien un instant, une longue minute même. Pour t’assurer qu’il comprenne bien. Quelque chose à changer. Trop de chose peut-être. Tu ne peux pas être celle qu’il lui faut, celle qu’il désire. Parce qu’il l’a désiré, elle, mais pas toi. Tu te rappelles bien de ses jeunes années où il ne savait garder ses mains sur lui, où il t’aurait soulevé contre ce mur pour t’arracher soupir et cri étouffé. Peut-être lui aurais-tu résisté, du moins c’est ce que ton rang t’impose, mais jamais vous ne le découvrirez. Parce qu’il a su se contrôler avec toi. Or, c’est pile ce qui te tourmente. Tu recules donc, lentement, à petit pas, comme la lady que tu es devenue. Déçue, le cœur douloureux, la tête encore plus. « Je dois rentrer… on va me chercher. »
« Tu as simplement « joué » avec la fiancée choisir par ton père… qui essais-tu de convaincre, Marcus ? Toi ou moi ? » Sa clairvoyance frappe. Heurte brusquement ce palpitant. Que j’aurai dû faire taire. Que m’a apporté cette honnêteté ? Rien. Elle n’a rien changé. Au pire, aggravé la situation. Cacher mes sentiments me parait maintenant plus raisonnable. Ne pas chercher à la revoir aurait été mieux. « Et avec moi aussi, tu jouais ? Qu’est-ce que ça veut seulement dire, jouer, pour toi, hein Marcus ? » Bordel. Non. Bien sûr que non. Ne me connaissait-elle pas par cœur ? A cette époque si lointaine. Comment peut-elle me poser cette question ? Comment peut-elle s’imaginer ça ? Notre histoire n’était pas du vent. Une récréation. Un amusement d’adolescent. Ce n’était pas un jeu. Loin de là. Tout le contraire. Elle était et reste les meilleurs instants. Les plus beaux moments. Les souvenirs les plus précieux. Elle ne peut pas remettre en doute tout ça. Elle ne peut pas comparer Beatrix avec ce qu’on a vécu. Elle n’a pas le droit. C’est complètement différent. Ces probables fiançailles avec la demie-vélane, c’est juste un grand n’importe quoi. Oui, son charme m’a fait perdre la tête. Oui, je n’ai été qu’un homme. Oui, j’aurai aimé aller plus loin. Oui, elle m’a rendu faible. Mais non, elle n’est rien. Comparée à Susanna. Par rapport à ce qu’on a partagé. Je ne suis pas tombé amoureux de sa sœur. Je n’en suis plus capable. Plus depuis Susanna. Elle n’arrive donc pas à le comprendre ? A voir l’importance qu’elle avait ? Et que je lui accorde toujours ? Son absence n’a pas su réparer ce manque. Ce vide. « Tu … » Elle coupe mon accusation. Un agacement naissant. Elle peut me reprocher tout ce qu’elle veut. Maintenant. Mais pas ça. Pas ma sincérité. Sur des sentiments rares. Surtout pas ceux du passé. « Cette petite chasse à travers les boutiques, ce n’était pas un jeu, ça aussi ? Après six ans de silence et de désintérêt de ta part, te revoilà ? … Je… » Mon père. C’est celui de mon père. Son jeu. Sa requête. Sa volonté. Je ne suis que son pion. Que son pantin. Ce n’est pas moi qui joue avec Sue là. C’est lui qui se fout de nous. Et peu importe les conséquences sur son fils. Peu importe si cette situation me torture. De la voir si éloignée. De la savoir presque détachée. De comprendre que je ne suis plus son équilibre. De comprendre qu’elle n’a plus besoin de moi. « … je ne comprends pas. » Et comment lui avouer ? Je ne peux pas le faire. Je ne peux pas lui faire comprendre. Ses doutes ne seraient que renforcés. Mérités. Alors que ma sincérité est bien réelle. Le point de départ n’est certes pas de ma propre volonté. Coincé par l’autorité paternelle, je ne suis pas revenu pour les bonnes raisons. Mais seulement au départ. Maintenant c’est différent. J’ai retrouvé un espoir. Enfoui depuis six longues années. « Tu dis regretter, tu dis me donner le choix… mais la réalité, Marcus, c’est qu’avec elle, tu t’es arrêté parce qu’elle l’a demandé. Alors qu’avec moi … moi je ne t’ai rien demandé. » Oui. Elle ne m’a rien demandé. Depuis six ans. Elle ne m’a plus jamais rien demandé. Elle n’est pas revenue. Elle n’a lancé aucuns signaux pour que je fasse le premier pas. Pourquoi me reproche-t-elle son ignorance ? Je n’assume déjà pas la mienne. De l’avoir laissé s’échapper. Aussi facilement. Mais de son côté ? N’était-ce pas ce qu’elle souhaitait ? Tout arrêter ? N’est-ce pas pour cette raison qu’on se retrouve ainsi ? Il est beaucoup plus facile d’accuser l’autre. Je m’en rends bien compte maintenant. Que je l’accable de la fin de notre relation.
