Cette fois, ce fut elle qui brisa le silence après leurs ébats. Alan s'en agaça presque, mais il ne bougea pas ni n'ouvrit les yeux. Ses sourcils se froncèrent sans doute imperceptiblement, mais de là où elle était, Ladáh ne pouvait pas les voir. Il repensait encore à l'importance qu'il mettait à vouloir la dominer, comme s'il prenait là une revanche sur tout ceux de sa catégorie. Il avait compris à demi-mot qu'elle avait été élevée par des sang-pur et en était une aussi, et cette information était pour lui source de conflit intérieur.

Il détestait ce qu'elle symbolisait pour lui. Il détestait être au courant de la chose, aurait préféré qu'elle soit moldu, qu'elle soit sang-mêlée, quelle soit cracmole. Tout plutôt que la représentante de tout ce qu'il combattait. L'opulence des vieilles famille. Leurs manières moyenâgeuse de marier leurs enfants entre eux jusqu'à réduire leur lignée en une infâme potion de consanguinité concentrée. Leur mépris pour ceux nés en dehors de leur cercle. Tout ça, autrefois il se contentait de désapprouver. Désormais il le haïssait. Raser ces gens de la surface de l'Angleterre, voilà ce qu'il voulait.

Il baissa son regard sur le sien lorsqu'elle se redressa pour le regarder. Oui elle était jeune. À cet âge on se pensait tout permis. Chacun est un roi à vingt-quatre ans, mais additionné à un sang soit disant pur, c'était tout bonnement insupportable. C'est d'un ton rude, mais sans élever la voix, qu'il répondit.

-On a pas toujours ce qu'on veut, dans la vie, lâcha-t-il.

Il se redressa avec une certaine mauvaise humeur. Il n'avait pas besoin qu'elle le comprenne, ni qu'elle l'accepte comme il était. Il n'avait pas besoin de sa permission pour exister. Il se leva pour enfiler son sous vêtement pendant qu'elle se précipitait sur le téléphone, avide de nourriture dont l'estomac d'Alan se satisferait également, à condition qu'il cesse de ruminer. Elle ne se rendait pas compte d'à quel point il pouvait être agaçant de trouver une sang-pur non détestable. Surtout quand on avait décidé de vouer le restant de ses jours à leur destruction totale. Il se retourna vivement lorsqu'elle menaça son dessert, du feu dans les prunelles couleur glacier.

-Ne crois pas une seule seconde que je vais te permettre de me voler mon dessert ! grogna-t-il.

Là-dessus, il s'approcha d'elle en deux grandes enjambées (soit la largeur de la chambre) puis la ceintura avant de poser ses lèvres sur les siennes pour l'embrasser. Elle était parfaitement insupportable, c'était la seule chose concluante qui pouvait résumer ce qu'il ressentait pour le moment. Une conclusion non dénuée de tendresse, comme pouvait en témoigner l'absence significative d'agressivité qu'il mettait habituellement dans ses baisers.

-N'en fait pas trop. T'es non coupable, mais t'es pas assez gradée pour avoir des exigences sur mon dessert.

Surtout qu'à présent il soupçonnait qu'elle puisse s'en commander aisément une bonne dizaine si elle le désirait. Les sang-pur. Des gens riches et pourris. Exception faite de ce brave vieux Arthur Weasley qu'il avait déjà croisé à plusieurs reprises au ministère. Ladáh était riche et semblait avoir le degré d'exigence des gens pourris, mais elle montrait de la tendresse et de la compassion à son égard et dieu sait qu'il en avait manqué dernièrement.

-On a qu'à faire comme si on était personne. On bien des gens qui ont pas de sang.

Aucun des deux ne sera pur, ni souillé. Ça pourrait être un marché qu'ils passeraient aujourd'hui. Ça permettrait à Alan de ne pas s'énerver en réfléchissant à la façon dont il devrait mener la lutte contre elle, si un jour ils en arrivaient là.