Elle recule. Prête à s’enfuir. « Je dois rentrer … on va me chercher. » « Non, Sue, s’il te plait ... » Une supplique. Une plainte. Voilà à quoi je suis rendu. Ce qu’il me reste. J’aimerai lui prier de rester. De revenir dans mes bras. Et d’oublier. Elle n’a pas le droit de mettre un terme à ce moment. Pas de cette façon. Pas maintenant. Mais ma requête reste bloquée. Elle meurt avant d’avoir vu le jour. « Alors va-y. » A quoi je m’attendais ? A la revoir tomber pour moi ? Et qu’elle propose de reprendre tout à zéro ? Je suppose que non. Pas entièrement. Même si je ne peux pas nier cette espérance ridicule. Pathétique. Méprisable. « Avant que les autres s’inquiètent pour toi. Si maintenant ce sont eux tes priorités ... » Je crache ma jalousie. Puisque je suis incapable de la supplier. Par fierté. Par pudeur. Par peur. De son rejet. « On aura qu’à reprendre nos ignorances. Si c’est ça qui te convient. » Alors que je désire le contraire. Même sa colère parait plus agréable. A côté de son indifférence. Plus douce. Plus facile à vivre. Preuve que quelque chose la relie encore à moi. Malgré tout.
Je fais quelques pas vers elle. Arrive rapidement à sa hauteur. Pour venir m’imposer à ses côtés. « Mais comprends que tu as été la personne la plus importante. Je me réveille peut-être trop tard. Mais ne crois pas que je vais faire la même erreur une deuxième fois. » Ma main s’abandonne dans ses mèches. Et entraine son visage vers le mien. Mes lèvres se pressent contre les siennes. Une nouvelle fois. Insatisfaites. Avides. De plus. Toujours plus. Ma langue retrouve le chemin. Vers la sienne. Tandis que le désir renaît. Même s’il ne s’était pas vraiment éteint. J’empêche mes doigts de remonter sa robe. De déchirer l’étoffe. De parcourir la soie de sa peau. De redécouvrir ses formes. De succomber. Entièrement. Ils se resserrent sur sa crinière. Presque avec trop de force. Par frustration. Par désir inassouvie. Et je stoppe. Ce court baiser. Pour ne pas m’y perdre davantage. Sentant ma volonté de me contrôler faiblir. Je m’éloigne. Avant de ne plus en être capable. Mes prunelles dévient. Ne pouvant plus supporter ce désir brûlant. Qui ne s’amplifierait qu’en la regardant. « Va y. » Alors que j’aimerai lui crier de ne pas s’en aller. De ne plus me laisser. Contradictoire jusqu’à la fin. Je ne me permets pas. Je joue la sincérité. Mais ne l’avoue pas jusqu’au bout. Je joue l’homme encore épris. Et pourtant la laisse s’enfuir.
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